SATTIN, ANTOINE, sulpicien et professeur, né le 18 février 1767 à Lyon, France, fils de Joseph Satin et de Pierrette Ocard ; décédé le 23 juin 1836 à Montréal.

Antoine Sattin entra au séminaire Saint-Irénée à Lyon le 1er novembre 1788. Au cours de la tourmente révolutionnaire qui troubla tant cette ville, Sattin, alors sous-diacre, signa une protestation publique contre une adresse publiée dans le Courrier de Lyon du 23 juillet 1790, et dont les auteurs auraient été des séminaristes mécontents du régime sévère en vigueur dans l’établissement. Sattin aurait été ordonné le 19 mars 1791. Il entra chez les sulpiciens et fit sa solitude (noviciat) à Paris. À l’instar de nombreux prêtres qui refusèrent de prêter serment à la Constitution civile du clergé, il s’exila en Suisse, d’où il avoua sa détermination de venir au Canada. Il faisait partie du groupe des 11 sulpiciens français qui débarquèrent à Montréal le 12 septembre 1794 [V. Jean-Henry-Auguste Roux*].

Sattin fut agrégé au séminaire de Saint-Sulpice dès le 29 septembre, puis on l’affecta au ministère dans la paroisse Notre-Dame. Il célébrait aussi la messe dans la chapelle Notre-Dame-de-Bonsecours. En 1801, on le nomma professeur au collège Saint-Raphaël (qui deviendra le petit séminaire de Montréal en 1806), où il enseigna le latin et le français.

En 1813, Sattin laissa l’enseignement pour devenir aumônier des religieuses de l’Hôtel-Dieu de Montréal. Puis en 1815 il assista son collègue Jean-Baptiste-Jacques Chicoisneau* qui remplissait la même fonction à l’Hôpital Général, et il le remplaça en 1818. Sattin se consacra dès lors aux pauvres, aux malades et aux retraités. Il fit preuve de dévouement et se révéla un conseiller précieux. Son influence bénéfique sur les religieuses, les novices et les professes stimula leur zèle tout comme ses remarques et avis judicieux aidèrent la communauté à réaliser les projets de la fondatrice, Mme d’Youville [Dufrost*].

Sattin s’intéressa aussi aux aspects matériels de la vie à l’hôpital, tels la qualité de la nourriture, les moyens de combattre les incendies, les constructions nouvelles et les réparations. Le journal des Sœurs de la charité le décrit comme un habile ingénieur. En 1832, par exemple, il traça les plans des rénovations de l’hôpital et de la chapelle puis, en 1834, ceux d’un chemin de croix. Il servit aussi la communauté en rédigeant une biographie de la fondatrice à partir de témoignages comme celui de mère Thérèse-Geneviève Coutlée*.

En juillet 1825, Sattin devint directeur de la Confrérie de la Sainte-Famille qui, à tous les deux mardis, rassemblait des femmes dévotes pour prier et entendre les prédications de l’aumônier. Les membres de la confrérie unissaient l’entraide aux prières et s’intéressaient plus particulièrement à certaines consœurs qui avaient besoin d’encouragements ou de support physique et moral. Ce groupe, fort de 60 personnes en 1825, augmenta au rythme de 7 à 8 recrues par année, qui devaient faire un stage de quatre mois avant d’être agrégées. En 1833, plus de 100 femmes faisaient partie de cette confrérie. L’année suivante, un collègue de Sattin, Jean-Baptiste Roupe*, le remplaça à titre de directeur.

Sattin devint membre du grand conseil du séminaire de Saint-Sulpice le 25 janvier 1821 et fit partie du petit conseil, qui assistait le supérieur dans le règlement des affaires courantes, à compter du 2 septembre 1829. Il fut donc mêlé de près aux événements qui bouleversaient la vie de l’établissement. D’abord, il y avait toutes les tensions issues du conflit entre les sulpiciens d’origine française et les sulpiciens canadiens, qui se sentaient menacés, voire écrasés, par les premiers qui détenaient tous les postes de prestige et de pouvoir dans l’établissement. Ensuite, la nomination en 1820 du sulpicien canadien Jean-Jacques Lartigue au poste d’évêque de Telmesse et auxiliaire de l’archevêque de Québec à Montréal créa des remous au séminaire [V. Jean-Charles Bédard*] et même parmi le clergé séculier [V. François-Xavier Pigeon ; Augustin Chaboillez*]. Le voyage du supérieur Jean-Henry-Auguste Roux en Europe en 1826, dans le but de régler le problème des droits seigneuriaux des sulpiciens, entretint la désunion. Sattin prit fait et cause pour ses confrères français, car il redoutait beaucoup l’influence des Canadiens.

À partir de novembre 1835, Antoine Sattin bénéficia de l’aide du sulpicien Sauveur-Romain Larré dans son ministère auprès des pauvres de l’Hôpital Général. Déjà sa santé déclinait. Il eut une attaque de paralysie le 1er juin 1836 et mourut le 23 suivant. Le supérieur de Saint-Sulpice, Joseph-Vincent Quiblier*, écrivit alors : « Sa prudence était rare et sa piété des plus tendres. Partout il a réussi à s’attacher la jeunesse et à lui inspirer l’amour de la piété et du travail. »

Bruno Harel

Antoine Sattin est l’auteur de : « Vie de madame Youville, fondatrice et première supérieure des Sœurs de la Charité de l’Hôpital Général de Montréal, communément nommées Sœurs Grises, dédiée à cette même communauté » qu’il écrivit en 1828 et dont l’original est conservé aux Arch. des Sœurs Grises (Montréal). Le récit a été publié dans ANQ Rapport, 1928–1929 : 387–436. Un portrait de Sattin attribué à Louis-Chrétien de Heer* est conservé à la maison mère des Sœurs Grises de Montréal.

ANQ-M, CE1-51, 25 juin 1836.— Arch. du séminaire de Saint-Sulpice (Paris), Fonds canadien, dossier 76.— Arch. des Sœurs Grises (Montréal), Ancien journal, I-III ; Dossier Antoine Sattin.— Arch. municipales, Lyon (France), État civil, Saint-Nizier, 19 févr. 1767.— ASSM, 16 ; 17 ; 21 ; 24, B, 5–6 ; 25, dossier 2 ; 32.— [L.-A. Huguet-Latour], Annuaire de Ville-Marie, origine, utilité et progrès des institutions catholiques de Montréal [...] (2 vol., Montréal, 1863–1882).— Louis Bertrand, Bibliothèque sulpicienne ou Histoire littéraire de la Compagnie de Saint-Sulpice (3 vol., Paris, 1900), 2 : 117.— Dionne, les Ecclésiastiques et les Royalistes français.— Robert Lahaise, les Édifices conventuels du Vieux Montréal : aspects ethno-historiques (Montréal, 1980), 496–501.— Gérard Morisset, l’Architecture en Nouvelle-France (Québec, 1949).

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Bruno Harel, « SATTIN, ANTOINE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/sattin_antoine_7F.html.

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Auteur de l'article:    Bruno Harel
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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