ROSVALL, VILJO, ouvrier des chemins de fer et organisateur syndical, né probablement en 1898, en Finlande ; décédé célibataire en novembre 1929 au nord de Port Arthur (Thunder Bay, Ontario).
Viljo Rosvall arriva au Canada dans les années 1920. Il faisait partie des nombreux Finlandais socialistes ou rouges qui fuyaient les suites de la guerre civile de Finlande (janvier–mai 1918), dans laquelle il avait combattu et qui s’était soldée par une victoire des forces nationalistes ou blanches. Dynamique et déterminé, il s’établit à Port Arthur, dans le nord-ouest de l’Ontario, où beaucoup de Finlandais travaillaient dans l’industrie forestière. On dit généralement qu’il était préposé à l’entretien du chemin de fer canadien du Pacifique, mais il fut aussi organisateur au Lumber Workers’ Industrial Union of Canada. En 1929, ce syndicat, le plus en vue dans la région, comptait une bonne proportion de membres finlandais et était dominé par le Parti communiste du Canada.
En octobre 1929, le Lumber Workers’ Industrial Union of Canada déclencha une grève à Shabaqua, à quelque distance à l’ouest de Port Arthur. Apparemment, la grève ne se déroulait pas très bien. Le syndicat décida donc de tenter de l’étendre aux campements de la Pigeon Timber Company Limited au lac Onion. À cet endroit, le contremaître était un Finlandais blanc et conservateur, Leonard A. Mäki, réputé pour son hostilité à l’endroit du syndicat. Le 18 novembre, Rosvall et Janne Voutilainen – un trappeur qui, semble-t-il, lui servait de guide – se mirent en route pour l’un des campements situés à l’extrémité nord du lac. À quelques milles de leur destination, ils rencontrèrent Mäki et quelques-uns de ses hommes à un dépôt d’approvisionnement où ils se préparaient à l’abattage hivernal. Par la suite, Mäki prétendrait avoir invité Rosvall et Voutilainen à venir se réchauffer les mains, les avoir prévenus que la glace était mince et les avoir vus se diriger vers le nord en marchant sur le lac gelé. Personne ne les reverrait plus vivants.
Dès leur disparition, la communauté finlandaise rouge eut la conviction que Mäki ou ses hommes avaient tué Rosvall et Voutilainen. On réclama une enquête à l’Ontario Provincial Police, et Jacob Laurence Cohen*, avocat de la Canadian Labour Defence League à Toronto, fut engagé pour obtenir une investigation officielle. La police enquêta sommairement et conclut que les deux hommes avaient dû se noyer.
Le 19 avril 1930, on découvrit le corps de Voutilainen ; il flottait dans des eaux peu profondes à l’extrémité nord du lac Onion. Le cadavre de Rosvall fut trouvé le 23, un demi-mille plus loin, dans un cours d’eau qui, dit-on, n’avait pas plus de quatre pieds de profondeur. Des rumeurs se répandirent : les deux corps portaient des marques de violence et au moins l’un d’eux avait des trous de balle dans la tête. Des autopsies et d’autres enquêtes aboutirent au même verdict : mort accidentelle par noyade. Cohen, qui représenta le syndicat à l’enquête sur Rosvall, le 5 mai, conclut : « il a semblé y avoir tendance, chez les témoins publics et officiels, à minimiser tout fait qui risquerait de soulever un doute quelconque quant aux conclusions de l’autopsie du médecin ». Quoi qu’il en soit, il est certain que les autorités rendirent leur verdict de manière hâtive, sans tenir compte des preuves indirectes qui, à défaut de le prouver, suggéraient quelque chose de louche. Les victimes avaient été inhumées le 28 avril au cimetière Riverside, au cours des obsèques les plus imposantes de l’histoire de Port Arthur.
La mort de Viljo Rosvall et de Janne Voutilainen en vint à être considérée comme un moment décisif dans l’histoire de la communauté finlandaise de la région du Lakehead, un symbole des profondes dissensions idéologiques qui déchiraient ce groupe. Bien que le Lumber Workers’ Industrial Union of Canada et toute la gauche finlando-canadienne aient décliné par la suite, Rosvall et Voutilainen continuèrent d’être honorés comme des martyrs. En 1992, ils furent intronisés au Temple de la renommée du Congrès du travail du Canada à North York, en Ontario.
Nous avons des enregistrements d’entrevues réalisées avec des parents et des amis qui ont été témoins des événements entourant la disparition et la mort de Viljo Rosvall et de Voutilainen. [p. r.]
AN, MG 30, A94, 1, dossier 10.— Lakehead Univ. Arch. (Thunder Bay, Ontario), Thunder Bay Labour Hist. Project, dirigé par Jean Morrison (entrevues enregistrées).— Multicultural Hist. Soc. of Ontario (Toronto), Finnish coll.— Canadan Uutiset [Canadian News] (Port Arthur [Thunder Bay]), 28 nov. 1929, 24 avril, 1er, 8 mai 1930.— Daily Times-Journal (Fort William [Thunder Bay]), 22 nov. 1929, 21–23 avril, 6 mai 1930.— Industrialisti [Industrialist] (Duluth, Minn.), 27 oct., 11 déc. 1929 ; 30 avril 1930.— Metsätyöläinen [Lumberworker] (Sudbury, Ontario), nº 3 (1930) ; nº 7 (1931), nº 10 (1932).— News-Chronicle (Port Arthur), 21, 27 nov., 18 déc. 1929, 21–23 avril, 6 mai 1930.— Vapaus/Liberty (Sudbury), 16, 18, 27 nov., 4 déc. 1929, 21, 28–29 avril 1930.— Ian Radforth, Bushworkers and bosses : logging in northern Ontario, 1900–1980 (Toronto, 1987).— Satu Repo, « Rosvall and Voutilainen : two union men who never died », le Travailleur (St John’s), 8/9 (1981–1982) : 79–102.
Peter Raffo, « ROSVALL, VILJO », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/rosvall_viljo_15F.html.
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Auteur de l'article: | Peter Raffo |
Titre de l'article: | ROSVALL, VILJO |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |