PRÉVOST, ALBERT (baptisé Louis-Elzéar-Albert), neurologue, médecin légiste et professeur, né le 5 août 1881 à Montréal, fils d’Alexis-Édouard-Armand Prévost, marchand, et de Joséphine-Ida Beaudry ; le 26 août 1909, il épousa à Montréal Thérèse Leduc, et ils eurent quatre enfants ; décédé accidentellement le 4 juillet 1926 au même endroit.
Albert Prévost grandit dans un milieu aisé et actif dans le milieu des affaires à Montréal depuis deux générations. Son père et son grand-père paternel, Amable-Cyprien Prévost, y possédèrent plusieurs magasins de marchandises sèches. Son grand-père maternel, Jean-Baptiste Beaudry, y fut marchand, propriétaire foncier et banquier.
En 1895, Prévost commença ses études classiques au collège Sainte-Marie, où il côtoya le futur secrétaire de la province, Athanase David*. Court, trapu, de stature athlétique, Prévost aurait manifesté dès ce moment de brillantes aptitudes pour le sport. Après l’obtention d’un baccalauréat en juin 1903, il s’inscrivit en médecine à la succursale montréalaise de l’université Laval, où il obtint, quatre ans plus tard et « avec distinction », son diplôme de docteur en médecine. Indépendant de fortune, il alla ensuite se spécialiser à Paris, où il rencontrerait sa future épouse, fille de Joseph Leduc, médecin de Montréal et propriétaire de la chaîne de pharmacies du même nom. Il y retrouva également, en 1909, un ami d’enfance avec qui il resterait toujours très intime, Édouard Montpetit*, futur fondateur de l’École des sciences sociales, économiques et politiques de l’université de Montréal.
Prévost eut d’abord l’intention d’obtenir le poste prestigieux d’interne des hôpitaux de Paris, comme l’avait fait précédemment son oncle, le docteur Azarie Brodeur. Très rapidement, il découvrit toutefois son champ d’intérêt : la neurologie. Sous la gouverne de maîtres tels que Pierre Marie, André Thomas, Joseph Babinski et surtout Jules Déjerine, tous anciens élèves de l’illustre Jean-Martin Charcot, Prévost jumela l’observation clinique auprès des malades de l’hôpital de la Salpêtrière et la recherche en laboratoire sur l’anatomie et la physiologie des fonctions dominantes du cerveau. Il fit également des stages à l’infirmerie du Dépôt de la Préfecture de police, auprès des aliénistes Ernest Dupré et Gaëtan Gatian de Clérambault, ce qui lui permit d’obtenir le titre de médecin légiste de l’université de Paris, vraisemblablement à la fin de l’année 1913. Il rentra ensuite à Montréal, où il fut engagé, en février 1914, au dispensaire des maladies nerveuses de l’hôpital Notre-Dame. Au même moment, il commença à participer aux activités de la Société médicale de Montréal. Le 4 mai 1914, il devint également agrégé de neurologie à la faculté de médecine de l’université Laval à Montréal et chargé des cliniques des maladies nerveuses à l’hôpital Notre-Dame. Il fut en outre, à la même époque, nommé médecin consultant à l’hôpital Saint-Jean-de-Dieu. De plus, il fit partie, de 1915 à 1924, du bureau médical de l’institut Bruchési. En 1918, Prévost prit la direction du service de neurologie de l’hôpital Notre-Dame, en remplacement de Georges Villeneuve, décédé cette année-là, et occupa ce poste de médecin-chef jusqu’à sa mort. Il fut également désigné titulaire de la première chaire de neurologie à l’université Laval à Montréal le 8 avril 1918. Très rapidement, il acquit la réputation d’être l’un des meilleurs professeurs de la faculté, ses conférences et cours théoriques étant appréciés tout autant de ses étudiants et des infirmières que de ses collègues. Selon Antonio Barbeau, à qui il a enseigné, Prévost était une personne volubile « dont le fond [était] aussi riche que la forme ».
À cette facilité d’expression s’ajoutaient un dévouement sans borne envers ses patients et un esprit d’entreprise alors peu commun chez les médecins francophones. Ainsi, constatant en 1919 que les grands hôpitaux ne convenaient pas aux besoins des personnes atteintes de névroses – troubles nerveux qui devinrent de plus en plus fréquents à partir de la Première Guerre mondiale –, Prévost décida de fonder dans un secteur calme de la banlieue de Montréal, celui de Cartierville, près de la rivière des Prairies, une clinique privée qui prit le nom de sanatorium Prévost. En 1919, il acheta de Raoul-Ovide Grothé, important homme d’affaires de Montréal, une maison de trois étages qu’il rénova à ses frais pour y accueillir dix patients. Après l’acquisition en 1921 d’une maison voisine, propriété de l’entrepreneur Félix-Avila Grothé, Prévost put désormais recevoir dans son sanatorium 23 malades. Fidèle à la doctrine française de l’époque, il y utilisa la psychothérapie pour traiter ses patients. Sur ce point, et bien qu’un service d’électrothérapie y fut installé en 1921, le sanatorium Prévost se démarquait des maisons de santé similaires, tel le sanatorium de Trois-Rivières, fondé en 1896 par le docteur Charles-Numa De Blois, où l’accent était surtout porté sur le traitement par des procédés physiques (électrothérapie, hydrothérapie, rayons X, etc.) de la neurasthénie, de la toxicomanie ou des psychoses légères. Sous la direction de la surintendante, Charlotte Tassé, et du premier disciple et collaborateur de Prévost, le docteur Edgar Langlois, cet établissement privé subsisterait à la mort de son fondateur et, après la Deuxième Guerre mondiale, deviendrait un important centre d’enseignement dans les domaines de la neurologie et de la psychiatrie.
En qualité de médecin légiste, Prévost fut également fort sollicité par les tribunaux. Le plus célèbre des procès auquel il participa comme expert fut sans doute celui de Marie-Anne Houde, belle-mère d’Aurore Gagnon*, dite Aurore l’enfant martyre, en 1920.
En janvier 1925, Prévost et 18 autres médecins francophones de Montréal se rajoutèrent au bureau de direction de l’Union médicale du Canada. Cette nouvelle société d’actionnaires avait comme objectif de contribuer au développement des centres hospitaliers et à l’avancement de l’enseignement universitaire au Canada français, de collaborer au développement scientifique des sociétés savantes et de participer à l’organisation des congrès de l’Association des médecins de langue française de l’Amérique du Nord, association dont Prévost était membre depuis 1922. Après la réorganisation du bureau de direction, des relations plus étroites se nouèrent entre les médecins de langue française d’Europe et du Canada. Prévost se préparait d’ailleurs à assister au trentième Congrès annuel des médecins aliénistes et neurologistes de France et des pays de langue française, qui aurait lieu à Lausanne et à Genève en Suisse du 2 au 7 août 1926, quand il fut victime de l’accident qui lui serait fatal.
Curieusement, Prévost a peu écrit. De ses communications à la Société médicale de Montréal, parfois présentées en collaboration avec des collègues de l’hôpital Notre-Dame, il ne reste que des comptes rendus reproduits dans l’Union médicale du Canada. Indéniablement, Prévost a fait des descriptions cliniques des principales maladies nerveuses d’origine organique ; toutefois, il semble que son principal apport au savoir résiderait dans les coupes anatomiques du cerveau ou de la moelle épinière qu’il réalisait et qui permettaient de confirmer son diagnostic ou celui de ses confrères.
Prévost fit également partie de plusieurs clubs sociaux dont le Club Saint-Denis, le Cercle universitaire de Montréal et les Chevaliers de Colomb. Partisan de l’exercice physique, il fut aussi membre du club de golf de Laval-sur-le-Lac (Laval) et du Club Chapleau (club privé de chasse et de pêche).
Le 4 juillet 1926, au moment où il était à l’apogée de sa carrière, Albert Prévost mourut à l’hôpital Royal Victoria de Montréal des suites d’un accident d’automobile survenu la nuit précédente sur la route entre L’Assomption et Saint-Paul-l’Ermite (Le Gardeur). Il revenait d’une consultation à Berthier (Berthierville), en compagnie du docteur D.-Alfred Benoit qui fut lui aussi gravement blessé. Les obsèques de Prévost, auxquelles assistèrent de nombreux notables de la ville de Montréal, furent imposantes.
Albert Prévost est l’auteur de « Résumé pratique du traitement de la syphilis », l’Union médicale du Canada (Montréal), 49 (1920) : 612–617.
ANQ-M, CE601-S33, 8 août 1881.— Arch. de l’univ. de Montréal, E 38 (faculté de médecine), Procès-verbaux du conseil de la faculté de médecine de l’univ. Laval à Montréal, 1914–1918.— BCM-G, RBMS, Saint-Louis-de-France (Montréal), 26 août 1909 (mfm).— Le Devoir, 5, 10 juill., 25 sept. 1926.— La Presse, 21 avril 1920, 5, 7 juill. 1926.— Antonio Barbeau, « Université de Montréal, chaire de neurologie de la faculté de médecine : leçon inaugurale du professeur Antonio Barbeau », l’Union médicale du Canada, 69 (1940) : 117–125.— E.-P. Benoît, « Nécrologie : Albert Prévost », l’Union médicale du Canada, 55 (1926) : 465s.— Wilfrid Derome, « le Professeur Albert Prévost », l’Union médicale du Canada, 55 : 467–470.— Jocelyne Dion, Pavillon Albert-Prévost, 1919–1994 : 75 ans (Montréal, [1994]).— J.-E. Dubé, « Nos hôpitaux : le passé, leur évolution, le présent », l’Union médicale du Canada, 61 (1932) : 148–234.— Hôpital Notre-Dame, Rapport annuel (Montréal), 1914–1926.— Madeleine [A.-M. Gleason], « Ceux qui s’en vont. . . », la Rev. moderne (Montréal), 7 (1925–1926), no 10 : 10.— Édouard Montpetit, « Albert Prévost », Rev. trimestrielle canadienne (Montréal), 12 (1926) : 361–367.— Univ. de Montréal, Annuaire, 1920–1922.— Univ. Laval à Montréal, Annuaire, 1904–1919.
Guy Grenier, « PRÉVOST, ALBERT (baptisé Louis-Elzéar-Albert) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/prevost_albert_15F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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