POLSON, FRANKLIN BATES, ingénieur et manufacturier, né le 10 février 1858 à Port Hope, Haut-Canada, fils de William Polson (1834–1901) et d’une prénommée Anna ; le 31 décembre 1880, il épousa à Cobourg, Ontario, Emma A. Wood (décédée en 1886), et ils eurent une fille, puis le 20 mars 1901, Bessie Stephen Thompson, et de ce mariage naquirent une fille et trois fils ; décédé le 28 octobre 1907 à Toronto.

Après avoir fréquenté le Cobourg Collegiate Institute, Franklin Bates Polson entreprit de suivre les traces de son père, mécanicien qualifié qui travaillait pour la Grand Junction Railway Company à Belleville en qualité de surintendant de la mécanique. Franklin Bates consacra presque dix ans à l’apprentissage de son métier à la Cobourg, Peterborough and Marmora Railway and Mining Company, chez Hyslop and Ronalds (mécaniciens de Chatham), et à la Stearns Manufacturing Company d’Erie, en Pennsylvanie. Il devint surintendant de la mécanique pour la Victoria Railway Company à Lindsay, en Ontario, en 1881 et maître mécanicien pour la division de Whitby de la Midland Railway Company un an plus tard. En 1883, le père et le fils démissionnèrent de leur poste respectif pour former la William Polson and Company à Toronto. Installée du côté sud de l’Esplanade, l’entreprise s’annonça comme une firme d’ingénieurs, de mécaniciens et de courtiers en machinerie spécialisée dans la construction de yachts à vapeur. En 1885, elle avait pris de l’expansion, et produisait des chaudières et des appareils de levage, des machines verticales et marines.

Le progrès régulier de l’entreprise mena à sa constitution juridique le 23 octobre 1886 sous le nom de Polson Iron Works Company of Toronto Limited, avec William comme président et Franklin Bates comme secrétaire-trésorier. Beaucoup de capital y fut investi dans le but d’en faire l’usine de fabrication de chaudières et de machines la mieux équipée du pays. L’expansion la plus notable de ses activités survint en 1888 lorsque la ville d’Owen Sound offrit une concession de terrain, un canal adjacent dragué aux frais de la municipalité et une exemption d’impôt foncier de dix ans pour attirer au lac Huron les activités de construction navale de la firme. Un règlement adopté plus tard au cours de l’année lui octroya la somme de 15 000 $ pour l’achat et l’agrandissement d’une cale sèche, qui était déjà en place. La Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique avait choisi Owen Sound comme terminus pour ses navires à vapeur. Quand cette société décida de remplacer l’Algoma, qu’elle venait de perdre, l’usine Polson était bien placée pour soumissionner et elle décrocha le contrat. Le lancement, le 4 mai 1889, du Manitoba, premier paquebot tout en acier construit au Canada, sembla confirmer la conviction des Polson que l’ère de la construction des navires en bois tirait à sa fin au Canada.

Deux autres contrats pour la construction de bateaux en acier suivirent. L’Ontario, traversier de wagons construit pour le tronçon Windsor-Detroit du chemin de fer canadien du Pacifique, était équipé de machines et de chaudières qui provenaient des ateliers Polson de Toronto. Le Seguin, une barge, avait été commandé par la Parry Sound Lumber Company ; le président de cette entreprise, John Bellamy Miller, était devenu l’un des principaux actionnaires de la Polson Iron Works en 1888 et membre du conseil d’administration deux ans plus tard. Polson, de son côté, avait manifesté un intérêt semblable pour le commerce du bois, qui commençait à se développer dans la région, en assumant la propriété conjointe du Seguin et la vice-présidence de la Parry Sound Navigation Company Limited en 1890.

Les activités de sa propre entreprise, toutefois, tenaient Polson très occupé. En sa qualité d’ingénieur mécanicien et d’ingénieur maritime capable d’assumer aussi le rôle d’architecte naval, il s’intéressait de près à la construction de chaque navire. Il allait chercher des commandes pour des yachts à vapeur en « acier, fer, bois et fer ou bois », ainsi que des contrats pour la construction de croiseurs à coque d’acier et de bois pour le département fédéral de la Marine et des Pêcheries. Ce travail permit au chantier de fonctionner pendant toute l’année 1891, au moment où Polson occupait le poste d’administrateur délégué, mais la société ne tarda pas à être touchée par le déclin temporaire que subissait toute l’industrie de la construction navale. Malgré une recapitalisation massive en 1888 et une liquidation volontaire en 1889, la firme ne parvint pas à honorer ses engagements concernant le dragage et l’agrandissement de la cale sèche d’Owen Sound. En 1895, le conseil municipal refusa de prolonger la période d’exemption d’impôt foncier et, deux ans plus tard, l’usine Polson revint à Toronto.

Au milieu de toutes ces difficultés, en 1893, l’usine avait été réorganisée : Polson et John Bellamy Miller s’étaient portés acquéreurs de l’actif de la société liquidée. Même si Miller figurait comme propriétaire unique en 1899, Polson continuait de jouer un rôle dominant ; dès 1901, il était redevenu associé. L’entreprise connaîtrait une autre réorganisation en 1905.

La fabrication des machines et des chaudières permit à la société de se maintenir à flot durant ces années difficiles, mais à la fin des années 1890, elle avait repris la construction navale et lançait au moins deux ou trois bateaux par année. Polson et d’autres faisaient pression auprès du gouvernement fédéral presque tous les ans pour qu’il accorde une prime de tonnage aux navires de construction canadienne afin de contrer l’effet des prix inférieurs demandés aux constructeurs navals britanniques pour le fer, le charbon, la main-d’œuvre et le capital, mais le premier ministre, sir Wilfrid Laurier*, refusa d’agir. En 1903, en compagnie de John Joseph Long, de la Collingwood Shipbuilding Company, et d’autres manufacturiers, Polson se rendit à Ottawa afin de demander plutôt un soutien financier pour la construction de cales sèches. Une loi visant à accorder de telles subventions fut adoptée en 1910.

L’usine de Polson avait reçu des moyens de subsistance du ministre des Travaux publics, Joseph-Israël Tarte, qui commanda deux dragues hydrauliques, à construire autant que possible de pièces fabriquées au pays. Même si Tarte avait des réserves au sujet de l’attribution de contrats « à la ville politiquement hérétique de Toronto » – ses députés étaient conservateurs –, il fut impressionné par Polson, qui appuyait le Parti libéral. On n’avait jamais construit de dragues de ce type ni de cette taille au Canada, et Polson dut chercher dans tout le pays pour trouver des fournisseurs convenables. Le lancement du J. Israel Tarte le 2 septembre 1901 marqua non seulement un point tournant pour la société Polson, mais aussi le début d’un programme de construction publique, surtout sur les canaux du Saint-Laurent, qui allait fournir du travail régulier au chantier jusqu’à la Première Guerre mondiale. Sa production, au début du siècle, de dragues, chalands, traversiers et même du premier navire armé construit au Canada, le Vigilant (bâti en 1903–1904 pour protéger les pêcheries des Grands Lacs), donna quelque crédit à la Gazette de Montréal, qui affirmait que le gouvernement fédéral était « le bienfaiteur le plus généreux des chantiers navals des Grands Lacs ».

Cette avalanche de travail amena Polson à poursuivre l’expansion de son usine. Il entreprit des négociations avec des dirigeants municipaux en 1906 en vue d’acquérir un emplacement adjacent pour construire une fonderie, de sorte que l’usine cesse de dépendre de sources américaines pour son approvisionnement en acier, et pour permettre la construction d’un paquebot. Le décès soudain de Polson, le 28 octobre 1907, à sa résidence de Rosedale, laissa les choses en plan. Polson souffrait de troubles digestifs depuis son combat contre la typhoïde quelques années auparavant, mais rien n’avait préparé sa famille à ce dénouement tragique.

Polson avait mené une vie active en dehors des affaires. Il fut membre du conseil d’administration du Grace Hospital en 1906 et manifesta son intérêt pour l’enseignement technique en présidant le conseil de la Toronto Technical School. Une grande partie de ses loisirs était consacrée aux activités de plusieurs clubs, en particulier le Royal Canadian Yacht Club. Membre du Bureau de commerce de Toronto depuis 1887, il fit partie du bureau de direction de l’Association des manufacturiers canadiens en 1904–1905. À sa mort, il était membre du conseil d’administration de l’Industrial Exhibition Association et appartenait à la Société canadienne des ingénieurs civils. Polson jouissait aussi du respect de ses pairs comme membre fondateur de l’Employers’ Association, regroupement de manufacturiers formé à Toronto en 1902 « pour négocier avec les syndicats ». Il joua par la suite un rôle important dans l’arbitrage de plusieurs conflits de travail.

Le nom de Franklin Bates Polson est étroitement associé aux nombreux bateaux construits sous sa supervision. Bien que de ses chantiers soient sortis surtout des bateaux utilitaires, il avait aussi à son crédit un certain nombre de yachts à vapeur dont la beauté des lignes commandait l’admiration. À partir d’un commerce régulier de chaudières et de machines destinées à une économie en expansion, Polson fit œuvre de pionnier dans l’industrie de la construction des navires en acier au Canada et son travail constitue un apport important à l’héritage maritime du pays.

Michael B. Moir

AN, MG 29, D61 : 6627–66254 ; MG 31, A 10, 59, dossier 5 ; RG 31, C1, 1861, Port Hope, Ward 2 : 4 ; 1871, Cobourg, Div. 3 : 12 (mfm aux AO).— AO, F 238, MU 3837, Polson à Roderick McLennan, 14 août 1890 ; RG 8, I-1-D, 1888, file 3442 ; RG 22, Ser. 305, n° 20648 ; RG 80-5, n° 1880–207716.— City of Toronto, Legal Dept. records, box 644, « Polson Iron Wk’s Co. re dredging Princess and Sherbourne Sts. slips » ; box 1452, « Polson Iron Works vs. Toronto – suit H.J.C. ».— St James’ Cemetery and Crematorium (Toronto), Tombstone inscription.— Toronto Harbour Commission Arch., RG 1/4 (records of the board of commissioners), box 2, folder 9 ; RG 3/3 (central registry files), box 181, folders 8–9.— Daily Mail and Empire, 8 janv. 1901, 29 oct. 1907.— Evening Telegram (Toronto), 29 oct. 1907.— Globe, 1891–1907.— Monetary Times, 1888–1901.— Toronto Daily Star, 28–30 oct. 1907.— G. M. Adam, Toronto, old and new : a memorial volume [...] (Toronto, 1891 ; réimpr. 1972).— An encyclopaedia of Canadian biography, containing brief sketches and steel engravings of Canada’s prominent men (3 vol., Montréal et Toronto, 1904–1907), 2.— Annuaire, Toronto, 1884–1907.— Canadian annual rev. (Hopkins), 1901–1903, 1905, 1907.— M. M. Croft, Fourth entrance to Huronia : the history of Owen Sound (Owen Sound, Ontario, 1980).— Hist. of Toronto, 1.— Industrial Canada (Toronto), 1 (1900–1901)–5 (1904–1905).— Naylor, Hist. of Canadian business, 2.— Toronto, Board of Trade, « Souvenir ».— Toronto municipal year book, Hubert Groves, compil. (Toronto), 1919 : 30–32.

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Michael B. Moir, « POLSON, FRANKLIN BATES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/polson_franklin_bates_13F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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