MORTIMER, GEORGE, ministre de l’Église d’Angleterre, né le 20 mai 1784 en Angleterre, fils de Harvey Walklate Mortimer, armurier de la rue Fleet à Londres ; le 21 février 1812, il épousa Mary Barford ; décédé le 15 juin 1844 à Thornhill, Haut-Canada.
George Mortimer était encore bébé lorsque sa mère mourut. Confié à la garde d’un parent à Birmingham, il fut victime d’une longue maladie qui le laissa difforme. Son père le reprit après son remariage en 1787 et le fit instruire par des précepteurs. À compter de 1798, George travailla à titre d’apprenti pendant sept ans à la librairie d’un dénommé Otridge, située dans le Strand. Il devint l’un des disciples du philanthrope Joseph Butterworth, un vendeur de livres de droit dont la résidence servait de lieu de rencontre à William Wilberforce et à d’autres membres de la « secte de Clapham ».
Tout en préparant son entrée au collège, Mortimer étudia les Pères de l’Église, dont les écrits devaient inspirer le mouvement d’Oxford, et, par la même occasion, il élargit sa connaissance des chefs évangéliques. Jeune homme sensible, il était souvent ému jusqu’aux larmes à la lecture des auteurs chrétiens. Après avoir obtenu un diplôme du Queen’s College de Cambridge en 1811, il travailla dans une paroisse du Shropshire. Bien que l’évêque ait eu quelques doutes sur cet ardent et jeune évangélique, il l’ordonna et lui confia un vicariat en mai 1811. Par la suite, Mortimer fit du ministère à Bristol et dans le Somerset.
Découragé par les conditions politiques et économiques de l’Angleterre et persuadé que les ministres « sans bénéfice ni protection chargés d’une famille nombreuse [devaient...] tôt ou tard décamper », Mortimer partit pour le Haut-Canada en 1832. Il se vit offrir la paroisse de Thornhill où on avait érigé deux ans plus tôt une église à charpente de bois sur un terrain cédé en partie par Benjamin Thorne. L’évêque Charles James Stewart lui garantit à même les réserves du clergé un revenu de £100 ; la paroisse, pour sa part, s’engageait à lui verser un supplément de £40 à £50 et à mettre à sa disposition une maison à loyer modique. Cette situation affligea Mortimer, surtout dans les premiers temps. Il trouvait sa maison petite et croyait que les réserves donnaient à ses fidèles une excuse pour négliger de répondre à ses besoins. Il n’en souffrit toutefois pas, car il bénéficiait d’une rente. En réalité, sur le plan politique, il s’identifiait à la classe « la plus loyale et la plus opulente » et pouvait se permettre de consacrer une partie de la dîme aux pauvres et aux œuvres de bienfaisance. En 1836, déprimé par la maladie, il prit des dispositions pour partir, mais ses paroissiens le supplièrent de rester. Il décida alors de se construire une imposante maison à ses frais et sa santé s’améliora.
La rébellion de 1837 fut une période difficile pour Mortimer. S’étant vu confier l’un des 44 rectories créés par sir John Colborne* en 1836, il craignit d’être la cible des groupes de rebelles qui passèrent à sa porte pour se rendre à Toronto en décembre 1837 [V. William Lyon Mackenzie*]. On l’épargna, mais c’est tout de même entouré d’un cortège de gens armés d’épées et de fusils de chasse qu’il procéda à l’enterrement de l’une des victimes, le colonel Robert Moodie, dans le cimetière de la paroisse. Un tel déploiement était, selon lui, « tout à fait injustifié ».
Avec le temps, la situation de Mortimer s’améliora. En 1840, on agrandit l’église, et l’année suivante il écrivait : « En Angleterre, tout n’était que luttes et difficultés et [il n’y avait] aucune possibilité d’installer ma famille ; ici par contre, je suis en mesure d’obtenir tout confort raisonnable. » Il passait la plus grande partie de la journée dans son bureau et réservait deux ou trois heures pour se promener en voiture dans la paroisse. Il visitait toutes les familles, même celles des catholiques et des non-conformistes. Il ne considérait pas l’épiscopat comme essentiel à l’Église et se montrait aimable envers les non-conformistes, mais il les prévenait contre le péché du schisme. Il faisait d’ailleurs la même remontrance à ses paroissiens quand il les soupçonnait de manquer les offices du soir pour assister à des réunions méthodistes. Il fonda une école du dimanche et une société de tempérance. Ses initiatives ne connurent cependant pas toutes le succès. Ainsi, il dut renoncer à faire des réunions en semaine, à la manière des méthodistes : les gens ne prisaient guère les débats sur la religion. Une douzaine de personnes seulement utilisèrent les livres de la Library of Useful Knowledge, qu’il avait aidé à mettre sur pied.
Tout en sachant que sa responsabilité première était de préparer ses ouailles pour le ciel, Mortimer demeurait conscient de son « incrédulité latente en ce qui concerne la réalité du monde à venir ». Le soir du 10 octobre 1841, tandis qu’il prononçait un sermon sur la vie future, il eut une crise de nerfs dont il ne se remit jamais complètement. On confia alors la paroisse à son vicaire, le révérend Adam Townley ; pour sa part, il se chargea de tâches moins exigeantes à German Mills, agglomération située à environ quatre milles de Thornhill. Il reprit la charge de la paroisse en 1843. Le 15 juin 1844, ayant appris que son libraire à Toronto avait reçu une nouvelle commande, il partit pour cette ville. Chemin faisant, il fit une chute à bas de sa voiture et mourut de ses blessures.
George Mortimer accordait beaucoup de prix aux relations familiales. Il vouait une grande affection et un grand respect à sa belle-mère, et il était très attaché à son frère Thomas et à sa sœur Mary, avec qui il correspondit toute sa vie. Sa conception du mariage reflète l’importance nouvelle que son temps accordait à l’amour et à la camaraderie entre conjoints. Avant d’épouser Mary Barford, sa « très chère amie », il prit une série de résolutions : il promit d’éviter la « maussaderie » et l’« entêtement », de « cultiver une attitude tendre et affectueuse [...] en partageant tous les soucis domestiques et maternels ». Il jura de « la consulter en tout [...] de lui donner libre accès à tous [ses] papiers, lettres, et autres [... et] de lui laisser l’entière conduite de toutes [ses] questions d’argent ». Il écrivit de plus : « En ce qui concerne l’organisation des affaires de la maison, [je ne vais] intervenir que s’il le faut. » Leur ménage fut vraiment heureux : à sa sœur qui allait se marier, Mortimer souhaita un bonheur semblable au sien. Il était père de trois fils et de trois filles qui le remplissaient de fierté. C’est probablement un bon choix qu’il fit lorsqu’il décida d’émigrer par amour pour eux : Arthur était déjà rector en 1844 et Herbert devint président du Toronto Stock Exchange.
George Mortimer a ordonné qu’on détruise ses papiers après sa mort ; les procès-verbaux du conseil de fabrique de la Holy Trinity Church (Thornhill, Ontario) pour cette période ont été perdus dans un incendie. Seul subsiste le registre paroissial qu’il utilisa ; il est conservé à l’EEC, Diocese of Toronto Arch. [r. e. r.]
AO, MS 35, letter-books, 1839–1843, John Strachan, circular to Mortimer et al., 10 juin 1840 ; corr. to Mortimer, 13 avril 1840, 5 avril 1841, 10 mars 1843 ; 1839–1866 (« to societies »), letter concerning memorials of Deacon and Mortimer, 19 avril 1842 ; 1844–1849, corr. to Dr O’Brien, 7 déc. 1846 ; unbound papers, letters missive authorizing the bishop of Quebec to institute the Rev. Geo. Mortimer to the parsonage at Thornhill, 16 janv. 1836 ; MS 199, M. S. [Gapper] O’Brien, journals, 11 févr. 1834.— The life and letters of the Rev. George Mortimer [...], John Armstrong, édit. (Londres, 1847).
Richard E. Ruggle, « MORTIMER, GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mortimer_george_7F.html.
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Auteur de l'article: | Richard E. Ruggle |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
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