McNUTT, ALEXANDER, officier, colonisateur et agent foncier, né en 1725, vraisemblablement à Londonderry (Irlande du Nord), probablement le fils d’Alexander McNutt et d’une prénommée Jane ; décédé célibataire vers 1811 à Lexington, Virginie.
Alexander McNutt immigra en Amérique quelque temps avant 1753 et s’établit à Staunton, en Virginie. En 1756, il était officier dans la milice lors de l’expédition du major Andrew Lewis contre les Chaouanons, sur l’Ohio. Une querelle survenue entre Lewis et McNutt, après cette campagne, occasionna peut-être le départ de ce dernier pour Londonderry, dans le New Hampshire, où vivaient beaucoup d’Écossais de l’Ulster. On sait qu’en septembre 1758 il était l’un des « francs-tenanciers et habitants » de cette ville. D’avril à novembre 1760, McNutt servit comme capitaine dans les troupes provinciales du Massachusetts au fort Cumberland (près de Sackville, Nouveau-Brunswick) ; il s’occupa aussi, la même année, de lever des troupes en vue de la conquête du Canada.
C’est vers cette époque que McNutt commença de s’intéresser à la colonisation de la Nouvelle-Écosse. Il paraît d’abord avoir travaillé comme adjoint de Thomas Hancock, représentant à Boston du gouverneur Charles Lawrence*, à recruter des colons pour repeupler les anciennes terres des Acadiens, à la suite d’une annonce publiée par Lawrence en janvier 1759. Au mois d’août de la même année, il était à Halifax, où il obtint de Lawrence la promesse écrite de la concession, à lui et à quelques associés, de sept cantons, à la condition qu’il les peuplât de colons protestants. Un mois après la mort du gouverneur, survenue en octobre 1760, McNutt se présenta devant le Conseil de la Nouvelle-Écosse pour réclamer les cantons promis. En plus de mentionner l’entente intervenue entre Lawrence et lui, il affirma avoir en main 850 signatures pour les terres dont il était question, avoir des agents en Irlande et en Amérique, et avoir déjà envoyé un navire en Irlande pour en ramener des colons. Au cours du printemps de 1761, un groupe d’environ 50 familles, qu’il avait recrutées dans le New Hampshire, arrivaient dans la région de Cobequid (près de Truro), où on leur concéda des terres.
Au début de la même année, McNutt était à Londres, porteur d’une lettre de l’administrateur Jonathan Belcher*, qui le recommandait comme agent capable d’amener des colons d’Irlande. Le 24 février, McNutt fut invité à comparaître devant le Board of Trade ; trois jours plus tard, il proposait, pour le peuplement des terres de la Nouvelle-Écosse, des conditions qui furent acceptées pour la plupart. Bien que les autorités cherchassent à décourager les habitants des îles Britanniques d’émigrer, McNutt était un orateur et un pétitionnaire persuasif, et ses propositions présentaient l’attrait de n’occasionner, finalement, aucune dépense au gouvernement britannique. En retour de ses efforts pour établir des colons en Nouvelle-Écosse, McNutt sollicita le droit de choisir des cantons de 100 000 acres dans la partie des terres non concédées et non arpentées au moment de l’arrivée de ses colons, et il demanda également que 100 acres lui fussent accordées pour chaque tranche de 500 acres concédée à ses colons. L’historien John Bartlet Brebner* a bien montré que, si les conditions de McNutt avaient été approuvées, c’est lui, et non point le gouverneur et le conseil, qui aurait eu la haute main sur la colonisation en Nouvelle-Écosse. Mais, malgré la recommandation du Board of Trade de donner instructions au gouverneur de concéder les terres aux conditions de McNutt, les propositions de ce dernier ne reçurent pas, cette année-là, l’approbation nécessaire du Conseil privé.
Entre-temps, muni de l’approbation du Board of Trade, McNutt s’était rendu en Irlande, où il avait engagé des représentants qui couvraient un territoire en forme d’hémicycle dans l’arrière-pays du port de Londonderry. Le 21 avril 1761, il lança publiquement sa campagne en publiant une annonce dans le Belfast News-Letter and General Advertiser, invitant « fermiers travailleurs et utiles artisans » à émigrer en Nouvelle-Écosse ; il offrait 200 acres à chaque chef de famille et 50 à chacun de ses membres. Les résultats, semble-t-il, furent encourageants, et bien qu’il eût d’abord décidé de ne louer qu’un navire, il dut en réserver un second. En octobre, McNutt était â Halifax, avec 300 colons. Contrairement aux fermiers à l’aise de la Nouvelle-Angleterre qui étaient arrivés l’année précédente [V. John Hicks*], les immigrants de McNutt étaient des « gens pauvres, sans moyens de subsistance » ; ils furent néanmoins bien accueillis par les autorités. Au cours de l’hiver, ils travaillèrent à Halifax où leur furent fournies des provisions que McNutt avait empruntées au gouvernement, de même que d’autres marchandises données par le gouvernement ou par des particuliers charitables. Au printemps de 1762, le conseil distribua aux Irlandais des vivres, des grains de semence, des outils et des matériaux de construction, et il fit des arrangements pour qu’un navire les transportât à Cobequid, où ils devinrent locataires sur les terres anciennement habitées par d’autres colons.
À son arrivée à Halifax, McNutt avait découvert que les instructions du Board of Trade relatives aux concessions de terre n’avaient pas été envoyées à Belcher, mais, de toute évidence, il ne fit pas allusion à ce problème quand il se présenta devant cet organisme, en mars 1762. Le Board of Trade discutait alors des rapports enthousiastes de Belcher sur les plans de McNutt de noliser des navires faisant au total 10 000 tonnes, pour transporter, ce même été, 7 000 ou 8 000 personnes du nord de l’Irlande. Le 16 mars, McNutt soumit un mémoire dans lequel il demandait au Board of Trade d’approuver de nouvelles conditions de colonisation, en affirmant qu’il avait déjà signé, en vue du transport des colons, des contrats pour une valeur de £26 000. Ces conditions étaient beaucoup plus détaillées et ambitieuses que les précédentes ; McNutt demandait, entre autres choses, que toutes les concessions fussent faites en son nom, de façon qu’il pût les diviser lui-même en lots. Ce serait « la seule assurance qu’il [pourrait] avoir d’être [payé] pour la traversée et la subsistance [des immigrants], jusqu’à ce qu’ils eussent pu amasser cette somme ». Il demandait aussi l’autorisation de recommander les personnes aptes à recevoir les commissions de milice dans les futurs cantons. Finalement, il désirait l’obtention des contrats pour le tracé et le déblaiement des routes qui relieraient les nouveaux cantons à Halifax, de même que pour d’autres types de travaux publics. Grâce à ces contrats, affirmait-il, les colons qui ne pourraient se rendre immédiatement sur leurs terres obtiendraient un emploi, et leur travail leur permettrait en outre de lui rembourser l’argent de la traversée, qu’ils avaient obtenu à crédit. De nouveau le Board of Trade jugea ces conditions raisonnables, et il recommanda que des concessions fussent octroyées aux colons que McNutt avait déjà installés. Mais, en même temps, l’organisme s’interrogeait : une émigration aussi considérable d’Irlandais que celle qu’on projetait ne pourrait-elle pas être préjudiciable à la mère patrie ? Le 29 avril, le Conseil privé examina le plan de McNutt et jugea que, si utile que pût être la colonisation de la Nouvelle-Écosse, « la migration d’Irlande d’un si grand nombre de sujets de Sa Majesté [serait] suivie de conséquences dangereuses ». Aussi ordonna-t-il que le gouverneur de la Nouvelle-Écosse reçût instructions de ne point concéder de terre aux colons irlandais qui n’auraient pas résidé pendant cinq ans en Nouvelle-Écosse ou dans une autre colonie américaine. Les propriétaires fonciers qui formaient le gouvernement britannique ne favorisaient pas l’émigration, car ils croyaient â la nécessité d’une forte population dans la métropole pour en assurer la prospérité. En outre, et plus important encore, la perspective d’une émigration massive, à partir des districts protestants d’Irlande, avait alarmé les autorités.
Une fois de plus, McNutt n’avait pas attendu la bénédiction des autorités pour inaugurer sa campagne de recrutement : le 11 mars 1762, il publiait dans le Belfast News-Letter and General Advertiser une lettre élogieuse émanant d’émigrants de l’année précédente. Mais, au moment où il arriva â Londonderry, en juin, il avait déjà appris la décision du Conseil privé, et ses efforts pour attirer des colons se refroidirent remarquablement. Il prit néanmoins les dispositions voulues pour que 170 personnes environ fissent avec lui la traversée vers la Nouvelle-Écosse, à bord du Nancy et du Hopewell. De nouveau les Irlandais arrivèrent tard dans la saison et se révélèrent incapables de se suffire à eux-mêmes. Belcher (devenu lieutenant-gouverneur) trouvait de plus en plus difficile d’assumer les dépenses occasionnées par les projets de McNutt, et il protesta contre les coûts qu’entraînait l’entretien des immigrants pendant l’hiver. Mais comme McNutt menaçait de conduire ces derniers à Philadelphie, le lieutenant-gouverneur céda. Des ravitaillements leur furent distribués, et on les conduisit dans le canton de New Dublin et dans d’autres lieux de la province, où ils devinrent locataires d’autres colons. Comme Belcher n’avait apparemment pas divulgué au conseil les instructions qu’il avait reçues de Londres de ne pas concéder de terre aux immigrants irlandais de fraîche date et que, de son côté, McNutt avait fait son travail auprès des conseillers, une dispute éclata et plusieurs parmi ceux-ci se plaignirent auprès du gouverneur absentéiste Henry Ellis que Belcher était en train de chercher à faire échec aux tentatives de McNutt pour faire venir d’autres colons.
Au printemps de 1763, McNutt était une fois de plus à Londres et il adressa plusieurs mémoires au Board of Trade. Dans le premier, il sollicitait une compensation pour des pertes qui, affirmait-il, résultaient du fait que l’organisme n’avait pas tenu ses engagements de 1761. Dans les mémoires qui suivirent, il accusait Belcher et d’autres de ses ennemis de la Nouvelle-Écosse d’essayer de limiter ses plans de colonisation. Favorablement impressionné par sa demande d’une compensation, malgré l’absence de toute preuve, le Board of Trade recommanda qu’on lui octroyât, pour le dédommager, une concession proportionnelle au nombre de personnes qu’il avait établies en Nouvelle-Écosse, en demandant aux autorités de la colonie d’en déterminer l’étendue. S’il critiqua les données de McNutt, le Conseil de la Nouvelle-Écosse lui accorda néanmoins, en 1765, 13 500 acres. La décision du Conseil privé avait effectivement mis un frein aux plans de McNutt relatifs à l’installation des Irlandais en Nouvelle-Écosse, et son rôle auprès des immigrants fut négligeable par la suite. Néanmoins, ses associés d’Irlande envoyèrent plus tard un ou deux groupes de colons dans les années 1760, à bord des navires Hopewell, Falls et Admiral Hawke.
L’intérêt de McNutt pour la colonisation ne se limitait pas à ses projets irlandais. En affirmant qu’il avait l’approbation du Board of Trade, il avait, en 1761, encouragé certains soldats provinciaux licenciés de la Nouvelle-Angleterre, dont Israel Perley, à se fixer sur les bords de la rivière Saint-Jean (Nouveau-Brunswick). Et, au moment où il se plaignait de ses pertes, en 1763, il proposait de transporter des protestants étrangers en Caroline du Sud, à la condition de recevoir une concession dans l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard). De surcroît, il soumit en décembre 1763 un projet visant à faire venir 200 000 calons en Nouvelle-Écosse, entre autres parties de l’Amérique du Nord, et cela sans débours pour le gouvernement. Ni l’une ni l’autre de ces propositions ne reçut une approbation inconditionnelle à Londres, et elles paraissent avoir été abandonnées peu après.
C’est en 1764 que McNutt s’intéressa de nouveau à la Nouvelle-Écosse. En créant une réserve indienne à l’ouest des Appalaches, la Proclamation royale de 1763 avait restreint les possibilités d’établissements dans les colonies centrales. Aussi, quand le gouvernement britannique publia l’année suivante de nouvelles instructions relatives aux concessions en Nouvelle-Écosse – instructions qui eurent pour effet d’accroître auprès des compagnies foncières des autres parties de l’Amérique l’attrait que présentait la Nouvelle-Écosse – un grand intérêt se manifesta pour l’acquisition de terres dans cette colonie. Au fait de cet intérêt, McNutt arrivait à Philadelphie en septembre 1764. En faisant valoir son expérience de la Nouvelle-Écosse, il persuada apparemment plusieurs compagnies de s’associer à lui pour tenter d’acquérir des terres, et il les convainquit que les conditions de colonisation qu’il proposait (conformes, en gros, à ses propositions de 1761) étaient les seules qui dussent présider à l’établissement des colons. En mars 1765, McNutt et les représentants de plusieurs compagnies foncières étaient à Halifax, où McNutt présenta leurs demandes visant à l’obtention de 21 cantons de 100 000 acres chacun et exposa les conditions auxquelles se ferait l’établissement des colons. Le gouverneur Montagu Wilmot* fut impressionné par le nombre de ces demandes, et il écrivit au Board of Trade au sujet de la possibilité de détourner vers la Nouvelle-Écosse « le flot annuel des Allemands vers l’Amérique ». Mais le gouverneur hésitait à concéder les terres aux conditions de McNutt, d’autant qu’elles différaient beaucoup de celles qui étaient contenues dans les nouvelles instructions qu’il avait reçues en juin 1764. En outre, lui-même considérait que ces nouvelles instructions encourageraient la spéculation, et il avait déjà exprimé au gouvernement britannique ses inquiétudes à cet égard. Plus encore, après avoir consulté le conseil, il avait décidé de ne pas publier les instructions, comme il en avait reçu l’ordre, jusqu’à ce qu’il eût obtenu des précisions du Board of Trade. En attendant, Wilmot et le conseil réservèrent 2 300 000 acres pour McNutt et les représentants des compagnies foncières, et ils proposèrent, comme condition à leur concession, que ces terres fussent peuplées en quatre ans, faute de quoi elles seraient confisquées. Wilmot voulait, en effet, empêcher que de grandes superficies de terre demeurassent indéfiniment entre les mains de spéculateurs.
Pendant cinq mois, au cours de l’été de 1765, McNutt et les représentants restèrent à Halifax, dans l’espoir d’obtenir du gouvernement provincial de meilleures conditions. Des querelles éclatèrent, les supposés associés de McNutt affirmant que ce dernier voulait les duper. L’un d’entre eux, Anthony Wayne, qui allait devenir général pendant la guerre d’Indépendance américaine, rapporta que plusieurs membres du conseil lui avaient dit que McNutt « avait agi par intérêt en privé, contre [les représentants], [qu’il] avait dit que [ceux-ci] n’avaient rien à voir à la question des conditions ou à quoi que ce fût d’autre, et n’étaient que des arpenteurs à ses ordres ». McNutt avait réussi à faire inscrire son nom dans la liste des bénéficiaires de chacune des quatre concessions de canton réservées pour Wayne et ses associés, et Wayne voulait « essayer de l’exclure, si possible, d’autant qu’il [leur avait] nui plutôt que de [les] servir ».
En octobre 1765, le gouvernement britannique n’avait encore donné réponse ni aux conditions de McNutt ni aux objections de Wilmot. McNutt et les représentants demandaient que l’on agît sur-le-champ, vu la mise en vigueur, le 1 er novembre, de la loi du Timbre, qui augmenterait de £15 6 shillings 3 pence le coût de chaque concession de canton. Wilmot et le conseil décidèrent de procéder aux concessions, mais en insistant pour que les conditions proposées dès le début, lors de la mise en réserve des terres, fussent respectées. Du 13 au 31 octobre, la Nouvelle-Écosse connut une vague de concessions foncières, au cours de laquelle 3 000 000 d’acres furent divisées en lots, surtout au sud, à l’est et au nord-est de la péninsule, et le long des rivières Saint-Jean, Petitcodiac et Memramcook (Nouveau-Brunswick). McNutt obtint la concession d’un canton à Port Roseway (Shelburne) et, avec divers associés, d’autres concessions le long de la Saint-Jean et des côtes nord, sud et nord-est, soit, au total, la moitié de toute la superficie concédée. Il trouva moyen de faire insérer, dans les lettres de concession, certaines clauses stipulant que des représentations étaient faites auprès de la couronne, et que toutes autres conditions favorables obtenues en conséquence de ces démarches seraient applicables aux terres cédées par ces lettres. Le projet de Wayne visant à l’exclusion de McNutt n’eut apparemment pas de suite, car ce dernier reçut un cinquième des deux cantons accordés au groupe de Wayne. La Philadelphia Company, une des organisations auxquelles McNutt s’était associé, fut également déçue. Elle avait espéré que sa concession de 200 000 acres sur la rive nord (à l’emplacement actuel des comtés de Pictou et de Colchester) aurait une large façade sur la mer, mais McNutt et quelques-uns de ses associés d’Irlande obtinrent, dans une autre concession, la plus grande partie du terrain donnant sur le port de Pictou – le meilleur de la région.
En dépit de la concession de ces énormes superficies de terre, les conditions de Wilmot, obligeant à les coloniser en quatre ans, mirent un frein à la spéculation, et le boom foncier disparut rapidement en Nouvelle-Écosse. De fait, peu de colons vinrent s’établir et, sur une longue période, la plupart des concessions furent confisquées. McNutt retourna à Londres, où, en avril 1766, il se présenta devant le Board of Trade pour se plaindre qu’on n’avait pas suivi les instructions de cet organisme, et que Wilmot et le conseil avaient donné les meilleures terres, à de meilleures conditions, à leurs amis. Prié de commenter ces accusations, le gouvernement de la Nouvelle-Écosse nia l’existence de toute partialité et affirma que les obstructions dont McNutt disait avoir été victime, quelles qu’elles fussent, « étaient le fruit de son zèle immodéré et de ses demandes exorbitantes au gouvernement ». Loin de lui faire obstacle, les autorités affirmaient qu’elles avaient mis son nom dans toutes les lettres de concession délivrées aux compagnies avec lesquelles il avait été associé. Les accusations de McNutt n’allèrent pas plus loin, semble-t-il.
McNutt revint en Nouvelle-Écosse où, à la fin des années 1760, il séjourna périodiquement avec son frère Benjamin à l’île McNutt, dans le havre de Port Roseway. Il vécut aussi, à ce qu’il semble, dans la région de Truro, et son nom apparaît au recensement de cette ville pour l’année 1771. Pour gagner sa vie, McNutt se lança probablement dans le commerce du tais, car, en juin 1767, le procureur général William Nesbitt* reçut l’ordre de poursuivre McNutt pour occupation illégale de certaines terres et pour abattage de bois. Selon toute apparence, McNutt ne fit rien pour mettre ses concessions en valeur, et, en 1770, furent confisqués les cantons du port de Pictou et du bassin des Mines, où il possédait des terres ; trois ans plus tard, le canton de Beaver Harbour subit le même sort. En outre, le canton de Port Roseway (qui comprenait file McNutt) fut vendu en 1768, pour rembourser une dette de McNutt envers Henry Ferguson, marchand de Halifax. McNutt fut traduit en justice à plusieurs reprises, de 1767 à 1774, pour d’autres dettes, et reçut l’ordre de payer plusieurs centaines de livres à ses créanciers, dont Michael Francklin* et Joshua Mauger*.
Lors de la Révolution américaine, la carrière de McNutt prit un nouveau tournant. Bien qu’il eût plus tard affirmé avoir souscrit depuis 1774 aux principes qui sous-tendaient les résolutions du Congrès continental, il semble être resté en Nouvelle-Écosse pendant les premières années de la rébellion. Mais quand sa maison de Port Roseway fut pillée, en juin 1778, par un parti de « bandits armés » venant d’un corsaire américain, qui s’emparèrent, parmi ses biens, de « plus de trois cents livres sterling, sans compter les livres [et] les papiers », il partit pour Boston, afin de demander de l’aide au Conseil du Massachusetts. En chemin, il subit une nouvelle humiliation, celle de se voir arrêter à Salem comme « personnage douteux ». Incapable d’obtenir une compensation immédiate, il se rendit à Philadelphie, afin d’adresser au Congrès une pétition demandant d’attirer la Nouvelle-Écosse dans la révolution, et, en mars 1779, il se joignit à Phineas Nevers et à Samuel Rogers, de Maugerville (Nouveau-Brunswick), pour demander au Congrès de l’argent pour la construction d’une route qui eût relié la Penobscot (Maine) à la Saint-Jean. En septembre 1779, McNutt obtint la permission de retourner à Halifax, pour se procurer des documents qui attesteraient ses pertes, mais il était suspect aux yeux des autorités britanniques, et Francis McLean*, commandant à Halifax, avait été averti, avant son arrivée, que McNutt « entretenait censément une correspondance avec les rebelles, et [qu’]il devait être surveillé ». Il apparaît clairement que McNutt quitta la Nouvelle-Ecosse en 1780 ou 1781. En cette dernière année, les autorités de la Nouvelle-Écosse reçurent une lettre dans laquelle on le décrivait comme « un individu rusé et intrigant, [qui] a[vait] entrepris de faire circuler plusieurs lettres et de dangereux pamphlets d’un bout à l’autre de la province ».
Parmi ces pamphlets, se trouve peut-être celui qu’on a attribué à McNutt et qui a pour titre Constitution and frame of government for the free and independent state and Commonwealth of New Ireland, qui fut apparemment imprimé à Philadelphie en 1781. Selon cet écrit, la nouvelle nation aurait été formée de la partie du Massachusetts située entre les rivières Saco (Maine) et Sainte-Croix, et, soit calcul, soit coïncidence, elle aurait porté le même nom et aurait eu la même étendue que la province proposée par le gouvernement britannique pour mettre à l’abri les Loyalistes déplacés [V. John Caleff]. Là s’arrête toute ressemblance entre les deux projets. Contrairement à la province impériale, la New Ireland indépendante eût été dotée d’une constitution théocratique fondée sur les principes du puritanisme. Les avocats n’y auraient pas été autorisés à détenir des postes gouvernementaux, et nul n’y aurait eu accès à des emplois publics qui n’eût été membre d’une société chrétienne. De surcroît, les distractions comme les jeux, les courses de chevaux, les combats de coqs, les bals et les jeux de hasard en auraient été bannies.
La révolution terminée, Alexander McNutt revint à l’île McNutt, et son frère et lui sont tous deux mentionnés sur les listes des impositions de Shelburne, en 1786 et 1787. En septembre 1791, William Hale, commerçant local, essayait de se faire rembourser une petite dette par le « colonel McNutt, dans l’île ». Le nom de McNutt apparaît encore sur la liste des impositions de Shelburne pour l’année 1794 ; il partit toutefois pour la Virginie en 1796. L’année suivante, il y était partie à une cession de propriété, dans le comté de Rockbridge, où il est également mentionné dans une cause relative à une propriété, en 1802. On pense qu’il mourut vers 1811.
PANS, MG 4, 140 (photocopie) ; RG 1, 31 : doc. 53, 55 ; 164 : f.331 ; 166A : 41 ; 188 : 5, 29 nov. 1762, 3 juin–2 juin. 1765 ; 189 : 26 août, 1er sept. 1766, 27 juin 1767, 14 avril 1770, 3 oct. 1774 ; 219 : doc. 68–69 ; 220 : doc. 59 ; 221, no 3, doc. 6 ; 374 : ff.79–80, 93–94, 118, 122, 126–127, 135 ; 377, no 2 : 6, 23, 27, 29, 32, 44, 112, 174, 179 ; 443, doc. 13.— PRO, CO 217/18 : ff.143–144, 148–157, 198–215, 297–298 ; 217/19 : ff.278–279, 300–301 ; 217/20 : ff.21–24, 41–46, 82–85, 224 ; 217/21 : ff.158–167 (mfm aux PANS).— Annals of Yarmouth and Barrington (Nova Scotia) in the Revolutionary War, compiled from original manuscripts, etc., contained in the office of the secretary of the Commonwealth, State House, Boston, Mass., E. D. Poole, compil. (Yarmouth, N.- É., 1899), 45–49.— DAB.— Bell, Foreign Protestants (Toronto, 1961), 109n., 111s., 113n., 114s., 117n., 122n., 123n., 547.—Brebner, Neutral Yankees (1969).—R. J. Dickson, Ulster emigration to colonial America, 1718–1775 (Londres, 1966), 55, 101, 132, 134–152, 154, 163–167, 173, 179s., 182, 191–193.— E. C. Wright, The Petitcodiac : a study of the New Brunswick river and of the people who settled along it (Sackville, N.- B., 1945), 16–23, 38–40.— A. W. H. Eaton, « Alexander McNutt, the colonizer », Americana (New York), 8 (1913) : 1065–1106 ; « The settling of Colchester County, Nova Scotia, by New England Puritans and Ulster Scotsmen », SRC Mémoires. 3e sér., 6 (1912), sect. ii : 221–265.— Margaret Ells, « Clearing the decks for the loyalists », SHC Report, 1933 : 43–58.— W. O. Raymond, « Colonel Alexander McNutt and the pre-loyalist settlements of Nova Scotia », SRC Mémoires, 3e sér., 5 (1911), sect.
Phyillis R. Blakeley, « McNUTT, ALEXANDER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mcnutt_alexander_5F.html.
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Auteur de l'article: | Phyillis R. Blakeley |
Titre de l'article: | McNUTT, ALEXANDER |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |