Titre original :  Hugh McKinnon. Image courtesy of the Hamilton Police Service Archives.

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McKINNON, HUGH, policier, athlète et fonctionnaire, né le 4 mai 1843 dans le canton de Vaughan, Haut-Canada, fils de Martin McKinnon, immigrant de l’île de Mull, Écosse, et de Flora Lamont ; en 1874, il épousa Jennie Morrison Lamont, et ils adoptèrent une fille ; décédé le 12 décembre 1903 à Dawson City, Yukon.

Hugh McKinnon était le dixième d’une famille de 11 enfants. Il grandit à la ferme de ses parents, dans le canton de Vaughan, et, vers l’âge de 15 ans, il partit faire une « année d’études ardues », probablement à Chatham. S’étant installé à Hamilton en 1861 ou en 1862, il entreprit bientôt un stage de droit chez son frère aîné, David, avocat. D’après ce qu’il rapporta en 1886, bien qu’il ait étudié durant presque trois ans, il savait qu’il était un « détective-né » et « aspirait à avoir la chance de se distinguer dans le travail de policier et de détective ».

On ne sait pas au juste ce que McKinnon fit ensuite. D’après ses souvenirs, qui en ce cas étaient inexacts, il entra au service de police de Hamilton en juin 1863 et devint détective par la suite. Selon d’autres sources, il aurait abandonné son stage de droit en 1865 pour un emploi de détective au gouvernement. Dans le recensement de 1871 concernant Hamilton, il est identifié comme détective, métier dans lequel il acquit une certaine notoriété. Les cinq semaines qu’il passa en 1876 à pister les Donnelly, de Lucan, en Ontario [V. James Donnelly*], méritent d’être signalées. Engagé en février par un comité local de vigilance pour accumuler des preuves contre ces malfaiteurs, il flâna quelque temps dans une taverne, « déguisé en sportif », et finit par y entendre quelqu’un faire une remarque peu flatteuse sur la famille Donnelly. Alors il tabassa cette personne, qui resta ahurie, et put gagner ainsi la confiance de Michael Donnelly. Il espérait en apprendre davantage par ce moyen d’infiltration ; par la suite, il enleva William Donnelly et son copain William Atkinson, puis les pendit par les pouces pour les faire parler. Il serait accusé, jugé et acquitté pour ce geste, mais tout de même, cinq membres de la famille Donnelly et plusieurs de leurs comparses comparurent devant la justice en mars. Les poursuites furent couronnées de succès.

Il arrivait rarement, à la fin du xixe siècle, qu’un policier ou un détective devienne célèbre à cause de son flair. John Wilson Murray bâtit sa réputation en se vantant lui-même de ses exploits. McKinnon, lui, se fit remarquer par son physique imposant et sa combativité. Certes, dans la suite de sa carrière, il insista sur sa force de caractère et sur la retenue avec laquelle il exerçait ses fonctions de policier, mais les récits de ses hauts faits faisaient immanquablement de bons sujets d’articles et mettaient en valeur d’autres qualités. Il faut dire que McKinnon mesurait six pieds trois pouces, pesait 225 livres et était réputé pour ses prouesses dans les épreuves de force traditionnelles des Highlands. Les jeux calédoniens avaient gagné en popularité dans toute l’Amérique du Nord et en Écosse [V. Roderick (R.) McLennan]. McKinnon eut la bonne fortune de briller au moment où cette vogue était à son apogée, c’est-à-dire dans les années 1870. Ainsi, il se classa « meilleur athlète toutes catégories » en 1875, aux jeux internationaux de Toronto, après quoi il fit une tournée aux États-Unis. En août, le World de New York signala les exploits accomplis aux jeux de Brooklyn par « le célèbre athlète de Hamilton » dans des épreuves comme le lancer du marteau, du poids de 56 livres et de la pierre ainsi que dans une épreuve consistant à lancer le tronc d’un jeune mélèze. En août 1876, il remporta le championnat nord-américain à Charlottetown ; il le gagna à nouveau à Philadelphie l’année suivante, puis abandonna la compétition.

Le 5 février 1877, McKinnon fut choisi, de préférence à 12 autres candidats, chef de la police de Belleville. Cette municipalité ontarienne comptait 11 192 habitants et une force policière de sept membres. Un citoyen de Belleville vanterait McKinnon en disant qu’il était d’une « force herculéenne », avait « du cran à revendre » et ne craignait pas les bandes de voyous. Le 8 octobre 1886, McKinnon fut nommé chef de la police de Hamilton, ville industrielle de 41 712 habitants, la seconde en importance en Ontario. Le 1er novembre, moyennant un salaire de 1 600 $, il prit la direction du service, qui comptait 44 hommes et était placé sous la supervision d’un conseil de commissaires de police. La ville était divisée en trois sections, chacune ayant son poste, son sergent, son sergent de patrouille et ses agents. Les policiers devaient être sujets britanniques, bien bâtis, « sains de corps et d’esprit » et de « bonne moralité ». Le nouveau chef de police de Hamilton semblait répondre en tous points à ces exigences. Le service comprenait en outre quatre détectives (dont deux suppléants) et deux chauffeurs. Le chef s’occupait du recrutement, de la discipline, de l’application de la loi, de la tenue des dossiers, des rapports au conseil et de la surveillance directe des incendies « graves » et de « toutes les bagarres ».

À l’aide d’un budget d’environ 42 000 $, le service dirigé par McKinnon contenait la turbulence de la vie urbaine. De 1886 à 1892, le nombre d’arrestations oscilla entre 1 920 et 3 048. Dans la très grande majorité des cas, il s’agissait de simples délits : par exemple, 57 % des 2 799 arrestations auxquelles la police de Hamilton procéda en 1888 avaient pour motifs des infractions liées à l’ivresse, au désordre, au vagabondage, à des voies de fait et à la tenue de propos obscènes. Les crimes étaient rares (seulement 1,46 % des arrestations en 1888). Le travail des policiers était donc en grande partie routinier, d’autant plus que le service devait aussi s’occuper des enfants fugueurs et des animaux errants ainsi que loger et nourrir les pensionnaires du dépôt de police.

Pendant les années où McKinnon fut en fonction, la ville de Hamilton grossit et le nombre d’habitants augmenta de près de 10 000. Le personnel de la police passa à plus d’une cinquantaine de membres ; le budget et les salaires augmentèrent. On construisit un nouveau poste central (auparavant, le chef avait un bureau chez lui), on nomma un agent de surveillance, on installa des signaux d’alarme dans les rues, on créa une patrouille à cheval et l’on constitua une caisse de prévoyance pour les policiers. En outre, McKinnon recréa le poste de sergent-major (ou sous-chef) et engagea les deux détectives suppléants sur une base permanente. Il veilla à ce qu’une dame nommée Martha Lewis s’occupe au besoin des prisonnières. En 1894, sous la pression des organisations féminines de la ville, le conseil la nomma gardienne à plein temps, même si l’Union chrétienne de tempérance des femmes s’opposait à la chose parce que Mme Lewis était une « femme de couleur ». Une autre restructuration du service, la même année, libéra un plus grand nombre d’agents pour la surveillance des rues. Malgré toutes ces améliorations, McKinnon n’échappait pas à la critique. En 1891, un détective du gouvernement avait reproché à son service d’être inefficace dans les enquêtes. L’année suivante, le Trades and Labor Council de Hamilton condamna McKinnon parce qu’il avait accordé, au cours d’une grève, une « protection policière spéciale » à des manufacturiers de poêles.

Les témoignages présentés par McKinnon devant plusieurs commissions au cours des années 1890 montrent qu’il procédait à des changements par pur sens pratique. Les explications doctrinaires du crime lui inspiraient de l’aversion, tout comme les panacées par lesquelles les réformateurs prétendaient y remédier. C’était un chef populaire et un bon administrateur, mais les choses finirent par aller mal pour lui. Le 8 janvier 1895, le Hamilton Spectator révéla qu’il était absent depuis cinq jours sans raison. Des journaux torontois alléguèrent (ce que l’on répéta à Hamilton) qu’il se trouvait dans un hôtel de Toronto avec deux femmes et que tous trois s’y étaient inscrits sous des noms d’emprunt. La situation s’envenima lorsque T. H. Gould, imprésario de Hamilton, fit savoir que ces deux femmes étaient son épouse et sa sœur. McKinnon refit surface et repoussa toute allégation d’immoralité : « le vin, et non les femmes », déclara-t-il, était la cause de sa « situation pénible et profondément humiliante ». Néanmoins, le conseil des commissaires et la population, choquée, le jugèrent coupable d’inconduite et d’adultère. Le 18, les commissaires exigèrent sa démission. Une semaine plus tard, il avait quitté son poste, et le conseil accorda à sa femme trois mois de salaire.

Malgré sa disgrâce, McKinnon demeura à Hamilton durant plusieurs années, à titre de détective privé. En 1901, il était à Dawson City ; nommé officier en chef, probablement par les autorités du territoire du Yukon, il avait le mandat de prévenir la distillation et l’importation illégales d’alcool. Libéral depuis toujours, il fut en 1902 président de la campagne de James Hamilton Ross* et suscita la controverse pour s’être jeté à bras raccourcis sur son vice-président, qui n’avait pas payé une facture de whisky et de cigares. Plusieurs mois plus tard, il mourut d’une crise cardiaque. Sa femme et sa fille l’avaient rejoint seulement peu de temps auparavant.

Franc-maçon, libéral, presbytérien et membre de plusieurs sociétés écossaises, Hugh McKinnon (ou « le gros », comme on l’appelait souvent) symbolisait le brave géant des Highlands, personnage de légende que Charles William Gordon*, dit Ralph Connor, a immortalisé dans son roman, le plus fameux, paru en 1901, The man from Glengarry. En tant qu’athlète, McKinnon personnifiait un aspect des efforts déployés par les Écossais à la fin du xixe siècle pour définir leurs traditions. En tant que policier, il incarnait la virilité dans une profession qui valorisait cet attribut.

Robert L. Fraser

AN, RG 31, C1, 1871, Hamilton, St Andrew’s Ward, div. 1 : 80 ; 1881, Belleville, div. 2 : 30 (mfm aux AO).— AO, F 1535, MS 282 : 669, 672, 675, 677, 680, 686.— HPL, Hamilton city records, RG 10, Ser.B, 1889, Manual of the Police Department of the City of Hamilton (Hamilton, Ontario, 1889) ; Ser. S : 234s., 243, 247, 257s., 260, 331, 355, 375–382.— Daily Morning Yukon Sun (Dawson, Yukon), 13 déc. 1903.— Daily Times (Hamilton), 17 déc. 1891, 8 févr. 1892, 14, 18 déc. 1903.— Hamilton Spectator, 21 août 1875, 10 févr. 1880, 2 nov. 1886, 1er mars, 26 sept. 1887, 19 janv. 1889, « carnival edition » août 1889, 10 mai 1894, 31 août, 14 déc. 1903, 30 juin 1962.— Annuaires, Hamilton, 1862–1863 ; Wentworth County, 1865–1866.— Canada, Parl., Doc. de la session, 1894, no 21, vol 4, partie : 113–121, 162s.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1.— [H.] O. Miller, The Donnellys must die (Toronto, 1962), 95–102.— Ontario, Commission appointed to enquire into the prison and reformatory system of Ontario, Report (Toronto, 1891), 277–281.— Prominent men of Canada (Adam).— J. C. Weaver, Hamilton : an illustrated history (Toronto, 1982), 196–199.

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Robert L. Fraser, « McKINNON, HUGH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mckinnon_hugh_13F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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