MALHERBE, FRANÇOIS, instituteur, marchand et fonctionnaire, né le 21 mars 1768 à Québec, fils (le deuxième à avoir été baptisé sous le prénom de François) de François Malherbe, dit Champagne, navigateur, et de Marie-Anne Margane de Lavaltrie ; décédé le 17 mai 1832 à Québec.

De 1781 à 1787, François Malherbe fait ses études au petit séminaire de Québec. La tradition veut qu’il ait été récollet un certain temps, mais il n’existe aucune preuve en ce sens. De plus, certains écrits laissent croire qu’il s’était marié le 27 octobre 1793 avec Marie-Louise Thomas, dit Bigaouet ; en réalité, il s’agit d’un homonyme, ainsi qu’en témoignent le nom des parents et un acte de mariage de 1801.

Les raisons qui poussent Malherbe à se rendre sur la Côte-du-Sud demeurent inconnues. Néanmoins, on le retrouve en 1799 maître d’école à Saint-André, près de Kamouraska, d’où il demande un permis de vente de boissons alcoolisées. Bien qu’on ne connaisse pas la raison officielle, il semble que le veto du curé de la paroisse, que les autorités britanniques avaient l’habitude de consulter en de tels cas, ait fait avorter le projet.

Le 13 octobre 1801, Malherbe épouse Marie Chennequy, fille du navigateur Martin Chenneque et sœur du marchand Martin Chinic*. Dans le contrat de mariage passé le 12 devant le notaire Michel Berthelot, de Québec, Malherbe déclare être résident de Saint-Jean-Port-Joli où il exerce le métier de marchand. Mais à la fin de cette année-là ou en 1802, il déménage de nouveau. Il élit domicile à Rivière-Ouelle où il devient le premier titulaire d’une école ouverte en vertu de la loi créant l’Institution royale pour l’avancement des sciences [V. Joseph Langley Mills]. Même si, en général, le clergé catholique voit une menace dans ce nouveau système scolaire, le curé de l’endroit, Bernard-Claude Panet, semble bien accepter Malherbe, allant, d’après la Gazette de Québec du 5 août 1802, jusqu’à porter « son zèle, même son épargne, à entretenir un maître d’école ». Selon la même source, les écoliers de Rivière-Ouelle, « Présidés de leurs digne Pasteur, et assisté du Maitre de leur Ecole », réservent un accueil chaleureux au lieutenant-gouverneur du Bas-Canada sir Robert Shore Milnes* venu faire la première revue générale de la milice. À cette occasion, Malherbe et neuf de ses élèves présentent au visiteur de marque une adresse qualifiée plus tard de dithyrambique par Louis-Philippe Audet et Pierre-Georges Roy*. Le geste, auquel s’associent les autres écoliers, attire l’attention et la Gazette de Québec en publie même le texte intégral. L’année suivante, Malherbe cède sa place à John Johnston.

C’est à Pointe-Lévy (Lauzon et Lévis), en mars 1805, qu’on retrace ensuite Malherbe. Il fait la classe à 15 enfants. Vu le manque d’instituteurs à cet endroit, les habitants sont si heureux de le recevoir qu’ils proposent de l’installer dans la partie du presbytère réservée au public et appelée la « salle des habitants ». De plus, il serait chauffé, et l’augmentation du nombre de ses élèves pourrait lui fournir un meilleur revenu. Le curé de la paroisse, Michel Masse, ne l’entend cependant pas de cette oreille et n’est guère prêt à accueillir « un certain sieur Malherbe et sa famille ayant trois enfants tous remuants et tous braillants ». L’instituteur n’a donc d’autre choix que de se tourner de nouveau vers l’Institution royale.

Au printemps de 1805, Malherbe commence à enseigner à l’école royale et, le 1er juillet, il est reconnu officiellement par le gouvernement. Son salaire annuel est alors de £60. Les Journaux de la chambre d’Assemblée révèlent qu’il conserve son poste jusqu’en 1820, date à laquelle il est remercié de ses services par le bureau de l’Institution royale pour des raisons inconnues. Durant sa dernière année, il enseigne la lecture, l’écriture et l’arithmétique en français à 31 élèves dont 14 sont instruits gratuitement. Il reçoit alors un traitement annuel de £54. Vers la fin de sa vie, en 1829, Malherbe effectue un très bref retour à l’enseignement à Pointe-Lévy. Toutefois, au moment de sa mort, en 1832, à Québec, il est huissier. Son corps est inhumé dans le cimetière des Picotés le 21 mai.

Vie mouvementée et énigmatique que celle de François Malherbe, ponctuée de plusieurs déplacements et de quelques difficultés avec certains membres du clergé, qui ne sont certes pas étrangères au fait qu’il se soit tourné vers l’Institution royale. Les péripéties de sa carrière ouvrent toutefois une fenêtre sur ce que pouvait être la vie d’un instituteur laïque au début du xixe siècle au Bas-Canada, à l’époque où l’Église catholique s’apprête à affermir son emprise sur le monde de l’éducation qu’elle craint de laisser entre les mains de l’État laïque et protestant.

Nelson Michaud

ANQ-Q, CE1-1, 10 janv. 1765, 21 mars 1768, 13 oct. 1801, 21 mai 1832 ; CN1-26, 12 oct. 1801.— ASQ, Fichier des anciens.— B.-C., chambre d’Assemblée, Journaux, 1807 : 262 ; 1820–1821, app. K.— La Gazette de Québec, 5 août 1802.— Almanach de Québec, 1815 : 124 ; 1820 : 133.— Ivanhoë Caron, « les Maîtres d’écoles de l’Institution royale de 1808 à 1834 », BRH, 47 (1941) : 28.— L.-P. Audet, le Système scolaire, 3 : 136, 140, 149, 157 ; 4 : 120, 127, 192–195, 217.— P.-H. Hudon, Rivière-Ouelle de la Bouteillerie ; 3 siècles de vie (Ottawa, 1972), 191.— J.-E. Roy, Hist. de Lauzon, 3 : 350–354 ; 4 : 123.— P.-G. Roy, Toutes Petites Choses du Régime anglais, 1 : 124, 259–263.— F.-J. Audet, « les Maîtres d’écoles de l’Institution royale », BRH, 28 (1922) : 284.— Desbras [  ], « Francis Malherbe », BRH, 29 (1923) : 57–58.— « Le Maître d’école François Malherbe », BRH, 44 (1938) : 93–94.— « Le Maître d’école Malherbe », BRH, 51 (1945) : 206–207.— L.-J. Pelletier, « Quelques maîtres d’école de la rive sud », BRH, 49 (1943) : 236.— « Un triomphe de François Malherbe », BRH, 51 : 207–208.

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Nelson Michaud, « MALHERBE, FRANÇOIS (1768-1832) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/malherbe_francois_1768_1832_6F.html.

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Auteur de l'article:    Nelson Michaud
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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