Titre original :  Adhémar Mailhiot 1935 à 1938

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MAILHIOT, ADHÉMAR (baptisé Joseph-Adhémar Mailhotte), ingénieur civil, professeur, auteur et administrateur scolaire, né le 11 mars 1884 à Sainte-Julienne-de-Rawdon (Sainte-Julienne, Québec), fils de Félix Mailhotte (Mailhiotte), cultivateur, et de Carmela (Marie) Éthier ; le 14 octobre 1914, il épousa à Lacorne (Sainte-Sophie, Québec) Virginie Carey, et ils eurent six enfants ; décédé le 21 avril 1938 à Montréal.

Après des études primaires à l’école Sainte-Brigide, à Montréal, et des études classiques au petit séminaire de Montréal (1899–1905) et au collège de L’Assomption (1905–1906), Adhémar Mailhiot entre à l’École polytechnique de Montréal en 1906. En 1910, il obtient les diplômes d’ingénieur civil, d’ingénieur chimiste et d’ingénieur des mines avec grande distinction. Immédiatement embauché comme professeur adjoint au département des mines de son alma mater – qui vient de mettre en place une politique de perfectionnement de ses meilleurs diplômés –, il entreprend une formation en minéralogie, en géologie et en pétrographie à Paris, où il fréquente l’École nationale supérieure des mines de Paris, la Sorbonne et le Muséum national d’histoire naturelle. En 1912, il revient à Montréal enseigner la minéralogie et la géologie à l’École polytechnique. Deux années plus tard, quand le professeur et directeur du laboratoire provincial d’analyse des minerais, Émile Dulieux, part rejoindre l’armée française, il prend en charge le cours d’exploitation des mines, puis, en 1918, celui de métallurgie. Il caresse toujours l’espoir de retourner à Paris pour terminer ses études supérieures. Il veut y rédiger une thèse sur les formations géologiques de la province de Québec, mais la Grande Guerre le contraint à demeurer au pays. Il succède à Dulieux à la chaire de géologie de l’École polytechnique et au laboratoire provincial d’analyse des minerais en 1919. En 1920, dès la création de la faculté des sciences à l’université de Montréal, il y obtient le poste de professeur titulaire de minéralogie et de géologie. En 1935, il accède à la direction de l’École polytechnique en succédant à Augustin Frigon*, qui devient le principal de l’établissement. Cette même année, l’université de Montréal lui confère le grade de docteur ès sciences appliquées honoris causa.

En plus de sa carrière axée autour de l’École polytechnique, où il enseigne et qu’il administre, Mailhiot joue un rôle de premier plan dans le développement de la profession d’ingénieur chez les Canadiens français. Au moment où il entreprenait ses études, les postes dans l’industrie étaient principalement détenus par des ingénieurs anglophones, issus des facultés d’ingénierie de la McGill University de Montréal, de la University of Toronto ou du Queen’s College de Kingston. L’ingénieur canadien-français occupait alors une place incertaine dans une communauté dont l’élite était définie comme ayant fréquenté les collèges classiques et appartenant aux professions libérales en droit, en notariat et en médecine. Les ingénieurs, au Canada comme ailleurs dans le monde, prennent ces professions comme modèles et se dotent d’outils pour accroître leur statut et leur rôle dans la société. Regroupés d’abord dans l’Association des anciens élèves de l’École polytechnique de Montréal, les ingénieurs canadiens-français voient à la sanction d’une loi régissant le titre d’ingénieur et l’exercice de cette fonction (1918). Puis, pour veiller à son application, ils forment la Corporation des ingénieurs professionnels de Québec le 14 février 1920. Mailhiot occupe les postes de secrétaire-trésorier (entre 1916 et 1928), de vice-président (1930), puis de président (1931) de l’Association des anciens élèves de l’École polytechnique de Montréal, qu’il a aussi aidé à fonder. Il est également membre du comité de rédaction et secrétaire de la Revue trimestrielle canadienne, que publie l’association. Par ces fonctions, il travaille activement au placement des diplômés de l’École polytechnique. Il est ainsi appelé à coordonner le travail des agents qui participent à l’établissement d’une identité forte parmi les membres de ce groupe social dont l’importance va de pair avec le développement économique et industriel de la province de Québec. En effet, les ingénieurs canadiens-français sont alors actifs dans le domaine de l’enseignement et sont plus nombreux à occuper des emplois dans l’administration publique ou à travailler comme ingénieurs-conseils dans l’entreprise privée, augmentant du coup la visibilité et le prestige de la profession.

Il n’y a pas que la formation des ingénieurs et l’avancement de cette fonction qui soient au cœur des préoccupations de Mailhiot. Ce dernier agit comme ingénieur et géologue-conseil pour des compagnies minières américaines et canadiennes, et comme expert auprès des tribunaux dans diverses causes en litige. Il mène de plus des travaux scientifiques pour le gouvernement et pour l’industrie dans le secteur de l’exploitation minière. Une fois embauché par l’École polytechnique, il s’est rendu sur le territoire gaspésien pour procéder à des explorations géologiques pour le Bureau des mines de la province de Québec en 1910. Il réalise une étude sur la valeur des gisements de zinc et de plomb en Gaspésie en 1917, puis une série d’études géologiques pour les divers ordres de gouvernement et les entreprises privées dans les Cantons-de-l’Est, la Gaspésie et l’Abitibi. Ces explorations lui permettent de rédiger plusieurs rapports géologiques, des brochures scientifiques et des articles, qui paraissent dans les publications des nombreuses sociétés techniques dont il est membre. À titre de directeur du laboratoire provincial d’analyse des minerais, Mailhiot effectue des déterminations minéralogiques pour les prospecteurs miniers à une époque clé du démarrage de l’exploitation aurifère dans le nord-ouest de la province. Parallèlement, il publie des guides à l’intention des prospecteurs. Les recherches de Mailhiot se situent donc au cœur d’une activité entrepreneuriale en milieu universitaire où, loin de se limiter à la recherche et à l’enseignement, son travail est contractuel et pratique. Il faut voir dans ces activités une redéfinition du rôle du professeur universitaire à un moment où ni la recherche, ni la profession d’ingénieur, ni la participation de l’industrie au fonctionnement de l’université ne sont valorisées.

L’essor de l’activité minière a certes contribué à ces développements dans la carrière d’Adhémar Mailhiot. Au cours des années 1930, toutefois, le gouvernement provincial se rend compte de l’importance de ce secteur et décide de prendre en main le soutien technique, plutôt que de le confier à l’École polytechnique. Aussi, le Service des mines établit-il un réseau de laboratoires régionaux qu’il centralise dans un complexe à Québec en 1937. De plus, le ministre des Mines du gouvernement de Maurice Le Noblet Duplessis*, Onésime Gagnon*, envisage la création d’un enseignement supérieur en génie minier. Deux diplômés de l’École polytechnique, Adrien Pouliot* et Mailhiot, et leurs établissements respectifs, l’école supérieure de chimie de l’université Laval et l’École polytechnique de Montréal, se disputent ce projet de façon acrimonieuse. En janvier 1938, le gouvernement décide d’établir l’école des mines à l’université Laval. Mailhiot, dont la santé est chancelante depuis qu’une attaque d’angine l’a terrassé l’année précédente, succombe à une crise cardiaque le 21 avril, à son bureau de l’École polytechnique.

Stéphane Castonguay

Les écrits d’Adhémar Mailhiot touchent le métier d’ingénieur, l’enseignement et la recherche en géologie minière. Ses articles ont paru dans Instit. canadien des mines (devenu le Canadian Instit. of Mining and Metallurgy en 1920), Trans. (Montréal), la Rev. trimestrielle canadienne (Montréal), le Canadian Mining Journal (Gardenvale [Sainte-Anne-de-Bellevue, Québec]) et l’Engineering Journal (Montréal). Nous retenons notamment son « Rapport géologique sur une partie de la région de Gaspé : bassins des rivières York et Ste-Anne », paru dans Québec, Ministère de la Colonisation, des Mines et des Pêcheries, Rapport des opérations minières dans la province de Québec durant l’année 1910 (1911), 91–99, ainsi que « The new zinc and lead fields of Gaspé peninsula », Instit. canadien des mines, Trans., 22 (1919) : 368–377, et Descriptive report of the gold deposits of Lake Demontigny, Abitibi (Québec, 1922). Que ce soit pour promouvoir la formation d’ingénieur en général, ou en génie minier à l’École polytechnique de Montréal, Mailhiot est un ardent propagandiste de sa profession, comme en témoignent les titres suivants : les Succès des anciens de Polytechnique (Montréal, 1931) ; « le Génie civil », dans les Carrières pour guider le choix des jeunes gens après leurs études classiques : III (Montréal, 1933), 9–16 ; et « la Préparation de l’ingénieur des mines à l’École polytechnique », l’Action universitaire (Montréal), 1 (1934–1935), no 8 : 6–7. Nous soulignons enfin son travail de vulgarisation pour le grand public ou pour les prospecteurs intéressés : Dix conférences sur la formation des gisements minéraux (Montréal, 1935) et W. L. Goodwin, Un manuel de prospection : préparé pour instruire et guider tous les prospecteurs, avec attention spéciale aux besoins de ceux qui font de la prospection au Canada, Adhémar Mailhiot, trad. (2e éd., Gardenvale, 1932).

Arch. de l’École polytechnique de Montréal, Dossier M. Dulieux, Émile ; Dossier M. Mailhiot, Adhémar.— BAnQ-CAM, CE605-S29, 12 mars 1884.— FD, Sainte-Sophie, comté de Terrebonne, Québec, 14 oct. 1914.— Le Devoir, 22, 25 avril 1938.— La Presse, 19 juill. 1919, 10 janv. 1920.— J.-F. Auger, « la Recherche utilitaire dans les facultés de génie canadiennes : au service de l’industrie et du gouvernement, 1870–1950 » (thèse de ph.d., univ. du Québec à Montréal, 2004).— Robert Gagnon et A. J. Ross, Histoire de l’École polytechnique, 1873–1990 : la montée des ingénieurs francophones (Montréal, 1991).— Jean Hamelin, Histoire de l’université Laval : les péripéties d’une idée (Sainte-Foy [Québec], 1995).— Ol[i]vier Maurault, « Nécrologie : Adhémar Mailhiot », Rev. trimestrielle canadienne, 24 (1938) : 113–115.— Marc Vallières, Des mines et des hommes : histoire de l’industrie minérale québécoise, des origines au début des années 1980 (Québec, 1989).

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Stéphane Castonguay, « MAILHIOT, ADHÉMAR (baptisé Joseph-Adhémar Mailhotte) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mailhiot_adhemar_16F.html.

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Auteur de l'article:    Stéphane Castonguay
Titre de l'article:    MAILHIOT, ADHÉMAR (baptisé Joseph-Adhémar Mailhotte)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2019
Année de la révision:    2019
Date de consultation:    28 novembre 2024