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Mahoi (Mahoy, Magoi), Maria (Douglas ; Fisher), maîtresse de maison et sage-femme, née vers 1855 dans le sud de l’île de Vancouver ; à partir de 1870 environ, elle vécut en union de fait avec Abel Douglas (Douglass) (décédé le 25 novembre 1908), et ils eurent quatre filles et trois fils, puis, à partir du milieu des années 1880, elle vécut en union de fait avec George Fisher (décédé le 28 mars 1948), qu’elle épousa le 9 janvier 1900, et ils eurent quatre filles et deux fils ; décédée le 1er juillet 1936 sur l’île Russell, Colombie-Britannique.
Maria Mahoi est un exemple type de ces gens souvent oubliés par l’histoire parce qu’il existe peu de documentation sur leur vie et parce qu’ils n’ont réalisé, selon les critères habituels, aucun exploit digne de ce nom. De son vivant, personne ne l’a considérée comme assez importante pour recueillir ses propos ou écrire à son sujet. Autochtone et analphabète, elle a eu une existence difficile. Les grandes étapes de sa vie peuvent être retrouvées dans des sources tout aussi impersonnelles que des recensements manuscrits et des statistiques d’état civil, mais le souvenir de ses contributions à la société canadienne est parvenu jusqu’à nous grâce à ses descendants qui l’ont perpétué.
Au cours du début et du milieu du xixe siècle, plusieurs centaines d’Hawaïens, dont le père de Maria, furent recrutés pour travailler dans l’industrie de la traite des fourrures du Nord-Ouest par la Pacific Fur Company, la North West Company et, plus tard, la Hudson’s Bay Company. Les Hawaïens n’utilisaient à l’époque qu’un seul nom ; un homme appelé Mahoi était employé au fort Victoria (Victoria) à peu près au moment où une autochtone de la région donna naissance à Maria. Tout au long de sa vie, cette dernière s’identifierait plus aux Hawaïens qu’aux Amérindiens. Elle était tellement fière de son patronyme que ses contemporains l’utilisaient pour parler d’elle, en dépit des deux hommes qu’elle eut dans sa vie.
Des photographies de Maria Mahoi montrent une jeune fille séduisante aux yeux et aux cheveux foncés, puis une femme d’âge mûr d’apparence soignée et, enfin, une vieille dame toujours pleine de vitalité. Pendant l’année de ses 15 ans, elle emménagea avec Abel Douglas, un capitaine au long cours originaire du Maine. La première photo date de cette époque. Le couple vécut à Victoria, là où des hommes d’affaires, espérant développer une industrie de pêche à la baleine, avaient attiré Douglas, qui avait quitté la Californie en 1868. Cependant, l’aventure ne fut que de courte durée, à cause de la baisse du prix de l’huile de baleine qui se voyait remplacée par le pétrole. Douglas resta à Victoria, sans doute pour Maria. Il pêchait, faisait du commerce et irait chasser le phoque. George, né en 1871, fut le premier de leurs sept enfants.
Vers 1875, le couple s’installa au sud de l’île Salt Spring, une des îles du Golfe dans le détroit de Géorgie. Cette décision fut probablement celle de Maria Mahoi, car plus d’une dizaine d’Hawaïens, dont William Naukana*, vivaient sur cette île ou sur de petites îles voisines, avec leurs femmes autochtones et leurs familles. La relation du couple se dégrada au milieu des années 1880, après quoi Maria Mahoi se mit à vivre avec George Fisher, un métis qui avait reçu une bonne éducation et qui exploitait une terre dans les environs. Ils se marièrent officiellement le 9 janvier 1900, peu après que Fisher eut été victime d’un accident qui avait mis sa vie en danger. Fervent catholique, il avait peut-être voulu légitimer ses enfants et s’assurer qu’il ne mourrait pas dans le péché.
Deux ans plus tard, Mme Mahoi fournit à la cour des déclarations sous serment affirmant que la propriété de William Haumea, un voisin hawaïen décédé depuis peu, lui revenait de droit puisqu’elle était sa fille, Mary Ann Haumea, mentionnée dans le testament du défunt. Il a été impossible de vérifier la véracité de ces revendications, mais le juge fut convaincu et lui donna l’autorisation de prendre possession de l’île Russell qui se trouvait non loin de là. Maria Mahoi et Fisher transformèrent l’île de 40 acres en une terre qui permettrait à leur famille d’être presque complètement autosuffisante. Les membres de la famille entretenaient le verger et le jardin. De plus, ils chassaient, pêchaient et vendaient des palourdes, des baies, du poisson et des algues.
Les enfants de Maria Mahoi étaient sa priorité. Elle était déterminée à subvenir à leurs besoins de son mieux, ce qui la conduisit à envoyer deux des filles qu’elle eut avec Abel Douglas dans un pensionnat catholique pour filles métisses, tenu par les Sœurs de Sainte-Anne à Duncan, sur l’île de Vancouver. Elle resta sans nouvelles de ces enfants pendant des années et ne revit jamais l’une d’elles. Elle soigna ses autres enfants quand ils étaient malades et veilla sur eux tout au long de leur vie d’adulte. Tous ses enfants, sauf un, vivraient jusqu’à l’âge adulte, mais cinq mourraient avant elle.
Les préjugés raciaux étaient très répandus à l’endroit des gens d’ascendance mixte. Comme il y avait très peu de femmes non autochtones en Colombie-Britannique, les filles de Maria Mahoi pouvaient cependant, si elles le voulaient, trouver des maris blancs et se fondre dans la société dominante. Ses fils n’avaient pas un tel choix : célibataires ou mariés avec des femmes d’ascendance mixte comme eux, ils décidèrent de s’installer près de leur mère.
Ce furent des femmes ordinaires comme Maria Mahoi qui bâtirent la communauté. Sage-femme d’une grande habileté, elle acceptait ce que les familles pouvaient lui donner en échange de ses services. Selon des souvenirs de membres de sa famille, « tout le monde l’envoyait chercher à cette époque-là ». Elle « laissait simplement tout tomber et s’en allait, partout dans Salt Spring ». Parmi les nombreux enfants qu’elle aida à mettre au monde se trouvaient ceux de familles importantes, ainsi que les petits-enfants de Naukana. Dans son foyer régnait la convivialité. Les gens de passage, des voisins venant des îles du Golfe ou des autochtones voyageant le long de la côte, tous recevaient un accueil chaleureux.
L’héritage de Maria Mahoi est toujours vivant au xxie siècle. Ses descendants sont présents dans toutes les couches de la population britanno-colombienne, chez les pêcheurs, les bûcherons, les hommes d’affaires et les hommes politiques de la province tels que Mel Couvelier. L’île Russell ressemble à ce qu’elle était au temps de sa propriétaire, mais fait maintenant partie de la Réserve de parc national du Canada des Îles-Gulf, créée en 2003.
Cette biographie s’appuie sur notre ouvrage intitulé Maria Mahoi of the islands (Vancouver, 2004), qui contient une liste complète des sources consultées, y compris des conversations avec des descendants de Maria Mahoi, des registres paroissiaux et scolaires, des recensements, des statistiques démographiques et des documents relatifs aux terres. On peut trouver de l’information supplémentaire dans : Tom Koppel, Kanaka : the untold story of Hawaiian pioneers in British Columbia and the Pacific northwest (Vancouver, 1995).
Jean Barman, « MAHOI (Mahoy, Magoi), MARIA (Douglas ; Fisher) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mahoi_maria_16F.html.
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Auteur de l'article: | Jean Barman |
Titre de l'article: | MAHOI (Mahoy, Magoi), MARIA (Douglas ; Fisher) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2015 |
Année de la révision: | 2015 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |