Mackenzie, Arthur Stanley, professeur et recteur, né le 20 septembre 1865 à Pictou, Nouvelle-Écosse, fils de George Augustus Mackenzie, avocat, et de Catherine Denoon Fogo ; le 29 mai 1895, il épousa à Indianapolis, Indiana, Mary Lewis Taylor (décédée en 1896), et ils eurent une fille ; décédé le 2 octobre 1938 à Halifax.

Arthur Stanley Mackenzie naquit au sein d’une famille anglicane dans le milieu principalement presbytérien du comté de Pictou. Il reçut une éducation qui fut un mélange, dirait-il, de « religion, de politique et de porridge ». Formé à la Pictou Academy, ainsi que dans des écoles secondaires de New Glasgow et de Halifax, il entra en 1881 à la Dalhousie University ‒ à l’ancien établissement, place Grand Parade dans le centre-ville de Halifax ‒ avec une bourse d’études. Il suivit le rigoureux programme de l’université qui comprenait du latin avec John Johnson, des mathématiques avec Charles Macdonald*, de la philosophie avec Jacob Gould Schurman, de la chimie avec George Lawson* et de la physique avec James Gordon MacGregor*. Les normes d’enseignement étaient élevées et les examens, impitoyables. Le jeune Mackenzie était un gaillard de six pieds qui aimait le sport et qui fit partie de la première équipe de rugby de l’université ; celle-ci joua contre l’Acadia College le 15 novembre 1884 et perdit la partie par un point. À titre de secrétaire du nouveau Dalhousie Athletic Club, Mackenzie écrivit une critique empreinte d’ironie sur la victoire de l’Acadia College : « Vous avez [joué] noblement[,] Acadiens […] Et, malgré tout, il aurait été à notre avantage que vous ayez lu les règles un peu plus attentivement, et que vous les ayez suivies un peu plus rigoureusement, mais nous ne nous plaignons cependant pas. »

Mackenzie obtint son diplôme six mois plus tard, et se classa au premier rang en mathématiques et en physique, ce qui lui valut la médaille d’or Sir William Young. Après avoir rempli pendant deux ans les fonctions de sous-maître au Yarmouth Seminary, il retourna à la Dalhousie University à titre de directeur d’études en mathématiques et en physique de 1887 à 1889. Il alla ensuite à la Johns Hopkins University de Baltimore, au Maryland, pour y préparer un doctorat en philosophie qu’il recevrait en 1894. En 1891, il avait été nommé chargé de cours de physique au Bryn Mawr College, établissement d’enseignement quaker pour femmes situé près de Philadelphie. Il fut rapidement promu et serait, dès 1897, professeur titulaire. En 1895, il avait épousé Mary Lewis Taylor, qu’il avait rencontrée à Bryn Mawr. Leur bref mariage se termina tristement, car Mme Mackenzie mourut en 1896 en donnant naissance à leur fille. Étrangement, elle avait prédit à son mari : « Tu ne te remarieras pas. » Il ne le ferait jamais. Mackenzie enterra sa femme à Indianapolis, emmena la petite Marjorie Taylor à Bryn Mawr et l’éleva du mieux qu’il put. Il essaya de lui offrir une vie heureuse et elle vint à partager ses différentes activités, comme ses excursions de pêche, ses parties de curling et de golf.

En 1900, Mackenzie dirigea la publication du livre intitulé The Laws of Gravitation, puis passa un an au Cavendish Laboratory de la University of Cambridge, où il travailla sur la physique des particules. Il publia un article important sur les rayons alpha du radium (desquels il fut le premier à mesurer la masse et la vitesse) et du polonium en 1905, ce qui inspira ce couplet d’une chanson de Cambridge :

Les électromètres s’agitent avec frénésie
Quand près d’eux je suis étendu tranquillement,
Ils m’ont donc envoyé en bas avec Mackenzie
Qui veut mon dernier rayon alpha.

La même année, la Dalhousie University l’invita à devenir titulaire de la chaire de physique George Munro. Bien que pleinement conscient des faiblesses de l’établissement en matière d’installations et d’équipements scientifiques, Mackenzie était ravi de retourner en Nouvelle-Écosse. Il était un professeur doué et adorait enseigner. Néanmoins, il aimait la recherche encore plus et, lorsqu’en 1910 le Stevens Institute of Technology de Hoboken, au New Jersey, lui offrit un poste de recherche, il ne put y résister. Il y avait de la tristesse à Dalhousie et l’affection que lui portait l’université ressortit d’un poème amusant d’Archibald McKellar MacMechan, titulaire de la chaire d’anglais George Munro depuis 1889 :

Adieu à Mackenzie, adieu au prof,
Qui peut mélanger sa physique et sa pêche et son
golf
Avec une goutte du liquide qui améliore le résultat,
Et nous espérons qu’une fois de plus dans notre ville
il reviendra.

Mackenzie y retourna peu de temps après. Au début de 1911, le conseil d’administration de Dalhousie acheta le domaine Studley [V. Elizabeth Carey*], vaste terrain de 43 acres situé au-dessus du bras Northwest, au milieu des pins, des chênes rouges et des saules. Enfin, selon Mackenzie, « l’ordre de marche [de Dalhousie] longtemps remis à plus tard était arrivé ». Le conseil d’administration de l’établissement l’invita alors à succéder à John Forrest* au poste de recteur et lui offrit un salaire de 3 600 $ par an, qu’il accepta. Il demeurerait à Halifax le reste de sa vie.

Mackenzie entra en fonction le 1er juillet. Plongé immédiatement dans une grande variété de problèmes, il s’y attaqua personnellement, comme les recteurs de Dalhousie avaient toujours eu à le faire. Il débuta par l’administration de son bureau. À l’époque où Forrest était en poste, on disait que les documents administratifs de l’université étaient écrits sur les manchettes amidonnées des chemises du recteur. La Dalhousie University n’avait acquis sa première machine à écrire qu’en 1907. On engagea un secrétaire professionnel et un système de documentation commença à faire son apparition en 1913. Mackenzie entreprit également une importante campagne de financement, le Dalhousie Forward Movement, et se mit en route en mai 1912 pour rencontrer d’anciens élèves de l’université et solliciter des dons. En octobre, il avait recueilli 444 891 $, dont une bonne partie aiderait à financer la création du nouveau campus de Dalhousie.

Mackenzie aimait le vieux style georgien de bâtiments tels que la résidence du lieutenant-gouverneur et la Chambre d’assemblée, tout comme Frank Darling*, l’architecte de Toronto engagé pour superviser le projet de construction. Les premiers édifices, soit le Science Building et la Macdonald Memorial Library, furent terminés en 1915. Avec 622 inscriptions en 1919, soit après la guerre, la population de l’établissement avait doublé comparativement à l’année précédente et le campus était inondé d’étudiants et d’étudiantes. Le conseil d’administration approuva une décision de construire une résidence pour femmes. Dès que la terre eut dégelé au printemps, Mackenzie, avec le professeur de génie John Norison Finlayson et une barre à mine de six pieds, partit vérifier la profondeur du sol au meilleur endroit pour bâtir. Le problème, comme partout ailleurs dans la ville, était l’omniprésence de la roche ferrugineuse de Halifax ; celle-ci se trouvait loin de la surface, heureusement, car l’emplacement choisi, où croissaient de hauts pins blancs qui dominaient le bras Northwest, était charmant. L’un des administrateurs de Dalhousie, Richard Bedford Bennett*, laissa entendre qu’une dame, qui avait déjà vécu à Halifax, souhaitait peut-être financer le dortoir. En mars 1920, Mackenzie se rendit à Ottawa pour y rencontrer Jennie Grahl Hunter Shirreff*, veuve d’Ezra Butler Eddy*. Femme d’idées et de décisions, elle menait une vie d’une modestie excentrique à l’hôtel Russell House. Moins de huit semaines plus tard, elle offrit 300 000 $ pour la résidence qui s’appellerait Shirreff Hall [V. Eliza Ritchie].

Mackenzie ferait bientôt face au problème le plus difficile de sa carrière de recteur : la fédération universitaire. Cette question avait une histoire longue et tortueuse. Le premier établissement postsecondaire de la Nouvelle-Écosse était le King’s College, qui avait obtenu sa charte en 1802. Fondé à Windsor en tant que bastion de l’Église d’Angleterre, il fut délibérément construit à 40 milles de la dépravation de Halifax et du faste de sa garnison. Lord Dalhousie [Ramsay*] avait l’intention, en 1818, d’établir son collège non confessionnel au centre de Halifax et de le rendre, par conséquent, accessible à tous, tout comme son alma mater, la University of Edinburgh. On avait essayé trois fois de fusionner la Dalhousie University et le King’s College, et des mouvements avaient tenté d’unifier tous les collèges de la province dans les années 1840 et 1870. La Nouvelle-Écosse et son Assemblée législative étaient cependant divisées par des rivalités de confession entre les baptistes, les méthodistes, les presbytériens, les catholiques et les anglicans ; la plupart d’entre eux détestaient profondément l’idée d’unir les collèges pour n’en former qu’un, à Dalhousie, qui serait officiellement laïque.

La Carnegie Corporation of New York, qui avait reçu des collèges des Maritimes une surabondance de demandes pour soutenir de nobles causes de toutes sortes, envoya en 1921 son agent William Setchel Learned, accompagné de Kenneth Charles Morton Sills, recteur du Bowdoin College à Brunswick, dans le Maine, pour enquêter sur l’état de l’enseignement supérieur au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et à l’Île-du-Prince-Édouard. Leur rapport, écrit avec impartialité et détachement, fut produit rapidement. La Dalhousie University de Mackenzie obtint d’excellents résultats, même si ses sérieuses faiblesses en matière de bibliothèques et de laboratoires n’échappèrent pas à la critique. Learned et Sills recommandèrent que tous les établissements postsecondaires des Maritimes soient fédérés et que la nouvelle université soit établie sur le vaste nouveau campus de Dalhousie. La Carnegie Corporation of New York offrit 3 millions de dollars pour faciliter le processus ; on présumait que l’Acadia College, le Mount Allison College, la Dalhousie University, le St Francis Xavier College, le King’s College et la University of New Brunswick feraient partie du projet, et que de plus petits établissements, comme la St Dunstan’s University de l’Île-du-Prince-Édouard, pourraient fusionner avec des collèges confessionnels plus importants. Mackenzie joua inévitablement un rôle central dans les discussions, avec un objectif en tête : améliorer la formation universitaire en Nouvelle-Écosse et peut-être, par la même occasion, au Nouveau-Brunswick et à l’Île-du-Prince-Édouard. Sa conviction que la fédération « apporterait de l’aide de l’État » aux établissements postsecondaires de la Nouvelle-Écosse, qui ne recevaient à l’époque aucun financement du gouvernement, faisait partie intégrante de cet objectif. Une bonne partie de 1922 fut occupée par les travaux ardus et souvent monotones liés aux réunions, aux comités et aux compromis. Mackenzie se plaignit au recteur de la University of Toronto, sir Robert Alexander Falconer*, que les recteurs des autres collèges prétendraient accepter le principe de la fédération, mais quils voteraient contre ce qu’ils avaient approuvé auparavant lorsque viendrait le temps d’adopter une décision officielle. Il décrivit certains d’entre eux comme des « filous hypocrites et peu fiables » qui poussaient les représentants de Dalhousie « à l’extrême limite de [leur] patience ». Les autres collèges craignaient l’influence impériale de la Dalhousie University, avec ses écoles de médecine et de droit, et son caractère officiellement laïque, mais l’argent offert par la Carnegie Corporation of New York était tentant. Tout ce que Mackenzie avait d’impérial était sa stature physique, sa dignité et sa patience. En février 1923, l’Acadia College suivit la voie déjà empruntée par la University of New Brunswick et le St Francis Xavier College, et se retira des discussions, ce qui mit fin au projet. Seul le King’s College, à court d’argent après qu’un incendie eut détruit son bâtiment en 1920, s’installa à Halifax.

Ce n’était pas tous les recteurs qui étaient aimés de leur communauté universitaire, mais c’était le cas pour Mackenzie. Calme, doux et strict quant à son sens du devoir, il détestait les charlatans, les prétentieux et ceux qui se mettaient en valeur. Le conseil qu’il donnait aux nouveaux membres du personnel se résumait en un mot : « Travaillez ! » Les ordres sévères indiqués en latin dans la devise de la Dalhousie University, Ora et labora (Priez et Travaillez), devaient être pris à cœur. Mackenzie avait été éduqué pour suivre le vieux chemin abrupt et solitaire qui mène à la connaissance ; il y croyait, mais l’abordait avec une ruse et une prudence instinctives. Au sein du personnel de la Dalhousie University existait une démocratie qui émanait non seulement de son histoire et de sa constitution centrée sur les professeurs, mais aussi de son recteur. En 1927, MacMechan, qui était depuis longtemps son collègue et son adversaire au golf, ne voulait plus surveiller les examens ; après presque quatre décennies d’enseignement à Dalhousie, cette corvée de trois heures l’ennuyait. Mackenzie déclara qu’en réalité, il ne pouvait pas échapper à cette tâche, car tous les professeurs devaient l’accomplir. Dans sa lettre, il ajouta : « J’espère que le moment ne viendra jamais […] où je me sentirais [trop] supérieur pour m’occuper des petits détails et travaux misérables, insignifiants et laborieux qui se présentent à moi chaque jour. »

En décembre 1930, Mackenzie, alors âgé de 65 ans, annonça au conseil d’administration sa décision de prendre sa retraite. Il ne voulait pas attendre que son départ soit accueilli par des soupirs de soulagement. « Je crains, dit-il à ses collègues, que cela m’anéantisse. » Puis, avant de sortir de la pièce, il remit sa démission au secrétaire pour le 31 juillet suivant. Lorsqu’il partit, tous les membres se levèrent. Ils marchèrent ensuite cinq minutes jusqu’à la maison du recteur ‒ achetée pour la Dalhousie University en 1925 par Bennett, ancien élève de l’établissement ‒, où ils burent du scotch et discutèrent avec commisération de leur âge, du temps qui passe et du changement.

Arthur Stanley Mackenzie, qui se trouvait à l’hôpital pour subir une opération bénigne, mourut subitement d’une crise d’apoplexie le 2 octobre 1938. L’université tout entière assista à ses funérailles trois jours plus tard. Sa dépouille fut escortée jusqu’à la gare, de sorte que Mackenzie puisse rejoindre sa femme au cimetière d’Indianapolis. Des professeurs, des étudiants, ainsi que des recteurs d’universités et de collèges de partout au Canada prononcèrent des éloges funèbres. Le journal étudiant, la Dalhousie Gazette, lui consacra un numéro complet le 20 octobre. Walter Charles Murray*, le Néo-Écossais qui dirigeait la University of Saskatchewan, déclara que « Mackenzie était à l’origine de la transformation d’un petit collège en une université nationale avec des bâtiments d’une grande beauté [… Il avait] une présence, une attitude et des qualités de leader majestueuses. » Mackenzie travailla à élever Dalhousie et ses étudiants vers des normes d’apprentissage et des aspirations de niveau manifestement international ; il ne sembla jamais perdre l’espoir que l’éducation et, encore plus, le désir d’apprendre marqueraient les étudiants de sa Dalhousie University.

P. B. Waite

Arthur Stanley Mackenzie a écrit de nombreux articles scientifiques, notamment « On the attractions of crystalline and isotropic masses at small distances », Physical Rev. (College Park, Md), 1re sér., 2 (mars–avril 1895) : 321–343 et « LXI. The deflexion of α rays from radium and polonium », Philosophical Magazine (Londres), 6e sér., 10 (1905) : 538–548 ; il a également été le traducteur et l’éditeur de The laws of gravitation : memoirs by Newton, Bouger and Cavendish : together with abstracts of other important memoirs (New York, 1900).

Arch. privées, P. B. Waite (Halifax), entrevue avec Janet MacNeill Piers, 17 sept. 1992.— DUA, UA-3 (president’s office fonds), box 96, file 25 (Archibald MacMechan personnel record) ; box 326, file 4 (Mackenzie à Sir Robert Falconer, 3 nov. 1922) ; UA-33 (student union/student organizations fonds), box 7, file 6 (minutes of the Dalhousie Athletic Club).— UTARMS, B1972-0001/013(03).— Cavendish Laboratory, The post-prandial proceedings (Cambridge, Angleterre, 1905).— W. A. Craick, « How personality creates : the task of President A. Stanley Mackenzie of Dalhousie University », Maclean’s (Toronto), décembre 1913 : 21–24.— A. McK. MacMechan, Late harvest (Toronto, 1934).— W. C. Murray, « Stanley Mackenzie of Dalhousie », Dalhousie Rev. (Halifax), 18 (1938–1939) : 427–434.— P. B. Waite, The lives of Dalhousie University (2 vol., Montréal et Kingston, Ontario, 1994–1998).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

P. B. Waite, « MACKENZIE, ARTHUR STANLEY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mackenzie_arthur_stanley_16F.html.

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Auteur de l'article:    P. B. Waite
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2016
Année de la révision:    2016
Date de consultation:    1 décembre 2024