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MACKAY, GEORGE LESLIE, éducateur, missionnaire presbytérien, dentiste, anthropologue et auteur, né le 21 mars 1844 dans le canton de Zorra, Haut-Canada, dernier des six enfants de George MacKay, fermier, et de Helen Sutherland ; en mai 1878, il épousa Tui Chang-mua, et ils eurent un fils et deux filles ; décédé le 2 juin 1901 à Tamsui (Tanshui, république de Chine).
Élevé dans une collectivité du comté d’Oxford qui avait été transplantée quasi intacte du Sutherlandshire en Écosse, George Leslie Mackay hérita à la fois l’esprit martial de son grand-père, combattant de Waterloo, et le presbytérianisme rigoureusement calviniste qui produisit tant de ministres dans le clan MacKay. Après avoir fait ses études primaires dans le canton de Zorra et fréquenté la Woodstock Grammar School, il enseigna deux ans. Puis, de 1865 à 1867, il étudia les arts au Knox College de Toronto, où il se fit remarquer par son application et son excentricité. Son parent Robert Peter MacKay, futur secrétaire du Foreign Missions Committee de l’Église presbytérienne au Canada (division de l’Ouest), rappelait : « Il perdait parfois la maîtrise de lui-même et devenait d’une violence douloureuse à voir [...] On ne pouvait guère le qualifier de sociable. » Diplômé du Princeton Theological Seminary en 1870, Mackay fit des études de troisième cycle à Édimbourg sous la direction du missionnaire Alexander Duff, le fameux « apôtre de l’Inde ».
Pendant que Mackay se trouvait en Écosse, le Foreign Missions Committee du Canada en fit son premier missionnaire à l’étranger et l’affecta en Chine. L’Église presbytérienne ne se distinguait pas par son zèle missionnaire. Bien des ministres ne voyaient en Mackay qu’« un jeune excité » ; quant à lui, il disait qu’ils appartenaient à l’« époque glaciaire » de l’Église. Ordonné le 19 septembre 1871, il quitta Toronto un mois plus tard, « tel Abraham, sans connaître sa destination », en emportant une bible annotée. Après avoir passé six mois à visiter les missions établies par l’Église presbytérienne d’Angleterre dans le port chinois de Chan-t’ou et le sud de Formose, il « occupa » son territoire, la moitié septentrionale de l’île. Installé dans une écurie du port de Tamsui, il écrivait : « Parti de mon vieux coin de pays, Zorra, j’ai parcouru toute cette route sous la conduite de Jésus, et me voilà dans cette maison, parvenu directement comme si mes caisses avaient été étiquetées, « Tamsui, Formose, Chine. »
Dès le début, Mackay se tint à l’écart de la petite communauté des Européens, préférant la compagnie de jeunes pâtres qui lui enseignèrent la langue des gens du peuple. Moins d’un mois après son installation, il avait fait une première conversion : celle d’un Chinois instruit, Giam Cheng-hoa, connu des Canadiens sous le nom d’A Hoa, qui devint son fidèle compagnon et son assistant officiel. Peu à peu, ils formèrent une « école ambulante », rassemblant des recrues qui iraient par les montagnes, de village en village, en procession – Mackay, avec son casque colonial et sa longue barbe noire, ouvrant la marche.
Comme les missionnaires de la Chine continentale, Mackay était constamment en butte, à Formose, à la xénophobie des Chinois, et surtout de la classe lettrée, qui allait fomenter des désordres pour le chasser. Aussi fit-il ses premières conversions parmi les illettrés et les proscrits des campagnes, considérés comme des traîtres à leur pays et à leur famille parce qu’ils abandonnaient la religion de leurs ancêtres. Mackay prit même le risque d’aller dans les montagnes où vivaient les chasseurs de têtes, mais il remporta quelque succès uniquement auprès des Pe-po-hoans, aborigènes sinisés qui escomptaient trouver en lui un protecteur. Afin d’attirer les gens, il pratiquait des méthodes jugées « bizarres » par les autres missionnaires ; la plus originale était de se faire dentiste itinérant. Lui et ses aides s’installaient sur une place et, après avoir chanté et prêché, offraient aux auditeurs d’extraire leurs dents déchaussées à cause des maladies tropicales. « La Bible et les pinces allaient de pair », nota par la suite Mackay, qui affirmait avoir arraché 40 000 dents en 30 ans. En 1888, il avait 16 chapelles et 500 convertis parmi les Taiwanais aborigènes. Bien entendu, cette réussite le rendait d’autant plus suspect aux autorités chinoises – et, par la suite, aux autorités japonaises.
Désireux de s’adapter aux mœurs du pays, Mackay épousa une Pe-po-hoan, ce qui souleva beaucoup de controverse au Canada et chez les étrangers de Formose. Il avait remarqué que peu de femmes du lieu assistaient aux offices de la mission ; par son mariage, il espérait gagner leur sympathie et les convaincre d’ouvrir leur porte aux missionnaires. Jamais il n’avait songé à épouser une Canadienne, écrivit-il pour justifier son choix. « Mon premier souci est de servir Jésus le mieux possible », précisait-il. Minnie Mackay – tel fut le nom prosaïque que l’on donna à Tui Chang-mia – se révéla un précieux atout pour la mission. Lorsque les Mackay vinrent au Canada en 1881–1882 (c’était la première fois en dix ans que Mackay avait un congé), elle aida à recueillir 6 125 $ dans le comté d’Oxford pour la construction de l’Oxford College à Tamsui. L’établissement fut inauguré en grande pompe ; bientôt s’y ajoutèrent des résidences, des bâtiments scolaires, une église et un hôpital – tout un complexe qui n’aurait pas déparé une petite localité ontarienne. Mme Mackay devint intendante de l’école des filles.
Le mauvais côté de Mackay se révèle dans ses relations avec ses collègues missionnaires canadiens. Les qualités qui faisaient de lui un missionnaire débordant d’initiative lui donnaient aussi un caractère égocentrique explosif. La discorde marqua ses rapports avec ses trois premiers associés. Le Foreign Missions Committee en vint à se demander « si M. Mackay a[vait] toute sa tête ». « Qui compte les dents qu’il arrache, s’interrogeait-on, et qu’est-ce que ces milliers de dents accumulées comme un trésor ont à faire avec des gains spirituels ? » Seul William Gauld, son quatrième collègue, s’entendait bien avec lui ; Mackay en fit d’ailleurs son successeur.
Lorsque, pendant la guerre larvée entre la France et la Chine en 1884–1885, la France imposa un blocus à Formose, les Chinois profitèrent de l’évacuation de Mackay pour attaquer les chrétiens et démolir les chapelles. À son retour, Mackay exigea une indemnité de « dix mille dollars mexicains », somme suffisante pour construire d’imposantes églises en pierre dont les clochers domineraient les maisons villageoises à un étage. « Impossible d’arrêter le missionnaire barbare », se plaignaient les gens.
En sillonnant l’île de Formose, Mackay recueillit des spécimens de la flore et de la faune tropicales qui formèrent le fonds d’un musée à l’Oxford College. D’autres objets recueillis par lui à Formose font partie des collections du département d’ethnologie du Musée royal de l’Ontario. Pendant son deuxième et dernier congé, de 1894 à 1896, il écrivit From far Formosa : the island, its people and missions. Cet ouvrage est caractéristique de l’ethnographie missionnaire à son meilleur. De pieuses dénonciations du paganisme se mêlent à des descriptions vivantes de l’histoire, de la géographie et des mœurs locales, et le tout est aussi passionnant qu’un roman d’aventures.
Au cours de son premier congé, Mackay avait reçu un doctorat honorifique en théologie du Queen’s College de Kingston. Pendant son deuxième congé, il fut élu à la plus prestigieuse fonction de son Église, celle de modérateur de l’Assemblée générale. L’« époque glaciaire » était révolue ; l’Église presbytérienne avait des missions en Chine, en Inde [V. Agnes Maria Turnbull], à Trinidad et dans l’Ouest canadien. Cet enthousiasme nouveau pour les missions était en grande partie attribuable à Mackay, premier missionnaire de l’Église à l’étranger et propagandiste zélé. Pendant qu’il était au Canada dans les années 1890, le Japon annexa Formose. Au début, il accueillit favorablement l’arrivée des Japonais, car il jugeait n’importe quel gouvernement préférable à celui des Chinois. Toutefois, leur présence compliqua les activités missionnaires parce que le japonais devint la langue officielle. Sous leurs dehors bienveillants, les Japonais considéraient la mission de Mackay comme une institution chinoise, donc potentiellement subversive. « La haine envers les Japonais, écrivit Mackay, entraînait l’amitié envers la religion de l’étranger. »
George Leslie Mackay avait souffert d’une méningite et de la malaria, mais ce fut d’un cancer de la gorge qu’il mourut en 1901. Pendant 30 ans, il avait maintenu la mission du nord de Formose presque seul, avec A Hoa et Minnie Mackay. Il avait prouvé qu’un missionnaire pouvait diriger une mission vouée à l’éducation, aux soins de santé et à l’évangélisation avec un budget minime et l’aide d’une armée d’évangélistes rémunérés et de femmes catéchistes (répartis, dans son cas, dans 60 postes). Jusqu’en 1949, les presbytériens du Canada furent les seuls missionnaires protestants à œuvrer dans la moitié nord de Formose. En tant que fondateur d’écoles et d’hôpitaux modernes, Mackay demeure un personnage important dans l’histoire de Formose. Un des principaux hôpitaux de l’île porte son nom : il s’agit du Mackay Memorial Hospital de Taipei. Le bâtiment d’origine de l’Oxford College a été converti en musée ; il est consacré à la vie de George Leslie Mackay, « le barbare à la barbe noire ».
Le livre de George Leslie Mackay, From far Formosa : the island, its people and missions, préparé pour l’édition par James Alexander Macdonald*, a été publié à Toronto en 1896 (copyright 1895) et a fait l’objet de plusieurs éditions.
AN, RG 31, C1, East Zorra Township, 1re partie, district 1 : 19 (mfm aux AO).— EUC-C, 122/7 ; Biog. file ; Photograph Coll.— Musée royal de l’Ontario (Toronto), Ethnology Dept., Artefacts collected by G. L. Mackay in Formosa Taiwan].— A. J. Austin, Saving China : Canadian missionaries in the Middle Kingdom, 1888–1959 (Toronto, 1986).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— A. H. Ion, The cross and the rising sun : the Canadian Protestant missionary movement in the Japanese empire, 1872–1931 (Waterloo, Ontario, 1990).— James Johnston, China and Formosa : the store of the mission of the Presbyterian Church of England [...] (Londres, 1897).— Marian Keith [M. E. Miller (MacGregor)], The black bearded barbarian : the life of George Leslie Mackay of Formosa (Toronto, 1912).— R. P. MacKay, Life of George Leslie Mackay, d.d., 1844–1901 (Toronto, 1913).— Some things that should be known to the ladies of the Woman’s Foreign Missionary Society in Canada (opuscule de 14 pages, Hong Kong, 1888 ; exemplaire aux EUC-C, 122/7, file 15).
Alvyn J. Austin, « MACKAY, GEORGE LESLIE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mackay_george_leslie_13F.html.
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Auteur de l'article: | Alvyn J. Austin |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |