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MACHAR, AGNES MAULE, écrivaine et réformatrice sociale, née le 23 janvier 1837 à Kingston, Haut-Canada, fille de John Machar* et de Margaret Sim ; décédée célibataire dans cette ville le 24 janvier 1927.
Ministre de l’Église d’Écosse, John Machar quitta l’Écosse en 1827 pour desservir l’église St Andrew à Kingston. Il contribua à la fondation du Queen’s College et le dirigea de 1846 à 1853. Margaret Sim, elle-même fille d’un ministre du culte écossais, l’avait rejoint après leur mariage, célébré à Montréal en 1832. Leur premier enfant mourut bébé. Agnes Maule naquit en 1837, et son frère John Maule, quatre ans plus tard. Son père, qui possédait une excellente bibliothèque, lui servit de précepteur, sauf pendant l’année qu’elle passa dans un pensionnat montréalais. Il l’initia au latin et au grec avant même qu’elle ait dix ans, puis lui enseigna le français, l’allemand et l’italien. Élève précoce, amoureuse de la vie au grand air, Agnes Maule s’épanouit sous ce régime. À la suite du décès de son père en 1863, elle demeura avec sa mère, organisatrice d’œuvres de bienfaisance. Après la mort de celle-ci en 1883, elle s’installa chez son frère et sa belle-sœur. Elle resterait dans leur maison, rue Sydenham, après le décès de John Maule en 1899.
Bien qu’elle ait vécu dans une petite ville coloniale, Mlle Machar baignait dans un riche milieu social et intellectuel. Dans sa jeunesse, outre les sources de stimulation présentes au presbytère, il y avait les fréquentations de ses parents : les hommes politiques John Alexander Macdonald* et Richard John Cartwright* ; George Romanes, professeur au Queen’s College, dont le fils George John se ferait connaître en Angleterre à titre de collaborateur de Charles Darwin ; l’ecclésiastique Joseph Antisell Allen de même que son fils Charles Grant Blairfindie, qui ferait sa marque en tant que romancier et vulgarisateur du darwinisme, et dont la sœur Caroline Elizabeth deviendrait la belle-sœur d’Agnes Maule en 1879. Plus tard, une fois établie sa réputation d’auteure, Mlle Machar créa son propre cercle et, particulièrement à Ferncliff – sa maison d’été à Gananoque, près des Mille-Îles –, elle accueillit des sommités internationales qui partageaient son goût pour la littérature, la religion et la science. Au fil de ses voyages, elle rencontra certains des plus fameux écrivains de son temps, dont le poète quaker John Greenleaf Whittier, objet de sa plus grande admiration. Parmi les presbytériens éminents, ceux dont elle semble avoir été le plus proche étaient Daniel James Macdonnell*, intime de la famille Machar depuis ses études à Queen’s, et George Monro Grant*, directeur de ce collège de 1878 à 1902. Figure influente de la petite communauté des femmes de lettres et femmes artistes du Canada, et en quelque sorte mentor des plus jeunes d’entre elles, Mlle Machar dénonça l’indifférence qui entourait Isabella Valancy Crawford* et pleura sa mort prématurée en 1887. En des occasions plus joyeuses, elle reçut Emily Pauline Johnson* et d’autres écrivaines à Ferncliff, ce lieu dont Charles Grant Blairfindie Allen a si bien parlé dans le Longman’s Magazine de Londres.
Agnes Maule Machar avait du temps, de l’énergie, du discernement et elle les utilisa pour exploiter les occasions qui se présentèrent à elle. La liste de ses écrits est imposante. Dès l’enfance, elle publia sous le couvert de l’anonymat. Son premier livre, des souvenirs rattachés à un concierge du Queen’s College, sortit en 1859. Les 30 dernières années du siècle furent sa période la plus prolifique. On peut dire que sa carrière démarra pour de bon avec Katie Johnstone’s cross : a Canadian tale, car ce roman, paru à Toronto en 1870, fut primé. Souvent sous le pseudonyme de Fidelis, elle composa ensuite un hommage à son père, au moins huit romans ainsi qu’une multitude de poèmes et d’essais. Seule ou en collaboration, elle écrivit, entre autres, six livres d’histoire pour le grand public. Des poèmes d’elle parurent dans des périodiques américains, britanniques et canadiens. Un choix de ses vers fut publié à Londres et à Toronto en 1899 sous le titre Lays of the « True North », and other Canadian poems. Des thèmes patriotiques et impérialistes se retrouvent assez fréquemment dans ses poèmes, mais la belle nature qui environnait Ferncliff, source de joie pour elle, était sa principale inspiration. Au Canada, des générations d’écoliers ont été initiés à sa poésie par leurs manuels de lecture. Cette forme de diffusion, les prix remportés par ses poèmes et romans, les nombreuses rééditions de ses écrits – et de ses ouvrages d’histoire –, attestent à quel point son œuvre correspondait à la sensibilité de ses contemporains. Bon nombre de ses essais ont résisté à l’épreuve du temps. Les textes qu’elle publia de 1872 à 1882 dans la plus grande revue d’idées du Canada, le Canadian Monthly and National Review/Rose-Belford’s Canadian Monthly and National Review, et dans le Week de Toronto de 1883 à 1896 offrent le meilleur échantillon de ses domaines d’intérêt.
Destiné aux bibliothèques des écoles du dimanche, Katie Johnstone’s cross avait marqué l’entrée, dans la littérature canadienne, d’un personnage classique chez Mlle Machar : la petite fille ou la jeune femme qui, par ses convictions religieuses, sa moralité et sa conduite, ramène dans le droit chemin des hommes dévoyés ou leur fait recouvrer la foi chrétienne. Toujours dans les années 1870, l’auteure choisit de s’adresser plutôt à des lecteurs adultes en publiant, dans le Canadian Monthly, une série d’essais où elle défendait le christianisme contre les assauts du rationalisme scientifique et de la critique historique de la Bible. Au lieu d’invoquer des conceptions immuables de la Création et des Saintes Écritures, elle demandait aux chrétiens traditionalistes et aux esprits tentés par le scepticisme de voir, dans la théorie évolutionniste et les lectures critiques de la Bible, l’instrument d’une meilleure compréhension du plan divin. Si elle ne fit pas beaucoup d’adeptes, au moins gagna-t-elle de l’estime. En 1876, William Dawson LeSueur*, partisan du laïcisme et brillant polémiste, déclara que, de tous ceux qui avaient contesté dans le Canadian Monthly ses arguments au sujet de l’efficacité de la prière, c’était Mlle Machar qui avait produit la réplique la plus satisfaisante. Bien qu’elle ait considéré le christianisme comme la « révélation la plus complète » de Dieu et soit demeurée au sein de l’Église presbytérienne, elle avait des positions théologiques assez souples pour être bien disposée envers d’autres religions, surtout le bouddhisme.
En défendant le christianisme, Agnes Maule Machar tentait aussi d’en montrer la fonction sociale, en particulier de préciser quels devoirs une société chrétienne avait envers les pauvres dans la nouvelle ère industrielle. Sur ce point, sa pensée était très bien développée. Dans un essai paru en 1879, elle recommandait des mesures d’assistance aux pauvres des villes, notamment la prohibition, des programmes de travail subventionnés par l’État et des refuges. Cependant, elle craignait que, en prenant en charge les nécessiteux – dont la plupart ne fréquentaient pas les lieux de culte –, les Églises favorisent l’hypocrisie et la paupérisation. Dans les années suivantes, où la pauvreté s’accentua à cause de la récession, Mlle Machar, instruite par l’expérience et par ses nombreuses lectures – entre autres des écrits du mouvement américain Social Gospel, l’ouvrage de William Booth, de l’Armée du salut, intitulé In darkest England and the way out, et le rapport publié en 1889 par la commission royale d’enquête sur les relations entre le capital et le travail – en vint à poser le problème de la pauvreté dans une perspective plus vaste. Dorénavant, elle soutenait que la véritable hypocrisie provenait des Églises qui prêchaient les nécessiteux à propos de leur âme sans se soucier de leurs besoins temporels. Les chrétiens privilégiés, disait-elle, devaient reconnaître que les démunis avaient droit au travail, à la justice et à plus que de simples moyens de subsistance.
Ce message, Agnes Maule Machar le livra de la manière la plus exhaustive (mais avec moins de force que dans certains articles) dans Roland Graeme : knight […], roman qui parut à Montréal en 1892 et qui reçut un accueil favorable. En voici l’intrigue. Des chrétiens traditionalistes couvrent d’éloges un industriel qui donne 5 000 $ à l’Église. Or, cet homme loue à ses ouvriers des logements misérables et les fait travailler dans une manufacture lugubre pour des salaires qu’il menace de réduire. Un valeureux journaliste, Roland, adepte du « socialisme chrétien », part en guerre contre ce sinistre personnage et contre un ecclésiastique complaisant. Il se joint aux Chevaliers du travail et, quand les ouvriers se mettent en grève, il les appuie. Inspiré par un ministre du culte qui est l’antithèse de l’ecclésiastique complaisant et par Nora, modèle féminin du christianisme appliqué, Roland retrouve la foi et change d’attitude envers les pauvres de la ville. Malgré sa conclusion prudente et son message banal, ce livre fait date dans l’histoire des romans Social Gospel. Il est même assez radical du fait que le héros appartient à une organisation controversée. Peut-être le personnage de Roland était-il inspiré en partie du frère de l’auteure, avocat, sympathisant des Chevaliers du travail et adepte du réformiste Henry George.
Bien que les vieillards démunis n’occupent pas une grande place dans Roland Graeme, Agnes Maule Machar en vint à se soucier particulièrement de leur sort. Dans une communication présentée en 1895 au National Council of Women of Canada, elle recommandait de créer des foyers pour eux. Au besoin, l’État devait en prendre l’initiative, et ces établissements ne devaient pas être « considérés davantage comme de la charité pour le vétéran de l’armée industrielle que la pension de retraite versée au vieux soldat ». De plus, elle voulait que ces foyers soient tels que les pensionnaires s’y sentent chez eux et, en dépit de ses convictions prohibitionnistes (trois de ses articles sur la tempérance avaient paru dans le Canadian Monthly en 1877), elle ne s’opposait pas, semble-t-il, à ce que l’on y serve à l’occasion un petit remontant. En fin de compte, ce seraient les femmes âgées qu’elle aiderait directement. Par testament, elle laisserait une somme en vue de la création de l’Agnes Maule Machar Home « pour les vieilles dames ayant passé l’âge de gagner leur vie ». Ouvert à Kingston par le Local Council of Women en 1930, ce foyer existe toujours.
Comme bien d’autres Canadiens anglais, Mlle Machar arborait ses convictions nationalistes et impérialistes. Assez indifférente à la mécanique qui régit l’édification d’un pays, elle préférait parler d’un Canada nanti d’une haute mission morale, où il n’y aurait ni politicaillerie, ni tensions « raciales ». Ce rêve s’exprimait déjà clairement en 1875 dans « Lost and won : a story of Canadian life ». Paru en feuilleton dans le Canadian Monthly, ce roman survenait tellement à propos que l’auteure et l’éditeur prirent soin de préciser qu’il ne contenait aucune allusion au contexte politique, encore altéré par le scandale du Pacifique. En 1879, Agnes Maule Machar composa, pour la fête du dominion, un poème dans lequel elle suggérait que, en tant que dirigeants d’une jeune nation dont le « moule en cire » était encore malléable, les hommes politiques du Canada avaient la chance de donner l’exemple. Peu d’entre eux retinrent la leçon, mais cette idée généreuse plut tant à John George Bourinot*, expert en procédure parlementaire, que, 16 ans plus tard, il conclut How Canada is governed (Toronto) en citant une strophe de ce poème. Les critiques applaudirent.
Agnes Maule Machar interprétait l’histoire du Canada de manière à favoriser la réalisation de ce rêve et à promouvoir le patriotisme. Bien qu’elle n’ait absolument pas été la seule parmi les écrivains anglo-protestants à célébrer le passé du Canada français, elle s’est démarquée en écrivant pour les enfants et pour les adultes, en pratiquant divers genres (poésie, fiction, récits « basés sur des faits »), dans le but d’apaiser les tensions entre francophones et anglophones. En 1890, à la parution de ses Stories of New France (Thomas Guthrie Marquis* était l’auteur de la deuxième partie), les critiques, qui notèrent la visée modératrice du livre, en louèrent l’à-propos : on était alors au lendemain de l’adoption d’une loi controversée, l’Acte relatif au règlement de la question des biens des jésuites. Du point de vue historiographique cependant, ses Stories of New France n’apportaient rien de neuf aux récits sur Samuel de Champlain*, Jacques Cartier*, la Huronie et autres sujets connexes. De temps à autre, Mlle Machar quitta le terrain relativement sûr de l’histoire pour aborder de front des questions d’actualité. Ainsi, elle composa un poème intitulé Quebec to Ontario, a plea for the life of Riel, September 1885 et publia dans le Canada Presbyterian de Toronto des lettres où elle réclamait la clémence pour Louis Riel*. Ce faisant, elle allait vraiment à contre-courant, comme en témoignent les lettres de protestation parues dans ce périodique. À plus de 80 ans, elle tenta une dernière fois de désamorcer une crise en traduisant et en éditant, sous le titre Young soldier hearts of France : a wreath of immortelles (Toronto, 1919), des lettres de vaillants soldats français morts pendant la Première Guerre mondiale. Vu l’état des relations entre le Canada français et le reste du pays, son geste était hélas naïf, mais il faisait preuve d’une merveilleuse fidélité à elle-même.
La vision qu’avait Agnes Maule Machar de l’Empire britannique et de la place du Canada était tout aussi sublime. L’Empire avait prospéré parce qu’il remplissait un « dessein divin ». Bien sûr, pour certains, il était une source d’enrichissement matériel ou de chauvinisme (les œuvres de fiction de Mlle Machar fourmillent de jeunes Anglais superficiels). Mais c’était dans cet ensemble que le Canada pouvait jouer un rôle : rappeler à la Grande-Bretagne ses anciens idéaux, être le joyau moral de la couronne impériale. Mlle Machar n’avait que faire des liens officiels, d’une présence du Canada dans un Parlement impérial, par exemple. Ce qui l’intéressait, c’étaient les liens spirituels et culturels qui n’exigeaient aucune structure institutionnelle. Jusqu’en 1913, année où elle publia, à Londres et à Toronto, Stories of the British Empire […], elle promut des liens de ce genre surtout par la poésie. Lays of the ‘True North’ (1899) commençait par le texte auquel le Week avait décerné le prix du meilleur poème en l’honneur des 50 ans de règne de Victoria en 1887. Ce poème parlait de ce qui, pour l’auteure, était la principale mission de l’Empire : favoriser l’expansion du christianisme. En privilégiant cet aspect spirituel, elle pouvait faire abstraction des frontières nationales et œuvrer à la réalisation de l’un de ses objectifs constants : le resserrement des relations entre la Grande-Bretagne, le Canada et les États-Unis et la disparition de ce que le Week appelait la « yankeephobie ». Cet objectif l’amena à prendre des positions tout à fait inhabituelles chez les nationalistes ou impérialistes. Elle appuya la réciprocité avec les États-Unis en 1891, se prononça deux ans plus tard contre une union douanière entre les parties de l’Empire et rejeta catégoriquement la position du Canada dans le litige de la mer de Béring. Son souci de protéger la nature renforça, dans ce dernier cas, sa conviction que les Américains avaient raison d’essayer de mettre fin à la chasse au phoque en haute mer [V. Clarence Nelson Cox*].
En tant que féministe, Agnes Maule Machar tenait surtout à l’instruction et au travail rémunéré. À l’encontre des arguments dominants selon lesquels les femmes perdraient leur féminité en faisant des études supérieures, elle soutenait que l’instruction leur permettrait de faire fructifier les talents que Dieu leur avait donnés, ferait d’elles de meilleures chrétiennes, de meilleures épouses et mères, et, si le mariage ne s’inscrivait pas « naturellement dans leur destinée », les aiderait à acquérir « un moyen de subsistance honorable ». Comme la plupart de ses contemporains, elle estimait que, idéalement, les femmes mariées devaient rester au foyer, mais elle admettait que, dans bien des cas, les pauvres étaient obligées d’avoir un emploi. Dans des articles et dans une proposition présentée en 1896 au National Council of Women, elle demanda à l’État de légiférer pour améliorer les conditions de travail des femmes et des enfants dans les ateliers et les manufactures. Carrie Matilda Derick*, chargée de cours à la McGill University et membre éminente du conseil, contesta ses prises de position en faveur de la réduction des heures de travail des ouvrières d’usine en faisant valoir que, logiquement, on ne pouvait à la fois réclamer des lois à cette fin et revendiquer l’égalité des chances. Bien que Mlle Machar ne semble pas avoir insisté auprès du conseil pour qu’il exerce des pressions en faveur de l’égalité des salaires, elle aborda dans ses écrits la question de la juste rémunération.
Les organismes auxquels appartint Agnes Maule Machar reflétaient ses préoccupations. Dans les années 1880, elle fut trésorière de la section kingstonienne d’une association presbytérienne, la Woman’s Foreign Missionary Society. Dans les années 1890, elle appartint à la direction du Local Council of Women et du National Council of Women. Elle fut aussi présidente de la Kingston Humane Society, secrétaire de la section locale de la Young Women’s Christian Association et cofondatrice de la Canadian Audubon Society. Pendant la première décennie du xxe siècle, elle contribua à la fondation du Canadian Women’s Press Club, fut vice-présidente de la Canadian Society of Authors et appartint à la section kingstonienne de la Women’s Art Association of Canada. Ses dons intellectuels et son œuvre littéraire l’auraient sûrement habilitée à devenir membre d’associations comme la Société royale du Canada, mais les femmes en étaient exclues. Par ailleurs, en dépit de son appui à la prohibition, elle ne semble pas avoir appartenu à l’Union chrétienne de tempérance des femmes.
Agnes Maule Machar voyageait beaucoup mais ne vécut jamais au-dessus de ses moyens. Apparemment, elle administrait avec soin ses revenus d’auteure. À sa mort, en 1927, elle laissait une succession d’une valeur approximative de 52 800 $, composée surtout d’hypothèques. Sa « fidèle amie et assistante » Matilda Speers eut droit à une rente viagère. Deux autres de ses amis intimes, Thomas Guthrie Marquis et Lawson Powers Chambers – diplômé de Queen’s et professeur de philosophie à la Washington University de St Louis, au Missouri – héritèrent de Ferncliff.
Par son libéralisme théologique, par son christianisme à visée sociale, par sa ferveur nationaliste et impérialiste (trait commun à beaucoup de ses compatriotes écrivains), Agnes Maule Machar est une figure exemplaire du Canada victorien. Elle se démarque toutefois par la variété de ses thèmes et par quelques prises de position apparemment paradoxales. Néanmoins, comme l’annonçait son pseudonyme, Fidelis, elle manifesta une cohérence remarquable. Un siècle après son heure de gloire, les chercheurs peuvent grincer des dents en lisant ses allusions poétiques à l’« hindou au teint sombre », au « sauvage terre-à-terre » et au « robuste Indien » qui se laissent volontiers conquérir par « l’espoir et le progrès » que leur amène l’Empire chrétien de Victoria. Au bout du compte, cependant, la plupart de ceux qui ont étudié sa carrière se rallient probablement au jugement affectueux d’Alfred Edward Prince, de Queen’s, qui a dit en 1934 qu’Agnes Maule Machar avait vécu généreusement et s’était éteinte en laissant derrière elle « une riche renommée et une œuvre féconde ».
On n’a trouvé aucune collection de papiers d’Agnes Maule Machar. On peut consulter une partie de sa correspondance dans le fonds Louisa Murray aux York Univ. Libraries, Arch. and Special Coll. (Toronto), dans les papiers de Helena Coleman, dossier 152, à la Victoria Univ. Library, Special Coll. (Toronto), et dans les papiers de George Monro Grant aux AN, MG 29, D38. Le dossier de sa succession est conservé aux AO, RG 22-159, nº 3867. On a de l’information sur son milieu familial dans Memorials of the life and ministry of the Rev. John Machar, D.D., late minister of St. Andrew’s Church, Kingston (Toronto, 1873), compilé par des membres de la famille et édité par Agnes Maule Machar, et dans le dossier biographique de John Machar à l’EUC-C.
Le premier livre d’Agnes Maule Machar, publié sous le couvert de l’anonymat, avait pour titre Faithful unto death, a memorial of John Anderson, late janitor of Queen’s College, Kingston, C.W. (Kingston, [Ontario], 1859). Ses romans comprennent notamment : Katie Johnstone’s cross : a Canadian tale (Toronto, 1870) ; Lucy Raymond, or, the children’s watchword (Toronto, [1871 ?]) ; For king and country : a story of 1812 (Toronto, 1874 ; d’abord publié sous forme de feuilleton dans le Canadian Monthly and National Rev., Toronto) ; « Lost and won » (paru sous forme de feuilleton dans le Canadian Monthly en 1875, mais non publié par la suite même si le journaliste et poète Thomas O’Hagan le considérait comme un des deux meilleurs romans de l’auteure – voir O’Hagan ci-dessous) ; Marjorie’s Canadian winter, a story of the northern lights (Boston, 1892 ; réimpr., Toronto, 1906) ; Roland Graeme : knight (réimprimé à Toronto en 1906, puis en 1996 ; cette dernière réimpression, avec une introduction de Carole Gerson, a paru dans le cadre de la série Early Canadian women writers) ; Down the river to the sea (New York, 1894) ; et The heir of Fairmount Grange (Londres et Toronto, [1895]). The quest of the fatal river (Toronto, 1904) est attribué à Agnes Maule Machar dans plusieurs sources, notamment dans Wallace, Macmillan dict., et la Canadian annual rev., 1904 : xiv, mais aucun exemplaire n’a pu être retrouvé. L’ouvrage commémoratif intitulé Mère Marie-Rose, fondatrice de la Congrégation des SS. Noms de Jésus et de Marie au Canada (Montréal, 1895) est aussi attribué à Agnes Maule Machar dans certaines bibliothèques, car son auteur, Jules-Henri Prétot, a aussi utilisé le pseudonyme Fidelis.
En plus de Lays of the « True North » (une deuxième édition augmentée a paru à Londres et à Toronto en 1902), il existe plusieurs collections plus spécialisées de poèmes d’Agnes Maule Machar, dont The Thousand Islands (Toronto, 1935), recueil préparé après sa mort par Thomas Guthrie Marquis et publié dans la série Ryerson poetry chap-book. Outre les ouvrages historiques mentionnés dans le texte, Agnes Maule Machar a écrit The story of old Kingston (Toronto, 1908). Son œuvre à titre d’historienne est décrite dans D. M. Hallman, « Cultivating a love of Canada : Agnes Maule Machar, 1837–1927 », texte paru dans Creating historical memory : English Canadian women and the work of history, Alison Prentice et Beverley Boutilier, édit. (Vancouver, 1997), 25–50.
On trouve des listes plus exhaustives des publications d’Agnes Maule Machar dans Nancy Miller Chenier, « Agnes Maule Machar : her life, her social concerns, and a preliminary bibliography of her writing » (travail de recherche de m.a., Carleton Univ., Ottawa, 1977), et dans D. M. Hallman, « Religion and gender in the writing and work of Agnes Maule Machar » (thèse de ph.d., Univ. of Toronto, 1994). Les articles qu’elle a rédigés pour le Canadian Monthly et le mensuel qui en a pris la suite, le Rose-Belford’s Canadian Monthly and National Rev., sont répertoriés dans l’Index compilé par Marilyn G. Flitton (Toronto, 1976).
Certaines notices biographiques écrites du vivant d’Agnes Maule Machar ou peu après sont utiles pour connaître son cercle d’amis au Canada et à l’étranger, notamment les suivantes : A. E. Wetherald, « Some Canadian literary women – II : Fidelis », Week (Toronto), 5 avril 1888 : 300s. ; Thomas O’Hagan, « Some Canadian women writers », Week, 25 sept. 1896 : 1050–1053 ; L. A. Guild, « Canadian celebrities, nº 73 : Agnes Maule Machar (Fidelis) », Canadian Magazine (Toronto), 27 (mai–oct. 1906) : 499–501 ; F. L. MacCallum, « Agnes Maule Machar », Canadian Magazine, 62 (nov. 1923–avril 1924) : 354–356 ; les articles de Robert William Cumberland écrits en hommage à Agnes Maule Machar dans le Queen’s Quarterly (Kingston), 34 (1926–1927) : 331–339, et dans le Willisons Monthly (Toronto), 3 (1927–1928) : 34–37 ; et l’entrée d’Alfred Edward Prince dans le Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell), 1.
Parmi les textes récents écrits sur Agnes Maule Machar par des historiens, mentionnons : M[ary] Vipond, « Blessed are the peacemakers : the labour question in Canadian Social Gospel fiction », Rev. d’études canadiennes (Peterborough, Ontario), 10 (1975), nº 3 : 32–43 ; Ruth Compton Brouwer, « The “between-age” Christianity of Agnes Machar », CHR, 65 (1984) : 347–370, et « Moral nationalism in Victorian Canada : the case of Agnes Machar », Rev. d’études canadiennes, 20 (1985–1986), nº 1 : 90–108 ; Ramsay Cook, The regenerators : social criticism in late Victorian English Canada (Toronto, 1985) ; et Constance Backhouse, Petticoats and prejudice : women and law in nineteenth-century Canada ([Toronto], 1991). Carole Gerson a, de son côté, étudié son œuvre dans une perspective littéraire : « Three writers of Victorian Canada », dans Canadian writers and their works, Robert Leckie et al., édit. (24 vol. en 2 sér., Toronto, 1983–1996), sér. fiction, 1 (1983) : 195–256. [r. c. b.]§
Ruth Compton Brouwer, « MACHAR, AGNES MAULE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/machar_agnes_maule_15F.html.
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Auteur de l'article: | Ruth Compton Brouwer |
Titre de l'article: | MACHAR, AGNES MAULE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |