MacDONALD OF GLENALADALE, HELEN (MacDonald) (Eilidh MacDhòmhnaill), gestionnaire d’une propriété foncière, née vers 1750 en Écosse, fille d’Alexander M’Donald of Glenaladale et de Margaret MacDonell of Scothouse (Scotus) ; décédée vers 1803 à l’Île-du-Prince-Édouard.

On ne sait pas grand-chose des premières années de Helen MacDonald (ou Nelly, comme on l’appelait toujours). Il est évident qu’elle fréquenta l’école, car elle écrivait couramment l’anglais aussi bien que le gaélique. En 1772, Nelly et sa jeune sœur Margaret (Peggy) firent, en compagnie de leur frère Donald, la traversée jusqu’à l’île Saint-Jean (Île-du-Prince Édouard) à bord de l’Alexander. Sous la conduite de l’aîné, John, qui arriva l’année suivante, la famille tentait de fonder une colonie de Highlanders catholiques dans l’île. Elle ambitionnait, ce faisant, de récupérer sa fortune perdue, d’une part, et de travailler au soulagement des Highlanders en Écosse, persécutés sur le plan religieux et opprimés sur le plan économique, d’autre part. Nelly et sa sœur partagèrent toutes les difficultés et les privations de la vie des pionniers dans des régions sauvages et peu familières. Lorsque éclata la Révolution américaine, en 1775, le petit établissement, situé sur le lot no 36, dont Scotchfort était le centre, avait pris racine. Mais les frères MacDonald étaient désespérément à court d’argent, et, quoique catholiques, ils obtinrent une commission au sein des Royal Highland Emigrants (84e d’infanterie), régiment qui avait été recruté pour servir en Amérique du Nord pendant la guerre. Tous deux avaient quitté l’île avant la fin de 1775 ; Donald fut tué sur le champ de bataille en 1781 et John devait rester éloigné de l’île jusqu’en 1792, d’abord occupé à faire la guerre, puis à mener des luttes politiques concernant l’île en Grande-Bretagne. Pendant la guerre, Nelly et sa soeur avaient projeté de quitter l’île pour un endroit qui fût plus convenable, mais elles n’y donnèrent jamais suite.

En l’absence des deux frères, la direction et la gestion de l’établissement, comme aussi des intérêts de la famille MacDonald dans l’île, incombèrent à Nelly. Le fait d’assumer de semblables responsabilités, quand les hommes étaient éloignés par la guerre ou par leurs affaires, n’était pas chose rare pour les femmes de l’époque, l’ampleur de leurs responsabilités étant proportionnelle à celle des biens à gérer. Mais l’absence de John MacDonald pendant 16 années consécutives était excessive puisque la nature de ses biens, tout autant que les aspects politiques de la propriété foncière dans l’île, rendait la tâche de Nelly onéreuse et critique. Car MacDonald n’était pas simplement un propriétaire foncier à la tête d’une grande ferme ; il était conscient d’être un laird des Highlands (connu en gaélique sous le nom de Fear-à-Ghlinne, le seigneur du vallon) et il se sentait responsable d’un grand nombre de fermiers à bail dont le sort était entre ses mains. Comme propriétaire foncier, au surplus, il était menacé par les machinations de la clique de fonctionnaires qui dominait l’île. Quant à Nelly, elle était nettement désavantagée dans ses efforts pour gérer le domaine tout en protégeant les intérêts de son frère. Étant femme, elle devait se tenir à l’écart de l’activité politique et sociale indispensable à qui voulait obtenir l’appui du milieu ; elle n’en eut pas moins suffisamment d’influence pour acquérir à son nom certains emplacements urbains à Charlottetown. Comme les catholiques de l’île ne pouvaient ni voter ni occuper un emploi public, elle ne put trouver personne, parmi ses nombreux parents ou locataires, avec qui manœuvrer dans les coulisses de la capitale.

Tout ce qu’exigeait de Nelly le rôle de gestionnaire – qu’elle assuma si longtemps – n’était pas peu de chose. Elle devait exploiter la ferme familiale, qui comptait, entre autres, plus de 90 têtes de bétail, car sans le produit de celle-ci il eût été impossible de survivre dans cette île éloignée. Son succès à ce chapitre – si grand que par la suite son frère lui demanda des conseils d’ordre administratif – elle le dut à l’aide de ses locataires et de soldats qu’elle engageait à Charlottetown. Au milieu des années 1780, elle fit même bâtir une maison pour son frère, suivant les spécifications de ce dernier. La perception des rentes était une tâche plus difficile encore, d’autant qu’il y avait peu de numéraire dans l’île et point de marché pour sa production ; mais – et particulièrement en 1781, année où John craignit de perdre sa propriété s’il n’amassait pas suffisamment d’argent pour payer ses redevances – Nelly essaya de percevoir l’argent, qu’elle conservait dans un coffre-fort dans sa cave. Il lui était indubitablement plus facile de faire rapport à son frère sur les progrès du domaine que de recueillir tous les renseignements d’ordre politique qu’il réclamait. John s’intéressa particulièrement à la vente, par le gouvernement de l’île, de lots confisqués à leurs propriétaires, à la fin de 1781, une affaire sans importance que le gouverneur Walter Patterson* négligea de mentionner au gouvernement de Grande-Bretagne, jusqu’à ce que MacDonald, entre autres propriétaires fonciers, agissant d’après les renseignements fournis par Nelly, eût forcé le ministre à insister pour que Charlottetown donnât les éclaircissements voulus.

Afin de récompenser Nelly de ses efforts, John lui envoyait périodiquement de l’argent et des douceurs (à une occasion, huit paires de souliers, deux à trois verges de lasting, des patrons et deux paires de galoches), et lui prodiguait un flot de conseils paternels. « Toi et les gens devez danser et vous divertir entre vous, écrivait-il en 1780, il est fort raisonnable que vous vous réjouissiez innocemment et que vous fassiez en sorte que le temps passe doucement. » Mais seulement des réjouissances honnêtes : Nelly ayant rencontré un jeune officier, à l’une des danses organisées dans sa maison, et songé à se fiancer, John en fut très inquiet. Ce jeune homme n’avait « d’autre moyen de subsistance que sa commission », et sa sœur n’ajouterait rien à son « importance sociale par ce lien », les unités provinciales n’étant guère au-dessus de la milice. Promettant de rentrer pour s’occuper de sa sœur, MacDonald insista : « en attendant ce moment, il vaudrait mieux que tu n’épouses pas un homme indigne de toi », permettant ainsi « que nous passions pour sots aux yeux du monde ». Nelly acquiesça, cette fois, aux désirs de son frère. Comme l’écrivait sa mère en 1785 : « Une chose me réconforte : c’est que le mariage n’est point nécessaire au salut – aussi, ma chère Nelly, tu peux [...] être heureuse ailleurs si tu ne l’es pas dans le mariage ici-bas. » Mais, après son intervention, MacDonald crut nécessaire de se plaindre constamment des lettres mornes et sans joie de sa sœur, et de lui conseiller de « ne pas se laisser abattre, autant que possible ». Finalement, peu de temps avant le retour attendu de John dans l’île, en 1792, la Royal Gazette annonçait le mariage de Nelly et de Ronald MacDonald, de Grand Tracadie. L’un des derniers gestes de Nelly, comme gestionnaire, fut de faire le recensement de la population – hommes et bêtes – vivant sur les lots nos 35 et 36, qui appartenaient à son frère. Malgré ses efforts, beaucoup de locataires avaient quitté les lieux pendant l’absence de ce dernier.

John MacDonald revint dans l’île avec une nouvelle épouse. Nelly ne s’entendait pas bien avec sa belle-sœur Margaret (que son arrogance fit appeler « la reine de Tracadie »), et quand MacDonald retourna en Grande-Bretagne, en 1802, accablée du fardeau de Margaret, elle reçut de son frère le conseil de laisser sa femme gouverner la maison comme elle l’entendait. À cette époque, Nelly était constamment malade, et elle mourut peu après. Sa vie témoigne de quelles ressources les femmes furent capables en pays de colonisation, malgré les limitations et les exigences que leur imposait la société de leur temps.

J. M. Bumsted

Arch., privées, Jean et Colin MacDonald (St Peters, Î.-P.-É.), MacDonald family papers, Helen MacDonald corr., 1779–1802 (copies aux PAPEI).— PAPEI, RG 16, Land registry records.— Scottish Catholic Arch. (Édimbourg), Blairs letters, 11 déc. 1775, John MacDonald à George Hay ; 4 nov. 1776, James MacDonald à Hay.— Royal Gazette and Miscellany of the Island of Saint John (Charlottetown), 28 janv. 1792.— J. M. Bumsted, « Captain John MacDonald and the Island », Island Magazine, no 6 (printemps-été 1979) : 15–20 ; « Highland emigration to the Island of St. John and the Scottish Catholic Church, 1769–1774 », Dalhousie Rev., 58 (1978–1979) : 511–527.— A. F. MacDonald, « Captain John MacDonald, « Glenalladale », SCHÉC Report, 30 (1964) : 21 s.

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J. M. Bumsted, « MacDONALD OF GLENALADALE, HELEN (MacDonald) (Eilidh MacDhòmhnaill) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/macdonald_of_glenaladale_helen_5F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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