LAUZON, PIERRE DE, prêtre, jésuite, missionnaire, supérieur des missions jésuites de la Nouvelle-France, baptisé à Leignes-sur-Fontaine (dép. de la Vienne, France), le 13 septembre 1687, fils de Pierre de Lauzon, avocat, et de Marguerite Riot, décédé à Québec le 5 septembre 1742.

Après ses études classiques au collège de Poitiers, en France, Pierre de Lauzon entra au noviciat des jésuites de la province d’Aquitaine, à Bordeaux, le 26 novembre 1703 et prononça ses premiers vœux le 27 novembre 1705. Il étudia la logique et la physique à Limoges, de 1705 à 1707, et fut professeur de 1707 à 1710. Après avoir fait une troisième année de philosophie à Limoges, il y enseigna la rhétorique jusqu’en 1712 ; il entreprit ensuite sa théologie à Bordeaux, et, quatre ans après, il fut ordonné prêtre.

Pierre de Lauzon s’embarqua pour le Canada en 1716 et, peu après son arrivée à Québec, il se rendit à la mission de Lorette aider le père Pierre-Daniel Richer, tout en apprenant les langues huronne et iroquoise. En 1718, il fut nommé missionnaire au Sault-Saint-Louis (Caughnawaga), où il prononça ses vœux le 2 février 1721. Après un séjour de trois ans dans cette mission, il revint à Québec où il enseigna l’hydrographie [V. Joseph Des Landes] durant l’année scolaire 1721–1722. Ce fut probablement pour remplacer le père François Le Brun qui venait de mourir, mais aussi pour refaire ses forces, car ses travaux auprès des Iroquois avaient miné sa santé. Son repos fut de courte durée, parce que les Indiens du Sault-Saint-Louis réclamèrent son retour dans la mission. En effet, en 1721, il y avait eu de l’agitation au Sault-Saint-Louis et les Iroquois avaient exprimé leurs griefs en envoyant une requête au gouverneur Philippe de Rigaud* de Vaudreuil et à l’intendant Bégon, dans laquelle ils affirmaient que les troubles survenus à la mission avaient été causés d’abord par le changement trop fréquent des missionnaires ; en conséquence, ils demandaient le retour de Gannenrontié (nom indien du père de Lauzon). Par ailleurs, ils considéraient le projet de rétablir la garnison française dans le village comme une insulte à leur loyauté, une source de mauvais exemples pour les jeunes gens, un danger pour leurs femmes et leurs filles et une dépense inutile de sommes qui seraient mieux employées à aider les veuves et les orphelins des nombreux guerriers morts pour défendre les intérêts français, tant contre leurs « propres frères que contre l’Anglois ».

La menace était grande que les habitants du Sault-Saint-Louis ne quittent les lieux pour se retirer en Iroquoisie ou se rapprocher des Anglais. Le gouverneur et l’intendant jugèrent donc nécessaire de demander le retour du père de Lauzon au Sault-Saint-Louis, puisqu’il avait déjà réussi à conjurer une telle menace pendant son premier séjour dans cette mission et que, de plus, les Iroquois lui témoignaient beaucoup d’attachement. Le père de Lauzon retourna donc à la mission en 1722 et, l’année suivante, il y fut nommé supérieur, succédant au père Julien Garnier*. Il conserva cette fonction jusqu’en 1732, date à laquelle son habileté à gouverner la mission du Sault-Saint-Louis, durant neuf années consécutives, détermina le père François Retz, général de la Compagnie de Jésus, à le nommer supérieur des missions jésuites de la Nouvelle-France. Cette charge comprenait aussi celle de recteur du collège de Québec. Il entra en fonction en septembre, succédant au père Jean-Baptiste Duparc.

En 1733, au cours de son supériorat, il se rendit en France chercher du renfort, spécialement pour les missions de l’Ouest. Il revint en 1734, ramenant les pères Jean-Pierre Aulneau* et Luc-François Nau. Les trois jésuites firent le voyage de retour avec Mgr Dosquet*, sur le vaisseau de guerre le Rubis. La traversée, qui dura 80 jours, fut marquée par la tempête et par l’épidémie, et 20 personnes moururent. Le père de Lauzon servit comme assistant-maître d’équipage, car tous les passagers durent partager les corvées de la navigation.

Lorsque Jean-Baptiste de Saint-Pé lui succéda au poste de supérieur des missions jésuites de la Nouvelle-France en 1739, Lauzon retourna au Sault-Saint-Louis et reprit le gouvernement de son ancienne mission [V. Nau]. Une dure épreuve l’y attendait : Lauzon dut prendre la défense de ses ouailles contre les accusations de déloyauté à la France et de commerce illicite avec les Anglais. Dans un mémoire daté de 1741 et adressé à Pierre de Rigaud* de Vaudreuil de Cavagnial, alors gouverneur de Trois-Rivieres, pour qu’il le fasse parvenir au ministre Maurepas, il rappela les services que les Iroquois du Sault-Saint-Louis avaient rendus à la France dans les luttes contre les autres Indiens et contre les Anglais ; il nota la suspicion et les traitements injustes dont ils étaient l’objet, en retour, de la part des Français. Il repoussa aussi l’accusation qui pesait sur les jésuites de cette mission, à savoir de faire du commerce. Ce fut le début de l’affaire Tournois-Desauniers : on accusa le jésuite Jean-Baptiste Tournois d’être en société commerciale avec les demoiselles Desauniers et d’encourager les Indiens à fréquenter le magasin de ces commerçantes. Le mémoire du père de Lauzon ne rejoignit pas assez tôt le ministre et, le 12 avril 1742, ce dernier ordonna la fermeture du magasin des demoiselles Desauniers, et faisait prier le père de Lauzon d’empêcher les Indiens de se rendre chez les Anglais.

Pierre de Lauzon se montra très sensible au soupçon qui le frappait dans son honneur de missionnaire et de Français. Brisé par la maladie et affecté par les accusations des marchands, il fut rappelé à Québec en 1741. La peine qu’il en ressentit hâta même sa mort, qui survint le 5 septembre 1742, après quelques jours de maladie.

Joseph Cossette

AD Vienne (Poitiers), État civil, Leignes-sur-Fontaine, 13 sept. 1687.— ASJCF, 555 ; Cahier des vœux ; Fonds Rochemonteix, 4 006, 227, 259 ; 4 018, 18.— JR (Thwaites), LXVII : 66, 72–78 ; LXIX : 45–47, 57.— Melançon, Liste des missionnaires jésuites, 46.— Rochemonteix, Les Jésuites et la N.-F. au XVIIIe siècle, I : 211 ; II : 20, 21, 23, 52, 245, 256.

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Joseph Cossette, « LAUZON, PIERRE DE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lauzon_pierre_de_3F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
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