LAUVERJAT, ÉTIENNE, prêtre, jésuite, missionnaire, né à Bourges, France, le 25 janvier 1679, mort à Québec le 16 novembre 1761.

Étienne Lauverjat entra au noviciat de la Compagnie de Jésus à Paris le 8 novembre 1700. Ordonné prêtre, il partit aussitôt pour le Canada, probablement en 1710, car les registres de la paroisse Saint-François-du-Lac attestent sa présence dans la mission Saint-François-Xavier le 14 février et les 18 et 30 mars 1711. Son supérieur, Joseph-Louis Germain*, qui le destinait aux missions abénaquises d’Acadie, l’avait envoyé dans cette mission pour y apprendre la langue abénaquise sous la direction de Joseph Aubery. Après un séjour dans les missions de Sault-Saint-Louis (Caughnawaga) et de Bécancour, il alla remplacer Pierre de La Chasse à Panaouamské (Pannawambskek), village situé à quelques milles au nord de la ville actuelle de Bangor, Maine. Il y était à l’automne de 1718. Malgré lui, les Abénaquis de Panaouamské laissèrent les Anglais s’établir aux alentours de Pemaquid en 1720.

En mars 1723, au cours de la première année de la guerre entre le Massachusetts et les Abénaquis du Maine, le colonel Thomas Westbrook, parti de Boston avec une troupe de 230 hommes, vint brûler le village et la chapelle du jésuite pour venger l’attaque des Abénaquis, l’année précédente, contre un petit fort anglais de la rivière Saint-Georges. Vers 1728, Lauverjat eut des démêlés avec Joseph d’Abbadie de Saint-Castin et son frère cadet. Le missionnaire les accusa, entre autres, d’avoir toujours contrecarré ses entreprises guerrières.

Comme son confrère Aubery, Lauverjat était d’avis que les Abénaquis d’Acadie devaient s’opposer, même par les armes, aux empiétements des Anglais sur leurs terres. Il jugeait qu’une fois maîtres du pays, ces derniers en chasseraient les missionnaires catholiques et que c’en serait fait de la foi de leurs ouailles. Il était encouragé dans son attitude par les gouverneurs et les intendants de la Nouvelle-France, pour qui l’abandon des terres d’Acadie par les Abénaquis allait ouvrir la porte du Canada aux Anglais. Le jésuite recevait des autorités de la Nouvelle-France une aide financière, mais en sous-main, ceci ne pouvant se faire ouvertement à cause du traité d’Utrecht (1713).

En 1732, à la suite de sa dispute avec les frères Saint-Castin, Lauverjat quitta Panaouamské pour aller à Médoctec (Meductic) sur la rivière Saint-Jean. Revenu au Canada en 1734, il desservit la paroisse et la mission de Bécancour, de 1735 à 1738, et la paroisse Sainte-Geneviève-de-Batiscan, de 1738 à 1740. Après deux années à Panaouamské et un séjour à la résidence des jésuites à Montréal en 1742, il prit charge d’une nouvelle mission fondée pour les Abénaquis de Saint-François et de Bécancour, à l’embouchure de la rivière Missisquoi (dans le Vermont actuel). On comptait sur lui pour détacher ces Abénaquis des Anglais et pour informer les autoritités de leur conduite. Le gouverneur Charles de Beauharnois et l’intendant Gilles Hocquart* lui firent construire et meubler une maison. Le jésuite desservit en même temps, « par voie de mission », la paroisse Saint-Denis qu’on projetait alors d’ériger dans la seigneurie de Foucault, sur la baie Missisquoi.

Lauverjat quitta Missisquoi en 1747 pour Saint-Michel (Saint-Michel-de-Bellechasse, Québec). En 1749 il se rendit à Pointe-à-la-Caille (Montmagny) afin de secourir spirituellement des centaines d’Indiens d’Acadie qui étaient venus s’y réfugier au commencement de la guerre de la Succession d’Autriche en 1744. La guerre terminée, il retourna avec eux dans leur pays en 1749 et desservit la mission de Narantsouak (Norridgewock, actuellement Old Point, Madison, Maine), puis celle de Médoctec jusqu’en 1754. Par la suite, il vécut retiré au collège des jésuites à Québec, s’occupant de confesser les Indiens. Marcel Trudel croit pouvoir l’identifier avec le religieux âgé qui fut arrêté par le lieutenant John Knox*, après la chute de Québec, parce que soupçonné d’avoir engagé des soldats anglais à déserter. Il mourut à Québec en 1761.

Thomas-M. Charland

AJTR, Registre d’état civil, Bécancour et Sainte-Geneviève-de-Batiscan.— AN, Col., B, 45, f.801 ; 78, f.25 ; 81, f.42 ; Col., C11A, 49, f.124 ; 81, f.12 ; 93, f.181 ; Col., F3, 2, f.457.— ANQ-M, Registre d’état civil, Chambly, 12 nov. 1745.— ASJCF, Extraits des catalogues.— Coll. de manuscrits relatifs à la N.-F., III : 31, 54, 61, 134, 136, 143, 161, 166.— Coll. of the Mass. Hist. Soc., 2e sér., VIII (1826) : 264.— JR (Thwaites), LXVI : 204, 206, 345 ; LXIX : 78 ; LXX : 80 ; LXXI : 163, 399.— Knox, Historical journal (Doughty), II : 277s.— Letters of Colonel Thomas Westbrook and others relative to Indian affairs in Maine 1722–26, W. B. Trask, édit. (Boston, 1901), 76s.

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Thomas-M. Charland, « LAUVERJAT, ÉTIENNE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lauverjat_etienne_3F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
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