KENWENDESHON (Henry Aaron Hill), Agnier, catéchiste de l’Église d’Angleterre et traducteur, fils aîné de Karonghyonte (David Hill) ; il épousa Christiana Brant, deuxième enfant de Joseph Brant [Thayendanegea*], et ils eurent au moins trois enfants ; décédé du choléra en 1834 à la rivière Grand, Haut-Canada.

Le nom de Kenwendeshon, porté au début du xixe siècle par Henry Aaron Hill, appartenait apparemment au clan du Loup de la tribu des Agniers et signifie « jours plus longs ». À cette époque, les Agniers connaissaient bien les coutumes des Blancs, et certains d’entre eux, suivant leur exemple, avaient commencé à adopter des patronymes. Les Hill étaient de ceux-là, et Henry Aaron Hill semble avoir préféré son nom européen. Quand le chef David Hill mourut vers 1790, Joseph Brant tenta de faire nommer Henry Aaron pour lui succéder, mais la coutume iroquoise prévalut et le titre passa à la filiation maternelle. Néanmoins, certains observateurs considérèrent plus tard Henry Aaron Hill comme un chef.

De passage à la rivière Grand en 1792, Patrick Campbell décrivit Hill comme un jeune homme « d’aspect très agréable, aux manières douces », qui avait été « le meilleur étudiant » de Harvard. Toutefois, cette université ne possède aucune trace de sa présence, ce qui n’empêcha pas que l’on ait donné parfois à Hill le titre de docteur. Durant la guerre de 1812, ce dernier participa à Beaver Dams (Thorold, Ontario) à une embuscade qu’on avait tendue à des forces armées américaines le 24 juin 1813 [V. William Johnson Kerr*]. En novembre 1814, il faisait partie d’un détachement qui empêcha une importante troupe américaine de traverser la rivière Grand pour attaquer Burlington Heights (Hamilton) par l’arrière. Considéré comme « un guerrier fidèle en toutes occasions », Hill fut blessé à la cuisse et à la main lors de cet engagement.

Dès 1816, Hill servait à titre d’interprète au sein des conseils des Six-Nations et dirigeait les offices à la chapelle des Agniers (qui existe encore à Brantford). Selon le voyageur Francis Hall, il « appliquait sur ses joues et son front quelques touches de vermillon pour honorer le dimanche ; il portait un surplis et prononçait de longs sermons [...] son débit était mesuré et monotone à l’extrême ». L’église St Paul, tel était le nom de la chapelle, recevait occasionnellement la visite du ministre anglican de Niagara (Niagara-on-the-Lake) et, plus tard, celle du ministre d’Ancaster. Le plus souvent, un catéchiste indien lisait les prières. En 1821, Hill fit fonction de lecteur et aussi d’interprète de Ralph Leeming* ; l’année suivante, Robert Addison en parlait comme du catéchiste de la Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts. Le premier ministre anglican à résider à la rivière Grand, William Hough, fut nommé en 1826. On continua quand même à utiliser les services de catéchistes, et c’est seulement en 1827 que Hill fut officiellement nommé catéchiste de la Society for the Propagation of the Gospel, au salaire annuel de £20. Il demeura à son poste lorsque la New England Company, société interconfessionnelle, prit charge de la mission cette année-là.

Si Hough avait été nommé à la rivière Grand, c’était dans une certaine mesure parce qu’une mission méthodiste y avait été établie en 1822. En fait, ce sont les méthodistes qui proposèrent à Hill un programme de traduction. L’Évangile selon saint Marc, traduit par Joseph Brant, avait été annexé à un livre de prières en agnier publié par la Society for the Propagation of the Gospel en 1787. Quant à l’Évangile selon saint Jean, traduit par John Norton, il avait été publié par la British and Foreign Bible Society en 1804. En dépit de commentaires peu favorables sur la qualité de son travail, Norton, encouragé par la Society for the Propagation of the Gospel, se remit à la tâche avec l’idée de terminer la traduction des Évangiles, et il s’assura le concours de Hill. Toutefois, Norton trouvait ce travail ennuyeux et il en vint à la conclusion que les Agniers eux-mêmes préféreraient les bibles en langue anglaise. L’American Bible Society découvrit en 1823 que Hill, avec l’appui de John Brant [Tekarihogen], travaillait déjà à l’Évangile selon saint Luc, et elle lui proposa de terminer la traduction des quatre Évangiles. Le missionnaire William Case* transmit des rapports selon lesquels Hill était parfois porté à s’enivrer mais, d’après certains, ce dernier était en train de se réformer. D’ailleurs, malgré les inquiétudes de Case, Hill se révéla un travailleur assidu. Sa traduction de l’Évangile selon saint Luc parut en 1828 (la page de titre porte l’année 1827, ce qui s’explique par la grande difficulté de l’imprimeur de New York, Azor Hoyt, à composer l’ouvrage). Trois cent cinquante exemplaires furent envoyés à la mission méthodiste de la rivière Grand, et cinquante dans le Bas-Canada. L’Église d’Angleterre, se tenant à l’écart des non-conformistes au sein des sociétés bibliques, se servit peu des traductions faites par Hill.

L’intérêt de l’American Bible Society diminua lui aussi. La York Auxiliary Bible Society, formée en 1828, constatant qu’il existait déjà des textes de la Bible en agnier, commença à faire des traductions dans la langue des Sauteux. Ce fut donc la Young Men’s Bible Society de New York, un service auxiliaire de l’Église méthodiste épiscopale aux États-Unis, qui continua la publication des saintes Écritures en agnier. De 1831 à 1836, cette société patronna la traduction de ce qui restait à faire dans le Nouveau Testament, à l’exception de la IIe épître aux Corinthiens. C’est Hill qui accomplit le gros du travail, puis, après sa mort en 1834, les corrections et le parachèvement de certains textes furent effectués par John Aston Wilkes, marchand de Brantford, William Hess, instituteur agnier, et Elizabeth Kerr, née Brant. La traduction du livre d’Isaïe, commencée par Hill et terminée par Hess, fut publiée par l’American Bible Society en 1839, mais cet organisme résista aux pressions faites pour l’amener à poursuivre la traduction de l’Ancien Testament. Hill fut aussi le traducteur en chef d’un recueil de psaumes et d’hymnes qui donna lieu à deux impressions distinctes, l’une destinée aux méthodistes et l’autre aux anglicans.

Aux yeux de certains qui le qualifièrent de docteur, de pasteur ou de chef, Henry Aaron Hill semblait plus important qu’il ne l’était vraiment. Toutefois, souvent son nom n’apparaissait pas sur la page de titre de ses traductions, et son travail a été peu reconnu à l’époque où il vivait, ou même plus tard. Et pourtant c’est lui qui a traduit la majeure partie des hymnes et des textes de la Bible que les Agniers peuvent lire dans leur propre langue.

Richard E. Ruggle

Pour plus d’informations sur les traductions de Henry Aaron Hill, le lecteur se référera à l’article de J. C. Pilling, « Bibliography of the Iroquoian languages », Smithsonian Institution, Bureau of American Ethnology, Bull. (Washington), 6 (1888) : 82–86.

AO, MS 500, H. A. Hill, deposition, 28 juin 1830.— P. Campbell, Travels in North America (Langton et Ganong).— Doc. hist. of campaign upon Niagara frontier (Cruikshank), 2 : 308–310.— Francis Hall, Travels in Canada, and the United States, in 1816 and 1817 (Londres, 1818).— Norton, Journal (Klinck et Talman).— « The Rev. Robert Addison : extracts from the reports and (manuscript) journals of the Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts », A. H. Young, édit., OH, 19 (1922) : 186–190.— SPG, [Annual report] (Londres), 1827 : 165–166 ; 1828 : 189.— Valley of Six Nations (Johnston).— John West, A journal of a mission to the Indians of the British provinces, of New Brunswick, and Nova Scotia, and the Mohawks, on the Ouse, or Grand River, Upper Canada (Londres, 1827), 278.— Bibliog. of Canadiana : first suppl. (Boyle et Colbeck).— Officers of British forces in Canada (Irving), 220–221.— R. E. Ruggle, « A house divided against itself : the denominational antagonisms of the Grand River missions » (communication faite lors de la conférence annuelle de la Canadian Soc. of Church Hist., London, Ontario, 1978), 1–10.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Richard E. Ruggle, « KENWENDESHON (Henry Aaron Hill) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/kenwendeshon_6F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique:

Permalien: http://www.biographi.ca/fr/bio/kenwendeshon_6F.html
Auteur de l'article:    Richard E. Ruggle
Titre de l'article:    KENWENDESHON (Henry Aaron Hill)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
Année de la révision:    1987
Date de consultation:    1 décembre 2024