KENNEDY, WILLIAM, trafiquant de fourrures de la Hudson’s Bay Company, marin, explorateur et magistrat, né en avril 1814 à Cumberland House (Saskatchewan), cinquième enfant de l’agent principal Alexander Kennedy et d’Aggathas, son épouse crise ; le 29 novembre 1859, à Londres, il épousa Eleanor Eliza Cripps, et ils eurent un fils et une fille ; décédé le 25 janvier 1890 à St Andrews, Manitoba.
William Kennedy fut envoyé à l’école dans le village natal de son père, St Margaret’s Hope, aux îles Orcades, en 1825 ; pendant les huit années qui suivirent, on lui enseigna le français et d’autres matières. En 1833, il entra à l’emploi de la Hudson’s Bay Company et passa cinq ans dans la vallée de la rivière Outaouais, surtout au fort Coulonge (Fort-Coulonge), dans le Bas-Canada. Transféré dans la région de l’Ungava et du Labrador, il travailla ensuite aux forts Chimo (Fort-Chimo), Trial et Nascopie sur le lac Petitsikapau (Labrador). Les convictions religieuses de Kennedy l’incitèrent à désapprouver la pratique de la compagnie de vendre de l’eau-de-vie aux Indiens, et il remit sa démission en 1846. Il déménagea au Haut-Canada où il entreprit de faire du lobbying contre le monopole de la Hudson’s Bay Company, soutenant qu’on devait permettre au Canada-Uni de s’étendre jusque dans Rupert’s Land. En 1848, il mit sur pied une entreprise de pêche à l’embouchure de la rivière Saugeen et devint ainsi l’un des fondateurs de Southampton, dans le Haut-Canada. De 1848 à 1850, il fut capitaine d’un vaisseau sur le lac Huron.
À la suggestion de l’ancien chef de poste John McLean, lady Franklin [Griffin*] accepta que Kennedy prenne, en 1851, le commandement de la seconde expédition organisée à ses frais pour rechercher son mari, sir John Franklin*, que Kennedy avait rencontré en 1819 à Cumberland House. Peu de temps avant que l’expédition prenne la mer, Joseph-René Bellot*, enseigne de vaisseau dans la marine française, se joignit à Kennedy ; ce dernier avait insisté pour que Bellot soit son commandant en second, en dépit d’une certaine opposition de l’Amirauté britannique. Cette expédition était la mieux préparée de toutes celles qu’on avait envoyées dans l’Arctique jusqu’à ce jour. Kennedy, qui avait travaillé dans l’Ungava et au Labrador, connaissait bien les périls du Nord ; il choisit un noyau d’hommes qui avaient l’expérience des régions sauvages du Canada et il insista pour que son équipage s’habille à l’indigène. Son navire de 89 tonneaux, le Prince Albert, au tirant d’eau très faible, était peu propice à la navigation sur mer, mais il s’avérera très maniable dans les glaces de l’Arctique.
En mai 1851, le Prince Albert quitta Aberdeen, en Écosse, avec 17 membres d’équipage à son bord ; en juillet, près d’Upernavik, au Groenland, l’expédition rencontra l’Advance et le Rescue, commandés par Edwin Jesse De Haven*, que Henry Grinnell, négociant de New York, avait envoyés l’année précédente à la recherche de Franklin. Les trois navires furent retenus par les glaces, et Kennedy et le médecin de l’expédition américaine, Elisha Kent Kane*, se lièrent d’amitié et plus tard entretinrent une correspondance. Kennedy réussit là où les Américains avaient échoué, en parvenant à pénétrer dans le goulet du Prince-Régent par le détroit de Lancaster. À cet endroit, Kennedy utilisa de la poudre explosive dont il avait appris à se servir, en avril précédent, à l’arsenal de Woolwich (maintenant partie de Londres), afin de se frayer un passage à travers la glace.
En septembre, pendant qu’il tentait de faire une reconnaissance du havre Leopold, sur la rive nord-est de l’île Somerset, Kennedy et quatre hommes se trouvèrent séparés du Prince Albert, un déplacement des glaces ayant entraîné le navire au sud. Bellot fit relâche et établit ses quartiers d’hiver dans la baie Batty. Peu familier des voyages dans l’Arctique, il ne réussit à rejoindre Kennedy qu’à la troisième tentative ; ce dernier était resté isolé pendant un peu plus de cinq semaines.
Le Prince Albert étant pris dans les glaces à la baie Batty, Kennedy, Bellot et 12 hommes d’équipage partirent à la fin de février 1852 explorer la région de la péninsule de Boothia. Après un arrêt à la plage Fury, le groupe continua sa route vers le sud le 29 mars, et atteignit la baie Brentford le 5 avril. Huit des hommes d’équipage retournèrent alors au vaisseau. Les six hommes restants repartirent vers le sud-ouest et découvrirent, le 7 avril, un nouveau détroit que Kennedy baptisa plus tard du nom de Bellot. À ce moment critique, il semble qu’à la suite d’une erreur, due peut-être à la cécité des neiges, l’équipe n’explora pas la péninsule de Boothia vers le sud-ouest, selon les ordres reçus. Elle se dirigea plutôt vers l’ouest, du côté de l’île du Prince-de-Galles, traversant les détroits gelés de Peel et de Franklin sans s’en apercevoir, et revint saine et sauve au Prince Albert le 30 mai, après avoir effectué un voyage de quelque 1 100 milles. Le 28 août 1852, le Prince Albert prit la mer, à partir de l’île Beechey, et arriva à Aberdeen environ 40 jours plus tard. Bien que sa recherche des vestiges de l’expédition de Franklin ait été infructueuse, Kennedy contribua à la connaissance de l’Arctique canadien et ramena son équipage en Grande-Bretagne sans avoir perdu un seul homme.
En 1853, on mit sur pied une deuxième expédition dirigée par Kennedy et patronnée par lady Franklin, en vue d’effectuer des recherches dans l’Arctique occidental et l’Arctique russe en passant par le détroit de Béring. Cette mission avorta quand les membres d’équipage se mutinèrent à Valparaíso, au Chili, et que Kennedy les fit emprisonner. Il fut impossible de les remplacer à cause de l’imminence de la guerre de Crimée, et Kennedy retourna en Grande-Bretagne. Comme une troisième expédition ne put s’organiser, il revint au Canada en 1856 et demeura quelque temps à Toronto.
Kennedy se joignit au mouvement d’agitation en faveur de l’annexion de Rupert’s Land au Canada et fit de nouveau du lobbying contre la Hudson’s Bay Company. Il écrivit pour les journaux plusieurs articles sur la « question de l’Ouest » et s’associa à George Brown* qui publia des extraits d’au moins une de ses lettres dans le Globe. Kennedy devint un des administrateurs de la Compagnie de transport, de navigation et de chemin de fer du Nord-Ouest, et effectua un voyage de Toronto à la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba) en février 1857, dans le but de prouver que la route était praticable, même dans les pires conditions atmosphériques. À la Rivière-Rouge, il fit circuler une pétition réclamant l’union avec le Canada, que signèrent 575 colons. L’année suivante, Kennedy transporta le premier courrier de Toronto à la Rivière-Rouge pour la Compagnie de transport, de navigation et de chemin de fer du Nord-Ouest, qui détenait le contrat du gouvernement canadien.
En 1860, Kennedy s’établit définitivement à la Rivière-Rouge où il construisit sa maison, The Maples, à St Andrews (la maison abrite aujourd’hui le Red River House Museum). Il y tint un magasin avec son frère George. Il devint membre du bureau d’Éducation de Manitoba en 1878, et magistrat l’année suivante. Le 13 février 1879, il présenta le premier mémoire scientifique à la Société historique et scientifique de Manitoba. Au cours des années 1880, Kennedy plaida en faveur de la construction d’un chemin de fer devant atteindre Churchill (Manitoba), sur la baie d’Hudson, afin de briser le monopole de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique. Combatif jusqu’à la fin, il mourut le 25 janvier 1890. Dans son éloge funèbre à la mémoire de Kennedy, le chanoine Samuel Pritchard Matheson* affirma qu’« il était un homme à qui on ne rendit jamais justice. Pendant que d’autres hommes beaucoup moins méritants recevaient honneur et rétribution, il restait ignoré. »
William Kennedy est l’auteur de A short narrative of the second voyage of the Prince Albert, in search of Sir John Franklin (Londres, 1853).
PAM, HBCA, A.12 ; B.38/a/7 ; C.1/806 ; MG 2, C1 ; MG 7, C12 ; MG 10, F2, Minutes, 1879.— Scott Polar Research Institute (Cambridge, Angl.), ms 248/105, 14 janv. 1851 ; ms 248/107, 2 mai 1851.— J.-R. Bellot, Memoirs of Lieutenant Joseph René Bellot [...] with his journal of a voyage in the polar seas, in search of Sir John Franklin, [Julien Lemer, édit.] (2 vol., Londres, 1855), I : 93, 136, 198 ; II : 14, 180.— Globe, 16 sept. 1848, 22 janv. 1857.— Manitoba Morning Free Press, 27 janv. 1890, 30 avril 1910.— Times (Londres), 3 nov. 1853.— Manitoba directory [...] (Winnipeg), 1878–1879.— W. S. Fox, The Bruce beckons ; the story of Lake Huron’s great peninsula (Toronto, 1952).— W. J. Healy, Women of Red River : being a book written from the recollections of women surviving from the Red River era (Winnipeg, 1923).— L. H. Neatby, The search for Franklin (Edmonton, 1970).— Noel Wright, Quest for Franklin (Londres et Toronto, 1959).— E. C. Shaw, « Captain William Kennedy, an extraordinary Canadian », HSSM Papers, 3e sér., no 27 (1970–1971) : 7–18.
Edward Charles Shaw, « KENNEDY, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/kennedy_william_11F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
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