JOURDAIN (Jourdain, dit Labrosse), CHARLES, maître maçon et entrepreneur, né le 8 mai 1734 à Longue-Pointe (Montréal), fils de Charles Jourdain, dit Labrosse, tailleur, et de Marie-Joseph Aubuchon, dit L’Espérance ; décédé après 1823, probablement à Québec.
La famille des Jourdain, dit Labrosse, de Montréal, était alliée à celle des Jourdain, de Québec, qui était déjà fort active dans le domaine de la construction lorsque Charles vint s’établir dans cette ville, vraisemblablement après la Conquête. Ce dernier avait d’ailleurs passé sa jeunesse au milieu des artisans du bois et de la pierre ; Paul-Raymond Jourdain*, dit Labrosse, sculpteur renommé de la région montréalaise, était son oncle.
Les mises en chantier dans le domaine de la construction étant plus importantes dans la région de Québec au début du Régime anglais, il est compréhensible qu’en sa qualité de maçon Jourdain ait jugé bon de s’y établir ; d’ailleurs, il y retrouvait ses cousins Augustin et Michel Jourdain, également maçons. En 1818, le recensement de la ville de Québec fait mention de la présence dans sa maison de la rue Saint-Jean d’une femme nommée Henriette Jourdain, âgée de 28 ans ; on peut présumer que cette dernière était sa nièce, puisque aucun contrat de mariage liant Jourdain n’a pu être retracé.
À partir de 1798, Jourdain signe de nombreux marchés de construction à Québec avec la nouvelle élite commerçante. Il semble d’ailleurs se spécialiser dans la réalisation d’ouvrages de maçonnerie pour des bâtiments ayant une fonction industrielle. Ainsi, en 1800, il entreprend pour le compte de la firme Lester and Morrogh les travaux de maçonnerie de la Cape Diamond Brewery qui comprend une brasserie de 74 pieds de longueur sur 64 de largeur et sur 20 de hauteur, un hangar de 65 pieds sur 40, avec deux cheminées, et un magasin de 26 pieds carrés. En 1802, il construit également les fondations en pierre, les fours et les cheminées pour une boulangerie du quartier Saint-Roch appartenant à George Miller. Ses services sont requis sept ans plus tard par Christian (Christianna) Ainslie, épouse de John Young*, afin d’effectuer des travaux d’agrandissement à la malterie de la St Roc Brewery ; à cet effet, un marché est conclu au prix de £300. Enfin, le 22 février 1810, il s’engage à monter un immense entrepôt rue Saint-Pierre pour le marchand John Mure.
Même si Jourdain entreprend des travaux pour la fabrique de Notre-Dame et le séminaire de Québec, ses principales réalisations se font du côté des édifices civils. Ainsi, en 1815, il obtient un contrat pour agrandir la salle de la Cour du banc du roi conformément au plan de François Baillairgé ; ces transformations comprennent la construction de deux nouvelles ailes, avec cave voûtée et soupiraux. Selon les termes du contrat, Jourdain doit fournir tous les matériaux, dont la pierre en provenance des carrières de Beauport. Ce marché est conclu au prix de £3 10s par toise jusqu’à concurrence de £1 850. Les travaux seront terminés au mois de juillet 1816 et ils auront exigé 674 « jours maçons » à 7s par jour, 439 « jours manœuvres » à 5s par jour et 336 voyages de mortier à 8s l’unité.
La compétence de Jourdain avait aussi été reconnue par Jean-Baptiste Bédard*, important charpentier de Québec, qui lui avait confié en 1809 la construction de sa maison à raison de « quarante shellins par toise de maçonne de mur, le toisé en étant vérifié par Pierre-Florent Baillairgé [Pierre-Florent Baillairgé*] ». Jourdain agit en outre à titre d’expert pour juger la qualité des travaux dans les cas de contestation, comme il est d’usage chez les artisans du bâtiment dont l’expérience est reconnue. La dernière trace de ce maître maçon remonte au 22 décembre 1823 au moment où la Gazette de Québec parle de lui comme l’un des administrateurs de la Banque d’épargne de Québec.
Il est difficile d’évaluer l’apport de Charles Jourdain à l’évolution stylistique des bâtiments de cette période. En observant sa carrière, on remarque qu’il ne fut manifestement qu’un exécutant à une période où l’industrie de la construction connaissait un essor très important à la suite de l’augmentation de la population urbaine de Québec et de la naissance de nouveaux quartiers et de nouveaux services. C’est du côté des architectes et des ingénieurs militaires qu’il faut chercher des manifestations de créativité.
ANQ-M, CE1-23, 9 mai 1734.— ANQ-Q, CN1-16, 31 janv. 1807, 23 juin 1809, 22 févr. 1810, 17 oct. 1816 ; CN1-26, 5, 10 mars, 5 avril 1804, 23 mars, 27 avril, 21 juin 1805, 11 nov., 31 déc. 1806, 29 juill., 3 déc. 1807, 9 juin, 20 juill. 1808, 31 janv., 28 mars, 15 mai 1809, 5 oct. 1810, 15 juill., 1er août 1811, 10 juin, 6 oct. 1812, 10, 11 janv., 6 déc. 1814, 21 juill. 1815, 22 janv. 1816, 16 févr. 1819 ; CN1-171, 10 sept. 1818, 9 sept. 1820 ; CN1-178, 4 juin 1808, 24 avril 1809, 26 mai 1814 ; CN1-230, 27 juin 1800, 20 mai 1807, 11 mai 1812, 13 mai 1815, 16 mai 1817, 13 févr. 1823 ; CN1-253, 25 avril 1812, 29 sept. 1813, 26 juill. 1823, 5 mai 1826.— AP, Notre-Dame de Québec, Cahiers des délibérations de la fabrique, 1777–1825 : 234–237.— ASQ, C 39 : 21, 38, 41–43, 65, 82, 87, 113–114, 134, 155 ; Séminaire, 121, nos 403–410.— La Gazette de Québec, 10 juill. 1794, 14 mai 1801, 19 mars 1812, 22 déc. 1823.
Raymonde Gauthier, « JOURDAIN (Jourdain, dit Labrosse), CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/jourdain_charles_6F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
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