JONES, JOHN, arpenteur, né vers 1743 ; décédé le 16 août 1823 à Augusta (Maine).

Avant la signature des traités de Versailles entre la Grande-Bretagne et les États-Unis en 1783, les Penobscot Associated Loyalists du district du Maine firent des tentatives pour venir s’installer en Nouvelle-Écosse. Parmi ceux qui aidèrent leurs chefs à organiser le transfert de plusieurs centaines de colons vers un emplacement convenable sous autorité britannique se trouvait un arpenteur de talent, John Jones.

On dit que Jones habita Concord, au Massachusetts, durant sa jeunesse. Il apprit apparemment son métier d’arpenteur en travaillant pour la Plymouth Company, association qui regroupait les propriétaires d’une étendue de terre appelée Kennebec Purchase. Dès 1771, il se trouvait dans la région de Kennebec où il dirigeait un certain nombre de travaux d’arpentage pour la compagnie. Il avait élu domicile à Hallowell. Quand éclata la Révolution américaine, Jones choisit de rester fidèle à la cause britannique et, en 1778 ou au début de 1779, il fut emprisonné à Boston. Il s’évada au printemps de 1779 et tenta alors de gagner Québec via le lac Champlain ; une fois arrivé à destination, il reçut une commission de capitaine dans un régiment commandé par le lieutenant-colonel Robert Rogers*. Peu après, Jones fut envoyé au fort George (Castine, Maine), que des militaires du 74th Foot et du 82nd Foot, sous les ordres du général de brigade Francis McLean*, avaient construit comme mesure préalable à l’établissement d’un refuge loyaliste sur les bords de la rivière Penobscot [V. John Caleff*]. Là, il devint célèbre pour les raids qu’il mena avec de petites troupes contre les établissements rebelles ; à la tête de sa bande de rangers, il marauda un peu partout dans les régions côtières. Il fut aussi chargé de porter des dépêches à Québec et à Halifax.

Les talents d’arpenteur de Jones durent être utiles à Robert Pagan qui fut, parmi les civils du fort George, le premier responsable de l’établissement des réfugiés le long de la rivière Penobscot après mai 1780. À la suite de la signature des traités de 1783 et du choix de la rivière Sainte-Croix comme frontière entre les États-Unis et la Nouvelle-Écosse, Pagan engagea Jones pour aider à préparer un emplacement urbain et des concessions foncières à la baie de Passamaquoddy (Nouveau-Brunswick), juste à l’est de la rivière Sainte-Croix. De concert avec le représentant loyaliste William Gallop* et l’arpenteur Charles Morris, Jones avait déjà commencé, en août 1783, à faire le tracé de St Andrews et des lots adjacents situés le long de la baie et de la rivière. Au cours de l’automne, le colonel John Allan*, surintendant américain des Affaires des Indiens de l’Est, captura Jones pendant qu’il faisait de l’arpentage. Prétendant que la rivière Sainte-Croix mentionnée dans les traités se trouvait plus loin à l’est, Allan essayait de bloquer toute tentative d’établissement ou de fortification de la région de Passamaquoddy par les loyalistes de Penobscot. Jones réussit toutefois à s’évader et parvint à terminer ses travaux d’arpentage. En tant qu’arpenteur, il eut aussi maille à partir avec les nouveaux colons. Les réfugiés affluèrent avant que ne soient terminés les travaux essentiels d’arpentage des fermes, lesquels prirent encore plus de retard quand les lots donnant sur la mer furent occupés et qu’il fallut en trouver d’autres dans l’arrière-pays. Jones fut souvent accusé de favoritisme, de négligence et de pure impolitesse dans ses rapports avec les réfugiés civils et militaires. Pour être juste, cependant, il faut tenir compte du fait que de 1783 à 1785 il fut pratiquement seul pour faire ses travaux.

On a décrit Jones comme un homme de « petite taille, au corps massif et au teint basané ». La couleur de sa peau lui valut quelquefois d’être appelé Jones le Noir ou Jones l’Acajou. On sait peu de chose de la vie qu’il mena dans le comté de Charlotte. Il acquit un lot de ville à St Andrews et un lot de culture maraîchère à Waweig, tout près de là, mais on ne sait pas avec certitude où il décida de vivre. Il ne semble pas avoir mis en valeur les 500 acres de terre qu’il avait obtenues à Waweig, avec privilège d’y exploiter un moulin. À la fin de 1784, avec Moses Gerrish et d’autres, il reçut un permis d’exploitation de l’île Grand Manan ; il se départit de ses intérêts dans cette propriété trois ans plus tard.

Selon le révérend Jacob Bailey*, compatriote loyaliste du Maine qui avait loué le « génie actif et entreprenant » de John Jones pendant la révolution, celui-ci perdit « une grosse fortune » à cause de sa loyauté. Blessé peut-être par les tourments que lui faisaient subir les colons de Passamaquoddy et sans doute frustré parce qu’il n’arrivait pas à trouver dans la communauté un poste permanent et plus payant que celui d’arpenteur, Jones retourna dans la région de Kennebec. Il peut s’être établi là en 1793, au moment où il dressa une carte pour la Plymouth Company. Il vivait déjà à Augusta en 1809, et c’est là qu’il mourut 14 ans plus tard. Seule sa femme, Ruth Lee, originaire de Concord, lui survécut ; aucun enfant n’était né de leur mariage.

Roger Nason

APNB, RG 2, RS6, B ; RG 10, RS107, C4/1–4 ; RG 18, RS148, A1.— N.-B., Dept. of Natural Resources, Lands Branch (Fredericton), Index to Nova Scotia grants, 1765–1784 ; Land grant books.— PRO, AO 13, bundle 75.— Winslow papers (Raymond).— Vital records of Augusta, Maine, to the year 1892, E. C. Conant, édit. (2 vol., [Auburn, Maine], 1933–1934).— J. H. Ahlin, Maine Rubicon : downeast settlers during the American revolution (Calais, Maine, 1966).— W. S. Bartlet, The frontier missionary : a memoir of the life of the Rev. Jacob BaileyA.M., missionary at Pownalborough, Maine ; Cornwallis and Annapolis, N.S. (Boston, 1853).— H. A. Davis, An international community on the St. Croix, 1604–1930 (Orono, Maine, 1950).— Eastport and Passamaquoddy : a collection of historical and biographical sketches, W. H. Kilby, compil. (Eastport, Maine, 1888).— Guy Murchie, Saint Croix : the sentinel river (New York, 1947).— R. P. Nason, « Meritorious but distressed individuals : the Penobscot Loyalist Association and the settlement of the township of St. Andrews, New Brunswick, 1783–1821 » (thèse de m.a., Univ. of N.B., Fredericton, 1982).— Hunter Boyd, « Waweig », Acadiensis (Saint-Jean, N.-B.), 7 (1907) : 274–283.— Robert Fellows, « The loyalists and land settlement in New Brunswick, 1783–1790 : a study in colonial administration », Canadian Archivist ([Calgary]), 2 (1970–1974), no 2 : 5–15.— R. H. Gardiner, « Jones’s Eddy », Maine Hist. Soc. Coll. (Portland), 1re sér., 4 (1856) : 41–48.— W. H. Siebert, « The exodus of the loyalists from Penobscot and the loyalist settlements at Passamaquoddy », N.B. Hist. Soc., Coll., 3 (1907–1914), no 9 : 485–529.

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Roger Nason, « JONES, JOHN (mort en 1823) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/jones_john_1823_6F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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