IROQUET (Yroquet), chef algonquin ; circa 1609–1615.

Iroquet fut le premier chef algonquin à rencontrer Champlain au mois de juin 1609, près de Québec où il s’était rendu en compagnie du chef huron Outchetaguin en vue de conclure une alliance avec les Français pour faire la guerre aux Iroquois. Champlain consentit à se joindre à eux et sa première attaque contre les Iroquois eut lieu sur le lac Champlain quelques jours plus tard.

Champlain accepta alors de retrouver Iroquet et Outchetaguin l’année suivante à l’embouchure de la rivière des Iroquois (Richelieu), inaugurant ainsi l’historique alliance diplomatique et commerciale conclue entre les Hurons et les Algonquins d’une part et les Français de l’autre.

Toutefois, Iroquet et Outchetaguin arrivèrent trop tard, en 1610, pour prendre part à la deuxième attaque de Champlain contre les Iroquois ; ils tinrent cependant un conseil de trois jours avec Champlain dans l’île de Saint-Ignace. Champlain pria Iroquet d’emmener un jeune Français [probablement Étienne Brûlé] passer l’hiver chez lui, à 80 lieues en amont des Rapides (Lachine), afin de lui permettre d’apprendre sa langue, d’observer les diverses tribus et d’explorer les cours d’eau et les mines. Iroquet accepta, mais ses compagnons craignaient les conséquences qui pourraient s’ensuivre s’il arrivait quoi que ce soit au garçon. Champlain les rallia cependant à l’idée en acceptant de ramener en France avec lui un jeune Huron du nom de Savignon.

Conformément au projet conçu, Champlain accueillit Iroquet et Outchetaguin l’année suivante (1611) dans le Saint-Laurent, par une salve d’arquebuses, de mousquets et de petits canons ainsi que par deux saluts des 13 pinasses qui étaient arrivées pour faire le commerce des fourrures. Tout ce bruit effraya fort les Indiens, dont la plupart n’avaient jamais vu d’Européens. Champlain commerça longuement avec eux aux Rapides et en profita pour se renseigner sur la géographie du pays. Bien que peu rassurés par beaucoup des autres traitants français, les Indiens exprimèrent de nouveau leur confiance en Champlain et promirent de lui faire visiter leur pays. De son côté, Champlain s’engagea à demander au roi d’envoyer une petite armée qui l’accompagnerait chez eux et à y fonder un établissement.

Champlain fut entièrement satisfait de la façon dont Iroquet avait traité le jeune Français et il permit à un deuxième garçon, attaché au traitant Boyer (Bouvier), d’accompagner les Algonquins, à condition qu’il habitât avec Iroquet.

En 1615, Champlain, tenant la promesse qu’il avait faite en 1611, se rendit au pays huron à la tête d’une troupe de soldats français. Iroquet était le chef des Algonquins du groupe huron-algonquin qui partit en guerre contre les Iroquois et que Champlain conduisit du pays huron, en bordure de la baie Georgienne, jusqu’au pays iroquois, situé au sud du lac Ontario.

À leur retour de cette incursion, Iroquet et ses Algonquins hivernèrent près du village huron de Cahiagué (près de la ville actuelle de Hawkestone, en Ontario). La façon dont Iroquet avait traité un captif que les Hurons lui avaient remis pour qu’il lui fît subir les tortures habituelles suscita de l’animosité entre les deux groupes. Ce captif était un homme intelligent, bon chasseur, et Iroquet le traita avec une bonté paternelle. Indignés par cette façon d’agir, les Hurons chargèrent un des leurs de tuer le captif. Par mesure de représailles, les Algonquins tuèrent le meurtrier ; sur quoi les Hurons, doublement outragés par ce massacre d’un de leurs guerriers, attaquèrent les Algonquins. Deux flèches atteignirent Iroquet, qui fut blessé.

Pour assurer la paix, les Algonquins durent remettre aux Hurons « cinquante colliers de pourceline avec cent bécasses d’icelle ; ce qu’ils estiment de grand valeur parmy eux et outre ce nombre de chaudières et haches, avec deux femmes prisonnières ». Mais la situation restait dangereuse pour les Algonquins et, de l’avis de Champlain, cette instabilité parmi les indigènes mettait en péril les résidents français de la région et risquait de ruiner le commerce.

Deux habitants de Cahiagué vinrent trouver Champlain, qui se trouvait à quelque distance de là, pour l’implorer de tenter une réconciliation. Champlain y consentit, mais il visita d’abord un établissement de Népissingues avec lesquels il s’était proposé d’aller en voyage de découverte dans le Nord. À son grand regret, il constata qu’Iroquet y était passé avant lui et qu’il avait, au moyen de cadeaux de wampum, arraché aux Népissingues la promesse de remettre ce voyage à plus tard. Iroquet voulait peut-être empêcher la conclusion d’alliances commerciales entre Champlain et d’autres nations ; peut-être aussi voyait-il dans la proximité du village populeux de Cahiagué – qui, selon Champlain, comprenait alors environ 200 cabanes – une menace possible pour ses guerriers relativement peu nombreux.

Sagard rapporte qu’en 1623–1624, un Indien du nom d’Yroquet, bien connu dans ces parages, s’était rendu au pays des Neutres avec 20 de ses hommes pour y chasser le castor et qu’ils en prirent « bien cinq cens ». On ne put toutefois l’amener à révéler aux Français la route conduisant du Saint-Laurent au pays des Neutres, situé en bordure du lac Érié. C’est qu’en effet les Algonquins et les Hurons voulaient se réserver le monopole des fourrures, dont dépendait alors la prospérité économique de la Nouvelle-France.

Selon la coutume, la tribu d’Iroquet était souvent connue sous le nom de son chef. En 1644, le père Barthélemy Vimont déclara que ces Indiens étaient « extrêmement insolents, arrogants, très superstitieux et de mœurs très libres », tandis que leur chef d’alors disait qu’ils étaient « les vestiges de l’une des tribus les plus florissantes qui aient jamais habité ce pays ».

Elsie McLeod Jury

Champlain, Œuvres (Biggar), passim.— JR (Thwaites), passim.— Sagard, Histoire du Canada (Tross), III : 803.— Desrosiers, Iroquoisie, 61–64.— Hunt, Wars of the Iroquois, 57, 63.

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Elsie McLeod Jury, « IROQUET (Yroquet) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/iroquet_1F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1966
Année de la révision:    1986
Date de consultation:    1 décembre 2024