HERDT, LOUIS-ANTHYME, ingénieur, professeur et expert scientifique, né le 14 juin 1872 à Trouville-sur-Mer, France, fils de John Herdt, banquier, et d’Hélène-Denise-Amélie Fleury de La Hussinière ; le 4 mai 1897, il épousa à Montréal Blanche Dugas (décédée en 1907), fille du juge Calixte-Aimé Dugas, et ils eurent deux fils ; décédé le 11 avril 1926 à Montréal.

La famille de Louis-Anthyme Herdt arrive à Montréal vers 1880. Protestant de confession, le jeune Louis-Anthyme est aussitôt dirigé vers la réputée High School of Montreal. En 1889, il entre à la McGill University, où il obtient, en 1893, une licence en génie électrique. Appelé à faire son service militaire en France, il en profite pour parfaire sa formation d’ingénieur sur le continent européen. En effet, en raison d’une surdité partielle, il est exempté de ses devoirs militaires et il s’inscrit alors à l’Institut électrotechnique Montefiore à Liège, en Belgique. Un an plus tard, il poursuit ses études à l’École supérieure d’électricité de Paris. De retour à Montréal en 1895, Herdt est engagé comme démonstrateur au département de génie électrique de McGill. En 1897, il devient maître de conférences et, l’année suivante, obtient son diplôme de maîtrise de cette université. En cette fin de siècle, l’enseignement et la recherche en sciences connaissent, à McGill, un développement important. Grâce aux dons faramineux du magnat du tabac, sir William Christopher Macdonald*, plusieurs bâtiments et laboratoires consacrés aux sciences et surtout aux sciences appliquées sont érigés sur le campus de l’université. Ainsi, en 1896, Macdonald donne 30 000 $ pour le laboratoire de génie électrique. C’est dans ces conditions exceptionnelles que Herdt s’initie à la recherche au moment où le Québec s’apprête à découvrir son potentiel hydroélectrique.

Les premiers travaux de Herdt au laboratoire de génie électrique portent sur le rendement des moteurs et des alternateurs électriques. Il travaille alors avec le professeur Robert Bowie Owens, principal responsable du développement du génie électrique à McGill. Avec l’aide de ce dernier, Herdt met au point une invention qui permet de guider les navires dans un canal de navigation. Ces derniers doivent être équipés, à la proue, d’un détecteur de variation du champ magnétique que génère un câble placé au fond de l’eau. Ainsi, le capitaine peut garder le cap du navire sur la trajectoire déterminée par le câble, et ce, même dans des conditions de visibilité nulle. Cette invention, testée pour la première fois en 1904 sur le Saint-Laurent, en présence du ministre de la Marine et des Pêcheries Raymond Préfontaine*, vaut à Herdt les éloges de la communauté scientifique. Il faudra cependant attendre la Première Guerre mondiale pour que cette découverte révèle tout son potentiel : grâce à l’invention de Herdt, les navires de la marine royale pourront être guidés dans les ports anglais pendant le conflit. En 1907, Herdt devient professeur assistant au département de génie électrique de McGill et, deux ans plus tard, il occupe la chaire Macdonald de génie électrique et succède à Owens comme directeur du département, poste qu’il occupera jusqu’à sa mort. En 1910, l’université reconnaît la valeur de ses travaux scientifiques en lui décernant un doctorat en sciences.

À la fin du xixe siècle, des transformations économiques importantes obligent les gouvernements provinciaux et les municipalités à créer de nouveaux organismes pour réglementer l’exploitation des ressources naturelles et pour coordonner la mise en place des principaux services publics. Commissions d’enquêtes, services techniques, ministères et commissions de surveillance nécessitent le recrutement d’experts scientifiques, dont les ingénieurs représentent certes le groupe le plus important. L’intérêt de Herdt pour la résolution de problèmes concrets dans le domaine de l’électricité le place au premier rang des spécialistes sollicités par ces organismes. Dès 1907, il est nommé à la Commission des ingénieurs-conseils de la ville de Winnipeg qui supervise les travaux du complexe hydroélectrique de Pointe du Bois. Que ce soit pour mettre en valeur le potentiel hydroélectrique de la rivière des Outaouais ou celui du Nouveau-Brunswick, Herdt est appelé à donner son opinion afin d’éclairer les décideurs. À Montréal, il fait partie de la plupart des commissions de services publics. En 1912, il est nommé par le lieutenant-gouverneur en conseil président de la Commission des services électriques de la ville de Montréal, qui a notamment pour mandat de superviser la construction de conduits souterrains, où seront placés les nombreux câbles électriques de la ville. En 1916, le gouvernement provincial crée la Commission des tramways de Montréal pour assurer une certaine uniformisation des services et des contrats de la Compagnie des tramways de Montréal, et Herdt agit alors comme ingénieur-conseil. Une entente de 36 ans est conclue en juin 1918 entre la ville de Montréal et la compagnie. La Commission des tramways devient alors une commission permanente et Herdt en est nommé l’un des deux vice-présidents. Les décisions en matière de transport public à Montréal ne seront plus du ressort d’une compagnie privée ou de la ville de Montréal mais de cette commission. La même année, Herdt se rend aux États-Unis afin d’étudier les différents réseaux de transport métropolitain.

L’engagement de Herdt dans les entreprises de services publics et ses travaux scientifiques l’amènent à occuper des postes honorifiques au sein d’organismes nationaux et internationaux. Élu membre de la Société canadienne des ingénieurs civils en 1899, il en devient conseiller à partir de 1907. Délégué à la Commission électrotechnique internationale tenue à Londres en juin 1906, il contribue à la définition des normes en matière d’électricité. Il est admis à la Société royale du Canada en 1911.

Au moment du déclenchement de la Première Guerre mondiale, Herdt se rend en France afin de participer à l’effort de guerre, mais les autorités militaires françaises lui demandent de retourner au Canada, où ses services seront plus utiles. Peu après, il devient consultant technique auprès de la mission française d’artillerie à New York : il supervise les contrats qu’elle signe et le matériel qu’elle achète de manufacturiers canadiens pour des téléphones de campagne. En reconnaissance des services qu’il a rendus, le gouvernement français lui décernera la Légion d’honneur en 1923.

Au milieu des années 1920, Louis-Anthyme Herdt commence à éprouver des problèmes de santé. Il souffre de dépression et est traité à l’hôpital Royal Victoria. Le dimanche 11 avril 1926, son fils John Dougas remarque que son père, en quittant la maison pour se rendre à son bureau de la McGill University comme tous les dimanches, semble avoir retrouvé la forme. Quelques heures plus tard, le corps de Herdt est découvert par un des gardiens de l’édifice. Le réputé professeur de McGill et vice-président de la Commission des tramways, âgé de 53 ans seulement, s’est tiré une balle dans la tête, mettant fin tragiquement à une brillante carrière scientifique. Au cours de celle-ci, Herdt a contribué à l’élaboration de normes dans plusieurs domaines liés à l’usage de l’électricité. Il s’est également illustré comme conseiller technique dans la mise en place de centrales hydroélectriques et s’est révélé un expert important auprès des organismes publics de régulation et de réglementation des services reconnus d’utilité publique.

Robert Gagnon

Louis-Anthyme Herdt est l’auteur de : Notes of polyphase equipments of some European high speed electric railways ([Montréal ?, 1902 ?]) ; The use of electricity on the Lachine Canal ([Montréal ?, 1904 ?]) ; et Electrolysis in the city of Winnipeg (s.l., [1910 ?]). Il a aussi publié plusieurs articles, notamment dans le Canadian Electrical News and Engineering Journal (Toronto) et dans les Trans.(Montréal) de la Soc. canadienne des ingénieurs civils. On trouvera une liste partielle de ses écrits dans Science and technology biblio. (Richardson et MacDonald).

ANQ-M, CE601-S1, 4 mai 1897.— Arch. départementales, Calvados (Caen, France), État civil, Trouville-sur-Mer, 17 juin 1872.— SAUM, Reference Room Staff Index, Herdt, L.-A. ; RG 49, scrapbooks and newspaper clippings, 1–6.— Montreal Daily Star, 13 avril 1926.— Christopher Armstrong et H. V. Nelles, Monopoly’s moment : the organization and regulation of Canadian utilities, 1830–1930 (Philadelphie, 1986), 251–254.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1912).— « Dr. Louis A. Herdt », McGill News (Montréal), 7, no 3 (juin 1926) : 29s.— R. C. Fetherstonhaugh, McGill University at war, 1914–1918, 1939–1945 (Montréal, 1947).— S. B. Frost, McGill University : for the advancement of learning (2 vol., Montréal, 1980–1984), 2 : 104.— Robert Gagnon et A. J. Ross, Histoire de l’École polytechnique, 1873–1990 ; la montée des ingénieurs francophones (Montréal, 1991), 178–181.— Linteau, Hist. de Montréal, 273.— « Louis Anthyme Herdt », SRC, Mémoires, 3e sér., 20 (1926), proc. : xxi–XXIV.— McGill Univ., Annual report (Montréal), 1894–1926.

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Robert Gagnon, « HERDT, LOUIS-ANTHYME », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/herdt_louis_anthyme_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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