HEPBURN, JOHN, marin et voyageur dans l’Arctique, né en 1794 à Whitekirk, East Lothian, en Écosse, décédé le 5 avril 1864 à Port Elizabeth (République d’Afrique du Sud).

Après une éducation sommaire à l’école paroissiale locale, John Hepburn fut vacher à l’estuaire de Forth durant son adolescence. Autour de 1810, il devint mousse et passa les trois années suivantes à naviguer entre Newcastle et Londres. Son apprentissage terminé, il s’embarqua à destination de l’Amérique du Nord, sur un navire marchand qui fit naufrage au retour. Capturé par un corsaire américain, Hepburn fut remis plus tard à la marine royale. En 1818, il servit dans la marine comme matelot de deuxième classe sur le brick Trent, commandé par le lieutenant John Franklin* durant l’expédition du capitaine David Buchan* dans l’archipel de Spitzberg. En 1819, on le choisit pour accompagner Franklin, le docteur John Richardson, George Back* et Robert Hood* dans une expédition qui devait explorer par voie de terre la côte située à l’est de l’embouchure de la rivière Coppermine (Territoires du Nord-Ouest). Bien que 20 voyageurs canadiens aient fait partie de l’expédition, les officiers trouvèrent Hepburn indispensable et de loin le plus digne de confiance ; le plus honnête, le plus courageux et le plus assidu au travail de tous leurs subordonnés. En 1821, lorsque les explorateurs, tenaillés par la faim, avançaient péniblement de la côte arctique vers le fort Enterprise, Hepburn, qui n’était guère en meilleur état que les autres, se dépensa sans compter pour trouver du combustible et de la « tripe-de-roche » (polypode de Virginie) servant d’aliment, alors que ses compagnons se sentaient trop faibles pour le faire. Au fort Enterprise, Hepburn et Richardson furent les seuls à trouver la force nécessaire pour continuer à chercher du combustible et de la nourriture jusqu’à ce qu’ils eurent reçu du secours, bien que les membres de Hepburn aient été fortement enflés.

À leur retour en Angleterre en 1822, Franklin intervint en faveur de Hepburn auprès de l’Amirauté. Dans l’une de ses recommandations, il mentionna que la conduite de Hepburn « pendant une période extrêmement difficile et pénible fut tellement humaine et excellente qu’il méritait la promotion la plus élevée à laquelle sa condition lui donnait droit ». Comme résultat des efforts de Franklin, Hepburn fut promu second maître dans la marine et obtint un poste confortable à Leith, en Écosse, étant en charge d’un petit bateau qui approvisionnait la flotte. Plus tard, il devint gardien au Haslar Hospital. Il resta en contact avec Franklin ; le respect mutuel et l’expérience des vicissitudes vécues en commun avaient fait naître une chaleureuse amitié entre le simple matelot et son chef. Lorsqu’en août 1836, Franklin accéda au poste de lieutenant-gouverneur de la Terre de Van Diemen (Tasmanie), il emmena Hepburn avec lui. Ce dernier avait contracté mariage à cette époque mais on ne sait rien de plus à ce sujet.

À la Terre de Van Diemen, il servit d’abord comme surintendant de la résidence du gouverneur, puis comme directeur de la maison de correction de Point Puer pour jeunes délinquants. Franklin rentra en Angleterre en 1844, mais Hepburn semble être resté jusqu’en 1850. À son retour, la recherche de l’expédition de Franklin, disparue durant sa tentative de trouver le passage du Nord-Ouest, battait son plein. Lady Franklin [Jane Griffin*] insista pour que Hepburn fasse partie de la seconde expédition de recherche qu’elle organisait et qui devait s’embarquer sur le Prince Albert ; elle lui écrivit : « Ne cherchez pas à dire (car je sais à quel point vous êtes modeste lorsqu’il s’agit de vos propres mérites) que vous n’êtes pas compétent, car nous pensons tous et savons que vous l’êtes. » Mais Hepburn n’avait pas besoin de stimulant et répondit : « il n’y a aucun emploi au monde que je préférerais davantage que celui de promouvoir [ces] aimables vues et je n’hésiterai pas un instant à forcer chaque nerf de mon corps pour aller à la recherche de mon valeureux Chef ».

Le Prince Albert, commandé par William Kennedy * et avec Hepburn comme subrécargue à son bord, leva l’ancre à Aberdeen le 22 mai 1851 et mit le cap au nord ; il passa l’hiver dans la baie de Batty, île de Somerset. Hepburn avait compté pouvoir diriger l’une des expéditions en traîneau au printemps de 1852, mais sa santé n’était pas à la hauteur de la tâche. Ses services furent, par conséquent, plutôt limités mais il gagna néanmoins la confiance et l’admiration à la fois de Kennedy et de Joseph-René Bellot*, officier en second. Kennedy avait l’habitude de laisser Hepburn en charge du bateau pendant que les équipes d’explorateurs partaient en traîneau, et Bellot adorait écouter les anecdotes de Hepburn sur sa vie d’autrefois avec Franklin.

Après le retour de l’expédition en Angleterre au cours de l’automne de 1852, Hepburn y demeura pendant quelques années. Inquiet de sa santé, qui était précaire depuis l’expédition de 1819–1822, et ébranlée par son deuxième voyage dans l’Arctique, il partit pour le cap de Bonne-Espérance au début de 1856 afin d’y occuper un poste gouvernemental. Il mourut en 1864, après plusieurs mois de maladie à Port Elizabeth.

Parmi les centaines de matelots de troisième classe qui ont servi dans l’Arctique canadien au cours du xixe siècle, Hepburn fut sans doute le plus connu. C’était un homme simple avec peu d’instruction ; pourtant, il réussit à s’attirer l’affection et le respect d’une foule de gens dont la condition sociale était de beaucoup supérieure à la sienne. Les exemples qui illustrent à quel point Franklin lui était dévoué ne manquent pas ; lady Franklin, Richardson, Kennedy, Bellot et d’autres écrivirent à son sujet avec admiration et affection. Ce respect ne saurait être attribué uniquement à son courage et à sa capacité d’endurance sur le terrain. Il était humble et presque trop modeste : à la Terre de Van Diemen, il fut plutôt embarrassé par son rang élevé et les ambitions que Franklin nourrissait pour lui ; « c’est toujours avec une grande réserve et beaucoup d’hésitation qu’il parlait de lui-même », écrivit Richardson en 1851. Mais ce sont sa loyauté à toute épreuve et son dévouement pour Franklin qui commandaient par-dessus tout l’admiration. Son retour dans l’Arctique canadien à un âge avancé est « le meilleur témoignage qu’il pouvait rendre de son affection pour son ancien commandant » et, sans contredit, constitue un épilogue touchant de leur longue amitié.

Clive A. Holland

Scott Polar Research Institute (Cambridge, Angl.), ms 248/106 (lettres de lady Franklin et de Sophia Cracroft, janv.–mars 1851), pp.246, 251–253, 269 ; Ms 248/107 (lettres de lady Franklin et de Sophia Cracroft, mars-mai 1851), pp.10, 13, 36, 39, 92, 101 ; ms 248/463/1 (lettre de sir John Richardson à Sophia Cracroft, 7 avril 1851) ; ms 395 (lettre de sir John Franklin à George Back, 14 févr. 1835).— J.-R. Bellot, Journal d’un voyage aux mers polaires exécuté à la recherche de sir John Franklin, en 1851 et 1852 (Paris, 1854), passim.— John Franklin, Narrative of a journey to the shores of the polar sea in the years 1819, 20, 21 and 22 [...] (Londres, 1823).— William Kennedy, A short narrative of the second voyage of the Prince Albert, in search of Sir John Franklin [...] (Londres, 1853), 30s., 114s.— Voyages of discovery and research within the Arctic regions, from the year 1818 to the present time [...], John Barrow, édit. (New York, 1846), 230, 278.— C. R. Markham, The Arctic navy list ; or, a century of Arctic & Antarctic officers, 1773–1873 ; together with a list of officers of the 1875 expedition and of their services (Londres, 1875).— K. [E. Pitt] Fitzpatrick, Sir John Franklin in Tasmania, 1837–1843 (Melbourne, Aust., 1949), 25, 45.— H. D. Traill, The life of Sir John Franklin [...] with maps, portraits, and facsimiles (Londres, 1896).— F. J. Woodward, Portrait of Jane : a life of Lady Franklin (Londres, 1951), 198, 277–279.— An East Lothian polar explorer, Haddingtonshire Courier (Haddington, Écosse), 22 août 1913.

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Clive A. Holland, « HEPBURN, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hepburn_john_9F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
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