HENRY, WALTER, officier, chirurgien, auteur et amateur de pêche, né le 1er janvier 1791 à Donegal (république d’Irlande), fils aîné de John Henry, marchand ; le 6 avril 1831, il épousa à Montréal Charlotte Todd (décédée en 1833), puis le 2 juillet 1834, à Kingston, Haut-Canada, Leah Allan Geddes, et ils eurent quatre fils et deux filles ; décédé le 27 juin 1860 à Belleville, Haut-Canada.

Walter Henry naquit dans une famille qu’il qualifia lui-même de « respectable ». Lecteur avide, il reçut un enseignement classique et, influencé peut-être par son oncle, médecin de Donegal, il fit des études de médecine au Trinity College de Dublin, à l’University of Glasgow et dans des hôpitaux londoniens. À la fin de ses études, en 1811, Henry réussit l’examen de chirurgien de régiment établi par le Royal College of Surgeons de Londres et entra immédiatement dans l’armée comme auxiliaire médical en service général. En décembre 1811, il devint aide-chirurgien du 66e d’infanterie, dans lequel il servit pendant la guerre d’Espagne, participant à de nombreuses batailles, dont celles de Badajoz, de Vitoria et de la Nivelle. En 1815, Henry fut affecté en Inde et au Népal au 1er bataillon du régiment, lequel fut rappelé en 1817 pour se joindre au 2e bataillon en garnison dans l’Atlantique Sud, à l’île Sainte-Hélène, où Napoléon était emprisonné. Il trouva l’ex-empereur « laid et obèse » ; en 1821, il prit les notes officielles au cours de l’autopsie de Napoléon. De 1822 à 1827, il servit en Irlande, toujours avec le 66e d’infanterie, dont il fut nommé chirurgien en 1826.

L’année suivante, Henry arriva au Canada avec son régiment qui fut posté à Québec (de 1827 à 1830 et de 1835 à 1839), à Montréal (de 1830 à 1831), à Kingston (de 1831 à 1833 et de 1834 à 1835) et à York (Toronto) (de 1833 à 1834). Promu chirurgien du corps de santé de l’armée en 1839, il resta à Québec jusqu’à ce qu’il reçoive son affectation à Halifax en 1841 ; quatre ans plus tard, il y devint inspecteur général adjoint des hôpitaux militaires. Il revint en Angleterre en 1848 mais, en 1852, il retourna à Québec comme inspecteur général responsable des services de santé de l’armée en Amérique du Nord britannique. Sa carrière médicale ne semble pas avoir été éminente. Néanmoins, ses mémoires ne laissent que peu de doutes quant à sa compétence de chirurgien, et il fit preuve d’un courage exemplaire autant au combat que dans l’accomplissement de tâches tout aussi dangereuses, comme le soin des malades durant les épidémies de choléra.

Henry était un homme vif et spirituel qui a dû animer la vie sociale des villes où il était en poste. Par l’intermédiaire de sa seconde femme, fille de James Geddes, médecin de Kingston, et petite-fille de John Gamble, chirurgien loyaliste, il était probablement connu de nombreuses familles bien établies dans le Haut-Canada. Une longue période de service en temps de paix lui donna l’occasion de s’adonner avec beaucoup d’enthousiasme à la littérature et à divers loisirs.

La pêche, qui pour Henry s’accompagnait d’une étude biologique poussée, était un passe-temps auquel il s’adonnait avec ardeur depuis son enfance. Alliant cette passion à son talent d’écrivain, il rédigea un premier article sur les habitudes de la famille du saumon et sur sa conservation en 1837. Sous le nom de plume bien choisi de Piscator, Henry publia, de 1839 à 1842, quatre longues lettres dans l’Albion, hebdomadaire de la colonie d’immigrants britanniques de New York. Dans ces lettres, il exprime son vif désir de poursuivre son « saumoncide scientifique, passionnant, absorbant, glorieux et impérial ». Les comptes rendus de ses expéditions de pêche au lac Ontario, à l’impétueuse rivière Jacques-Cartier, près de Québec, et à la poissonneuse rivière Gold, en Nouvelle-Écosse, sont divertissants et palpitants, en dépit du penchant de l’auteur pour une langue d’une exubérance baroque. Les rares écrits médicaux de Henry, s’ils n’apportent pas d’innovations, reflètent néanmoins son bon sens et sa pénétrante faculté d’observation ; on y dénote aussi une absence de verbiage. Il publia des articles sur l’emphysème traumatique et la malaria, et une étude statistique du delirium tremens chez les militaires du Canada à partir de 1824, ainsi qu’un article plein de louanges sur les études de médecine au McGill College de Montréal.

Dans ses écrits sur la rébellion de 1837 et la politique, Henry se montre très conformiste et favorable à la couronne, comme l’on pouvait s’y attendre compte tenu de ses années de service. Dans un exposé détaillé de la rébellion du Bas-Canada, écrit pour l’Albion sous le pseudonyme de Miles, Henry exprime son mépris à la fois pour Louis-Joseph Papineau*, dont la ligne de conduite radicale devait, selon lui, le conduire à la potence ou dans un asile d’aliénés, et pour Wolfred Nelson* qu’il assimile à un « distillateur opulent » plutôt qu’à un collègue. Son compte rendu révèle la xénophobie que montraient beaucoup de Britanniques contemporains de Henry. Il décrit le Canadien français typique comme un être ignorant et paresseux, mais non pas fondamentalement méchant ; il est éloquent quand il reproche à Papineau d’encourager ses compatriotes à la résistance et au crime. Au début de 1844, il écrivit de nouveau pour l’Albion une série d’articles sur la politique de la Nouvelle-Écosse sous le nom de Scrutator. Il attaqua avec vigueur l’effronterie des « libéraux » de Joseph Howe* dont l’intérêt « utopique » pour le gouvernement responsable et l’identification évidente avec la politique de réforme de Robert Baldwin et de Louis-Hippolyte La Fontaine* au Canada consternaient Henry.

En plus des articles et des lettres qu’il publia, Henry écrivit une autobiographie intitulée Trifles from my port folio [...], publiée à Québec en 1839 et rééditée à Londres en 1843 sous le titre d’Events of a military life [...]. Cette autobiographie reste sa principale contribution littéraire. Styliste au tempérament romantique et aventureux, il donna l’un des récits les plus pittoresques écrits par un soldat en service au Canada. La partie canadienne de Trifles fournit de nombreuses observations valables et divertissantes sur la vie au Canada avant 1839. C’est dans ses descriptions du triste aspect de Kingston durant l’épidémie de choléra de 1832, du quartier général de son régiment à York (où il chassa la bécassine afin de stimuler l’appétit défaillant d’un patient) et du « sentiment oppressant de mélancolie » qu’il avait ressenti « en traversant les sombres profondeurs d’une forêt canadienne » que Henry est le plus intéressant.

Walter Henry admirait néanmoins la nature « hautement morale et respectueuse » du Haut-Canada et, dès 1844, il souhaita s’établir de façon permanente en Amérique du Nord britannique. Après avoir pris sa retraite du corps de santé en 1855, Henry termina sa vie à Belleville, pour, de toute évidence, être proche des membres de la famille de son épouse qui habitaient cette ville et Kingston.

Charles G. Roland

Walter Henry est l’auteur de : Trifles from my port folio, or recollections of scenes and small adventures during twenty-nine years’ military service [...] (2 vol., Québec, 1839), publié de nouveau sous le titre de Events of a military life [...] (2 vol., Londres, 1843) et une autre fois sous le titre de Surgeon Henry’s Trifles : events of a military life, Pat Hayward, édit. (Londres, 1970). L’édition de 1839 parut sous le pseudonyme de A staff surgeon ; des extraits de l’édition de 1843 parurent dans l’Albion (New York), 23 sept., 7 oct., 11 nov. 1843. Les notes qu’il prit lors de l’autopsie de Napoléon Bonaparte ont été publiées sous le titre de « Dr Walter Henry’s account of the post-mortem examination » dans James Kemble, Napoleon immortal : the medical history and private life of Napoleon Bonaparte (Londres, [1959]), 282283. Henry publia des articles à caractère médical dans le Medical Chronicle (Montréal) : « Malaria », 3 (18551856) : 121127 ; « Medical education at the McGill University, Montreal » : 289292 ; « Statistics of delerium tremens amongst the troops in Canada for the last thirty years, with some observations on the disease », 1 (1853–1854) : 321–327 ; et « Traumatic emphysema » : 193–196. Sous le pseudonyme de Scrutator, il écrivit des articles politiques dans l’Albion : « Nova Scotia – political changes », 13 janv. 1844, et « Politics of Nova Scotia », 23 mars, 13 juill., 14 sept. 1844. Sous le pseudonyme de Miles, il écrivit « Narrative of the late revolt in Lower Canada », Albion, 23 déc. 1837, 20 janv. 1838. L’article « Observations on the habits of the salmon family » parut sous son nom véritable dans Literary and Hist. Soc. of Quebec, Trans. (Québec), 3 (1832–1837) : 346–364. Les articles suivants, écrits sous le pseudonyme de Piscator parurent dans l’Albion : « The salmon fisher », 18 juill. 1840 ; « Salmon fishing in Canada », 13, 20 avril 1839 ; et « Salmon fishing in Gold River, Nova Scotia », 18 juin 1842.

ANQ-M, CE1-65, 6 avril 1831.— APC, MG 29, D61, 11 : 3898–3900 ; RG 8, I (C sér.), 36 : 250, 305–306.— ÉÉC-O, St George’s Cathedral (Kingston, Ontario), reg. of burials, 25 janv. 1833 ; reg. of marriages, 2 juill. 1834.— PRO, WO 17/1544 : 4 ; 17/1545 : 75 ; 17/1556 : 62, 68 ; 17/1559 : 73 ; 17/2388 : 67 ; 17/2389 : 2 ; 17/2393 : 15 ; 17/2395 : 125 (mfm aux APC).— Univ. of Glasgow Arch. (Glasgow, Écosse), GUA 19057 ; 19089 : 33 ; 26678 : 361 ; 26680 : 69.— Hastings Chronicle (Belleville, Ontario), 11 juill. 1860.— G.-B. WO, Army list, 1813 : 284 ; 1827 : 242 ; 1839 : 370 ; 1849–1850 : 413 ; 1853 : 431 ; 1857–1858 : 554 ; 1859–1860 : 631.— The matriculation albums of the University of Glasgow front 1728 to 1858, W. I. Addison, compil. (Glasgow, 1913), 225.— Morgan, Bibliotheca Canadensis, 182–183.— R. L. Blanco, Wellington’s surgeon general : Sir James McGrigor (Durham, N. C., 1974).— Canniff, Medical profession in U.C., 378, 382.— Lit. hist. of Canada (Klinck et al. ; 1965), 128–129, 142.— Canada Lancet (Toronto), 5 (1872–1873) : 106.— C. G. Roland, « Walter Henry – a very Lilyputian hero », New England Journal of Medicine (Boston), 280 (janv.–juin 1969) : 31–33.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Charles G. Roland, « HENRY, WALTER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/henry_walter_8F.html.

Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique:

Permalien: http://www.biographi.ca/fr/bio/henry_walter_8F.html
Auteur de l'article:    Charles G. Roland
Titre de l'article:    HENRY, WALTER
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
Date de consultation:    1 décembre 2024