GUÉGUEN, JEAN-PIERRE, prêtre, oblat de Marie-Immaculée, missionnaire et auteur, né le 18 septembre 1838 à Ploudalmézeau, France, fils de Vincent-Gabriel-Marie Guéguen, commissionnaire, et de Marie-Anne-Michelle Le Borgne ; décédé le 22 octobre 1909 à Maniwaki, Québec.

Jean-Pierre Guéguen, élève au collège de Lesneven, en France, de 1852 à 1858, y termine brillamment ses études classiques, lauréat de sept premiers prix. En septembre 1858, il se dirige vers le grand séminaire du diocèse de Quimper puis, deux ans plus tard, attiré par les missions indiennes du Canada, il entre au noviciat des oblats de Marie-Immaculée, à Nancy. À la fin de ses études théologiques, qu’il poursuit à Marseille et à Autun, il est ordonné prêtre le 5 juillet 1863. L’année suivante, ses supérieurs comblent ses vœux en le désignant pour les missions indiennes de la colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba). Cependant, peu après son arrivée au Bas-Canada, tandis qu’il attend de poursuivre sa route jusqu’à la Rivière-Rouge, on décide de l’affecter aux missions de l’est du Canada.

Le père Guéguen inaugure son ministère dans les « chantiers » de la région de la Gatineau, auprès des hommes engagés dans la coupe du bois en forêt. Du 27 décembre 1864 au 15 février suivant, en compagnie d’un missionnaire expérimenté, le père Jean-François-Régis Déléage*, il visite 38 chantiers et rencontre 750 personnes. Dès le début, il remarque les bonnes dispositions de ces gens, leur désir de la présence du prêtre, ainsi que leur besoin d’instruction religieuse. Le ministère des chantiers lui tiendra à cœur et il l’exercera chaque hiver jusqu’à la fin de sa vie.

En mars 1865, le père Guéguen est envoyé à la résidence missionnaire Saint-Claude, au Témiscamingue, où il doit s’initier aux missions auprès des Amérindiens. Laissé seul pendant l’été par ses deux compagnons partis en missions, le jeune apôtre se livre avec ardeur à l’étude de la langue algonquine, tout en desservant la chapelle de la mission et en répondant à des appels de ministère qui viennent même de Mattawa, dans le Haut-Canada. À l’été de 1866 commence son ministère auprès des autochtones : il se rend chez les Algonquins de la région du lac Abitibi et du Témiscamingue. De 1867 à 1899, le père Guéguen est le missionnaire attitré des missions du Saint-Maurice, où se trouvent les Têtes-de-Boules, appelés aujourd’hui Attikameks, région dont le centre se situe à Weymontachingue (Weymontachie), des missions auprès des Cris de Waswanipi et de Mégiscane, au sud de la baie James, et des missions pour les Algonquins du Grand lac Victoria, du lac Barrière, de Hunter’s Lodge (Kipawa), de Kipawa et des autres postes situés le long de sa route. Chaque été, il fait un séjour plus ou moins prolongé dans chacun de ces postes.

C’est à Weymontachingue, auprès des Têtes-de-Boules de l’endroit et des postes environnants, que le père Guéguen passe le plus de temps, soit environ trois semaines. Prières, messes, catéchismes, instructions et cérémonies, notamment une grande procession en l’honneur de la Vierge Marie, vénérée avec grande dévotion par les autochtones, composent les principaux exercices de la mission. La tribu des Têtes-de-Boules, déjà évangélisée au temps de la Nouvelle-France, répond généreusement à son zèle. Le père Guéguen est habituellement satisfait de ses ouailles, même si, parfois, il doit se montrer ferme pour corriger certains désordres. Dès sa première visite, le jeune oblat s’est initié à leur langue, qui appartient à la famille linguistique algonquienne. En 1889, à Montréal, il publie un ouvrage édité dans cette langue et connu en français sous le titre de [...] Recueil de prières, catéchisme, chemin de la croix et cantiques à l’usage des sauvages du Saint-Maurice [...].

Le travail du père Guéguen auprès des Cris de Waswanipi et de Mégiscane revêt une importance particulière ; il doit affermir leur foi, car des ministres de Rupert House (Waskaganish) essaient de les gagner au protestantisme. Encore là, le vaillant missionnaire ne recule pas devant la tâche d’apprendre une nouvelle langue et de publier, en 1889, un catéchisme en cri.

Sa tournée dans les missions du Saint-Maurice, qu’il effectue du mois de mai au mois d’août, représente un parcours en canot et en portages de quelque 1 700 milles, que le père Guéguen entreprend chaque fois avec joie et empressement. De santé faible, affligé d’une hernie de naissance dont il ne peut être guéri, le voyage lui est le plus souvent très pénible et épuisant.

De 1887 à 1902 et de 1906 jusqu’à sa mort, le père Guéguen se trouve à Maniwaki, où il a passé son premier hiver en terre canadienne. De 1902 à 1906, il est de retour au Témiscamingue, d’abord à Ville-Marie (1902–1903), puis à Notre-Dame-du-Nord (1903–1906). Il visite fidèlement chaque année les missions du Saint-Maurice, jusqu’en 1899, et celles des chantiers, jusqu’en 1908. En plus, à Maniwaki, il dessert les Indiens de la réserve et les Blancs de paroisses en formation, notamment celles de Baskatong (Dépôt-Baskatong) (1887–1900) et de Montcerf (1887–1892).

Le père Jean-Pierre Guéguen s’est dévoué avec zèle et intelligence auprès des Amérindiens et des Blancs, dans de larges secteurs du nord du Québec. Homme ardent et tenace dans la poursuite de ses œuvres, à l’esprit ouvert et collaborateur avec ses supérieurs, il a exercé une influence religieuse et humaine bienfaisante auprès des gens, le plus souvent pauvres, auxquels il a consacré sa vie. Ses nombreuses lettres laissent voir son attitude de bonté, en même temps que de respect, à l’égard de ceux qu’il a évangélisés. Un canton et une rivière de la province de Québec conservent sa mémoire.

Donat Levasseur

Les Arch. Deschâtelets, Oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), conservent plusieurs manuscrits de J.-P. Guéguen : HEB 6924.J91C, no 1 (Catéchisme ou abrégé de la foi) ; no 2 ([Discours sur les missions indiennes]) ; no 4 (Charlatanisme) ; no 8 ([Rapport sur Maniwaki]) ; HR 906.A39R, no 14 ([Quelques mots algonquins-français]) ; HR 952.C93R, no 1 (Catéchisme cris) ; no 2 (Catéchisme en langue crise et [Notes linguistiques en langue indienne]) ; HR 1181.T34R, no 1 ([Dictionnaire Tête de Boule]) ; HR 1192.T34R, no 1 ([Sermons en Tête de Boule]) ; no 2 ([Catéchisme en Tête de Boule]) ; no 3 ([Catéchisme et cantiques en Tête de Boule]) ; HR 1501.N81R, no 12 (Journal du curé dans ses affaires de paroisse).

Guéguen a publié plusieurs ouvrages : Niirawe aiamie masinaigan ou Recueil de prières, catéchisme, chemin de la croix et cantiques à l’usage des sauvages du Saint-Maurice (postes de Wemontaching, Okikendatc, Manawan, Coucoucache) et de Mekiskan (Montréal, 1889) ; Kiskinoamatimasinaigan gaie aiamie kokwedjimitowini-masinaigan, à l’usage des sauvages du Saint-Maurice (postes de Wemontaching, Okikendatc, Manawan, Coucoucache) et de Mekiskan (Montréal, 1889) ; Ocki mino masinaigans ; kanacteng Ka odidjikatek kitci aio8ate kakina niina anicinabek ([Montréal], 1893) ; Recueil de prières, catéchisme et cantiques à l’usage des sauvages de la baie d’Hudson (postes de Moose Factory, New-Post, Albany, Waswanipi et Mékiskan) (Montréal, 1889 ; 2e éd., 1907) ; et il est l’éditeur de [L.-M. Lebret], Kiskinoamati-masinaigan ([Montréal], 1889) et de Kisinoaniati-masinaigan gaie aiamie kak8edjindi8ini-masinaigan ([Montréal], 1906). Il a aussi rédigé quelques articles : « Mission chez les sauvages Tête de Boule », Annales de la propagation de la foi pour la prov. de Québec (Québec et Montréal), 8 (1879) : 113–124 ; « Mission de Témiskamingue », Annales de la propagation de la foi pour la prov. de Québec, 12 (1880) : 220–231 ; « Mission du Saint-Maurice », Annales de la propagation de la foi pour la prov. de Québec, 16 (1882) : 20–24 ; « Missions de Témiskamingue et du Saint-Maurice », Rapport sur les missions du diocèse de Québec [...] (Québec), no 19 (mai 1870) : 9–19 ; « Missions du Saint-Maurice », Rapport sur les missions du diocèse de Québec [...], no 20 (mai 1872) : 44–53 ; « Missions du Saint-Maurice », Assoc. de la propagation de la foi, Rapport (Montréal), 24 (1872) : 21–27.

Arch. Deschâtelets, Oblats de Marie-Immaculée, HEB 6924.J91C, nos 9 (Certificat de baptême et lettre de L. Normand du 13 mars 1958) ; no 10 (Extrait des actes de naissance de la commune de Ploudalmézeau).— Arch. des oblats de Marie-Immaculée (Montréal), Maniwaki, dossiers 1882–1909 (corr. de Guéguen) ; Mattawa, dossiers 1869–1908 (corr. de Guéguen) ; Témiscamingue, dossiers 1863–1909 (corr. de Guéguen).— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (3 vol., Ottawa, 1976–1979), 2 : 118 ; Histoire documentaire de la Congrégation des missionnaire oblats de Marie-Immaculée dans l’est du Canada (12 vol., Ottawa, 1957–1975), 9 : 203–302 ; 11 : 190s., 286 ; le Père Jean-Pierre Guéguen, o.m.i., 1838–1909 : un grand voltigeur ; Mattawa, Nipawa, Tête du lac, Weymont, Maniwaki (Québec, 1978).

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Donat Levasseur, « GUÉGUEN, JEAN-PIERRE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/gueguen_jean_pierre_13F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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