GOFF, FADE, homme d’affaires, homme politique, fonctionnaire et juge de paix, né le 17 septembre 1780 à Bryanstown (république d’Irlande), fils aîné de Richard Goff et d’Anna Neville ; le 6 avril 1809, il épousa Mary Somaindyke Ryan, et ils eurent 11 enfants ; décédé le 6 janvier 1836 à Erinvale, lot 34, Île-du-Prince-Édouard.
Issu d’une famille de propriétaires terriens anglo-irlandais dont la prospérité était en déclin, Fade Goff immigra à Terre-Neuve au printemps de 1809 pour rejoindre son beau-père, John Ryan, éditeur de journal à St John’s. À son arrivée, il fit la connaissance de John Stewart*, propriétaire terrien de l’Île-du-Prince-Édouard, qui l’embaucha à titre d’agent là-bas. Au printemps suivant, la famille Goff s’installa dans l’île, où Fade accepta dès 1814 d’agir aussi en qualité de représentant d’une maison de commerce londonienne, la George and Alexander Birnie.
Les historiens ont accusé les agents fonciers de l’Île-du-Prince-Édouard, qui formaient une classe d’intermédiaires, d’avoir opprimé leurs tenanciers tout en détournant les fonds de leurs employeurs absents. Goff ne fut pas un agent de cette sorte. Ses lettres à George Birnie indiquent que pour trouver de bons tenanciers, et les convaincre de s’établir, il devait faire concurrence à ses collègues en offrant divers avantages matériels. Quant à ses rapports avec ses employeurs, c’était ceux d’un suppliant à l’endroit de ses maîtres. Les Birnie ainsi que John Stewart avaient séjourné dans l’île ; ils en connaissaient parfaitement la situation et y avaient de multiples relations. Non seulement un agent aurait-il pu difficilement les tromper, mais ils ne tardèrent pas à tenir Goff sous leur coupe. À son arrivée dans l’île, celui-ci avait fait plusieurs investissements malheureux dans des terres et des marchandises d’importation et avait accepté de grosses avances de ses employeurs pour garantir ses dettes. Dès 1815, il comprit que tant qu’il resterait dans l’île il ne parviendrait probablement pas à se libérer de ses obligations, à moins que l’économie de la province ne se relève ou que lui-même ne décroche une charge publique lucrative. Cette année-là, il posa donc sa candidature à titre d’agent de John Hill à Terre-Neuve, mais Alexander Birnie le poursuivit pour dettes non remboursées. George Birnie arrangea les choses, apparemment en gardant Goff à son poste, et il diminua l’escompte dont celui-ci bénéficiait au magasin des Birnie. Au début des années 1820, soit après plus d’une décennie de travail en qualité d’agent, Goff estima qu’on l’avait « traité de façon cruelle et mesquine » et se lança dans une gamme de petites entreprises, comme la construction d’un moulin à farine et l’établissement d’un bureau d’immigration, qui ne lui rapportèrent guère. Ainsi pendant qu’il élevait sa « jolie bande » d’enfants, il ne réussit jamais à se sortir de ses difficultés financières et n’atteignit un certain équilibre que grâce à son entrée en politique et dans l’administration.
Comme il était lié à la famille Stewart, Goff appartenait automatiquement à une faction de propriétaires que ses détracteurs appelaient souvent la « cabale ». Élu député de Georgetown en avril 1812, il appuya la vive lutte que mena ce groupe contre la faction alors dominante, celle des Loyal Electors, dont James Bardin Palmer* était un membre influent. En septembre, il s’absenta de l’Assemblée avec cinq autres députés dans l’espoir de bloquer, par défaut de quorum, un projet de loi de finances que parrainaient les Loyal Electors. Ce genre de tactique faisait partie d’une campagne de pression que les propriétaires avaient lancée ; elle avait abouti en août à la révocation du lieutenant-gouverneur, Joseph Frederick Wallet DesBarres*, et allait bientôt faire tomber les Loyal Electors, ses protégés.
Un partisan des propriétaires, William Townshend*, devint administrateur lorsque DesBarres partit en octobre, et il en profita pour récompenser les membres de la cabale par des nominations et des émoluments. Goff devint coroner et greffier de la couronne en mai 1813 et se révéla assez souple pour garder ces charges sous le nouveau lieutenant-gouverneur, Charles Douglass Smith*, même si ses anciens alliés de la cabale furent déçus par ce dernier au début des années 1820. Sous Smith, Goff agit en deux brèves occasions à titre de secrétaire de la colonie ; par ailleurs, on le nomma juge de paix en 1814 et shérif en chef en 1831.
Goff n’en connut pas moins, lui aussi, des déceptions politiques. Peut-être parce qu’il avait été trop proche d’un lieutenant-gouverneur impopulaire, il ne fut pas réélu député en 1818. De plus, il dut attendre jusqu’en 1819 la ratification de sa nomination aux postes de coroner et de greffier de la couronne, ainsi que le versement de ses honoraires (et même alors, les Birnie firent saisir son revenu pendant quelque temps). Il démissionna de ces deux postes en avril 1830. Le lieutenant-gouverneur Aretas William Young* le nomma en février 1832 au Conseil de l’Île-du-Prince-Édouard ; il assista d’abord aux réunions par intermittence puis cessa de s’y présenter vu son « indisposition et [ses] barras pécuniaires ». Il mourut au terme d’une longue maladie.
Selon Palmer, Fade Goff exerça « en coulisse » une influence sur la politique de l’île. En qualité de greffier de la couronne, il était certes en mesure d’informer des propriétaires comme Stewart, qui devaient parfois s’absenter de Charlottetown, des décisions qui pouvaient nuire à leurs intérêts. Les sources sont trop peu nombreuses pour qu’on puisse déterminer dans quelle mesure il agit sur les événements, mais il semble n’avoir pas fait plus que seconder les propriétaires. En raison de ses difficultés financières, il ne put jamais atteindre la position politique et sociale à laquelle il aspirait. « Chaque fois, écrivit-il, que j’ai tenté de servir autrui ou mes intérêts dans l’île, je n’ai obtenu que défaite et déception ; toujours, des événements contraires ou malheureux m’ont ramené en arrière. »
APC, MG 24, D99, files 1–2.— PAPEI, Acc. 2810/127 ; 2810/173 ; 2849/38 ; 2849/86 ; 2849/128 ; RG 1, commission books, 1812–1813, 1er févr. 1814, 3 avril 1816, 22 janv. 1818, 27 sept., 10 déc. 1819, 26 avril 1830, 4 mai 1831, 2 mai 1832 ; RG 3, journals, 1813 ; RG 16, land registry records, conveyance reg., liber 17 : fo 328 ; liber 20 : fo 78 ; liber 24 : fos 400, 867, 872.— P.E.I. Museum, « Charlottetown manuscript » (s.d.) ; W. F. Goff coll., Goff family geneal.— PRO, CO 226/26 : 11, 112 ; 226/27 : 82–88 ; 226/29 : 88.— St Paul’s Anglican Church (Charlottetown), Reg. of baptisms, marriages, and burials, particulièrement 1er août 1834 (mfm aux PAPEI).— Supreme Court of P.E.I. (Charlottetown), Estates Division, liber 3 : fo 110.— Î.-P.-É., House of Assembly, Journal, 3–4 nov. 1818 ; Legislative Council, Journal, 1832–1836.— Prince Edward Island Gazette, 14 oct. 1818.— Prince Edward Island Register, 6 mai 1825, 21 mars 1826, 2 déc. 1828.— Royal Gazette (Charlottetown), 7 févr., 3 avril 1832, 9 avril 1833, 18 mars 1834, 12 janv. 1836.— Weekly Recorder of Prince Edward Island (Charlottetown), 4 mai 1812.— MacKinnon, Government of P.E.I., 36n.— Patriot (Charlottetown), 6 juill. 1872.
M. Brook Taylor, « GOFF, FADE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/goff_fade_7F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
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