FORTES, JOSEPH SERAPHIM, cireur de chaussures, barman, porteur, moniteur de natation et maître nageur, né le 9 février 1863 à Port of Spain (république de Trinité-et-Tobago) ; décédé célibataire le 4 février 1922 à Vancouver.

D’après certaines sources, Joseph Seraphim Fortes serait né à la Barbade, mais ce dernier, dans un article autobiographique paru dans le Daily News-Advertiser de Vancouver, indiquait qu’il était né à Port of Spain. Une autre source relate que son père était Barbadien, « de sang totalement africain », et sa mère « entièrement, sinon en grande partie », Espagnole ou Portuguaise ; toutefois, selon le recensement de 1901 de Vancouver, Fortes était Trinidadien et hispanophone.

À l’âge de 17 ans, Fortes quitta l’île de la Trinité (république de Trinité-et-Togago) pour l’Angleterre. Il demeura cinq ans à Liverpool où il apprit la natation, aux St George’s Baths, et devint nageur et plongeur d’un certain calibre. Il remporta une compétition de trois milles, soit la traversée du fleuve Mersey, reçut la médaille d’or de sauvetage et montra ses talents au sein d’une équipe de natation de 11 personnes à l’occasion d’une tournée de stations balnéaires de l’Angleterre et de la France.

Fortes arriva à Granville (Vancouver) à bord du Robert Kerr, le 30 septembre 1885. Cette ville était en pleine expansion en raison de l’industrie forestière et de sa désignation comme terminus ferroviaire [V. Malcolm Alexander MacLean*]. Dans l’espoir de trouver un emploi, des personnes quittèrent l’île de Vancouver pour la région continentale, tout comme un certain nombre de Noirs venant de l’est du Canada, de l’Alberta, de la région du nord-ouest du Pacifique, des Antilles et de plus loin encore. Vers la fin du xixe siècle, le noyau de la communauté afro-canadienne de la Colombie-Britannique se déplaça donc de Victoria à Vancouver. La plupart des habitants de race noire de l’endroit, dont le nombre ne dépassa jamais les 300, vivaient principalement dans un endroit qui deviendrait plus tard connu sous le nom de Strathcona ou East End.

Pendant huit mois, soit jusqu’au grand incendie de juin 1886, Fortes exploita, au Sunnyside Hotel de la rue Water, la première échoppe de cirage de chaussures de Vancouver. Il travailla ensuite comme barman et porteur dans des établissements locaux, dont le Bodega Saloon, de la rue Carrall à Strathcona, et l’Alhambra Hotel, au coin de Carrall et Water. Reconnu pour sa propreté, sa sobriété et son habileté à faire des cocktails, Fortes était cependant réputé pour son travail comme moniteur de natation et sauveteur bénévole. On le voyait souvent à la plage d’English Bay, où il enseigna à nager à des milliers d’enfants. Ce n’est que vers 1897 que la ville, en reconnaissance de ses loyaux services, le fit figurer sur sa liste de paie à titre de sauveteur ; il fut aussi nommé à un certain moment constable spécial. Il aurait sauvé plus d’une centaine de personnes de la noyade, dont un grand nombre d’enfants et plusieurs adultes, y compris John Hugo Ross, qui mourrait plus tard dans le naufrage du Titanic. En 1905, la petite maison de Fortes, sise dans le bas de la rue Gilford, fut déplacée sur la berge surplombant la plage. Fortes n’avait apparemment aucune famille dans la ville, mais son ami Noel Robinson mentionna dans une notice nécrologique que Fortes avait « une sœur à Toronto avec laquelle il correspondait ». Chose certaine, il gagna le respect d’un nombre incalculable de parents et d’enfants.

Joseph Seraphim Fortes mourut en 1922 au Vancouver General Hospital. On crut d’abord qu’il avait contracté une pneumonie ayant dégénéré en oreillons, mais il décéda en fin de compte d’une crise d’apoplexie. La ville lui rendit hommage en organisant les plus grandes obsèques publiques jamais tenues à cet endroit. Des milliers de personnes, dont le maire, plusieurs échevins, le chef de police, des constables et de nombreux citoyens, assistèrent à son service à la cathédrale Our Lady of the Holy Rosary, et un moment de silence fut respecté dans les écoles de la ville. La somme de 5 000 $ fut amassée pour ériger une fontaine en sa mémoire. Cette fontaine, conçue par le sculpteur vancouvérois Charles Marega, se trouve dans le parc Alexandra près de la plage où il fut jadis sauveteur et porte simplement la mention Little children loved him.

Sherry Edmunds-Flett

AN, RG 31, C1, 1901, Vancouver, dist.16 : 2.— BCA, GR-2951, no 1922-09-302410 (mfm).— City of Vancouver Arch., Add. mss 35 (Robert Kerr fonds) ; Add. mss 54 (J. S. Matthews coll.), newspaper clippings, Joe Fortes (M3265) ; topical files, Joe Fortes (01558) ; Add. mss 786 (Alan Morley fonds) ; Vancouver Health Dept. fonds, ser.152 (Mountain View Cemetery reg.), MCR 15-26, vol.19 : 33s. (mfm).— Daily News-Advertiser (Vancouver), 19 janv. 1913.— Vancouver Daily Province, 16 juin 1920.— Michael Kluckner, Vancouver : the way it was (Vancouver, 1984)

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Sherry Edmunds-Flett, « FORTES, JOSEPH SERAPHIM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/fortes_joseph_seraphim_15F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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