FORGET, ANTOINE, clerc tonsuré, maître d’école, né à Reuilly (dép. de l’Indre, France) le 19 novembre 1672, et décédé au grand séminaire d’Angers, France, le 21 octobre 1749.

Nous connaissons peu de chose sur l’enfance et les premières études d’Antoine Forget. Demeurant à Reuilly où les sulpiciens bénificiaient des droits seigneuriaux, Forget dut sans doute profiter des écoles que les seigneurs du lieu veillaient à mettre à la disposition de leurs censitaires. La même politique était suivie par les sulpiciens de Montréal qui pressèrent, à la fin du xviie siècle, leurs confrères de Paris de leur envoyer des maîtres qualifiés pour les « petites écoles » de Montréal. C’est alors que le séminaire de Paris décida d’accorder « une bourse de six mois » à un candidat qui irait se former au séminaire des maîtres d’école de la paroisse Saint-Hippolyte à Paris selon les méthodes préconisées par Jean-Baptiste de La Salle. Ce séminaire était dirigé par le frère Nicolas Vuyart, un des principaux membres de la communauté naissante des Frères des Écoles chrétiennes. Forget arriva vraisemblablement au séminaire en octobre 1700 pour se corriger de certains défauts et acquérir des habitudes conformes à son rôle d’éducateur, selon ce que préconisait La Salle dans la Conduite des écoles chrétiennes.

En avril 1701, Antoine Forget était prêt à partir pour le Canada ; François Lechassier, supérieur du séminaire de Paris, informa alors François Dollier* de Casson, supérieur à Montréal, que Forget était « capable de bien instruire les enfants et qu’on le conn[aiss]ait de longue main pour être de bonnes mœurs ». De son côté, Armand Donay, qui devait faire le voyage en Nouvelle-France avec Forget, affirma que ce dernier faisait « bien l’école et qu’outre la lecture et l’écriture, il [savait] bien l’arithmétique ». Avant son départ, il fut convenu que le maître d’école ne devait ni porter la soutane ni s’orienter vers le sacerdoce ; de plus, il ne toucherait aucun salaire et se contenterait « du vivre et du vêtir ».

Arrivé à Montréal en juillet 1701, Forget fut autorisé peu après par Dollier de Casson à prendre la soutane. Dès février 1702, il demanda à Paris de lui envoyer des livres et des fournitures scolaires tels qu’un syllabaire, les Instructions et prières pour la Sainte-Messe de La Salle, un recueil de lettres écrites à la main, une « civilité », un catéchisme, un psautier, etc. Grâce à ces livres et s’inspirant de sa formation parisienne, Forget réforma les méthodes archaïques d’enseignement utilisées dans les « petites écoles » de Montréal.

En 1703, il reçut, semble-t-il, les ordres mineurs, mais on lui refusait toujours la permission de recevoir le sacerdoce sous prétexte qu’il n’avait pas « assez d’études ». Il poursuivit ainsi sa carrière jusqu’en 1715, alors que, fatigué et malade, il retourna en France pour se soigner et se reposer. L’année suivante, Forget tenta de revenir à Montréal – Jacques Talbot semble alors l’avoir remplacé – mais les sulpiciens de Paris s’y opposèrent et l’envoyèrent à Issy-les-Moulineaux (dép. des Hauts-de-Seine) pour l’éprouver. Deux mois plus tard, le 17 mai 1716, on lui offrit la direction de l’école de Villeneuve-le-Roi (dép. du Val-de-Marne), mais Forget refusa obstinément et les sulpiciens tentèrent de s’en débarrasser en lui offrant 300# et même en lui suggérant de se « mettre dans le traffic » pour subsister. À quoi Forget répondit qu’il « n’estoit pas propre à cela ».

On ne saurait affirmer avec certitude qu’Antoine Forget séjourna à Villeneuve-le-Roi, mais, ce dont on est sûr, c’est qu’il quitta le séminaire d’Issy avant le 29 juillet 1718 pour le grand séminaire d’Angers où il fut procureur. Il y décéda le 21 octobre 1749, ayant laissé, malgré qu’il n’ait reçu aucun salaire, une cassette contenant 339# qui furent distribuées à ses héritiers, tant à cause de leur indigence que par suite des services rendus au séminaire d’Angers par Antoine Forget.

Louis-Philippe Audet

Archives du grand séminaire d’Angers (France), Registre des sépultures du séminaire, mss, 829, f.2.— Archives de la Compagnie de Saint-Sulpice (Paris), Lettres de M. de Tronson, XIV : 221, 240, 244, 252, 282s., 288, 291, 318, 355, 376, 410 ; Registres des assemblées du séminaire de Paris, I : 415, 683, 684, 685, 689, 693, 694, 704, 740 ; II : 524.— Jean-Baptiste de La Salle, Conduite des Écoles chrétiennes (Avignon, 1720).— Gauthier, Sulpitiana.— Frère Maximin, Les écoles normales de saint Jean-Baptiste de La Salle (Bruxelles, 1922), 3439.— Olivier Maurault, Les origines de l’enseignement secondaire à Montréal, Cahiers des Dix, I (1936) : 95105.— Yves Poutet, Une institution franco-canadienne au xviiie siècle : les écoles populaires de garçons à Montréal, Revue dhistoire ecclésiastique (Louvain), LIX (1964) : 52–88 (cet article donne plusieurs renseignements biographiques concernant Antoine Forget).

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Louis-Philippe Audet, « FORGET, ANTOINE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/forget_antoine_3F.html.

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Auteur de l'article:    Louis-Philippe Audet
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
Date de consultation:    28 novembre 2024