ERHARDT, JOHN CHRISTIAN, agent commercial pour les frères moraves sur la côte du Labrador, né vers 1720 à Wismar (alors en territoire suédois et maintenant dans la République démocratique allemande), décédé en 1752 sur la côte du Labrador.
John Christian Erhardt, marin allemand, adhéra à l’Église des frères moraves sous l’influence de leurs missionnaires rencontrés à l’ile Saint-Thomas dans les Antilles. Par la suite, Erhardt navigua sur le vaisseau qui ravitaillait les missions moraves au Groenland. Il apprit quelques mots de la langue esquimaude et conversa avec les missionnaires, en particulier avec le vétéran Matthew Stach, qui lui apprit que les Esquimaux vivant au-delà du détroit de Davis étaient probablement semblables aux Groenlandais par la langue et les coutumes. Erhardt écrivit à l’évêque Johannes [John de Watteville], en 1750, et offrit ses services pour fonder une mission au Labrador ; il lui déclara : « voyageur au Groenland depuis longtemps [j’ai] une immense affection pour ces régions, pour les Indiens et autres barbares, et ce serait pour moi une source de joie profonde si le Sauveur me révélait qu’il m’a choisi et qu’il me rendait digne de cette tâche ».
En 1752, trois commerçants appartenant à la congrégation morave de Londres armèrent le vaisseau Hope pour aller commercer avec les Esquimaux du Labrador, dans le but de financer un voyage de reconnaissance le long de ces côtes pratiquement inexplorées jusque-là. On nomma Erhardt commandant en second et on lui confia la responsabilité du commerce. Quatre frères moraves s’embarquèrent en qualité de missionnaires : George Golkowsky, John Christian Krum, Frederick Post et Matthew Kunz.
Les frères moraves quittèrent Londres le 18 mai 1752 et prirent contact avec les Esquimaux du Labrador le 29 juillet, au nord de l’inlet de Hamilton. Le 31 juillet ils choisirent un endroit propice à l’établissement d’une mission et le nommèrent Nisbet’s Harbour, et ils prirent possession du sol au nom du roi George III. Nisbet’s Harbour était vraisemblablement situé dans la région de l’actuel Hopedale, à environ dix lieues au sud de l’inlet de Davis.
Erhardt se lança immédiatement dans un troc actif avec des Esquimaux apparemment sympathiques, afin d’obtenir des fanons de baleines et des peaux de phoques. Sa connaissance limitée de la langue esquimaude le gênait et il s’en plaignait : « Je souhaite souvent avoir les Stachs avec moi, car le peu de groenlandais que je sais ne va pas loin. » Entre temps, l’équipage du vaisseau avait érigé la maison dont les éléments avaient été fabriqués au préalable et apportés d’Europe, pour le cas où les missionnaires décideraient d’hiverner au Labrador.
Au début de septembre, les missionnaires ayant pris leurs quartiers dans la nouvelle maison, le Hope fit voile vers le nord en direction de l’inlet de Davis pour y trafiquer davantage avant de retourner en Angleterre. À l’entrée de l’inlet, Erhardt, de même que le capitaine, John Madgshon, et cinq membres de l’équipage quittèrent le vaisseau dans une embarcation chargée d’articles de traite pour se livrer au commerce dans les îles. On ne revit jamais l’embarcation. Les membres de l’équipage demeurés à bord du Hope attendirent deux jours puis ils mirent la voile sur Nisbet’s Harbour qu’ils atteignirent le 14 septembre. Une expédition de secours partit à bord de la yole des missionnaires mais des vents violents l’obligèrent à rebrousser chemin. Les missionnaires décidèrent donc de rentrer en Angleterre, puisqu’on avait besoin d’eux pour la manœuvre à bord du vaisseau. Ils laissèrent des provisions derrière eux pour le cas où Erhardt et ses compagnons seraient encore vivants et réussiraient à regagner Nisbet’s Harbour.
L’été suivant, l’officier en second du Hope, Elijah Goffe, retourna au Labrador, trouva la maison de la mission détruite et découvrit sur une île voisine les cadavres des disparus. Après avoir quitté le vaisseau, il se peut qu’Erhardt et ses compagnons aient été retardés ou retenus par les Esquimaux, qu’ils aient ensuite regagné Nisbet’s Harbour et qu’ils aient été plus tard assassinés dans le voisinage. Cependant, à n’en pas douter, ils furent tués par les Esquimaux : certains des meurtriers furent même signalés à des missionnaires qui vinrent plus tard. À cette époque, les Esquimaux se rendaient au cours de l’été dans la partie sud du Labrador, pour trafiquer avec les Européens ou les dépouiller, au gré des circonstances. La mince connaissance de l’esquimau que possédait Erhardt n’avait probablement pas suffi à faire comprendre aux indigènes le but premier de sa mission. Lorsque les Esquimaux rencontrèrent Erhardt et ses compagnons, loin de tout, ils profitèrent de leur position désavantageuse comme ils avaient, dans le passé, profité de celle d’autres commerçants anglais ou français.
L’idée d’une mission au Labrador ne mourut pas avec Erhardt. Un charpentier morave, Jens Haven*, était lui aussi mû par un puissant désir d’aller porter l’Évangile aux meurtriers d’Erhardt. Il prit une part importante au cours des années 1760 aux expéditions des frères moraves qui aboutirent, en 1771, à l’établissement du premier poste missionnaire. Haven et certains de ses collègues connaissaient bien la langue esquimaude et ne s’occupaient pas personnellement de commerce. Ils furent ainsi en mesure d’établir de façon convaincante qu’ils n’étaient pas comme les autres Européens et ils gagnèrent de la sorte la confiance du peuple esquimau.
APC, MG 17, D1, Diary of Kunz, Post, Krum and Golkowsky, May-November, 1752 (microfilm 4–548).— Memorial University Library (St John’s), Moravian missions, Labrador, Papers relating to the exploratory voyages, 1752–1770 (microfilm 4), pp. 1–13.— David Cranz, The history of Greenland : including an account of the mission carried on by the United Brethren in that country, from the German of David Crantz, with a continuation to the present time, illustrative notes, and an appendix containing a sketch of the mission of the Brethren in Labrador (2 vol., Londres, 1820) ; The Moravians in Labrador (Édimbourg, 1833).— J. W. Davey, The fall of Torngak ; or the Moravian mission on the coast of Labrador (Londres, 1905).— W. G. Gosling, Labrador : its discovery, exploration, and development (Londres, 1910).— J. K. Hiller, The foundation and the early years of the Moravian mission in Labrador, 1752–1805 (thèse de
William H. Whiteley, « ERHARDT, JOHN CHRISTIAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/erhardt_john_christian_3F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
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