DICKIE, MARGARET (Michener ; McCulloch), cordonnière, institutrice, télégraphiste, fermière, poète et auteure d’un journal, née le 4 juillet 1827 à Half-Way River (Hantsport, Nouvelle-Écosse), fille de Samuel Dickie et d’une prénommée Sarah (dont le nom de famille était peut-être Brothers) ; le 4 janvier 1849, elle épousa Simeon Michener, et ils n’eurent pas d’enfants, puis le 9 avril 1856, Robert McCulloch, et de ce second mariage naquirent deux filles ; décédée le 2 août 1908 à Tuscola, Michigan.

Le père de Margaret Dickie était fermier et cordonnier. Très jeune, elle apprit à coudre des semelles à l’empeigne des chaussures, travail que l’on confiait souvent aux jeunes femmes dans la société préindustrielle. Bien que l’on manque de détails à ce sujet, il est évident qu’elle fit de bonnes études avec des précepteurs de la région. Ses premiers journaux, qui datent de 1847–1848, indiquent qu’elle se dépensait beaucoup à l’église baptiste : elle enseignait à l’école du dimanche, tenait une bibliothèque de prêt et recueillait de l’argent pour diverses œuvres – missions, éducation, tempérance, édition. Grande lectrice de textes sacrés et profanes, elle aimait la poésie et en composait parfois. Avec des amis et des parents, elle apportait un concours enthousiaste à une école de chant dont elle a donné en 1854 une description en vers. Son journal montre aussi, avec passablement de précision, ce qu’était une vie soumise au rythme des travaux domestiques traditionnels.

Le 4 janvier 1849, Margaret Dickie épousa un de ses concitoyens, le marin Simeon Michener. Au milieu du xixe siècle, Hantsport commençait à devenir un grand centre de construction navale, et toute une flotte de voiliers qui livraient notamment, de par le monde, du gypse et des produits agricoles de la région, y avaient leur port d’attache. Le journal de Margaret Michener fait souvent allusion à la construction, au lancement, au départ et à l’arrivée des bateaux. À cause de son métier, Simeon devait s’absenter de la maison durant de longues périodes. C’est peut-être pour meubler sa solitude que, à l’automne de 1849, la jeune femme décida d’ouvrir chez elle une école pour les enfants de la localité.

Au printemps de 1850, on apprit à Hantsport que le Michigan, alors région pionnière, offrait des conditions avantageuses à ceux qui voudraient aller y cultiver la terre. Cela ne pouvait manquer d’attirer les jeunes ménages. « Nous les femmes, nota tristement Margaret Dickie, nous ne serons pas fâchées de voir nos maris abandonner la navigation au long cours. » Cependant, cruelle ironie du sort, ce fut justement la décision de s’installer dans le Centre-Ouest américain qui mit fin tragiquement, quoique temporairement, à son rêve de vie conjugale à la campagne. En effet, Simeon mourut de la fièvre près de Chicago, en septembre 1850, au cours d’une mission d’exploration pour les futurs immigrants.

Après la disparition de son mari, Margaret Michener continua d’enseigner, soutenue dans son deuil par la compagnie et la sollicitude de ses parents et amis. Pendant l’hiver de 1851–1852, elle alla parfaire sa formation à l’école de Mlle Kidson à Horton, non loin de Hantsport, et retourna à ses diverses occupations. En 1856, elle épousa un calfat d’origine irlandaise, Robert McCulloch, avec qui elle allait avoir deux filles : Nettie en 1860 et May en 1865. Pendant un temps, elle fut la télégraphiste de Hantsport. En reconnaissance de ses services, la compagnie de télégraphe lui remit une gravure du prince de Galles à l’occasion de la visite de celui-ci en Amérique du Nord britannique, en 1860.

Après la guerre de Sécession, le frère de Margaret McCulloch, Robert, qui avait épousé Letitia McCulloch (sœur du mari de Margaret) emmena sa famille à Lincoln, dans le Delaware, et y exploita un verger de pêchers. En juillet 1867, les McCulloch rejoignirent les Dickie, puis en mars 1868, ils s’installèrent tous ensemble sur une ferme près de Georgetown, dans le même État. Margaret tenait les deux maisons et participait aux travaux de la ferme. En plus, elle enseigna durant deux mois, mais elle cessa parce qu’elle manquait d’élèves. À l’automne de 1868, après une année de maladie et de labeur, les McCulloch regagnèrent Hantsport. Les Dickie, quant à eux, s’établirent à Bay City, dans le Michigan.

En raison de l’incertitude qui pesait sur l’avenir de la construction navale dans les Maritimes, les McCulloch durent bientôt envisager à nouveau d’émigrer. En 1880, Nettie et son père se rendirent à Bay City. Robert McCulloch, alors âgé de 63 ans, trouva sans difficulté du travail dans les chantiers navals du lac Huron et décida de rester. Margaret et May arrivèrent en septembre 1881. La famille acheta une ferme près de Tuscola. Encore une fois, Margaret s’enracina dans un nouveau milieu. Elle commença à fréquenter l’église baptiste de l’endroit et se remit à s’occuper des œuvres de bienfaisance et de l’école du dimanche. En outre, elle fut inspectrice des écoles locales. Quand la santé de Robert se mit à décliner, Nettie et son mari, James McKay, s’installèrent à leur tour sur la ferme de Tuscola. Margaret délaissa peu à peu ses responsabilités publiques, mais demeura active. Nettie a rapporté qu’elle tricotait des mitaines doubles pour la lainerie voisine, ce qui « ajoutait une somme rondelette à [son] revenu ». Elle se rappelait aussi que, lorsque sa mère battait du beurre « avec la vieille baratte, elle épinglait une feuille sur le mur et la lisait en travaillant », car elle était demeurée grande liseuse. Robert McCulloch mourut en 1901. May, qui était devenue institutrice comme sa mère, mourut en 1903. Margaret s’éteignit en 1908, quelques semaines après son quatre-vingt et unième anniversaire.

L’importance de Margaret Dickie provient surtout du fait qu’elle tint son journal durant des périodes marquantes de sa vie d’adulte. Les originaux n’existent plus, mais des extraits ont paru de 1924 à 1930 dans l’Acadian de Wolfville, en Nouvelle-Écosse. Ses premiers cahiers, écrits de 1847 à 1852, sont une véritable mine de renseignements sur la vie familiale et collective à Hantsport. Un journal plus tardif (écrit en sténographie Graham) raconte les péripéties des McCulloch dans le Delaware. Une autre partie intitulée « Notes by the way » décrit le déménagement au Michigan. Ces journaux révèlent les ambitions et la mobilité qui caractérisaient les familles des Maritimes dans la seconde moitié du xixe siècle et montrent la faculté d’adaptation des femmes de la trempe de Margaret Dickie. Issue d’un milieu rural et baptiste, elle sut pourtant se prévaloir des nouvelles possibilités qu’offrait l’âge industriel. Tout au long de sa vie, elle s’essaya à une variété d’occupations et ce, en plusieurs lieux, tout en entretenant des liens étroits avec sa famille et son milieu, dont elle nota fidèlement les activités.

Margaret Conrad

Des extraits des journaux de Margaret Dickie (nov. 1847–16 janv. 1848, 13 mai 1849–8 août 1852, et 11 juill. 1867–ler, févr. 1869) et ses « Notes by the way », écrites du 21 sept. au 30 nov. 1881, ont paru dans l’Acadian (Wolfville, N.-É.), entre 1924 et 1930. Les poèmes suivants de Dickie ont aussi paru dans l’Acadian : « Avonside Cottage or the old red house », numéro du 15 févr. 1924 ; « Our singing school », 6 mars 1924 ; « The storm king », 11 mars 1926 ; « On the death of Exmouth Davidson, son of Asa and Emily Ann Davidson », 5 mai 1927 ; et « The Intervale Brook », 13 sept. 1928. Dans le numéro du 9 mars 1929, on pouvait lire ses « Minutes of the meeting of the Baptist Ladies’ Aid Society held at Tuscola, Michigan, on 17 January 1895 ».

On trouve aussi des extraits du journal de Dickie pour la période allant du 2 janv. 1850 au 4 janv. 1851 dans No place like home : diaries and letters of Nova Scotia women, 1771–1938, Margaret Conrad et al., édit. (Halifax, 1988).

AN, RG 31, C1, 1861, 1871, 1881, Nova Scotia (mfm aux PANS).— Atlantic Baptist Hist. Coll., Acadia Univ. (Wolfville), Hantsport, N.-E., United Baptist Church, first minute-book, 1830–1855 (texte dactylographié).— PANS, MG 5, 7, no 7 ; RG 1, 448–450.— Acadian, 23 déc. 1923–9 janv. 1930.— Christian Messenger, 16 avril 1856, 27 mai 1857.— C. A. Armour et Thomas Lackey, Sailing ships of the Maritimes [...] 1750–1925 (Toronto et Montréal, 1975).— Hattie Chittick, Hantsport on Avon (3e éd., Hantsport, 1968).— J. V. Duncanson, Falmouth – a New England township in Nova Scotia, 1760–1765 (Windsor, Ontario, 1965 ; réimpr., avec suppl., Belleville, Ontario, 1983).—Judith Fingard, Jack in port : sailortowns of eastern Canada (Toronto, 1982).— E. W. Sager, Seafaring labour : the merchant marine of Atlantic Canada, 1820–1914 (Kingston, Ontario, 1989).— G. V. Shand, Historic Hants County (Halifax ; 1979).

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Margaret Conrad, « DICKIE, MARGARET (Michener ; McCulloch) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/dickie_margaret_13F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
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