DESROCHES, CHARLES, instituteur, né en France, fils de Charles Desroches et d’Anne Delestrade ; circa 1816–1826.

Après des études à Paris, Charles Desroches passa en Angleterre au moment de la Révolution française. Il y poursuivit son éducation et s’engagea comme officier dans la marine britannique, où il servit pendant huit ans. Peut-être est-ce en sa qualité d’officier qu’il vint au Bas-Canada. Au début de 1810, il aurait enseigné à Pointe-aux-Trembles (Neuville). Le 7 octobre 1816, il épousa à Cap-Santé Nathalie Marcotte, et ils eurent sept enfants.

Au début du xixe siècle, la paroisse Sainte-Famille de Cap-Santé était vaste et prospère, et elle comptait plusieurs villages dont Portneuf. En 1816, une pétition fut signée par 60 habitants pour que soit ouverte une école royale ; la demande fut acceptée et Desroches fut nommé instituteur en mai 1817. Selon les règles établies par les trois syndics qui avaient la responsabilité de l’école, et par Desroches lui-même, les parents devaient payer 2s par mois pour chaque enfant, en plus d’approvisionner l’école en bois de chauffage. L’établissement était ouvert du lundi au vendredi, hiver comme été, de neuf heures à midi et de une heure à quatre heures. L’instituteur prenait congé du 15 août au 15 septembre ; deux fois par année, il s’absentait durant trois jours afin d’aller à Québec toucher son salaire. En 1817, Desroches gagnait £50 annuellement, mais à partir de 1819 il ne recevait plus que £45.

La lecture, la grammaire et l’arithmétique étaient les trois matières principales enseignées à l’école de Portneuf. Desroches jouissait d’une grande liberté pédagogique. Il utilisait la méthode d’enseignement mutuel qui avait été élaborée par Joseph Lancaster* et qui connaissait alors une grande vogue. Les élèves étaient répartis en sections, un condisciple plus avancé agissant comme moniteur. L’Institution royale pour l’avancement des sciences laissait aussi beaucoup de latitude quant au choix des livres, et Desroches utilisa tout ce qui lui tombait sous la main. Compte tenu de sa clientèle, il devait donner ses cours en anglais et en français et enseigner la religion catholique et protestante.

Même si, selon l’historien Louis-Philippe Audet, Desroches fut un des maîtres les plus dynamiques de l’époque, le nombre d’élèves qui fréquentaient son école diminua constamment. De 32 en 1820, il passa à 16 en mars 1822, puis à 14 en septembre de la même année. Aussi, en octobre 1822, les syndics de Portneuf et de Cap-Santé suggérèrent de muter Desroches à Cap-Santé afin de remplacer Charles Harper*, qui avait démissionné de son poste en avril. Desroches se montra intéressé et, apparemment, le curé de Cap-Santé, Félix Gatien*, donna son accord. Le gouverneur approuva le transfert ; le 15 novembre, l’école de Portneuf ferma ses portes.

Desroches commença à enseigner à Cap-Santé en janvier 1823. L’école accueillait alors 34 élèves. Les syndics se montrèrent satisfaits, même s’ils regrettaient que Desroches soit incapable d’enseigner les mêmes matières que Harper. L’un d’entre eux, George Waters Allsopp*, demanda au secrétaire de l’Institution royale, Joseph Langley Mills, l’autorisation d’engager un assistant qui enseignerait le latin, les mathématiques et la tenue de livres. En septembre, le nombre d’écoliers s’éleva à 48. En mars 1824, l’école de Desroches ne comptait que 42 élèves, répartis en 5 classes ; parmi eux, 9 apprenaient l’anglais et 33 le français.

À partir de 1825, il devint évident que le problème qui avait causé la fermeture de l’école de Portneuf se répétait à Cap-Santé. Le nombre d’élèves baissa à 25. Desroches, qui avait peur d’être blâmé, écrivit à Mills qu’il faisait de son mieux, mais que les parents retiraient les enfants de l’école dès que ceux-ci pouvaient lire leurs prières. L’instituteur se plaignit de l’attitude négative du curé Gatien et, craignant pour son poste, il rappela qu’il avait la responsabilité d’une famille. Mills répondit qu’il n’envisageait pas de fermer l’école, mais que les parents devraient être informés de cette éventualité. En mars 1826, seulement 19 écoliers fréquentaient l’école et Desroches, qui avait été très malade, était fort découragé. Il demanda une mutation, et l’Institution royale accéda à sa requête.

En novembre 1826, Charles Desroches se rendit à Québec pour toucher son salaire. Il ne revint pas à Cap-Santé. On l’aurait vu à Montréal et à New York, où il aurait cherché à s’embarquer pour l’Angleterre. Il laissait sa femme et ses sept enfants, dont le plus jeune avait à peine six mois, dans la plus grande détresse.

Yves Frenette

ANQ-Q, CC1, 11 mars 1829 ; CE1-8, 7 oct. 1816 ; CN1-28, 5 oct. 1816, 26 janv. 1818, 7 nov. 1825, 1er févr., 25 avril 1828, 1er juin 1829 ; CN1-157, 9 mars 1813.— Arch. privées, Yves Frenette (Orono, Maine), Notes d’entrevue avec François Desroches, descendant de Charles Desroches et de Nathalie Marcotte, 29 juin 1982.— McGill Univ. Arch., Royal Instit. for the Advancement of Learning, letter-books, 1820–1827.— L.-P. Audet, Histoire de l’enseignement au Québec (2 vol., Montréal et Toronto, 1971) ; le Système scolaire.— Boulianne, « Royal Instit. for the Advancement of Learning ».— Félix Gatien et al., Histoire du Cap-Santé (Québec, 1955).— L.-P. Audet, « Deux Écoles royales, 1814–36 : Sainte-Marie de la Nouvelle-Beauce et Cap-Santé », SRC Mémoires, 3e sér., 50 (1956), sect. i : 7–24.— R.-G. Boulianne, « The French Canadians and the schools of the Royal Institution for the Advancement of Learning, 1820–1829 », HS, 5 (1972) : 144–164.

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Yves Frenette, « DESROCHES, CHARLES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/desroches_charles_6F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
Année de la révision:    1987
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