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DESBARATS, PIERRE-ÉDOUARD, marchand, traducteur, fonctionnaire, imprimeur, propriétaire foncier, officier de milice et juge de paix, né le 7 octobre 1764, fils de Joseph Desbarats, marchand, et de Marie-Louise Crête ; le 24 septembre 1798, il épousa à Québec Josette Voyer, fille du notaire Charles Voyer, et ils eurent huit enfants ; décédé le 23 avril 1828 à Québec.
Certains biographes ont jadis fait des liens entre la longue lignée des Desbarats qui furent imprimeurs dans le Béarn à compter du milieu du xviie siècle et la lignée canadienne des imprimeurs Desbarats. Toutefois, les recherches ne révèlent aucune relation entre les deux familles. Originaire de la région d’Auch, Joseph Desbarats, perruquier de profession, arriva en Nouvelle-France en 1756 avec le régiment de La Sarre, en tant que domestique. En 1760, il obtint la permission de s’établir à Trois-Rivières et d’y exercer le métier de marchand. Pierre-Édouard Desbarats passa presque la première moitié de sa vie à cet endroit et pratiqua, durant quelques années, le même métier que son père.
En 1794, Desbarats s’installa à Québec et entreprit une nouvelle carrière en devenant traducteur à la Gazette de Québec ; dans l’atelier de John Neilson*, propriétaire du journal, il se familiarisa avec les divers rudiments du métier d’imprimeur. En 1797, tout en conservant son poste à la Gazette de Québec, il devint traducteur français à la chambre d’Assemblée du Bas-Canada, fonction qu’il remplit au cours des sessions parlementaires jusqu’en 1808.
Le 14 mai 1798, Desbarats et Roger Lelièvre furent nommés imprimeurs officiels des lois du Bas-Canada, succédant ainsi à William Vondenvelden* qui leur vendit son entreprise, la Nouvelle Imprimerie, le 23 mai suivant. Le 16 novembre 1799, Lelièvre se retira et céda ses intérêts à Desbarats. Le 19 mai 1800, Neilson devint le nouvel associé de Desbarats ; une entente officialisa alors un accord remontant au 23 octobre 1799. Toutefois, le nom de Neilson, déjà propriétaire d’une imprimerie, n’apparut jamais publiquement.
Durant les premières décennies du xixe siècle, l’imprimerie de Desbarats était la deuxième en importance à Québec, précédée uniquement par celle des Neilson. Entre ces deux établissements, les rapports furent, durant un certain temps, davantage complémentaires que concurrentiels. Desbarats demeura d’ailleurs le traducteur de la Gazette de Québec de Neilson jusqu’en 1808. Longtemps associé de Thomas Cary père et de Thomas Cary* fils, Desbarats fut l’imprimeur du journal que ces derniers dirigeaient, le Quebec Mercury. Il imprima aussi le Courier de Québec en 1807 et 1808, et le Vrai Canadien, également de Québec, en 1810 et 1811. Ces journaux, organes du parti des bureaucrates, s’opposaient d’une façon souvent virulente aux prétentions du parti canadien et du journal le Canadien.
Le tirage des publications étant, à cette époque, peu considérable et la diffusion restreinte, la marche d’une entreprise de presse se révélait souvent périlleuse. Cependant, l’apport constant des contrats d’impression qu’apportait à Desbarats son titre d’imprimeur des lois et les postes qu’il se vit confier au sein de l’administration publique lui permirent de se dégager des tracas financiers. D’abord traducteur français à la chambre d’Assemblée, il occupa l’importante fonction de greffier adjoint de la chambre, provisoirement en 1798, puis d’une façon définitive de 1809 à sa mort.
Le 10 juillet 1806, Desbarats se vit concéder, à titre de chef de canton, plus de 11 000 acres de terre dans le canton de Frampton, que traversait la rivière Etchemin. Alors que la plupart des bénéficiaires de ces vastes domaines boisés et inaccessibles ne se souciaient guère de leur mise en valeur, Desbarats prit à cœur le défrichement et le peuplement de ses terres, situées à l’ouest de la rivière Etchemin. En 1817, à titre de commissaire des chemins et des ponts des comtés de Dorchester, de Devon et d’une partie de Buckingham, il fit construire un chemin afin de relier le canton de Frampton au village de Sainte-Marie-de-la-Nouvelle-Beauce (Sainte-Marie). Il fit plus tard bâtir à ses frais un moulin à scier et un moulin à farine. Afin de peupler ses terres, il recruta la majeure partie des futurs habitants parmi les immigrés irlandais qui débarquaient en grand nombre au port de Québec. Malgré des chemins souvent impraticables, il se rendait régulièrement visiter les pionniers de Frampton et se préoccupait de leur bien-être.
Desbarats possédait de nombreuses propriétés à Québec et dans le faubourg Saint-Jean. En 1819, il se fit construire une imposante maison de trois étages par le maître maçon John Phillips au coin des rues Sainte-Geneviève et des Carrières, face aux jardins du gouverneur et à quelques pas du château Saint-Louis. Sa maison de campagne était située au nord de la ville, à Petite-Rivière-Saint-Charles. En 1796, il y avait acheté une ferme qu’il louait, tout en conservant une maison en pierre de deux étages, située près de la Saint-Charles.
Desbarats devint en peu d’années un membre influent de l’administration publique et de la société québécoise. Il fut nommé secrétaire de la Société du feu de Québec en avril 1800. Deux ans plus tard, il se vit confier la même fonction au sein d’un comité chargé d’encourager la culture du chanvre. Vers 1810, il s’enrôla dans la milice à titre de capitaine dans le 2e bataillon de milice de la ville de Québec et fut promu major du 1er bataillon de milice de Saint-Vallier en avril 1815 ; à son décès, il était lieutenant-colonel de ce même bataillon. Toujours en 1815, il obtint une commission de juge de paix du district de Québec, qui fut renouvelée en 1821 et 1828. En 1824, il fut l’un des membres du comité créé afin de voir au réaménagement et à l’embellissement de la place d’Armes.
Les contemporains de Desbarats gardèrent de lui le souvenir d’un homme distingué et accueillant qui, racontait-on, portait toujours l’habit de soirée et la cravate blanche, qu’il eût ou non des invités à dîner. L’ascension remarquable de Desbarats se doubla d’une anglicisation graduelle de la famille. Plusieurs de ses enfants épousèrent des membres de la bourgeoisie anglophone de Québec. Louise-Sophie se maria avec le docteur Frederic Horatio Fisher, originaire de Londres, Hélène et Sophie épousèrent respectivement George et Henry Pemberton, marchands de Québec ; une autre fille, Charlotte-Louise, devint l’épouse du docteur Charles-Norbert Perrault, fils de Joseph-François Perrault*.
Pierre-Édouard Desbarats s’éteignit, à l’âge de 63 ans, le 23 avril 1828, à sa résidence de Petite-Rivière-Saint-Charles. Les funérailles, présidées par Mgr Joseph Signay*, coadjuteur de l’évêque, eurent lieu à la cathédrale Notre-Dame de Québec. Le cortège funèbre traversa ensuite le fleuve et, empruntant des chemins difficiles en cette saison, se dirigea vers le canton de Frampton. Desbarats fut inhumé selon ses dernières volontés dans la chapelle de l’endroit, pour laquelle il avait fait don d’un terrain en 1825. La translation de ses restes, de la chapelle à la nouvelle église de la paroisse Saint-Édouard, eut lieu, non sans quelques réticences de la famille, vers 1870. En tant que fondateur et bienfaiteur, le nom de Desbarats demeura longtemps gravé dans la mémoire des premières générations d’habitants de Frampton ; son fils Édouard-Olivier devait y poursuivre la mise en valeur des terres : Ce nom se perpétua aussi dans les domaines difficiles et précaires de l’imprimerie et de l’édition. Les fils, petit-fils et arrière-petit-fils de Desbarats, George-Paschal*, George-Édouard* et William-Amable, se succédèrent tout au long du xixe siècle à la direction de l’imprimerie familiale, poursuivant l’aeuvre avec distinction, et faisant souvent preuve d’avant-gardisme.
Jean-Marie Lebel avec la collaboration d’Aileen Desbarats
ANQ-MBF, CN1-5, 30 janv., 25 avril, 18 juin 1788, 28 mars, 24 avril 1794.— ANQ-Q, CE1-1, 24 sept. 1798 ; CN1-16, 28 mai 1819 ; CN1-26, 29 avril, 26 sept. 1809 ; CN1-116, 9 janv. 1818, 15, 19 févr., 21 sept. 1821, 19 avril, 13 août, 6 sept., 11, 15 oct. 1822, 3, 21 févr., 9, 20 mai 1823, 26 sept. 1824 ; CN1-178, 27 févr. 1796, 26 avril 1797, 2 janv., 21 mars, 17, 22 sept., 5 déc. 1798, 24 janv., 30 mai 1800, 16 mars 1801, 2 févr., 2 mars, 2 avril, 3 mai 1802, 22 juin, 27 sept. 1803, 27 févr. 1805, 15 juill. 1809, 18 mai 1810, 22 févr., 7 mai 1811, 3 sept. 1814, 9 mai 1815 ; CN1-208, 7, 16 oct., 25 nov. 1820, 29 mai 1821, 13 août 1822, 20 mai, 3, 7, 13 oct. 1823, 5 août 1824, 10 juin, 16 sept. 1826, 1er oct. 1828 ; CN1-230, 30 avril 1794, 7 juin 1800, 6 juin 1801, 8 juill. 1802, 28 mai, 13 sept. 1806, 19 mars, 24 nov., 30 déc. 1807, 24 oct. 1808, 25 janv., 10 mars, 14 avril, 21 mai, 5, 22, 25 juin, 5 juill., 7 nov. 1810, 27 mai, 7 juill. 1812, 25 mai 1814, 6 déc. 1815, 19, 21 août, 6, 14 oct., 24 nov. 1817, 9 févr. 1818, 16, 24 juill., 30 oct. 1819, 9 août 1820, 4 mai 1821, 31 mai 1822, 26 mai, 10 juin 1824 ; CN1-253, 20 févr. 1812, 5 déc. 1823, 23 juill., 11 déc. 1824, 8 déc. 1826 ; CN1-262, 23 mai 1798, 16 nov. 1799, 7 juin 1800 ; CN1-284, 10 janv. 1794, 25 nov. 1819 ; ZQ6–45, 26 avril 1828.— APC, MG 24, B1, 1 : 182–187 ; 2 : 106–107 ; RG 68, General index, 1651–1841.— Arch. de la ville de Québec, Juges de paix, Procès-verbaux des sessions spéciales relatives aux chemins et ponts, 1816–1828.— « Cahier des témoignages de liberté au mariage commancé le 15 avril 1757 », ANQ Rapport, 1951–1953 : 115.— « Les Dénombrements de Québec » (Plessis), ANQ Rapport, 1948–1949 : 155, 213.— « Recensement des habitants de la ville et gouvernement des Trois-Rivières tel qu’il a été pris au mois de septembre mil sept cent soixante », ANQ Rapport, 1946–1947 : 8.— La Gazette de Québec, 10 avril 1800, 20, 29 mai 1802, 3 avril 1806, 27 avril 1815.— Quebec Mercury, 26 avril 1798.— Almanach de Québec, 1796–1828.— Beaulieu et Hamelin, la Presse québécoise, 1 : 19, 23.— Hare et Wallot, les Imprimés dans le B.-C.— Le Jeune, Dictionnaire, 1 : 499–500.— Officers of British forces in Canada (Irving), 143.— P.-G. Roy, Fils de Québec, 2 : 130–132.— Tremaine, Biblio. of Canadian imprints, 525, 528–529, 634, 664.— Christina Cameron et Jean Trudel, Québec au temps de James Patterson Cockburn (Québec, 1976).— Louis Lacaze, les Imprimeurs et les Libraires en Béarn (1552–1883) (Pau, France, 1884).— Yvan Lamonde et al., l’Imprimé au Québec, aspects historiques (18e 20e siècles) (Québec, 1983), 98–99, 109–110, 276, 285.— J.-E. Roy, Hist. de Lauzon, 4 : 70–71 ; 5 : 86–87.— Henri Têtu, Histoire des familles Têtu, Bonenfant, Dionne et Perreault (Québec, 1898), 523–524.— Claude Galarneau, « les Métiers du livre à Québec (1764–1859) », Cahiers des Dix, 43 (1983) : 149–150, 159–160.— Eugène Rouillard, « les Chefs de canton », BRH, 2 (1896) : 183–185.
Jean-Marie Lebel avec la collaboration d’Aileen Desbarats, « DESBARATS, PIERRE-ÉDOUARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/desbarats_pierre_edouard_6F.html.
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Auteur de l'article: | Jean-Marie Lebel avec la collaboration d’Aileen Desbarats |
Titre de l'article: | DESBARATS, PIERRE-ÉDOUARD |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |