DEGUISE, dit Flamand (Flamant), JACQUES, maître maçon, tailleur de pierre et entrepreneur, né le 5 mars 1697 et baptisé le lendemain à l’église Notre-Dame de Québec, fils de Guillaume Déguise, dit Flamand, maçon, et de Marie-Anne Morin, décédé à Québec le 18 novembre 1780.

Jacques Déguise, dit Flamand, fait partie de la seconde génération de maçons œuvrant en Nouvelle-France, tout comme Pierre Renaud, dit Cannard. L’un des premiers maîtres maçons canadiens, Jean-Baptiste Maillou*, dit Desmoulins, avait formé le frère de Jacques, Girard-Guillaume*, et, aucun contrat d’apprentissage ne portant le nom de Jacques Déguise, il est conséquent de penser qu’il fit lui aussi partie de l’entourage de Maillou.

L’activité de Jacques Déguise s’étend sur une période d’environ 36 ans. Son nom apparaît pour la première fois dans un minutier de notaire en 1721 alors qu’il construit le « solage » d’une maison de « pièces sur pièces », rue Saint-Flavien, à Québec. À ce moment, il est encore mineur et doit faire ratifier ses contrats par sa mère. C’est cependant sur le grand chantier de la prison et de la salle d’audience de Trois-Rivières, à partir de 1722, que Jacques Déguise complète sa formation. Il travaille alors en compagnie de son frère et de Jean-Baptiste Boucher, dit Belleville, tailleur de pierre et entrepreneur d’ouvrages de maçonnerie dont le nom revient souvent au bas des contrats se rapportant aux entreprises des fortifications de Québec et de Montréal.

Dans le domaine de l’architecture domestique, Jacques Déguise se charge, dans un premier temps, de plusieurs résidences à Québec dont celle désignée aujourd’hui sous le nom de maison Montcalm, rue des Remparts, construite selon les plans de Gaspard-Joseph Chaussegros* de Léry, en juin 1725, celle, en 1728, de l’officier Joseph Duburon, située sur la place Royale, et celle du navigateur Abel Olivier*, en 1729, rue Saint-Roch.

À compter de 1730, la situation de Jacques Déguise devient difficile. Thérèse Rinfret, dit Malouin, qu’il avait épousée à Québec le 10 septembre 1725, meurt le 21 novembre. À ce moment, Déguise est harcelé du côté professionnel à cause de son incapacité de rencontrer certaines échéances prévues lors de la signature de contrats. Pour tenter de se remettre à flot, il effectue diverses transactions immobilières avec, par exemple, Jean-Eustache Lanoullier* de Boisclerc.

L’activité de Jacques Déguise reprend en 1734 avec la construction de la maison du chirurgien Michel Bertier*, rue des Pauvres, de celle de Charles Normand, au coin de la rue Saint-Jean et de l’actuelle rue Sainte-Angèle, et se poursuit jusqu’en 1745 avec plusieurs autres constructions destinées à l’habitation, toujours dans le quartier des Pauvres à proximité de l’emplacement primitivement concédé à l’Hôtel-Dieu. La technique utilisée par Jacques Déguise pour assurer son profit consiste à faire l’acquisition d’un terrain dans ce secteur, y construire une maison de pierre et revendre le tout.

La carrière du maître maçon prend une autre tournure avec son entrée sur la scène de l’entreprise des fortifications de Québec, en 1747. Cinq ans plus tard, son frère étant décédé, il prend sa relève comme adjudicataire des travaux du roi pour les fortifications et les casernes. Le rythme de ses transactions financières marque, à compter de ce moment, une prospérité significative ; de toute évidence, ces travaux lui profitent. Les capitaux ainsi amassés se multiplient rapidement puisqu’ils lui permettent de nombreuses transactions immobilières, toujours dans l’actuel quadrilatère formé par les rues Saint-Jean, Saint-Stanislas, Elgin et Sainte-Angèle, alors en plein développement. En 1755, Déguise fournit à l’ingénieur en chef Chaussegros de Léry la somme d’argent nécessaire à la dot de sa fille Josephte-Antoinette, désireuse d’entrer à l’Hôpital Général. Cette transaction laisse d’ailleurs flotter une odeur de favoritisme.

Jacques Déguise travaille aussi pour les communautés religieuses. En 1754, il veille à l’édification de l’aile des parloirs au monastère des ursulines et au toisé d’un mur de maçonnerie entourant leur propriété. On lui confie également la réfection du monastère des hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Québec, ravagé par un incendie en 1755 : le contrat est alors de 24 000#.

Dans le domaine de l’architecture religieuse, le seul édifice qu’on puisse attribuer avec certitude à Jacques Déguise est l’église Saint-François-Xavier-de-la-Petite-Rivière (Petite-Rivière, Québec). Ce temple de faible dimension, fait de colombage « pierroté », prouve que les maçons du xviiie siècle utilisent encore les techniques importées de France par leurs aînés. Comme la plupart des maîtres maçons travaillant dans la colonie, Jacques Déguise avait formé des apprentis et engagé des compagnons. Les noms associés au sien sont, entre autres, ceux de Thomas Allard, Jean-Baptiste Rouillard et Joseph Morin. Mais aucun de ces derniers ne prit la relève du maître ; aucun n’acquit même une certaine notoriété.

De son mariage avec Thérèse Rinfret, dit Malouin, Jacques Déguise avait eu trois enfants. Un seul survivra, François, qui continuera d’ailleurs la tradition paternelle et épousera, en 1749, Marie-Françoise, fille du maçon Pierre Jourdain, dit Bellerose. Après le décès prématuré de son épouse, Déguise se maria avec Marie-Élisabeth Laisné, dit Laliberté, le 5 février 1742 à Saint-Augustin et le couple eut 11 enfants.

Jacques Déguise s’éteignit le 18 novembre 1780, à l’âge de 83 ans, dans la maison de sa fille Élisabeth et de son gendre Joseph Falardeau, rue Saint-Stanislas, où il habitait. Il fut inhumé le lendemain au cimetière des Picotés.

Raymonde Gauthier et Marthe Lacombe

AMHDQ, Registre des comptes du monastère, IV : 331s.— ANQ-Q, État civil, Catholiques, Notre-Dame de Québec, 6 mars 1697, 4 juill. 1729, 8 févr. 1774, 19 nov. 1780 ; Saint-Augustin, 5 févr. 1742 ; Greffe de Gilbert Boucault de Godefus, 10 juill. 1747 ; Greffe de Louis Chambalon, 26 déc. 1711 ; Greffe de J.-É. Dubreuil, 23 janv., 20 nov. 1721, 8, 18 mars, 21 avril 1722, 18 janv. 1723, 3 mars 1724, 5 août, 10 sept., 29 déc. 1725, 11 janv. 1727, 5 oct. 1729, 20 oct. 1731, 4 avril 1734 ; Greffe de C.-H. Du Laurent, 24 mai 1735, 1er mars 1755 ; Greffe d’Henri Hiché, 1er févr. 1734 ; Greffe de N.-C. Pinguet de Bellevue, 27 avril 1749 ; Greffe de J.-N. Pinguet de Vaucour, 16, 26 févr. 1728 (nos 112, 113, 115), 8 mars 1731, 26 févr. 1737, 17 avril 1738, 31 déc. 1740, 27 mars 1741, 28 janv. 1742 ; NF 19, 68, ff.174v.–190.— AUQ, Fonds construction, 20 août 1735, 14 oct. 1754.— P.-G. Roy, Inv. coll. pièces jud. et not. ; Inv. ord. int., II : 48, 59s., 82.— Tanguay, Dictionnaire, I : 165 ; III : 44, 279s.— Marthe Bergeron-Hogue, Un trésor dans la montagne (Québec, 1954), 225–239.— D’Allaire, L’Hôpital Général de Québec, 108.— Marthe Lacombe, Les réalisations du maçon Jacques Deguise, dit Flamand, au quartier du palais, Le parc de l’Artillerie et les fortifications de Québec ; études historiques présentées à l’occasion de la conférence des Sociétés savantes (Québec, 1976), 27–36.— O’Reilly, Mgr de Saint-Vallier et l’Hôpital Général, 720.

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Raymonde Gauthier et Marthe Lacombe, « DEGUISE, dit Flamand (Flamant), JACQUES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/deguise_jacques_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
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