Titre original :  Northland exploration: report of exploration by Frank J.P. Crean ... in Saskatchewan between the Saskatchewan and Churchill rivers, season of 1908 by Crean, Frank J. P. (Frank Joseph Patrick). Canada. Dept. of the Interior. Publication date 1909. Publisher Ottawa : Govt. Print. Bureau. From: https://archive.org/details/cihm_82280/page/n5.

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CREAN, FRANCIS JOSEPH PATRICK, estimateur de peuplements forestiers, ingénieur civil, fonctionnaire, explorateur, auteur et officier, né le 6 mars 1875 à Dublin, fils de Michael Theobald Crean (prononcé Crane) et d’Emma Dunne (Dunn) ; le 19 janvier 1909, il épousa à Nelson, Colombie-Britannique, Josephine Mary Gigot (décédée en 1963), et ils n’eurent pas d’enfants ; décédé le 18 décembre 1932 à Toronto.

Le père de Francis Joseph Patrick Crean était barrister et travaillait pour la Irish Land Commission. Septième d’une famille de huit enfants, Crean, surnommé Frank, fréquenta deux écoles catholiques : le Belvedere College à Dublin et le Clongowes Wood College, situé dans la localité voisine de Naas. On ne sait pas exactement où il reçut sa formation d’ingénieur. Bien qu’il n’ait été membre d’aucune société d’arpenteurs, irlandaise ou anglaise, il ferait suivre son nom de la mention C.E. (Civil Engineer). Pendant la guerre des Boers, il servit dans la Roberts’ Light Horse en 1899, puis dans le 5th Canadian Mounted Rifles ; à la différence de son frère Thomas Joseph, couvert de médailles, on ne sait que peu de chose sur lui à cette époque. Les raisons et le moment de son émigration au Canada demeurent incertains, mais sa famille se souvient de lui aujourd’hui comme mouton noir. D’une taille de plus de six pieds, Crean, costaud et moustachu, était un personnage intimidant, d’autant plus qu’il arborait une brûlure de poudre autour de l’œil droit et sur la gorge ; les Amérindiens le surnommèrent Big One Eye.

Les toutes premières mentions des activités de Crean au Canada datent de 1903, lorsqu’il était estimateur de peuplements forestiers à 35 milles au nord de Prince Albert (Saskatchewan) pour la Bell Brothers Lumber Company. Il semble qu’il ait passé du temps à Winnipeg, car il affirmait être un ami de Clarence Campbell Chipman*, commissaire de la Hudson’s Bay Company, et car il épouserait la fille aînée d’Édouard-François Gigot, administrateur de la Hudson’s Bay Company à Nelson et ancien député à l’Assemblée législative du Manitoba. Ce fut probablement grâce à son expérience et aux gens qu’il connaissait dans l’Ouest que Crean obtint un poste à Ottawa, qu’il occupa à partir du 4 février 1908, en tant qu’employé à la division des chemins de fer et des marécages du ministère fédéral de l’Intérieur.

Crean entra au ministère au moment où ses représentants, qui s’inquiétaient du fait que le Canada commençait à manquer de terres pour la colonisation, soutenaient qu’il faudrait ouvrir la région située au delà de la rivière Saskatchewan-du-Nord. En effet, on en fit la promotion sous le nom de « Nouveau-Nord-Ouest ». Crean dirigea un petit groupe d’exploration qui se rendit dans la partie nordique centrale de la Saskatchewan (la forêt boréale située au sud du fleuve Churchill) à la fin de l’été de 1908 pour déterminer si la région était propice au développement agricole. Une grande partie du territoire était graveleux, densément boisé ou en tourbière, mais il suggéra que le climat était parfait pour la culture des céréales et que, partout où on avait planté du blé, il avait bien poussé. Son rapport était illustré de photographies qu’il avait prises au cours de ses voyages. Les splendides images de jardins et de champs attenants à des missions et à des postes de traite de fourrure – bien que ces derniers n’aient couvert que quelques acres d’un vaste territoire – semblaient un témoignage éloquent du potentiel de la région.

La confirmation apportée par Crean lui fit obtenir une autre expédition l’été suivant, dans le nord-est de l’Alberta, jusqu’à la rivière Eau-Claire (rivière Clearwater) au nord et l’Athabasca à l’ouest. Une fois encore, il considéra que la région était idéale pour les pionniers. En fait, il fit une description du territoire, avec sa grande variété de ressources naturelles, en disant qu’il conviendrait mieux que les grandes prairies du sud aux colons qui avaient peu de moyens. Il insista sur le fait que le principal obstacle à une colonisation à grande échelle était le manque d’accès et non le climat. Ses deux rapports d’expédition furent publiés ensemble sous le titre New Northwest exploration.

Les conclusions de Crean ne résistèrent finalement pas à un examen rigoureux. Des arpenteurs envoyés dans la région située au nord de Prince Albert en 1909 et 1910, dans le but de tracer les bases géodésiques principales, comme le troisième méridien, ne rencontrèrent que peu de terres ayant une valeur agricole. Devant ces résultats contradictoires, le ministère de l’Intérieur ordonna, en 1912, une enquête spéciale qui préconisa que le territoire soit préservé et constitué en réserve forestière fédérale (parc national de Prince Albert, fondé en 1927). Crean, pour sa part, démissionna de son poste au gouvernement en février 1913 et trouva un emploi à Calgary en tant qu’agent pour la Compagnie d’assurance du Canada sur la vie, avant d’obtenir du travail auprès de son beau-frère à High River, en Alberta.

En janvier 1915, pendant la Première Guerre mondiale, Crean s’enrôla à Calgary dans le 12th Canadian Mounted Rifles Regiment. Il demanda brusquement sa libération un mois plus tard. Nommé lieutenant dans la milice (le 12th Manitoba Dragoons), il passa le reste de l’année au camp d’internement pour ressortissants ennemis à Brandon, au Manitoba, avant d’être démis de ses fonctions pour ivrognerie. Il s’enrôla de nouveau pour servir outre-mer et joignit le 2nd Tunnelling Company du Génie canadien, en France, en mars 1916. Toutefois, son alcoolisme interféra encore une fois avec ses obligations – ses commandants le qualifiaient poliment d’incompétent – et il fut renvoyé au Canada en octobre. À son retour, toujours fidèle à lui-même, il omit de se présenter devant ses supérieurs. On n’eut aucune nouvelle de lui pendant plusieurs mois.

Après la guerre, Crean resta quelque temps à Ottawa, vraisemblablement pour être réembauché par son ancien ministère. Il vécut ensuite à Toronto, sauf pendant une période, vers 1928, durant laquelle sa femme tenait un restaurant à Belle River. Il passa le reste de sa vie à errer d’un emploi à l’autre. Crean mourut en 1932, âgé de 57 ans et sans travail. Catholique, il fut inhumé au cimetière Mount Hope à Toronto par le fonds du Souvenir, organisme de charité de Montréal qui organisait les funérailles des vétérans indigents.

Le Nouveau-Nord-Ouest devint quant à lui une terre de la deuxième chance pendant l’entre-deux-guerres. Le long de la lisière sud de la forêt boréale, plus de 200 nouveaux cantons furent ouverts aux colons, particulièrement aux vétérans qui revenaient de la guerre. Cela faisait partie d’un programme de reconstruction fédéral. Pendant la grande dépression, de nombreux colons abandonnèrent leur terre du sud de la Saskatchewan, frappée par la sécheresse, et montèrent vers le nord afin de tout recommencer à zéro. L’agriculture s’y révéla toutefois difficile et ne pouvait soutenir le type de colonisation envisagée par Francis Joseph Patrick Crean.

W. A. Waiser

Les sources de cette biographie se trouvent dans notre ouvrage The New Northwest : the photographs of the Frank Crean expeditions, 1908–1909 (Saskatoon, 1993). Les papiers de Crean, qui comprennent deux albums de photographies, sont conservés au SAB de Saskatoon (BF 26). Il existe aussi une petite collection sur Crean à BAC, R190-36-2, dossier 1645827.

AO, RG 80-8-0-1331, no 7640.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

W. A. Waiser, « CREAN, FRANCIS JOSEPH PATRICK », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/crean_francis_joseph_patrick_16F.html.

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Auteur de l'article:    W. A. Waiser
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2014
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