COMPAIN, MARIE-LOUISE, dite Saint-Augustin, sœur de la Congrégation de Notre-Dame, supérieure de la communauté (supérieure générale), née le 28 janvier 1747 à Montréal, fille de Pierre Compain, dit L’Espérance, barbier et perruquier, et de Françoise Vacher ; décédée le 2 mai 1819 à Montréal.
Marie-Louise Compain appartenait à une famille dont cinq enfants optèrent pour la vie religieuse : son frère, Pierre-Joseph Compain, fut prêtre, deux de ses sœurs devinrent religieuses à l’Hôtel-Dieu de Montréal et une autre la suivra à la Congrégation de Notre-Dame. Élevée à la porte de cette communauté, rue Saint-Jean-Baptiste à Montréal, Marie-Louise en fréquenta d’abord la petite école. Puis elle entra au noviciat en 1764 et fit profession deux ans plus tard sous le nom de sœur Saint-Augustin. À partir de 1768, elle enseigna à la mission de Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud (Saint-François-de-Montmagny) et, en 1774, elle fut nommée maîtresse des pensionnaires. L’année suivante, elle alla enseigner à Pointeaux-Trembles (Neuville). Rappelée en 1783, elle reçut la charge de fonder la mission de Saint-Denis, sur le Richelieu, où le curé François Cherrier venait de terminer la construction d’un couvent. Devenue maîtresse des novices à la maison mère en 1788, sœur Saint-Augustin fut nommée assistante l’année suivante, fonction qu’elle remplit jusqu’à son élection comme supérieure en 1796. Au terme de son sexennat, elle fut, exceptionnellement, réélue à ce poste aux deux tiers des voix ; avec l’autorisation du vicaire général Jean-Henri-Auguste Roux*, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice et aussi supérieur de la congrégation, elle conserva ses fonctions jusqu’en 1808.
Pendant ces 12 années du supériorat de sœur Saint-Augustin, la communauté fut aux prises avec des problèmes de développement et de revenus. Après avoir compté 70 sœurs en 1760 et 56 au moment du feu de 1768 [V. Marie-Josèphe Maugue-Garreau*, dite de l’Assomption], la Congrégation de Notre-Dame ne comprenait, en 1800, que 58 sœurs dont 30 étaient employées à l’enseignement dans 12 pensionnats ou écoles tandis que les 28 autres vivaient à la maison mère, réparties en trois catégories : d’abord, les anciennes, puis les « hautes officières » et les « sœurs de classe » retirées de l’enseignement, qui remplissaient certains offices à la pharmacie, à la sacristie, à l’infirmerie, et se chargeaient des petits travaux manuels ; enfin, les « sœurs des gros ouvrages », accueillies dans la communauté pour faire, entre autres, les travaux de métairie, de cordonnerie, de boulangerie et de ciergerie. La chute puis la stagnation des effectifs de la communauté depuis la Conquête étaient attribuables non pas au changement de régime politique, mais à la situation économique de la colonie : la dot de 2 000# était devenue un obstacle au recrutement. Afin de remédier à cette difficulté, le coadjuteur, Mgr Plessis*, conseilla la supérieure, en 1805 : « Faites l’impossible pour augmenter le nombre de vos sujets... rendez-vous faciles sur la dot... souvenez-vous de ce que je vous ai dit, que la première richesse d’une Communauté est d’avoir de bons sujets. »
Mais la communauté ne pouvait alors renoncer à aucune de ses sources de revenus, car elle avait déjà perdu la plus élevée et la plus régulière d’entre elles, la perception des rentes de France, interrompue par la Révolution française. Et bien qu’au lendemain du traité d’Amiens, signé en 1802 entre la Grande-Bretagne et la France, le premier geste de sœur Saint-Augustin fût d’écrire au procureur de la Congrégation de Notre-Dame en France, l’avocat Jean-Louis Maury, dans le but de récupérer les rentes dues, la communauté n’avait obtenu en retour que celles de 1790 et de 1791. De plus, ces rentes se trouvaient fortement réduites, ayant été touchées en assignats dans le temps, puis dépréciées à la chute de ce numéraire. Quant aux autres rentes et arrérages, le procureur se montrait pessimiste, puisqu’on leur réservait le sort des rentes des sujets français. La guerre ayant repris entre la France et la Grande-Bretagne en 1803, aucune autre rente ne fut perçue et, faute de revenus, la communauté se vit dans l’obligation de vendre des propriétés.
En 1808, sœur Saint-Augustin devint assistante et, l’année suivante, maîtresse des novices. Elle reprit ensuite la direction de la communauté en 1814. Or, cette année-là, le début de la Restauration en France venait de permettre aux sœurs de la congrégation d’établir des liens avec Alexandre Maury, fils de leur ancien procureur français. Sœur Saint-Augustin apprit avec satisfaction que le gouvernement français donnerait justice aux communautés religieuses du Canada qui produiraient leurs titres. La Congrégation de Notre-Dame était en mesure de le faire ; mais la liquidation, confiée à deux commissions, l’une britannique, pour recevoir les réclamations, l’autre française, pour les examiner, fut d’une lenteur infinie. Après deux ans de travail, les commissions se déclarèrent inefficaces et recommandèrent une entente entre les nations. Des plénipotentiaires évaluèrent alors à 60 millions de francs toutes les créances britanniques, capital plus intérêts, somme que ne pouvait payer le gouvernement français. La Grande-Bretagne s’en chargea donc, à certaines conditions que la France accepta. La Congrégation de Notre-Dame, comme les autres communautés canadiennes, pouvait désormais s’adresser au gouvernement britannique pour recevoir paiement annuel de ses rentes et paiement immédiat des arrérages, avec intérêts au 22 mars 1818.
C’est sur cet espoir que s’éteignit sœur Saint-Augustin le 2 mai 1819. Elle avait dominé de sa forte personnalité 17 ans de l’histoire de la Congrégation de Notre-Dame, à une époque où les difficultés financières freinaient l’élan apostolique. Il est évident que les religieuses avaient beaucoup estimé sœur Saint-Augustin et qu’elles s’étaient senties à l’abri des difficultés du temps sous sa ferme et intelligente direction.
ANQ-M, CE1-51, 9 juin 1732, 29 janv. 1747.— Arch. de la Congrégation de Notre-Dame (Montréal), Fichier général ; Personnel, VI ; Reg. général.— Tanguay, Dictionnaire, 5 : 119.— Gosselin, L’Église du Canada après la Conquête.— Lemire-Marsolais et Lambert, Hist. de la CND de Montréal, 5 : 129s. ; 6.— Trudel, L’Église canadienne, 2 : 344–347.
Andrée Désilets, « COMPAIN, MARIE-LOUISE, dite Saint-Augustin », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/compain_marie_louise_5F.html.
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Auteur de l'article: | Andrée Désilets |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |