Provenance : Lien
CHINIQUAY (Che-ne-ka, Chiniki), JOHN, chef stonie, né d’une mère crie et d’un père qui était peut-être métis ; décédé probablement en 1906 dans la réserve des Stonies à Morley, Alberta.
Des registres gouvernementaux indiquent que John Chiniquay naquit vers 1834, mais l’allure qu’il présentait à la fin du siècle suggère une date antérieure à celle-là. Enfant, il vécut au bord de la rivière Red Deer (Alberta), au campement de Maskepetoon*, grand chef cri renommé pour son attachement à la paix. Il reçut le nom de John d’un missionnaire, probablement Robert Terrill Rundle*, qui visitait régulièrement le campement dans les années 1840.
À un moment quelconque, Chiniquay quitta les Cris pour vivre parmi les Stonies. Descendants des bandes sioux qui avaient migré vers le nord et l’ouest au xviie et au xviiie siècle, les Stonies chassaient et faisaient du piégeage le long des pentes orientales des Rocheuses, vivaient en petits groupes et se déplaçaient au gré des saisons. Ils étaient alliés aux Cris contre les Pieds-Noirs. Au milieu du xixe siècle, ils se divisaient en trois groupes principaux. L’un d’eux, appelé quelquefois la bande du milieu, chassait surtout le long de la rivière Bow et de ses affluents. Les territoires des autres bandes s’étendaient au nord jusqu’à la rivière Athabasca et au sud jusqu’au mont Chief, Montana.
Chiniquay vécut dans une famille stonie après la mort de ses parents. Jeune homme, il chassa et fit du piégeage à la source de la rivière Red Deer. Selon la tradition orale, il épousa la sœur du chef Jacob Bearspaw [Ozîja Thiha]. On sait qu’il jouait un rôle de conciliateur et de leader dans les campements stonies ; dès le milieu du siècle, il était reconnu comme le chef de la bande du milieu. Lorsque George Millward McDougall* et son fils John Chantier McDougall* fondèrent une mission méthodiste à Morleyville (près de Morley), sur la rivière Bow, en 1873, ils trouvèrent en Chiniquay un fervent chrétien et un précieux collaborateur.
Les années 1870 furent critiques pour les nations des Prairies et des contreforts des Rocheuses. Le gouvernement du Canada était impatient d’établir son autorité dans cette région et d’annuler les titres de propriété des aborigènes. De leur côté, les chefs autochtones tenaient à préserver ce qu’ils pouvaient pour garantir l’avenir de leurs peuples. « En grande partie parce que les deux camps envisageaient les négociations avec des buts et des présupposés différents, a noté l’historien James Rodger Miller, ils ne leur donnaient pas la même portée à l’époque, ce qui, hélas, est encore le cas aujourd’hui. » En septembre 1877, les Amérindiens d’une grande partie de ce qui est maintenant le sud de l’Alberta – Pieds-Noirs, Gens-du-Sang, Peigans, Sarcis et Stonies – se réunirent à Blackfoot Crossing pour discuter d’un traité [V. Isapo-muxika*]. Chiniquay était l’un des trois chefs stonies présents qui signèrent le traité no 7. En vertu de cette entente, chaque famille de cinq personnes aurait droit à un mille carré. S’assura-t-on que les chefs stonies savaient ou comprenaient à quel point le territoire que cette entente donnerait serait petit ? On peut se le demander. L’emplacement de la réserve n’était pas défini, sinon par cette formule : « dans le voisinage de Morleyville ». La région visée par le traité n’englobait pas les terres de la bande du Nord, dirigée par Ki-chi-pwot (Jacob Goodstoney ou Big Stony), ce qui allait engendrer des difficultés dans l’avenir. En plus, contrairement aux autres tribus qu’on incitait à faire de l’élevage, les Stonies étaient censés devenir agriculteurs.
En 1879, un arpenteur se présenta à Morleyville pour délimiter la réserve. Parmi les chefs stonies, seul Chiniquay était présent. John Chantler McDougall, qui tenait apparemment à ce que tous les Stonies soient près de la mission, servit d’interprète. Ces circonstances, et la formulation même du traité, eurent pour résultat que les Stonies se virent assigner uniquement des terres situées en bordure de la rivière Bow. Cet arrangement engendra un vif mécontentement. En plus, les Stonies constatèrent bien vite que le sol n’était pas assez fertile. Tant que la chasse leur permit d’assurer leur subsistance, leur situation économique fut tolérable. Mais, plus la colonisation blanche augmentait, plus le gibier diminuait et plus les animaux qui restaient faisaient l’objet d’une rude concurrence entre les Stonies et d’autres groupes autochtones. À l’automne de 1893, à Golden, en Colombie-Britannique, les Stonies, représentés par Chiniquay, tinrent une rencontre avec les Koutanis pour fixer une frontière entre leurs territoires de chasse. Ils choisirent la ligne continentale de partage des eaux.
De tous les chefs de sa bande, John Chiniquay fut celui qui occupa cette fonction le plus longtemps. Il croyait fermement en l’instruction et visitait fréquemment l’école de la réserve. C’est là que sa photographie fut prise en 1887. Dans son rapport du 30 juin 1906, l’agent des Affaires indiennes parle de la bande en lui donnant le nom de Chiniquay, mais une lettre d’un missionnaire de la région, datée du 24 décembre 1906, signale que Chiniquay était mort dans le courant de l’année. Les membres de la bande dépeignent Chiniquay comme un homme agréable, généreux et juste. L’appellation officielle de la bande Chiniki, de même que le nom de divers lieux et établissements, perpétuent son souvenir. Il repose au cimetière de la bande, à Morley.
Les renseignements les plus complets sur la vie du chef John Chiniquay figurent dans le premier volume de l’étude non publiée de John Lee Laurie et intitulée « The Stony Indians of Alberta » (on trouve un exemplaire dactylographié, en quatre volumes, préparé pour la Glenbow Foundation, Calgary, 1957–1959, aux GA, 4390), mais comme ce texte contient peu de notes en bas de page, on ne peut vérifier la plupart des sources.
On trouve de l’information additionnelle concernant l’histoire de Chiniquay et des Stonies dans la collection d’histoire orale au Nakoda Institute, Stoney Tribal Administration (Morley, Alberta), notamment la transcription d’un récit – daté de 1972 – du chef Bill McLean de la bande de Bearspaw (ruban A-3).
GA, M656, file 25.— Canada, Parl., Doc. de la session, 1903–1908, rapports annuels du dép. des Affaires indiennes, 1902–1907.— J. R. Miller, Skyscrapers hide the heavens : a history of Indian-white relations in Canada (Toronto, 1989), 164.— Morris, Treaties of Canada with the Indians.— J. W. Niddrie, « Memories of Morley », J. W. Chalmers, édit., Alberta Hist. (Calgary), 40 (1992), no 3 : 10–13.— John Snow, These mountains are our sacred places : the story of the Stoney Indians (Toronto et Sarasota, Fla, 1977).— « Stoney history notes », P. M. Jonker, compil. (opuscule de 20 pages publié par la bande de Chiniki des Stonies, Morley, 1983).
Ian A. L. Getty, « CHINIQUAY (Che-ne-ka, Chiniki), JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/chiniquay_john_13F.html.
Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique:
Permalien: | http://www.biographi.ca/fr/bio/chiniquay_john_13F.html |
Auteur de l'article: | Ian A. L. Getty |
Titre de l'article: | CHINIQUAY (Che-ne-ka, Chiniki), JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |