CHAFFEY, SAMUEL, homme d’affaires, né le 4 février 1793 à Norton sub Hamdon, Angleterre, fils de Benjamin Chaffey et d’une prénommée Sarah ; le 25 décembre 1821, il épousa Mary Ann Poole, originaire du Somerset, et ils eurent un fils, Samuel Benjamin ; décédé le 26 juillet 1827 à Chaffey’s Mills (Chaffeys Locks, Ontario).

Samuel Chaffey était le cinquième fils d’un négociant et fabricant de lainages du Somerset. La crise économique qui sévissait en Angleterre à la suite des guerres napoléoniennes fut probablement un des facteurs qui poussèrent Samuel et son frère Benjamin à immigrer dans le Haut-Canada en 1816. Les deux frères se fixèrent d’abord dans l’établissement militaire de Perth, puis allèrent s’installer à Brockville vers 1817. Ils se lancèrent dans le commerce sous le nom de B. and S. Chaffey, mirent sur pied une petite distillerie et louèrent (au nom de Benjamin) une ferme et des moulins voisins, propriétés de Daniel Jones père. Pendant qu’ils s’affairaient à la mise en exploitation de ces moulins, des colons du canton de South Crosby, situé dans l’arrière-pays, leur demandèrent de construire un moulin chez eux. Les Chaffey acceptèrent et, en avril 1820, Benjamin obtint la location à bail du lot 17 du rang 8 ; ce lot faisait partie de la réserve du clergé, et on y trouvait un bon emplacement de moulin. La construction commença cet été-là, sous la direction de Samuel.

L’activité commerciale des Chaffey à Brockville dura à peu près trois ans, période pendant laquelle ils firent souvent affaire avec des grossistes et des marchands de bois de Montréal et de Québec. Mais l’entreprise ne tarda pas à s’endetter lourdement, principalement envers la succession de Daniel Jones, et Benjamin s’enfuit aux États-Unis à la fin de 1820 pour échapper aux poursuites. Samuel resta sur place pour tenter, sans grand succès, de se tirer de ce mauvais pas. Des créanciers qui lui réclamèrent des sommes de £155 7s 6d, en 1822, et de £186 9s 2d, l’année suivante, obtinrent gain de cause en justice ; cependant, en 1827, l’ancienne association des frères Chaffey avait plus de £1 060 de créances. Samuel avait conservé, toujours au nom de son frère, le droit que ce dernier avait sur l’emplacement de moulin, dans le canton de South Crosby, où une scierie était en construction au moment de la fuite de Benjamin.

Vers 1822, Samuel s’était installé dans ce canton ; il avait commencé à cultiver la terre et avait poursuivi la construction de moulins qui, en 1827, formaient un vaste ensemble comprenant la scierie, un moulin à farine, une distillerie et des machines à carder et à fouler. Bien qu’en 1823 il ait tenté avec d’autres d’obtenir le tracé d’une route jusqu’à Chaffey’s Mills, il n’existait aucun réseau efficace de routes ou de voies d’eau pour desservir cette « région stérile et rocheuse », et Chaffey écoulait probablement ses produits dans la région. Néanmoins, des rapports sur le revenu annuel des entreprises de Chaffey, faits en 1829 et 1830, révèlent qu’il s’agissait d’une exploitation moyenne : Mary Ann Chaffey estimait ce revenu à £205, le lieutenant-colonel John By* à £300 et le cotiseur du canton à £457. John Mactaggart, conducteur des travaux sur le canal Rideau, estimait à au moins £5 000 la valeur totale de cette entreprise autosuffisante et dynamique.

En 1826, on avait déjà commencé près de Chaffey’s Mills la construction d’une écluse du futur canal Rideau. Cet endroit était un des plus malsains de toute la voie navigable : on y dénombrait beaucoup de cas de paludisme, appelé aussi malaria ou fièvre des marais. Mactaggart en décrivit ainsi les symptômes « Ils se manifestent généralement par une poussée de fièvre bilieuse, un épouvantable vomissement, des douleurs au dos et aux reins, une faiblesse générale, une perte d’appétit [...] Après être resté dans cet état pendant huit à dix jours, il est probable que la jaunisse se déclare, puis ce sont des accès de frissons [...] Deux ou trois heures avant qu’ils n’apparaissent, [le malade] a tellement froid que rien ne peut [le] réchauffer [...] et alors le tremblement commence. [Ses] os [lui] font mal, [ses] dents claquent et [ses] côtes sont douloureuses, et une douleur atroce s’ensuit [...] Puis, [on] se rend compte que toutes les phases de la maladie sont passées et [le malade] sort de son lit dans un état de grande faiblesse. » Plusieurs survécurent à cette maladie, mais Samuel Chaffey en mourut le 26 juillet 1827.

Benjamin Chaffey, qui revint des États-Unis en 1828, et la veuve de Samuel Chaffey se disputèrent les droits sur les moulins. Benjamin en revendiqua la propriété en vertu du bail et de son ancienne association avec Samuel, tandis que Mary Ann allégua qu’elle avait les moulins en mains et que c’était son mari qui avait fait les améliorations. Elle avait l’appui de deux immigrants originaires du Somerset, John Rowswell, un de ses voisins, et Benjamin Tett, son futur beau-frère. Après bien des discussions, on arriva à un compromis en juin 1829 ; Mary Ann et Benjamin versèrent un paiement commun pour le bail. Pendant ce temps, les plans du canal Rideau prévoyaient que l’emplacement des moulins devait être intégré à la voie d’eau afin d’en simplifier le tracé et d’économiser des frais de construction. Des négociations avec By, semblables à celles que le lieutenant-colonel effectuait pour d’autres lots le long du tracé du canal, aboutirent à une entente en octobre 1829 : Mary Ann et Benjamin cédèrent à By le lot 17 et d’autres terres dans le canton pour £2 000. Au cours des deux années suivantes, les moulins furent démantelés et remplacés par un poste d’écluse qui fut nommé d’après Samuel Chaffey et qui forma bientôt le noyau de la communauté actuelle de Chaffeys Locks.

David Roberts

AO, MS 393, A-2-c(i), box 2, envelope 1 ; RG 1, C-IV, South Crosby Township, concession 8, lot 17 ; RG 21, United Counties of Leeds and Grenville, Elizabethtown Township, assessment rolls, 1816–1821 ; South Crosby Township, census records, 1815–1825 ; assessment rolls, 1816–1830 ; RG 22, sér. 131, 1 : fos 82, 86 ; sér. 176, 1 : 156.— APC, RG 1, E3, 8 : 12–18 ; L3, 108 : C15/103 ; 146 : C leases, 1819–36/157 ; RG 5, A1 : 19743–19744, 23611–23614, 23857–23858, 24073–24075, 24082–24085, 56945.— Leeds Land Registry Office (Brockville, Ontario), Abstract index to deeds, South Crosby Township, vol. 1 (mfm aux AO).— QUA, Tett family papers.— Somerset Record Office (Taunton, Angl.), South Petherton Independent (Congregational), reg. of baptisms, marriages, and burials.— « Journals of Législative Assembly of U.C. », AO Report, 1913 : 298.— John Mactaggart, Three years in Canada : an account of the actual state of the country in 1826–7–8 [...] (2 vol., Londres, 1829.— « Parish register of Brockville and vicinity, 1814–1830 », H. R. Morgan, édit., OH, 38 (1946) : 83.— Karen Price, « Construction history of the Rideau Canal » (Canada, Direction des parcs et lieux hist. nationaux, Travail inédit, no 193, Ottawa, 1976).— Sights and surveys : two diarists on the Rideau, Edwin Welch, édit. (Ottawa, 1979).— J. A. Alexander, The life of George Chaffey ; a story of irrigation beginnings in California and Australia (Melbourne, Australie, et Londres, 1928).— Hearth and heritage : history of Chaffey’s Lock and area, 1800–1980, Laurel Fleming, compil. (Kingston, Ontario, 1981).— R. W. Passfield, Building the Rideau Canal : a pictorial history (Toronto, 1982).

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David Roberts, « CHAFFEY, SAMUEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/chaffey_samuel_6F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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