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CHABOT, JEAN, avocat, homme politique et juge, né le 15 octobre 1806 à Saint-Charles, près de Québec, fils de Basile Chabot, agriculteur, et de Josephte Prévost ; le 1 er juillet 1834, il épousa à Québec Hortense Hamel, et ils n’eurent pas d’enfants ; décédé le 31 mai 1860 à Québec.
Jean Chabot fréquenta le petit séminaire de Québec de 1820 à 1828, puis, le 26 février 1829, il entreprit l’étude du droit dans le cabinet d’Elzéar Bédard*, qui allait devenir le premier maire de Québec en 1833. Admis au barreau le 27 février 1834, Chabot s’acquit rapidement une réputation d’avocat distingué. En septembre 1843, il accepta l’invitation de se porter candidat à une élection partielle tenue dans la circonscription de la ville de Québec, et se fit élire par acclamation. Partisan de Louis-Hippolyte La Fontaine*, il dut se résigner à travailler dans l’opposition, car le comportement politique du gouverneur, sir Charles Theophilus Metcalfe*, provoquait en novembre la démission du ministère dirigé par La Fontaine et Robert Baldwin, et entraînait le mois suivant la formation d’un gouvernement ayant à sa tête William Henry Draper* et Denis-Benjamin Viger*.
Lors des élections générales de 1844, Chabot centra sa campagne sur le thème de la responsabilité ministérielle et fut réélu sans opposition. Sans être un grand orateur, il possédait de bonnes aptitudes pour le travail parlementaire ; on lui reconnaissait en particulier les qualités d’un excellent juriste et le don de répliquer de façon mordante. Avec ses collègues Pierre-Joseph-Olivier Chauveau* et Thomas Cushing Aylwin*, il s’efforça en particulier, en tant que député de la ville de Québec, d’obtenir la collaboration du gouvernement pour résoudre les problèmes qui accablaient ses électeurs, problèmes principalement reliés aux incendies des mois de mai et juin 1845. Même s’il en appuya certaines initiatives, notamment la loi scolaire de 1845, Chabot se montrait grandement insatisfait du gouvernement. Ainsi, le 23 juin 1847, il dressa en chambre un sombre bilan de ses réalisations, dénonçant son favoritisme à l’endroit du Haut-Canada et s’en prenant à l’inefficacité des mesures votées dans le but de secourir les victimes des incendies de Québec.
À la même époque, Chabot contribua activement à l’établissement de la Société de Saint-Vincent-de-Paul à Québec [V. Joseph Painchaud]. Le 19 novembre 1846, il fut invité à présider la première conférence de cette société philanthropique au Canada-Uni, celle de Québec, et, le 7 février 1847, on le nomma en plus président du conseil de Québec, fonctions qu’il occupa jusqu’en 1850. S’il était sensible aux misères de la classe ouvrière, Chabot n’envisageait pas pour autant le problème du point de vue des inégalités sociales. Bien de son temps et de son milieu, il faisait appel au sens charitable tout en considérant que les pauvres étaient « pour la plupart, vicieux, fainéants, imprévoyants », comme on pouvait le lire dans une lettre aux citoyens de Québec qu’il signait le 31 décembre 1847.
Perçu comme un bon défenseur des intérêts de Québec, Chabot obtint encore une fois le renouvellement de son mandat sans opposition, en décembre 1847. Cette élection, qui permit à la coalition de La Fontaine et de Baldwin de reprendre le pouvoir en mars 1848, donna lieu également au retour en chambre de Louis-Joseph Papineau*, dont la position sur l’Union divisa les libéraux. Pour sa part, Chabot s’opposa fermement au rappel de l’Union réclamé par Papineau et réitéra sa confiance dans la politique réformiste de La Fontaine. Appelé à présider l’assemblée publique tenue le 11 mai 1848 à l’occasion de la venue de Papineau à Québec, Chabot dut constater l’enthousiasme de la population francophone de Québec à l’égard de l’ancien chef patriote, mais il avertit l’auditoire que malgré son admiration pour Papineau il était contre l’abrogation de l’Union. Cette loyauté au parti de La Fontaine lui valut d’être nommé commissaire des Travaux publics le 13 décembre 1849, lors d’un remaniement ministériel occasionné par la retraite du président du Conseil législatif, René-Édouard Caron*. L’influence du secrétaire du diocèse de Québec, Charles-Félix Cazeau*, cousin germain de Chabot, joua toutefois un rôle déterminant dans sa nomination. Selon l’historien Jacques Monet, c’est lui qui proposa le nom du député de Québec à Joseph-Édouard Cauchon* et à La Fontaine, qui tenaient compte de ses recommandations. Obligé de retourner devant l’électorat avant d’entrer en fonction, Chabot dut faire campagne contre les « rouges » annexionnistes et leur candidat Joseph Légaré. Avec le soutien de Cauchon et le concours personnel de Cazeau, cette réélection ne posa aucune difficulté. Mais Chabot n’occupa son poste que quelques mois, car c’était un ivrogne invétéré, et il dut démissionner en mars 1850, après avoir passé une nuit dans une prison de Toronto. Avant même que Chabot n’ait été nommé officiellement, Lewis Thomas Drummond* avait prévenu La Fontaine « qu’il ne poss[édait] ni la dignité personnelle ni la position politique » requises, et Cauchon, quant à lui, avait avoué à son chef le 15 décembre qu’il lui fallait « une forte considération d’intérêt public pour soutenir Chabot ».
Craignant sans doute l’effet de ces incidents sur sa popularité à Québec, Chabot alla se faire réélire dans Bellechasse en 1851. À la suite du discours du trône, il donna son appui au nouveau gouvernement dirigé par Francis Hincks* et Augustin-Norbert Morin* tout en dressant la liste des réalisations qu’il en attendait : la construction de chemins pour faciliter l’accès à de nouvelles terres et réduire ainsi l’émigration aux États-Unis, l’abolition du Conseil législatif, ou tout au moins sa réforme, la construction du chemin de fer de Québec à Halifax, la codification des lois et surtout l’abolition de la tenure seigneuriale, à laquelle il accordait beaucoup d’attention. En septembre 1852, à la suite de la démission du commissaire des Travaux publics John Young* et du refus de George-Étienne Cartier* d’assumer cette succession, Chabot accepta de nouveau ce poste. En cette qualité, il allait être mêlé de près à la première phase d’expansion du réseau ferroviaire canadien, marquée par la construction du Grand Tronc, quoique son rôle ait consisté surtout à seconder Hincks, le maître d’œuvre en ces matières. Du 20 novembre 1852 au 26 janvier 1855, Chabot siégea au conseil d’administration du Grand Tronc comme représentant du gouvernement. Il était également engagé à titre personnel dans certains projets ferroviaires. En 1850, il faisait partie des administrateurs de la compagnie du Quebec and Melbourne Railway et, en 1854, son nom figurait dans une pétition présentée à l’Assemblée au nom de la compagnie du Northern Pacific Railroad. S’intéressant aussi à l’amélioration des communications entre Québec et Lévis pendant la saison hivernale, Chabot fit étudier en 1853, par le biais d’un comité de la chambre, la possibilité d’utiliser des traversiers à vapeur plutôt qu’un pont de glace.
En 1854, Jean Chabot posa sa candidature à la fois dans Bellechasse et dans la ville de Québec. Facilement élu à chaque endroit, il choisit de représenter Québec. Il conserva son poste de commissaire jusqu’en janvier 1855, soit au moment de la démission de Morin et de la formation’ du ministère de sir Allan Napier MacNab* et d’Étienne-Paschal Taché*. Exclu du nouveau cabinet, on retint cependant ses services, à compter du 19 juin 1855, à titre de commissaire chargé de faire les cadastres dans chaque seigneurie, en vertu de la loi sur la tenure seigneuriale. Chabot demeura député de Québec jusqu’à ce qu’il ait été nommé, le 20 septembre 1856, juge de la Cour supérieure avec résidence à Montréal. L’année suivante, sa résidence était transférée à Québec où il exerça les mêmes fonctions durant les trois dernières années de sa vie.
ANQ-Q, CE1-1, 1er juill. 1834, 2 juin 1860 ; CE2-4, 15 oct. 1806.— APC, RG 68, General index, 1841–1867.— ASQ, Fichier des anciens.— Debates of the Legislative Assembly of United Canada (Abbott Gibbs et al.).— Le Canadien, 18 sept. 1843, 2 oct. 1844, 15, 22 déc. 1847, 12 mai 1848, 14 déc. 1849, 28 janv. 1850, 24 sept. 1852, 10, 12, 24 juill. 1854, 1er juin 1860.— Le Journal de Québec, 22 juill. 1854. - F.-J. Audet, « Commissions d’avocats de la province de Québec, 1765 à 1849 », BRH, 39 (1933) (1933) : 587, « les Législateurs du B.-C. ».— Desjardins, Guide parl.— I.-J. Deslauriers, Juges de la Cour supérieure de 1849 à 1978 (s.l., 1978).— Morgan, Sketches of celebrated Canadians.— Quebec directory, 1847–1860.— P.-G. Roy, les Juges de la prov. de Québec.— Monet, la Première Révolution tranquille.— [Henri Têtu], les Noces d’or de la Société de Saint-Vincent de Paul à Québec, 1846–1896 (Québec, 1897).— L.-P. Turcotte, le Canada sous l’Union, 1841–1867 (2 vol., Québec, 1871–1872).
Pierre Poulin, « CHABOT, JEAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/chabot_jean_8F.html.
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Auteur de l'article: | Pierre Poulin |
Titre de l'article: | CHABOT, JEAN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |