CAUX, JEAN, dit Cataline, mineur et transporteur par convois, né en France ; décédé le 22 octobre 1922 à Hazelton, Colombie-Britannique.
Le surnom de Cataline désigne un personnage plus grand que nature, une figure quasi mythique de l’histoire de la Colombie-Britannique, dont une statue perpétue la mémoire à Williams Lake. Cet homme appelé Jean Caux – ou John Cox selon la prononciation habituelle – acquit la renommée en convoyant des chargements à dos de mulet ou de cheval, et il le fit plus longtemps que nul autre dans la période (1858–1914) où ce mode de transport se pratiqua dans la province. Malgré les légendes qui l’entourent et la pauvreté des sources dignes de foi, on peut reconstituer sa carrière avec une certitude raisonnable.
Français d’origine, né vers 1829 dans les Pyrénées (peut-être à Oloron), Caux fit sa première apparition en Colombie-Britannique en 1858 : il était alors mineur sur le Fraser. Sans doute, comme tant d’autres, était-il remonté des régions aurifères de la Californie. On ignore d’où lui venait son surnom de Cataline ; certaines sources l’associent à la Catalogne, en Espagne. Dès 1862, il exploitait un convoi de mulets et de chevaux. L’approvisionnement des mines d’or de la région de Cariboo, et ensuite de celles des districts d’Omineca et de Cassiar, ne pouvait se faire autrement. D’abord, il eut trois ou quatre animaux, puis davantage, au point que, dès 1869, il était un des transporteurs principaux. Bien que son convoi fut de différentes longueurs selon les saisons, il compta jusqu’à une quarantaine de bêtes. Dans les années 1870 et 1880, Cataline faisait hiverner ses animaux dans les vallées situées à l’ouest d’Ashcroft et, au printemps, il les menait vers le nord jusqu’à Quesnel, où se terminait la piste de chariots de la région de Cariboo. C’est là qu’il prenait les chargements que son convoi transportait, en peut-être deux ou trois voyages par été, dans les régions septentrionales de la Colombie-Britannique. Au début du XXe siècle, sa base nordique se trouvait plutôt à Hazelton, à la jonction des rivières Skeena et Bulkley. À partir de là, il approvisionnait les neuf relais de la ligne télégraphique du Yukon entre Hazelton et la rivière Nass (à compter de l’achèvement de la ligne en 1901) ainsi que les mines de roche dure plus au nord.
En 1900, Cataline était déjà une figure légendaire. Grand et bien bâti, il portait une grosse moustache et sa chevelure lui allait aux épaules. Sa ténacité, sa résistance au froid et son habileté au lancer du couteau étaient sans égales. Quand il prenait un verre d’alcool (c’était un solide buveur), il en versait souvent les dernières gouttes dans ses cheveux pour les frictionner. Sur la piste, il était toujours vêtu d’un sombrero, d’une redingote, d’une chemise blanche empesée et de hautes bottes de cuir dans lesquelles il gardait son couteau. Il n’enlevait pas sa chemise tant que son convoi n’était pas arrivé à destination ; alors, il en achetait une neuve et jetait la vieille. Il eut des enfants avec au moins deux autochtones. On raconte que le juge Matthew Baillie Begbie* lui accorda la citoyenneté en le rencontrant par hasard sur la route du Cariboo. Il savait signer son nom (il signait Jean Caux), mais ne pouvait ni lire ni écrire ; il comptait sur les autres pour composer ses lettres et télégrammes. Son parler était un mélange de langues. Les équipages de ses convois étaient formés d’hommes d’ascendance autochtone, chinoise, européenne et mixte. Ses exploits de transporteur – par exemple, il convoya d’énormes pièces d’équipement minier sur de longues distances à la fin des années 1890 – attiraient l’attention et suscitaient l’admiration. On savait pouvoir lui faire confiance – aucune mine, aucune station n’était trop éloignée pour lui.
Doté des qualités d’un personnage de légende, Jean Caux était par contre un piètre homme d’affaires. Il devait emprunter aux banques, mais estimer le coût de certaines cargaisons était quasi impossible à cause des caprices du temps et de l’état des pistes. Comme il n’avait pas mis un sou de côté, il dut vendre son convoi vers 1912 pour rembourser ses dettes. Il passa ses dernières années à Hazelton, à vivre de la charité d’autrui, et y mourut en 1922. S’il ne fut pas, à l’encontre de ce que l’on aimerait croire, « le dernier transporteur par convois de la Colombie-Britannique », il fut un digne représentant des marginaux – hommes et femmes – qui assuraient le transport par convois de bêtes de somme, et sa retraite coïncida avec la fin de l’époque où ce moyen de transport fut en usage.
BAC, RG 3, D-3, sér. 6, 5 (mfm).— BCA, E/C/B81.3 ; E/C/B172.2 ; E/E/C61 ; E/E/H85 ; E/E/M311 ; E/E/M963 ; GR-1372, F 1369, J. T. Pidwell, tolls collected at Clinton, 1869 ; GR-2025, 8 : ff.231, 237 ; GR-3049, vol. 1, mining licence, 19 févr. 1859 ; MS-0676, 4, file 12 ; 9, file 19 ; MS-2018 ; VF42, frames 1197–1199.— Victoria Daily Times, 27 oct. 1922.— Annuaire, Victoria, 1874 : 89.— R. J. Barman, « Packing in British Columbia : transport on a resource frontier », Journal of Transport Hist. (Manchester, Angleterre), 21 (2000) : 140–167.— Sperry (Dutch) Cline, « Cataline », dans Pioneer days in British Columbia : a selection of historical articles from « BC Outdoors » magazine, Art Downs, édit. (4 vol., Surrey, C. B., 1973), 1 : 98–103.— Hilda Glynn-Ward [Hilda Glynn (Howard)], The glamour of British Columbia (Toronto, 1932), 116s.
Roderick J. Barman, « CAUX, JEAN, dit Cataline », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/caux_jean_15F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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