CARON, ÉDOUARD, cultivateur, commerçant, fonctionnaire, homme politique et officier de milice, né le 22 avril 1830 à Rivière-du-Loup (Louiseville, Québec), second fils de François Caron, cultivateur, et de Marie-Henriette Coulombe ; le 11 janvier 1860, il épousa au même endroit Marie-Louise Lemaître-Augé, et ils eurent quatre fils ; décédé le 25 février 1900 à Louiseville.
Après des études au séminaire de Nicolet de 1845 à 1847, Édouard Caron se livre à l’agriculture sur la terre de son père, l’un des plus gros exploitants de la paroisse de Rivière-du-Loup. À l’âge de 26 ans, il reçoit en donation de son père deux terres qui totalisent 79 acres, de même qu’une portion de 5 acres d’un lot en « prairie à gros foin ». En 1859, il acquiert de François Belliveau, cultivateur, pour la somme de 4 800 $, deux terres qui couvrent 84,5 acres. Il détenait une hypothèque sur l’une d’elles en vertu d’un prêt de 400 $ consenti l’année précédente.
Très tôt, Caron s’impose comme un important cultivateur. Déjà au recensement de 1861, il déclare posséder 211 acres de terre et produire 214 boisseaux d’avoine ainsi que 6 000 bottes de foin. Son cheptel compte 2 chevaux, 2 poulains, 5 moutons et 2 porcs ; il possède jusqu’à 200 $ d’instruments aratoires ou machines, et ses terres sont évaluées à quelque 12 500 $. Afin de faciliter la vente de sa production agricole, Caron devient en 1863 l’un des associés de la Société de navigation des Trois-Rivières à Montréal côté nord du fleuve. Formée cette année-là, la nouvelle société regroupe des commerçants, des navigateurs et des cultivateurs de Rivière-du-Loup, de Trois-Rivières, de Saint-Léon et de Yamachiche.
Avec le temps, l’exploitation de Caron fait figure de modèle, ce qui lui vaut en 1871 le premier prix à l’« Examen des terres les mieux tenues pour le comté de Maskinongé ». Au recensement de cette année-là, il déclare occuper 241 acres de terre, dont 118 en foin. Il produit 644 boisseaux d’avoine, 161 de sarrasin, 644 de pommes de terre et 30 000 bottes de foin. Il est devenu, et de loin, le plus gros producteur de foin de Rivière-du-Loup. Son cheptel, considérable, se compose entre autres de 3 chevaux, 50 bovins, 112 moutons et 12 cochons. Enfin, il possède cinq entrepôts, huit granges et écuries, dix charrettes et chariots ainsi que diverses machines agricoles.
Caron fait de plus le commerce du foin et du grain avec des cultivateurs de sa paroisse et des environs. Pour le faciliter, il fait construire en 1874 avec son neveu Ferdinand Caron une péniche de 400 tonneaux. L’ampleur de son commerce au début des années 1880 impressionne : en 1880, par exemple, il achète 80 000 bottes de foin à Saint-Paulin. Pour écouler une bonne partie de sa marchandise, il se tourne vers New York. Cette année-là, il y fait affaire avec la maison Frazee and Company et, l’année suivante, avec la Theo. Chase and Company. Cette dernière société se charge, moyennant une commission de un dollar « par tonneau de 2 000 livres », de la vente sur le marché de New York. En 1881, les expéditions de foin dans cette ville s’élèvent à 1 145 558 livres (approximativement 71 500 bottes) qui rapportent environ 6 000 $ à Caron, déduction faite des frais de transport et de commission. En 1885, il s’associe à Ignace Leclerc sous la raison sociale de Caron et Leclerc ; en plus de faire le commerce du foin et du grain, les associés touchent à celui du bois de sciage et du charbon.
Caron, qui a passablement investi pour se doter d’installations adéquates afin d’entreposer de grandes quantités de foin, semble éprouver des difficultés financières au fil des années 1880. Les différents emprunts qu’il contracte entre 1883 et 1889 totalisent 32 500 $. Ses affaires périclitent en 1889 : la société Caron et Leclerc fait faillite, et Caron doit déclarer en plus une faillite personnelle. Au moment de la cession des biens, la société Caron et Leclerc possède 54 lots dans le canton de Caxton, la moitié d’un moulin à farine à Yamachiche, plusieurs granges, 3 presses à foin et quelques biens meubles. Dans la faillite personnelle de Caron, on saisit quatre terres estimées à environ 22 000 $, des instruments aratoires, un cheptel et des biens meubles d’une valeur approximative de 2 000 $.
En plus de ses activités agricoles, Caron a formé des projets qui, tous, sont demeurés sans lendemain. En 1881, il envisage, avec Auguste-Frédéric Dame, médecin de Louiseville, de creuser sur la terre d’un cultivateur de Rivière-du-Loup un puits artésien afin d’exploiter du gaz et du pétrole. La même année, on le retrouve à la tête d’une entreprise qui vise à faire souscrire un capital de 40 000 $ destiné à la construction d’un chemin de fer entre Louiseville et Hunterstown. Avec trois marchands et un manufacturier de Louiseville, il forme en 1882 une compagnie au capital de 25 000 $ afin d’établir une manufacture de chaussures à Louiseville.
Caron cumule au cours de sa vie diverses responsabilités. Il est commissaire d’écoles, préfet de comté, capitaine de milice, maire de la municipalité de paroisse de Rivière-du-Loup en 1874. Dans le domaine de l’agriculture, Caron est secrétaire-trésorier élu de la Société d’agriculture du comté de Maskinongé (en 1864, 1869 et 1872), et membre de la Société de fabrication de beurre et de fromage de Louiseville en 1884. De plus, il est l’un des administrateurs en 1859 de la Compagnie du pont de la Rivière-du-Loup et membre en 1874 de la Société de construction Victoria.
À l’instar de son grand-père, François Caron, et du frère de celui-ci, Charles*, Édouard Caron fait de la politique. Aux élections provinciales de 1867, il brigue la faveur populaire comme candidat conservateur dans Maskinongé, mais il essuie la défaite. Sous la même bannière et dans la même circonscription, il se représente aux élections de 1878 et remporte la victoire. Réélu en 1881, c’est par une faible majorité de 65 voix qu’il conserve son siège de député aux élections de 1886. Cependant, l’un de ses adversaires, Joseph-Hormidas Legris, cultivateur de Rivière-du-Loup, demande l’annulation de cette élection. Ce dernier allègue que Caron s’est adonné à des manœuvres frauduleuses, a usé d’intimidation et proféré des menaces au cours de l’élection.
Legris a gain de cause puisqu’en 1887 un jugement de la Cour supérieure annule l’élection du 14 octobre 1886. À l’élection partielle du 28 avril 1888, il éclipse Caron par une majorité d’à peine 48 voix. Les différends entre les deux hommes ne s’arrêtent pourtant pas là. Le 1er août suivant, Legris réclame devant la Cour supérieure la somme de 10 000 $ à Caron pour dommages et intérêts. Il déclare qu’avant l’élection partielle, au cours des rencontres des deux hommes les dimanches aux portes des diverses églises de la circonscription, Caron n’a pas cessé de le calomnier. Cette affaire se termine en 1890 par une entente de gré à gré.
Édouard Caron est un exemple intéressant de cultivateur entrepreneur qui, malgré bien des déboires, a tout mis en œuvre pour donner à ses activités un rayonnement extra-régional. Il a aussi participé à la vie de sa communauté et acquis une grande respectabilité.
AC, Trois-Rivières, État civil, Catholiques, Saint-Antoine-de-la-Rivière-du-Loup (Louiseville), 27 févr. 1900.— AN, RG 31, C1, 1852, Rivière-du-Loup (Louiseville) ; 1861, Rivière-du-Loup ; 1871, Rivière-du-Loup.— ANQ-MBF, CE1-15, 22 avril 1830, 11 janv. 1860 ; T-11/1, no 36 (1883) ; no 9 (1886) ; no 7 (1887) ; no 116 (1888) ; nos 252–253 (1889) ; T11-401.— Le Constitutionnel (Trois-Rivières, Québec), 1869–1872, 1882.— Le Courrier de Maskinongé (Louiseville), 1879–1881.— RPQ.— J.-A.-I. Douville, Histoire du collège-séminaire de Nicolet, 1803–1903, avec les listes complètes des directeurs, professeurs et élèves de l’institution (2 vol., Montréal, 1903), 2.— Germain Lesage, Histoire de Louiseville, 1665–1960 (Louiseville, 1961).— Charles Drisard, « Édouard Caron », l’Écho de Saint-Justin (Saint-Justin, Québec), 1er oct. 1927 : 1.
Jocelyn Morneau, « CARON, ÉDOUARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/caron_edouard_12F.html.
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Auteur de l'article: | Jocelyn Morneau |
Titre de l'article: | CARON, ÉDOUARD |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
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