CAMPBELL, JOHN SAXTON, homme d’affaires, juge de paix et seigneur, né vers 1787, fils d’Archibald Campbell, marchand, et de Charlotte Saxton ; le 11 mars 1817, il épousa à Londres Jane Hamilton, puis en secondes noces Mary Carne Vivian ; décédé le 25 avril 1855 à Penzance, Angleterre.
Il semble que John Saxton Campbell ne soit pas né à Québec ; son acte de naissance ne figure pas dans les registres paroissiaux de la ville, contrairement à celui de son frère cadet Archibald*, né en 1790. Cela indique toutefois qu’il se trouvait, probablement à Québec dès l’âge de deux ou trois ans. Campbell était issu d’un milieu aisé. Son père, un loyaliste venu dans la province de Québec après la Révolution américaine, fit de bonnes affaires dans le commerce du bois. Devant les perspectives intéressantes qu’offrait alors le port de Québec pour l’exportation des produits forestiers canadiens en Angleterre, Campbell choisit de prendre la relève de son père en 1811. Déjà, depuis 1808, il était mesureur de douves au port de Québec et s’adonnait au commerce.
Vers 1815, Campbell entra en société avec son beau-frère William Sheppard* pour pratiquer le commerce du bois. Installés d’abord à l’anse au Foulon, les deux associés achetèrent de Mathew Bell*, en 1816, l’anse Woodfield, située quelque peu en amont de Québec. C’est là qu’ils recevaient le bois qui était ensuite chargé sur des navires à destination de la Grande-Bretagne. Pour des raisons qui demeurent obscures, cette société fut dissoute en 1823. En 1824 et 1825, Campbell travailla pour John Caldwell* à titre d’agent responsable des moulins à scier que celui-ci possédait près de la chute Etchemin, à Saint-Nicolas, sur la rive sud du fleuve Saint-Laurent.
Au début de 1825, Campbell déplaça son centre d’activité à l’anse des Mères, située plus près de la ville, où, en plus d’aménager des quais pour le chargement des navires, il établit un moulin à scier mû par la vapeur ainsi qu’un chantier naval. Depuis 1816, Campbell investissait des capitaux dans l’achat et la construction de navires, et il avait déjà fait enregistrer au port de Québec deux navires, deux bricks et une barque. Son activité dans ce secteur prit beaucoup d’ampleur entre 1825 et 1835 ; au cours de cette période, il fit immatriculer 24 bâtiments (14 bricks, 9 navires et une goélette), dont plusieurs avaient été construits par George Black. On ne connaît cependant pas la nature précise des relations d’affaires entre Campbell et Black. Il semble que Campbell finançait la construction des navires et mettait son chantier à la disposition de Black ou d’autres constructeurs. Ses navires étaient parfois vendus à des marchands locaux, mais le plus souvent il les expédiait en Angleterre avec une cargaison de bois. Campbell était alors en liaison avec plusieurs marchands du Haut et du Bas-Canada qui acheminaient à son anse d’importantes quantités de pins blancs et de pins rouges, équarris ou sciés. Le mesurage et le classement qui déterminaient le prix du bois donnaient souvent lieu à des disputes entre acheteurs et vendeurs. Étroitement concerné parce problème, Campbell siégea, de 1823 à 1837, au sein du Bureau des mesureurs de bois créé en vue d’admettre sans partialité des candidats à cette profession.
En 1831, Campbell prit part en tant qu’actionnaire à la fondation de la Compagnie de la navigation par la vapeur entre Québec et Halifax [V. sir Samuel Cunard*] ; c’est d’ailleurs à son chantier naval que cette société fit construire le Royal William. Encore une fois l’œuvre de George Black, ce navire à vapeur de 618 tonneaux était équipé d’un engin de 200 chevaux-vapeur installé par la fonderie Bennet and Henderson, de Montréal. Son lancement, le 27 avril 1831, « fut si important qu’on avait décrété un congé public. Le gouverneur général [Whitworth-Aylmer*] et lady Aylmer présidaient aux cérémonies dont les participants comprenaient une garde d’honneur et la fanfare du 32e régiment d’infanterie. » Du haut du cap Diamant, surplombant le chantier, le peintre James Pattison Cockburn* réalisa alors une très belle aquarelle représentant l’événement.
Dans la ville de Québec, Campbell s’inscrivait au rang des notables. De 1826 à 1828, son nom figurait comme conseiller du Committee of Trade [V. John Jones*]. À l’instar d’autres marchands prospères, Campbell s’intéressait au milieu bancaire. Il fut élu administrateur de la Banque de Québec en 1828 et demeura à ce poste jusqu’en 1831. Il avait siégé aussi au conseil d’administration de la Quebec Savings Bank en 1829 et 1830, puis de nouveau de 1835 à 1841. Le 14 octobre 1830, il avait reçu une commission de juge de paix qui fut renouvelée trois ans plus tard. Campbell habitait, en bordure de la Grande Allée, un vaste domaine juste en face de celui du réputé marchand de bois William Price*. Dans ses temps libres, il cultivait un certain intérêt pour les lettres ; d’ailleurs, son nom apparaît parmi les fondateurs de la Société littéraire et historique de Québec dans la charte royale reconnaissant officiellement cet organisme en 1831.
À partir de 1835, Campbell délaissa progressivement ses entreprises à Québec. Le 19 janvier, il acquit aux enchères la seigneurie de l’Îlet-du-Portage, à Saint-André, où il avait flairé des potentialités forestières, énergétiques et portuaires. Il y construisit un somptueux manoir entouré de quelques bâtiments, d’un moulin à scier et d’un grand quai d’un quart de mille de long, prolongé par une jetée de 200 pieds permettant l’accostage de gros navires. Afin de réaliser ces projets d’investissement, il fit mettre en vente une vingtaine de lots de terre qu’il possédait dans divers cantons du Haut et du Bas-Canada. En janvier 1837, il se départit aussi de ses propriétés de l’anse du Cap acquises vers 1829 ; la plus grande partie fut achetée par George Black au prix de £5 437. Campbell continua cependant d’entretenir des relations d’affaires avec Black comme en témoigne un document de 1838 faisant état de l’existence d’une société du nom de Campbell and Black. En 1840, ils possédaient un navire en copropriété.
C’est à l’instigation de sa seconde femme, Mary Carne Vivian, que John Saxton Campbell aurait décidé de quitter la colonie pour l’Angleterre vers 1842. Établi à Penzance, il continua d’acquérir des navires construits en Amérique du Nord. Par le caractère varié et mobile de ses entreprises, Campbell illustre bien l’activité économique des marchands de bois du Bas-Canada au xixe siècle.
ANQ-Q, CE1-61, 1er août 1790, 19 avril 1809 ; CN1-49, 2 juill. 1824, 5 mars, 28 juill., 4 déc. 1825, 20 juin 1826, 22 déc. 1827, 1er août, 11 oct., 5 nov. 1829, 13 janv., 10 juill. 1830, 21 juin 1831, 11 juin, 24 nov. 1832, 18 sept., 12 oct. 1833, 3, 22 avril, 24 juin, 15 juill. 1834, 17 janv., 18 mars, 4 juin 1835, 16 janv., 12 avril, 17 juin, 14 déc. 1836, 3 févr., 26 oct., 9 nov. 1838, 23 mai, 22 juill. 1840 ; CN1-67, 14 mars, 25 avril 1840 ; CN1-116, 24 janv. 1837, 23 oct. 1840 ; CN1-212, 20 août 1832 ; CN1-230, 27 nov. 1815, 21 sept. 1816.— La Gazette de Québec, 19 mai 1808, 5 juill. 1810, 2 mai 1811, 20 févr., 12 mai 1823.— Morning Chronicle (Québec), 15 mai 1855, 18 juill. 1862.— Almanach de Québec, 1828–1841.— E. H. Dahl et al., la Ville de Québec, 1800–1850 : un inventaire de cartes et plans (Ottawa, 1975), 125, 159, 212.— Quebec directory, 1822 ; 1826.— Christina Cameron et Jean Trudel, Québec au temps de James Patterson Cockburn (Québec, 1976), 33, 38–39.— J. M. LeMoine, Monographies et Esquisses (Québec, I 885), 276.— Rosa, la Construction des navires à Québec.— J.-E. Roy, Hist. de Lauzon, 5 : 144.— Georges Desjardins, « Un chantier naval à la Pointe-Sèche de Kamouraska », SGCF Mémoires, 21 (1970) :215.
Pierre Poulin, « CAMPBELL, JOHN SAXTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/campbell_john_saxton_8F.html.
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Auteur de l'article: | Pierre Poulin |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
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