BROWNE (Brown), TIMOTHY, prêtre, augustin, né vers 1786, probablement à New Ross (république d’Irlande) ; décédé le 9 octobre 1855 à Galway (république d’Irlande).

Timothy Browne fit ses études à New Ross en vue de devenir prêtre, sous la direction de son oncle Philip Crane, prêtre augustin, et du célèbre James Warren Doyle, du même ordre, qui fut plus tard évêque de Kildare et de Leighlin. Ayant la réputation d’être doué d’une « intelligence supérieure », Browne prononça ses vœux comme moine augustin en 1808 et reçut l’ordination le 29 juin 1810 à Waterford.

Browne quitta l’Irlande en 1811 pour exercer son ministère à Terre-Neuve. D’abord vicaire de l’évêque Patrick Lambert* à St John’s, il fut bientôt nommé curé du district de Ferryland, probablement en 1815, en remplacement du père Ambrose Fitzpatrick qui avait dû quitter son poste en raison de sa conduite scandaleuse. La vaste paroisse dont Browne avait la charge comprenait la côte au sud de St John’s, de Bay Bulls à Trepassey, ainsi que toute la baie de Sainte-Marie, et comptait quelque 3 500 catholiques. Il s’installa tout d’abord à Bay Bulls, semble-t-il, peut-être parce que la maison et la chapelle de Ferryland étaient « en ruine ».

En 1819, à cause de la pénurie d’augustins en Irlande, les supérieurs de l’ordre menacèrent Browne d’être rappelé au pays, en dépit de son désir de rester à Terre-Neuve. Afin d’empêcher que celui-ci ne soit déplacé, le successeur de Lambert, Mgr Thomas Scallan*, alla jusqu’à demander à Rome d’intervenir. Non seulement il souligna que le départ de Browne réduirait davantage le nombre déjà peu élevé de prêtres à Terre-Neuve, mais il déclara que Browne était son prêtre le plus éminent, « la plus grande gloire et fierté de la mission ». Cet appel ne resta pas lettre morte, et les autorités de Rome veillèrent à ce que Browne ait la permission de demeurer à Terre-Neuve.

L’enthousiasme de Scallan pour Browne diminua rapidement. Dans un rapport envoyé à Rome en 1822, il mentionna que Browne, même s’il était un prêtre de valeur et un excellent prédicateur, gérait mal ses affaires personnelles et avait de grosses dettes. En 1827, toutefois, Browne figurait encore parmi les trois prêtres recommandés par Scallan pour lui succéder. Mais ce fut Michael Anthony Fleming*, premier choix de Scallan, qui obtint finalement le poste d’évêque coadjuteur en 1829.

La mort de Scallan et l’entrée en fonction de Fleming en 1830 marquèrent un point tournant dans la carrière de Browne. Dès le début, Fleming considéra Browne comme une charge pour l’Église et le décrivit quelques mois plus tard aux autorités romaines comme un homme « manquant de prudence et de religion ». Bien que Browne ait toujours desservi sa mission seul auparavant, Fleming lui assigna un vicaire en 1834, James W. Duffy, qui comptait parmi un certain nombre de prêtres nouvellement arrivés d’Irlande. Ce faisant, Fleming espérait probablement miner la position de Browne dans la paroisse. Browne détestait profondément Duffy ; même s’il était en principe son supérieur, il se tint à l’écart des problèmes d’ordre juridique auxquels Duffy eut à faire face après 1835, par suite de la destruction d’établissements de pêche à St Mary’s.

En 1835, même le gouverneur Henry Prescott* remarqua que Browne était « mal vu » du nouvel évêque et qu’il « lui était diamétralement opposé – ainsi qu’au reste du clergé – de par sa conduite et son tempérament ». Une hostilité ouverte divisa bientôt les catholiques en partisans et adversaires de Fleming. À St John’s, les adversaires furent dénoncés par l’abbé Edward Troy* qui les taxa publiquement de « chiens furieux ». Browne appuya, dans une plainte officielle présentée au gouvernement, un des catholiques qui avait été victime de représailles. Au même moment, Henry David Winton, adversaire acharné de Fleming, commença à faire paraître dans le Public Ledger des commentaires favorables à Browne.

Fleming admit qu’il y avait des divergences entre lui et « deux ou trois » de ses prêtres, les attribuant à la subdivision qu’il avait faite des districts missionnaires existants et à la perte de revenu qui en était résultée pour les titulaires. Browne, même si son nom n’était pas mentionné, avait particulièrement souffert de cette réorganisation ; depuis 1837, deux nouvelles paroisses (celle de St Mary’s, cédée à Duffy, et celle de Bay Bulls) avaient été retranchées de son territoire. Sans raison particulière, Fleming dépouilla Browne cette année-là de toutes ses facultés sacerdotales, sauf celle de dire la messe en privé. Les prêtres de la région n’avaient même pas la permission d’entendre Browne en confession. Tout à fait brouillé avec son évêque, Browne n’avait que Rome pour unique recours ; en 1838, dans une lettre à la Propagande, il accusa Fleming d’avoir rendu le catholicisme à Terre-Neuve « inhumain, irréligieux et fanatique ».

En juin 1841, grâce aux quelque £200 recueillies parmi les catholiques et les protestants, Browne quitta Terre-Neuve pour Rome à titre de porte-parole des catholiques opposés à Fleming. Une querelle peu édifiante s’ensuivit. Browne accusa son supérieur d’avoir abusé de son autorité épiscopale, et Fleming allégua en retour que Browne avait négligé ses devoirs ecclésiastiques, qu’il avait semé la discorde dans sa paroisse en s’engageant dans des litiges et qu’il s’était approprié les biens de l’Église pour son propre usage. Fleming insinuait en fait que Browne ainsi que son frère et son cousin n’étaient à Terre-Neuve que pour leur profit personnel. L’opposition des catholiques à son égard était imputable, selon lui, à une renaissance à Terre-Neuve des rivalités entre certaines régions d’Irlande, le Leinster et le Munster ; la plupart de ses adversaires, disait-il, venaient du Leinster. Même si les accusations de Browne eurent un certain impact à Rome, Fleming réussit à les contrer. À la fin de 1843, la cause de Browne était manifestement perdue, et celui-ci quitta Rome pour l’Irlande en 1844. Les détails concernant sa carrière ultérieure à cet endroit, qui semble avoir été peu remarquable, ne sont guère nombreux. En juillet 1855, tandis qu’il assistait au chapitre de son ordre à Galway, il tomba malade et mourut.

Timothy Browne était un pasteur respecté et il mérite que ses efforts pour maintenir l’harmonie au sein de la communauté terre-neuvienne soient reconnus. Les espérances qu’il avait suscitées au début ne se concrétisèrent point, et les affaires séculières accaparèrent de plus en plus son attention. Néanmoins, l’affirmation de Fleming suivant laquelle le manque d’esprit pratique de Browne était à l’origine de leurs divergences n’était pas fondée. Il ne s’agissait pas non plus d’un simple conflit entre supérieur et subordonné. Le catholicisme terre-neuvien des années 1830 avait un caractère nouveau et plus militant que celui auquel il était habitué, et le vrai problème de Browne résidait peut-être dans le fait qu’il ne pouvait ou ne voulait pas s’y adapter.

Raymond J. Lahey

AAQ, 10 CM, IV : 30 ; 30 CN.— AASJ, Fleming papers ; Scallan papers.— Archivio della Propaganda Fide (Rome), Scritture riferite nei Congressi, America Settentrionale, 2 (1792–1830) ; 5 (1842–1848).— PRO, CO 194/57 ; 86 ; 90 ; 94–95.— M. A. Fleming, Relazione della missione cattolica in Terranuova nell’America settentrionale [...] (Rome, 1837).— Newfoundlander, 26 sept. 1833, 5 nov. 1855.— Public Ledger, 23 juin, 29 sept. 1835, 4 mai, 21, 24 juin 1836, 22 mai 1840, 22 juin 1841, 23 mars 1843.— Royal Gazette and Newfoundland Advertiser, 4 mars, 23 févr. 1815.— Howley, Ecclesiastical hist. of Nfld.

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Raymond J. Lahey, « BROWNE (Brown), TIMOTHY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/browne_timothy_8F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
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