BOULDUC, LOUIS, soldat, colon, bourgeois, procureur du roi, né vers 1648 ou 1649, fils de Pierre Boulduc, maître apothicaire-épicier de la rue Saint-Jacques, paroisse de Saint-Benoît, à Paris, et de Gilette Pijart, décédé en France entre 1699 et 1701.

Soldat de la compagnie d’Andigné* de Grandfontaine du régiment de Carignan, Boulduc débarqua à Québec le 17 août 1665. Il y épousait, le 20 août 1668, Élisabeth Hubert, fille d’un procureur au parlement de Paris. Le couple s’installa à Charlesbourg, sur une terre de 40 arpents acquise de Jacques Bédard, au coût de 800, le 7 octobre 1669. Mais Boulduc, en citadin qu’il était, ne s’intéressa que brièvement aux travaux des champs. Le 18 novembre 1672, il louait une maison à Québec et, le 29 octobre 1674, il était qualifié bourgeois de cette ville ; entre-temps il avait vendu sa terre, le 26 août 1674, pour la somme de 850#. Sur la recommandation de Frontenac [Buade*], à ce qu’il semble, il fut nommé, par lettres royales du 15 avril 1676, procureur du roi en la Prévôté de Québec, aux appointements de 300e Le 31 août suivant, après avoir prêté le serment d’usage, il était mis en possession de son office.

À l’époque du premier gouvernement de Frontenac, marqué d’incessantes querelles de partis, on ne pouvait impunément se ranger du côté de l’irascible gouverneur. Boulduc, s’il ne le savait déjà, allait l’apprendre à ses dépens, d’autant que Frontenac entendait se servir de lui et de la prévôté pour faire échec au Conseil souverain. Or le choix n’était guère heureux, si l’on en croit Duchesneau*, personnellement mêlé aux intrigues, et Denonville [Brisay], qui eut en 1685 le loisir de mener sa propre enquête : Boulduc, écrivait Duchesneau « est accusé de concussion, de vol dans toutes les maisons dans lesquelles on le souffre, de débauches et de crapules continuelles » , Denonville, à son tour, le jugeait « un fripon achevé à ne jamais souffrir dans une pareille charge ».

À cet officier par trop vulnérable, les conseillers ne ménagèrent pas les tracasseries, dans le but de le discréditer et de compromettre du même coup la prévôté. La lutte s’engagea pour de bon après que, en mai 1677, Louis XIV eut rétabli la Prévôté de Québec en sa première puissance, et confirmé en son emploi le procureur Boulduc. Le protégé de Frontenac pouvait s’attendre à quelque affrontement sérieux. Le 13 novembre 1680, Duchesneau lui portait un premier coup dans une lettre au ministre ; et, en janvier 1681, accusé de malversations, Boulduc était traîné devant le Conseil souverain. Objet d’une plainte d’un marchand de Bayonne qui désirait peut-être se venger de lui, Boulduc allait bientôt voir les conseillers étendre leurs indiscrètes enquêtes à toute sa vie, publique et privée. En conséquence d’un arrêt du 28 avril, il fut interdit et remplacé provisoirement par Pierre Duquet*. On assista dès lors à un déchaînement peu commun de passion : les partis s’entredéchirèrent interminablement dans une lutte à finir dont Boulduc, à vrai dire, n’était plus guère que l’occasion et le prétexte. Enfin, après 14 mois d’une véritable bagarre, le Conseil reconnut Boulduc coupable de malversations – c’était le 20 mars 1682 – et le déclara déchu de sa charge.

On peut penser que Frontenac, rentré en France, n’abandonna pas son protégé, car, par arrêt du 10 mars 1685, Louis XIV accordait à la famille de Boulduc le tiers des appointements de ce dernier, et invitait l’intendant à lui rendre son emploi, si on le jugeait suffisamment puni. Denonville s’opposa énergiquement au retour de l’exprocureur, si bien que, le 4 juin 1686, le roi cassait définitivement le malheureux Boulduc.

Mme Boulduc était repassée en France en 1685, munie d’un congé de Denonville, qui se déclara heureux de « délivrer le pays d’un assez mauvais meuble ». Boulduc la suivit, peut-être l’année suivante. Ils laissaient « des enfants qui sont réduits à la charité des gens de bien ». Les Boulduc avaient en effet trois fils et deux (ou trois) filles dont l’âge variait de neuf à 17 ans.— La, cadette, Louise, dont on ne sait si elle vivait encore, était filleule de Frontenac.— Ils restèrent tous dans la colonie et prirent le nom de Bolduc. Quant aux parents, ils moururent en France, apparemment sans revoir leurs enfants.

Qui oserait porter un jugement définitif sur Boulduc ? Quels qu’aient été ses torts, il fut peut-être, avant tout, la victime d’une époque troublée. L’intendant de Meulles semble l’avoir pensé : « Beaucoup de passion ayant été mis en cette affaire, le Roi ferait sagement de rétablir ce magistrat », écrivait-il le 12 novembre 1686.

André Vachon

AJQ, Greffe de Romain Becquet, 18 nov. 1672, 26 août 1674 ; Greffe de Pierre Duquet, 7 oct. 1669 ; Greffe de Leconte, 8 août 1668 ; Greffe de Gilles Rageot, 26 août 1674, 8 nov. 1675.— AQ, NF, Ins. de la Prév. de Québec, I : 299, 543.— Correspondance de Frontenac (1672–1682), RAPQ, 1926–27 : 140. —Jug. et délib., I, II, passim.— Lettres et mémoires de Ruette d’Auteuil, RAPQ, 1922–23 : 5s., 23.— Recensement du Canada, 1681 (Sulte).— P.-G. Roy, Inv. ins. Cons. souv., 67s.— Gareau, La Prévôté de Québec, RAPQ, 1943–44 : 104s.— Godbout, Nos ancêtres, RAPQ, 1957–59 : 429s.— Le Jeune, Dictionnaire, I : 200s.— P.-G. Roy, Louis Boulduc ou Bolduc, BRH, XXII (1916) : 65–70. —Régis Roy, Boulduc, BRH, XXVI (1920) : 13.

Le 8 févr. 1700, dans le contrat de mariage de son fils René, Louis Boulduc -pour lors en France -est dit vivant (greffe Jacob) ; le 7 nov. 1701, au contrat de son fils Jacques, il est décédé (greffe Jacob). On en peut conclure qu’il est mort en France entre l’été de 1699 et celui de 1701.  [a. v.]

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André Vachon, « BOULDUC, LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/boulduc_louis_2F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1969
Année de la révision:    1991
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