BENSON, WILLIAM JOHN CHAPMAN, homme d’affaires, né vers 1818, probablement à Londres ; décédé le 3 décembre 1850 à Whitehall, New York.

William John Chapman Benson débarqua à Québec vraisemblablement à l’été de 1845 ; il venait de Londres et était alors dans la vingtaine avancée. À son arrivée, il loua une maison rue Mont-Carmel, dans la haute ville. Nanti de £10 000 empruntées à Edward Henry Chapman, de Haringey (Londres), il se prépara à se lancer dans le domaine fort encombré du commerce du bois. À Québec, au début du siècle, Henry Usborne avait entrepris l’exportation massive du bois et, grâce aux droits préférentiels britanniques qui la protégeaient de la concurrence des pays baltes, celle-ci avait atteint une telle ampleur au début des années 1830 que les fournisseurs québécois de bois équarri dominaient le vaste marché britannique. Pendant que des exploitants, tel Philemon Wright, continuaient de produire du bois équarri, des scieries voisines de Québec comme celles de Peter Patterson* et de sir John Caldwell, d’autres situées plus haut sur le Saint-Laurent ou dans la vallée de l’Outaouais, par exemple celles de George Hamilton, alimentaient le marché en madriers et en bois de construction scié, de telle sorte que les produits du bois constituèrent certaines années les trois quarts des exportations de Québec. La crise financière de 1837 et la réduction des droits préférentiels, en 1842, s’étaient répercutées sur le commerce, mais seulement de façon passagère, si bien qu’à l’époque où Benson arriva on s’apprêtait à exporter une quantité record de bois d’œuvre : en 1845, en effet, les marchands allaient expédier 1 499 chargements de bois depuis une trentaine d’anses qui bordent le Saint-Laurent, de Cap-Rouge à la rivière Montmorency. Cette année-là, les exportations du principal produit, le bois équarri, s’élevèrent à 24 000 000 de pieds cubes.

Comme il était arrivé tard dans la saison en 1845, Benson n’entreprit ses activités qu’en 1846, après être entré en contact avec les personnes requises. En juillet, il passa un contrat avec George Browse, du comté de Dundas, dans le Haut-Canada, pour prendre livraison à Québec, au cours de la saison, de 50 cages d’orme et de pin blanc en retour d’avances de £299 destinées à couvrir les frais de production engagés pendant l’hiver précédent. En juin, il avait conclu avec l’entreprise québécoise Allan Gilmour and Company [V. Allan Gilmour*] une entente par laquelle il s’engageait à acheter 100 000 pieds cubes de pin rouge au coût approximatif de £4 600 ; cette entente prévoyait la livraison du bois à Québec au plus tard le 31 août, mais comme la compagnie dépassa l’échéance Benson reçut la somme de £591 à titre de dédommagement. Vers la fin de la saison, selon la coutume établie chez les marchands de bois de Québec, Benson s’occupa de financer la production pendant l’hiver afin de s’assurer un approvisionnement pour l’année suivante. Il avança par exemple à James Jardine, de Pembroke, dans le Haut-Canada, £1 200 à 6 % d’intérêt, pour s’assurer la livraison de 50 000 pieds cubes de pin rouge et de la même quantité de pin blanc. Il se réservait le droit de choisir entre deux possibilités : acheter le bois au prix courant à son arrivée à Québec, ou le vendre à un autre marchand, en imputant au compte de Jardine un montant qui engloberait les frais, une commission de 5 %, les avances et l’intérêt.

En octobre 1847, Benson consolida sa présence à Québec en achetant un domaine sur le bord du Saint-Laurent, en face de Sillery. Appelé New Liverpool, ce domaine était situé entre les rivières Chaudière et Etchemin, près d’un autre établissement du même nom qui appartenait à l’importante société Hamilton and Low, fondée par Hamilton. La propriété de Benson comprenait un lot de grève de 66 acres aménagé comme une anse à bois et 381 acres de terre arable qui s’étendaient vers l’arrière. Avec son chantier de construction de navires océaniques, ses jetées, ses quais, ses maisons et ses bâtiments sur la plage, cette propriété avait déjà constitué l’un des principaux établissements de la zone portuaire, et avait employé une soixantaine d’hommes en été. Les anciens propriétaires, William Price* et Peter McGill*, avaient été forcés de la mettre en vente par suite des réductions tarifaires de 1842 et des difficultés financières éprouvées par McGill ; Benson fut apparemment le premier acheteur potentiel capable d’en payer le prix de £8 000, dont il versa £5 300 en espèces.

Depuis New Liverpool, où se trouvait aussi sa demeure, et un bureau de la rue Saint-Pierre, dans la basse ville, Benson dirigeait une grande entreprise de transport maritime. Les journaux de Québec publiaient à sa demande toutes sortes d’informations : des avis pour signaler l’arrivée des navires qu’il avait affrétés, des annonces d’espaces à louer sur des bateaux en partance pour la Grande-Bretagne, des demandes d’espace pour des cargaisons et des ventes de briques ou de sel transportés comme lest à bord de navires entrants. Selon ces mêmes journaux, plus de 100 navires chargés par Benson partirent chaque année de Québec, de 1846 jusqu’en 1850. Cette année-là, comme il avait assuré le chargement de 159 des 1 162 navires qui avaient passé aux douanes, le Morning Chronicle de Québec le cita comme le plus important des 47 expéditeurs du port. Benson construisit aussi au moins deux navires à son chantier naval : le New Liverpool, de 722 tonneaux, en 1847 et le Harbinger, de 751 tonneaux, en 1848. La même année, il loua l’anse pour trois ans à son agent Robert Roberts, moyennant la somme annuelle de £1 500. À l’été de 1849 cependant, on liquida le chantier dans une vente aux enchères. L’entreprise d’expédition de bois continua tout de même à fonctionner sous le nom de Benson.

Malgré son jeune âge, Benson, capitaliste de respectable envergure, s’engagea tout naturellement dans des entreprises qu’avaient lancées les gens d’affaires de Québec. En 1848, il entra au conseil d’administration de l’Association du télégraphe électrique de l’Amérique britannique du Nord, qui se proposait de relier la région du Saint-Laurent au marché britannique, par Halifax, dès 1850. Il s’agissait là d’un projet commercialement vital pour Québec. Parmi les intéressés à l’entreprise, au nombre d’une trentaine, on comptait les compagnies forestières H. and E. Burstall, G. B. Symes and Company, Sharples, Wainwright and Company et quelques particuliers en vue comme Edward Boxer*, James Gibb* et Henry LeMesurier*. En octobre 1849, Benson fit partie du groupe d’actionnaires qui lança la Quebec and Melbourne Railway Company, devenue par la suite la Compagnie du chemin de fer de Québec et Richmond, une autre entreprise indispensable au développement portuaire de Québec. Il devint l’un des vice-présidents fondateurs de la compagnie en 1850 ; après Patterson, c’est lui qui avait investi le plus d’argent, soit £1000.

En décembre 1850, pendant qu’il était en route pour l’Angleterre afin de préparer les activités de la saison suivante, selon l’habitude des marchands de bois de Québec, William John Chapman Benson mourut subitement à Whitehall, dans l’État de New York. Cette mort prématurée priva Québec d’un chef d’entreprise dynamique. Par ailleurs, deux autres individus du nom de Benson, apparemment ses frères, s’étaient également installés à Québec : Thomas prit la relève à New Liverpool sous la raison sociale de Benson and Company, tandis que Willis A. se joignit à Timothy Hibbard Dunn* pour faire le commerce du bois dans les années 1850.

John Keyes

ANQ-Q, CN1-49, 2 sept. 1846, 24–25 oct. 1848, 19 déc. 1849 ; CN1-67, 8 juill., 10, 25 sept., 5 oct. 1846 ; CN1-197, 14 oct. 1847, 6 juin 1850 ; P-600/4, D-362-Québec-1861.— Morning Chronicle (Québec), 5 juill., 5 oct., 10 déc. 1849, 13 déc. 1850.— Quebec Gazette, 21 déc. 1849.— Quebec Mercury, 11 juill., 5 nov., 10 déc. 1850.— Quebec directory, 1848–1849 : 22, 165, 210–211, 236 ; 1850 : 23, 252–253.— J. E. Defebaugh, History of the lumber industry of America (2 vol., Chicago, 1906–1907), 1 : 139–140.— A. R. M. Lower, Great Britain’s woodyard : British America and the timber trade, 1763–1867 (Montréal et Londres, 1973), 71.— P. D. McClelland, « The New Brunswick economy in the nineteenth century » (thèse de ph.d., Harvard Univ., Cambridge, Mass., 1966), tableau xviii.

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John Keyes, « BENSON, WILLIAM JOHN CHAPMAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/benson_william_john_chapman_7F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
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