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Avec l’aimable autorisation de Steve Giersch et de Marla Waldron.

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BEAUDRY, CYRILLE, prêtre, clerc de Saint-Viateur, administrateur scolaire et éducateur, né le 16 avril 1835 à Saint-Paul-d’Industrie, Bas-Canada, fils de Jean-Baptiste Beaudry, cultivateur, et de Clotilde Brault (Brau) ; décédé le 3 mai 1904 à Joliette, Québec, et inhumé le 5 au cimetière des Clercs de Saint-Viateur de Joliette.

Cyrille Beaudry fait ses études secondaires au collège de L’Assomption et au collège Joliette de 1848 à 1854. Tout en se livrant à l’enseignement, il étudie la théologie au collège Joliette (1854–1856) puis à celui de Chambly. Ordonné prêtre le 20 décembre 1857, il remplit d’abord les fonctions de vicaire à Huntingdon et à Saint-Chrysostome, et de directeur au collège de Longueuil, tenu par les Clercs de Saint-Viateur. En 1859, il est envoyé comme missionnaire à Victoria, dans le diocèse de l’île de Vancouver. Sa santé fragile l’oblige toutefois à quitter ce ministère après un an. En 1863, il est nommé vicaire à la paroisse Saint-Charles-Borromée de Joliette et, le 1er janvier suivant, il entre chez les Clercs de Saint-Viateur.

Dès le mois de mars 1864, le père Beaudry commence sa longue carrière au collège Joliette avec lequel il va bientôt s’identifier. Sauf quatre années (1867–1871), où il est curé de la paroisse du Saint-Enfant-Jésus (à Montréal), et l’année 1882–1883, il sera directeur du collège Joliette jusqu’à sa mort en 1904, tout en cumulant à certains moments les postes de préfet des études et de procureur, et la charge de supérieur provincial des Clercs de Saint-Viateur de 1880 à 1893.

Le père Beaudry s’illustre d’abord comme bâtisseur : à partir du petit collège de Barthélemy Joliette*, construit en 1846, il réalise, de 1875 à 1903, un ensemble impressionnant d’édifices. Le sommet de ses réalisations sera la chapelle du Sacré-Cœur, chef-d’œuvre d’art gothique, qu’il fera élever en 1881–1882. Les entreprises du père Beaudry n’étaient pas sans inquiéter la direction générale des Clercs de Saint-Viateur. Pour résoudre ses problèmes de financement, il utilise largement les prêts à fonds perdu provenant des anciens élèves. Les loteries et les affiliations spirituelles lui apporteront des fonds supplémentaires. Il intervient fréquemment auprès du gouvernement de Québec pour faire augmenter les subventions au collège Joliette (en 1904, la subvention annuelle était de 682,58 $).

Sous la direction du père Beaudry, le collège Joliette prend son essor. Le nombre des élèves, qui était de 115 en 1864, passe à 331 en 1904, et celui des professeurs, de 23 à 35. Les études classiques qui se faisaient après le cours commercial et ne duraient que six ans deviennent conformes à celles des autres collèges classiques. En 1873, il fait reconnaître le collège Joliette comme collège classique et l’affilie à l’université Laval en 1880. Il implante l’enseignement du grec et de l’économie politique. Il consolide et réorganise le cours commercial, et y instaure l’enseignement de la sténographie. Il favorise l’enseignement et l’usage de la langue anglaise. Il fait donner des cours d’hygiène et d’éducation physique, fait construire une piscine (1899) et transforme la cour de récréation en un véritable parc. Il entreprend la publication de l’Annuaire du collège Joliette en 1875 et celle de l’Ordo des élèves en 1886. En 1876 paraît le journal du collège intitulé la Voix de l’écolier du collège Joliette et, en 1885, le périodique interne Curiosités de l’histoire de France. Plusieurs manuels scolaires sont imprimés sur la presse du collège. Le père Beaudry favorise les études spéciales des professeurs à Paris et ailleurs en Europe.

Parmi les thèmes qui reviennent le plus souvent dans les entretiens du père Beaudry avec les élèves, on remarque l’éducation patriotique, la politesse, la distinction et surtout la piété eucharistique. Il reste en contact intime avec les élèves et leurs parents, à qui il écrit annuellement des lettres circulaires dans lesquelles il défend vigoureusement les objectifs des collèges classiques. Il utilise l’Ordo des élèves pour mieux faire connaître l’histoire du collège Joliette aux élèves et aux anciens.

De 1880 à 1893, le père Beaudry remplit la charge de supérieur provincial des Clercs de Saint-Viateur du Canada, tout en cumulant celle de directeur du collège Joliette. Sous son administration, les Clercs de Saint-Viateur prennent un nouvel élan. Entre 1880 et 1893, le nombre des religieux passe de 130 à 216 et cela, malgré de nombreux décès et le détachement des établissements américains, qui sont érigés en province religieuse en 1882.

Le père Beaudry jouit d’un grand prestige auprès du clergé de la province, et le public lui accorde une confiance illimitée. Sur le plan politique, il n’est pas neutre. Le premier ministre Honoré Mercier* y fait allusion dans une lettre de 1890. Selon l’historien Robert Rumilly*, le candidat libéral Louis Bazinet (Basinet) a été élu dans la circonscription provinciale de Joliette en 1889 malgré le père Beaudry, « la plus grosse influence de Joliette ». À plusieurs reprises, ce dernier intervient auprès du député de Joliette et du secrétaire de la province pour obtenir leur appui au sujet de projets de loi concernant l’éducation. À la tête des communautés religieuses, il s’oppose à la proposition de Louis-Rodrigue Masson, présentée au Conseil de l’instruction publique en 1893, qui prône le brevet de capacité pour tous les religieux et religieuses, et propose l’uniformité des manuels scolaires.

Mais c’est surtout par sa spiritualité que le père Beaudry se fera connaître et qu’il influencera son temps. Dans ses innombrables instructions aux élèves, il cherche à leur communiquer sa piété intense envers le Sacré-Cœur. La collecte de fonds en vue de la construction de la chapelle du Sacré-Cœur, érigée en pèlerinage en 1883, fait connaître son œuvre au Canada, aux États-Unis et en France. Il est également le « prophète » de la dévotion au culte eucharistique. Depuis le xviie siècle, sous l’influence du jansénisme, l’Église catholique avait connu un courant de rigorisme concernant les dispositions requises pour communier, ce qui avait eu pour effet de diminuer la fréquence et le nombre des communions. Bien avant les décrets du pape Pie X en 1905 (sur la communion fréquente) et en 1910 (sur la communion des enfants), le père Beaudry se fait le propagateur de la communion fréquente. En 1881, il fonde au Canada l’Association des prêtres adorateurs, qu’il dirigera de Joliette jusqu’à l’arrivée des pères du Saint-Sacrement en 1890 [V. Marie Hébert* de La Rousselière]. Il se fait également le propagandiste de l’Agrégation du Très Saint-Sacrement, confrérie qu’il a implantée dès 1882 auprès du personnel et chez les élèves du collège Joliette, et qu’il établit ensuite chez les frères clercs de Saint-Viateur.

Le père Beaudry joue un rôle important dans le choix de Joliette comme siège épiscopal en 1904 [V. Joseph-Alfred Archambeault*]. Contre L’Assomption, il défend avec efficacité les « droits de Joliette ». Tandis que son frère, l’abbé Prosper Beaudry, curé de Joliette, construit la future cathédrale, il prépare le « séminaire » diocésain. Il exerce de fortes pressions auprès des évêques du Québec et dispose d’amis sûrs à Rome.

À cause de la longueur de son mandat de directeur (35 ans), de sa personnalité, de son prestige et de ses nombreuses initiatives, nul supérieur (titre que porteront ses successeurs) n’aura contribué autant que le père Cyrille Beaudry au développement du collège Joliette et n’aura produit une pareille influence sur des générations d’élèves. Le « second fondateur » du collège Joliette avait engendré, disait-on, des milliers de « P’tits Beaudry ». Depuis sa mort en 1904, le souvenir du « patriarche » ou du « Moïse » de Joliette a été célébré périodiquement. Un monument devant le collège, une aile, un rang, une rue rappellent son souvenir.

Léo-Paul Hébert

Le père Cyrille Beaudry est l’auteur de plusieurs ouvrages religieux dont : Manuel de la Confrérie du Cœur de Jésus ; en faveur des saintes âmes du purgatoire [...] (Joliette, Québec, 1877) ; Manuel de piété ; à l’usage des académies, collèges et petits séminaires [...] (Joliette, 1892) ; Nouveau Manuel à l’usage des membres du Tiers Ordre de S. François [...] (Joliette, 1884) ; la Semaine sainte (Joliette, 1890) ; Vade mecum du pieux garde d’honneur (Joliette, 1883 ; réimpr. 1905 ; 2e éd., Montréal, 1925). Il a aussi publié de nombreuses brochures et des articles, parus surtout dans l’Annuaire du collège Joliette, de 1876 à 1903, et dans l’Ordo des élèves, de 1886 à 1904.

On trouve une documentation abondante sur le père Beaudry, son administration du collège Joliette et son rôle de supérieur provincial dans les Arch. des Clercs de Saint-Viateur, à Joliette (où sont aussi conservées les Arch. du séminaire de Joliette) ; plusieurs manuscrits du père Beaudry y sont déposés, dont des cahiers de sermons et des journaux de voyage. Les Arch. des Clercs de Saint-Viateur, à Montréal, et les ANQ-Q, fonds du ministère de l’Éducation (E13), sont aussi à consulter.

Une liste détaillée de toute la documentation concernant le père Beaudry, qu’elle soit manuscrite ou imprimée, nous a été fournie par l’auteur et fait partie du dossier Beaudry, conservé au DBC.

ANQ-Q, E13/1873, no 2200 ; 1875, no 319 ; 1876, no 375 ; 1877, no 3589.— L’Action populaire (Joliette), 17–24 juin 1926, 23 mai 1929, 31 oct., 21, 28 nov. 1935, 19 mars, 22 oct. 1936, 6 mai 1954.— Le Droit (Ottawa), 12 févr. 1927, 21 oct. 1936.— L’Étoile du Nord, 13 mai, 16 juin 1904, 22 sept. 1921, 4 mars 1964.— Joliette Journal, 15 déc. 1982.— La Patrie, 4, 6–7 mai 1904.— La Presse, 21 déc. 1952.— La Voix de l’écolier du collège Joliette (Joliette), 1876–1879.

Paul Beaubien, « le Père Beaudry, fils du père Querbes », l’Estudiant (Joliette), 23 (1959), no 9 : 12.— Claude Beaudry « Un homme et un saint », l’Estudiant, 22 (1957), no 5 : 11.— René Beaudry, « Un apôtre vénérable, ce père Beaudry », l’Estudiant, 18 (1954), n5 : 6s.— Antoine Bernard, les Clercs de Saint-Viateur au Canada (2 vol., Montréal, 1947–1951).— Léo Boismenu, « le Père Eymard du Nouveau Monde », Rev. eucharistique du clergé (Montréal), 60 (1957) : 641s.— Victor Cardin, « le R. P. Cyrille Beaudry, c.s.v. et l’Association des Prêtres-Adorateurs », Annales des Prêtres-Adorateurs et de la Ligue sacerdotale de la communion (Montréal), 30 (1927) : 261–267.— « La chapelle du Sacré-Cœur, œuvre du père Cyrille Beaudry, c.s.v. », les Anciens de Joliette (Joliette), 2, no 5 (juin 1960) : 12s.— Barthole Charbonneau, « le Tiers-Ordre et les jeunes ; le P. Cyrille Beaudry, c.s.v. », la Rev. franciscaine (Laprairie, Québec), 60 (1944), no 2 : 49s.— « Cinquantième anniversaire de la mort du père Beaudry, c.s.v. ; sa dernière lettre aux élèves », les Anciens de Joliette, 1, no 3 (juin 1954) : 4, 8.— Lucien Comtois, « Glorification du père Cyrille Beaudry, c.s.v. », Rev. eucharistique du clergé, 60 : 688–697.— Wilfrid Corbeil, « la Chapelle du Sacré-Cœur du séminaire de Joliette ; étude historique et critique en l’année cinquantenaire de son érection », Séminaire de Joliette, Annuaire, 1932–1933 :111–118.— A.-C. Dugas, Gerbes de souvenirs ou mémoires, épisodes, anecdotes et réminiscences du collège Joliette (2 vol., Montréal, 1914) ; Un éducateur apôtre : le R. père C. Beaudry, clerc de Saint-Viateur, supérieur du collège Joliette (2e éd., Montréal, 1910).— P.-M. Farley, « le Collège Joliette, séminaire diocésain », SCHEC Rapport, 17 (1949–1950) : 37–53.— Alphonse de Grandpré, le Père Cyrille Beaudry des Clercs de Saint-Viateur (1835–1904), un apôtre de la jeunesse (Joliette, [1929 ?]) ; Propos d’un éducateur (Montréal, 1944), 42–51.— Marcel de Grandpré, « le Père Cyrille Beaudry, clerc de Saint-Viateur (1836–1904) », SCHEC Rapport, 17 : 55–68.— L.-P. Hébert, le Financement du collège Joliette ; perspectives historiques (1846–1904) (Joliette, 1989).— Eugène Prévost, « les Prêtres adorateurs au Canada, en 1882 », les Anciens de Joliette, 1, no 8 (mars 1957) : 2.— Adolphe Robert, « Portrait d’un supérieur », les Anciens de Joliette, 3, no 2 (juin 1961) : 6.— Lucien Sylvestre, « le Diocèse de Joliette, l’histoire de son érection », SCHEC Rapport, 17 : 81–98.— [Robert Valois], « Ceux qu’on prie dans le secret » (Trois-Rivières, [1953]), 69–79 ; « les « P’tits Beaudry » ... que nous sommes ! », les Anciens de Joliette, 1, no 9 (déc. 1957) : 1.

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Léo-Paul Hébert, « BEAUDRY, CYRILLE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/beaudry_cyrille_13F.html.

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Auteur de l'article:    Léo-Paul Hébert
Titre de l'article:    BEAUDRY, CYRILLE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
Date de consultation:    1 décembre 2024