BAUZHI-GEEZHIG-WAESHIKUM (Pazhekezhikquashkum, Pechegechequistqum, Beyigishiqueshkam, qui signifie « qui enjambe le ciel »), chef indien et sorcier, né sur les bords de la rivière des Miamis (rivière Maumee, Ohio) ; il eut trois fils qui atteignirent l’âge adulte ; décédé à la fin de 1841 ou au début de 1842 dans l’île Walpole (comté de Lambton, Ontario).
Bauzhi-geezhig-waeshikum naquit probablement bien avant la Révolution américaine. Il passa sa jeunesse sur la rive ouest du lac Saint-Clair, dans ce qui est aujourd’hui le Michigan ; à la fin des années 1820, devenu assez âgé et chef des siens, il partit s’installer avec sa famille de l’autre côté de la frontière, dans l’île Walpole. Après la Révolution américaine, Alexander McKee*, du département des Affaires indiennes, avait encouragé les Sauteux et les Outaouais de la région, alliés de la Grande-Bretagne, à s’établir dans la grande île. Celle-ci, qui n’avait jamais été cédée à la couronne, comptait à l’époque environ 300 habitants.
En août 1829, le révérend Peter Jones*, missionnaire méthodiste autochtone, essaya en vain de convertir Bauzhi-geezhig-waeshikum. Le vieux chef et sorcier répliqua à Jones et aux Indiens convertis qui étaient avec lui : « L’homme blanc fabrique l’eau-de-vie, il en boit, il la vend aux Indiens, il ment aux pauvres Indiens et les trompe. Je l’ai vu se rendre à sa chapelle au [fort] Malden et, sitôt sorti, je l’ai vu s’en aller directement à la taverne, se soûler, se disputer et se battre. Alors, la religion de l’homme blanc n’est pas meilleure que la mienne. Je garde la religion de mes ancêtres. » Sans se décourager, Jones revint à la charge en deux occasions au début des années 1830, mais ce fut peine perdue. Bauzhi-geezhig-waeshikum lui donna sans doute la même réponse qu’à sa première visite, à savoir que des voies différentes avaient été tracées pour les Blancs et les Indiens. « Le Grand Manitou nous a créés tous, avait-il dit. Lorsqu’[il] a fait l’homme blanc, il lui a donné son culte, écrit dans un livre, et a préparé une place pour son âme là-haut dans le ciel. Il lui a appris également une manière de préparer et d’administrer les remèdes qui diffère de celle des Indiens. Mes frères et amis, lorsque le Grand Manitou a créé l’Indien, il lui a donné son culte et lui a enseigné comment utiliser les remèdes et les administrer aux malades. Le Grand Manitou a donné à l’Indien de connaître la vertu des racines et des plantes qui conservent la vie et c’est en respectant ces choses que nous préservons nos vies. » Après des échecs répétés, Jones confia à propos de la mission de Saint-Clair : « [c’est] la plus dure que je connaisse ».
Reconnu grand chef de tous les Indiens de l’île Walpole et du haut de la rivière Saint-Clair, du côté canadien, Bauzhi-geezhig-waeshikum résista aux pressions exercées par les autorités gouvernementales pour les amener, lui et son peuple, à adopter le christianisme et l’agriculture. En guise de protestation, il bouda le recensement organisé par le département des Affaires indiennes et refusa tout présent pendant plusieurs années. Cependant, comme il le dit à Jones au cours de l’été de 1833, il était « disposé à envoyer, [les] enfants à l’école pour qu’ils apprennent à lire, à mettre des mots sur papier et à compter, de façon que les trafiquants blancs ne puissent pas les duper ».
L’arrivée imprévue de colons blancs dans l’île Walpole exaspéra le chef indien. En 1839, il informa Samuel Peters Jarvis*, surintendant en chef des Affaires indiennes du Haut-Canada, que les squatters avaient tué une centaine de porcs qui appartenaient aux Indiens, volé leurs chevaux et abattu leurs chiens « à la porte même de [leurs] wigwams ». Les Blancs firent en outre courir la rumeur que les Indiens seraient chassés comme ils l’avaient été aux États-Unis. Heureusement, le département des Affaires indiennes protégea leur droit de propriété et expulsa les squatters au début des années 1840.
Bauzhi-geezhig-waeshikum était un orateur-né ; sa facilité de parole et sa grande connaissance de la médecine ancestrale lui avaient valu le profond respect des Indiens de la région. Jones écrivit à son sujet : « les autres chefs n’entreprennent rien d’important sans le consulter [...], ce chef est un peu un patriarche parmi son peuple ».
Même si, vers 1835, le révérend James Evans réussit à gagner un bon nombre de Sauteux de la rive ouest de la rivière Saint-Clair, ni lui ni aucun de ses successeurs ne firent de conversions chez les Indiens de l’île Walpole du vivant de Bauzhi-geezhig-waeshikum. Celui-ci fut l’un des derniers grands défenseurs de la tradition des Sauteux et des Outaouais de la région. Sa mort, survenue peu avant le 10 janvier 1842, élimina, au dire de l’agent des Affaires indiennes John W. Keating, « un grand obstacle [...] à la lutte du missionnaire pour la conversion des Indiens ».
L’auteur tient à remercier Basil Johnston du Royal Ont. Museum (Toronto) pour ses avis concernant les noms des Sauteux. [d. b. s.]
AO, MS 296.— APC, RG 10, A4, 58 : 59781 ; 67 : 64211–64214 ; 126 : 70969 ; B3, 2022, file 8520 ; C1, 2, vol. 569 : 10.— MTRL, S. P. Jarvis papers, B57 : 373–376, 381–384.— Victoria Univ. Library (Toronto), Peter Jones coll., Peter Jones papers, letter-book, 10 juin 1833.— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1847, app. T, app. 21, J. W. Keating, lettre, 16 déc. 1842.— Peter Jones, History of the Ojebway Indians ; with especial reference to their conversion to Christianity [...], [Elizabeth Field, édit.] (Londres, 1861) ; Life and journals of Kah-ke-wa-quo-nā-by (Rev. Peter Jones), Wesleyan missionary, [Elizabeth Field et Enoch Wood, édit.] (Toronto, 1860).— « Missionary intelligence », Christian Guardian, 27 févr. 1830 : 115.— K. J. Tyler et R. T. Ryan, « The government’s management of Indian trust funds : a case study of the Chippewas and Pottawatomies of Walpole Island » (rapport préparé pour la National Indian Brotherhood, polycopié, 1981), V-2, VII-3.
Donald B. Smith, « BAUZHI-GEEZHIG-WAESHIKUM (Pazhekezhikquashkum, Pechegechequistqum, Beyigishiqueshkam) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bauzhi_geezhig_waeshikum_7F.html.
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Auteur de l'article: | Donald B. Smith |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |