ARNOLD, OLIVER, instituteur, ministre de l’Église d’Angleterre et juge de paix, né le 15 octobre 1755 à Mansfield, Connecticut, aîné des enfants du docteur Nathan Arnold et de Prudence Denison ; le 9 novembre 1786, il épousa Charlotte Hustice, née Wiggins, de New York, veuve d’un loyaliste, et ils eurent sept enfants ; décédé le 9 avril 1834 à (Sussex Corner, Nouveau-Brunswick).

Oliver Arnold fréquenta le Yale College où il fit partie de la promotion de 1776 et obtint une maîtrise ès arts en 1792. On ne sait rien de son activité ni de ses déplacements pendant la Révolution américaine, mais il servit probablement dans les forces britanniques provinciales. En 1783, il immigra avec les loyalistes à Parrtown (Saint-Jean, Nouveau-Brunswick) et remplit la fonction de secrétaire des « administrateurs de la ville à l’entrée de la rivière Saint-Jean », parmi lesquels se trouvait George Leonard, son futur protecteur. Après avoir été mêlé à un certain nombre de transactions foncières à Saint-Jean et dans le voisinage, et après avoir fait un bref séjour à Long Reach, au nord de la ville (où il se maria), Arnold réussit à obtenir en 1787, grâce à l’influence que Leonard avait acquise dans la région à titre de commissaire de la New England Company, un poste d’instituteur chez les Indiens, à Sussex Vale. C’est là, dans la maison de campagne de Leonard, qu’Arnold alla habiter. La New England Company, établie à Londres et désignée intégralement sous le nom de Society for the Propagation of the Gospel in New England and the Parts Adjacent in America, transféra de la Nouvelle-Angleterre au Nouveau-Brunswick, après la Révolution américaine, la zone d’activité de son programme en vue d’éduquer et d’évangéliser les autochtones et de leur enseigner un métier. Elle se reposait sur le bureau des commissaires du Nouveau-Brunswick autant pour engager et surveiller les instituteurs et les maîtres chez qui les Indiens étaient mis en apprentissage que pour assurer le bien-être moral, spirituel et économique des autochtones. La société engagea Arnold en qualité d’instituteur jusqu’en 1790, année au cours de laquelle il devint missionnaire. Bien que nominalement il soit demeuré instituteur, Arnold engagea d’autres enseignants. Ses attributions qui consistaient à faire des visites, à enseigner et à rédiger des rapports en faisaient en réalité le surintendant de la New England Company à Sussex Vale, où l’activité de la société était surtout concentrée. Il continua à s’acquitter de ses responsabilités jusqu’à ce que la société le remercie de ses services en 1824, après plusieurs années d’un malaise sans cesse croissant parmi les membres du conseil d’administration, malaise dû au fait que les mesures concernant les Indiens étaient appliquées au nom du conseil et que celui-ci devait en assumer les coûts élevés.

Dans l’intervalle, les activités d’Arnold en matière d’éducation et de « civilisation » auprès des Indiens passèrent au second plan, étant supplantées par son travail de ministre anglican auprès de ses compatriotes réfugiés et des nouveaux immigrants arrivés de Grande-Bretagne. Ordonné en 1791 par l’évêque Charles Inglis*, les coûts de subsistance étant assumés par la New England Company, il tut nomme titulaire de la paroisse de Sussex, qui comprenait à cette époque trois établissements importants : Sussex Vale, où il continua à habiter, puis Norton et Hampton, situés respectivement à 20 et à 33 milles de son église. Après qu’elle eut subi pendant trois ans les pressions de l’évêque et que Leonard eut fait don d’une terre bénéficiale de 200 acres, la Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts accepta en 1794 de compter la paroisse de Sussex parmi ses missions. Tout en recevant des émoluments de cet organisme et un salaire du gouvernement du Nouveau-Brunswick, Arnold continua jusqu’à sa mort à desservir les établissements situés sur son territoire. L’arrivée de deux missionnaires dans la région, Elias Scovil en 1803 et James Cookson en 1818, allégea le fardeau des responsabilités que lui avait d’abord confiées la Society for the Propagation of the Gospel. Cependant, en raison de l’ouverture de nouveaux établissements et de l’aggravation des infirmités d’Arnold, son fils Horatio Nelson, qui allait lui succéder plus tard, lui fut envoyé comme aide en 1829. Un autre de ses fils, Samuel Edwin, avait aussi suivi ses traces au Nouveau-Brunswick et était entré dans les ordres au cours des années 1820.

À l’instar d’autres membres du clergé loyaliste œuvrant dans les missions rurales, Arnold éprouva certaines difficultés à obtenir une aide financière de ses congrégations, qu’il décrivait en 1791 comme « extrêmement pauvres » dans « un pays très rude » et à peine capables de subvenir aux besoins de leur famille et encore moins à ceux d’un ministre. Il dut se contenter d’églises inachevées et d’écoles fonctionnant de façon irrégulière, et fut forcé d’effectuer des voyages pénibles afin d’exercer son ministère auprès de ses ouailles dispersées. La tâche d’élever et de faire instruire ses propres enfants fut encore plus difficile, compte tenu de la rareté du numéraire au Nouveau-Brunswick et du refus inattendu des lettres de change, à Londres. En outre, le diocèse de la Nouvelle-Ecosse souffrait d’un manque de direction. Bien qu’Arnold ait évoqué particulièrement certains problèmes relatifs à l’ordination de ses propres fils, il fut le porte-parole de tout le clergé du diocèse quand il déplora en 1823 l’absence de l’évêque Robert Stanser, qui se trouvait alors en Angleterre. Malgré les privations inhérentes à la vie des pionniers, Arnold semble avoir été l’un des ministres les plus dynamiques et les plus adaptables à l’époque des loyalistes. Sussex Vale devint le centre d’une dynastie des Arnold qui contribua à l’essor d’une collectivité stable. Comme juge de paix et franc-maçon, Arnold ajouta un prestige social et civil à son rôle de pasteur bien-aimé.

La réussite d’Arnold comme ministre du culte auprès de ses semblables contraste d’une façon frappante avec la triste réputation qu’il s’acquit comme missionaire de la New England Company chez les Indiens. Qu’il ait bénéficié de sa situation plus que les Indiens de ses services semble ne faire aucun doute. Arnold touchait à titre de missionnaire un salaire de £30, qui fut porté à £50 en 1814, et il ne donnait qu’une fraction de son traitement d’instituteur à celui qui le remplaçait. Il était aussi gratifié d’une prime annuelle de £20 pour chaque Indien qu’il faisait travailler comme apprenti (de quatre à sept en même temps). Enfin, il vivait dans une maison appartenant à la société, qu’il finit par acquérir grâce à des facilités de paiement. Ses deux fils aînés et ses proches parents se partageaient les autres contrats d’engagement. Le travail des apprentis, du moins de ceux de la deuxième génération sinon de la première, se révéla un apport important au sein d’une communauté agricole. Sous prétexte de leur faire apprendre un métier, mesure qu’Arnold jugeait nécessaire pour les Indiens en bas âge afin de les arracher à la dépendance des prêtres catholiques, les enfants mis en apprentissage devinrent, en pratique, des esclaves au service des familles en vue de Sussex Vale.

Il se peut qu’Oliver Arnold lui-même n’ait pas été le pire des maîtres. Il tenta apparemment d’apprendre la langue des Indiens et de former un autochtone pour en faire un instituteur ou un missionnaire. De plus, il prétendit que son projet d’établissement à l’intention du groupe prédominant de Malécites était aussi réaliste que celui qu’avait envisagé Walter Bromley* dans le cadre de la North American Indian Institution en 1814. Cependant, après les premières années de son engagement auprès des Indiens, Arnold manifesta peu d’enthousiasme pour améliorer leur sort. Le fait qu’il ait décrit l’enseignement aux Indiens comme une tâche désagréable laisse entendre qu’il n’était peut-être pas apte à ce genre d’occupation. Il est clair que les avantages financiers furent la raison qui l’incita à persister dans son travail. John Coffin*, qui devint surintendant salarié de la région pour le bureau des commissaires de la New England Company, éprouva peut-être autant de difficultés financières qu’Arnold, mais il décrivit quand même ce dernier comme « rapace à l’extrême », ressemblant plus à « un chien enragé poursuivant sa proie qu’à un membre du clergé habitué à prier pour [obtenir] des choses indispensables ». Que ce soit parce qu’il considérait l’Indien comme un être inférieur, que ce soit par intérêt financier ou parce qu’il avait perdu l’espoir de réussir, Arnold donna aux colons l’impression que les Indiens étaient des êtres que l’on pouvait exploiter, en mettant les choses au mieux, ou dont on pouvait se passer, en mettant les choses au pis. L’histoire ignoble de l’activité de la New England Company à Sussex Vale qui transparaît dans les rapports de Walter Bromley (1822) et de John West* (1825), délégués par le conseil d’administration de la société à Londres, jette une lumière révélatrice bien que peu flatteuse sur à d’autres égards.

Judith Fingard

APC, MG 23, D1, sér. 1, 13.— Guildhall Library (Londres), mss 7920–7921/2, 7954, 7956, 7970.— Musée du N.-B., Sussex Indian Academy papers.— PANS, MG 1, 479, no 3 : 206–259 (transcriptions).— USPG, C/CAN/NB, 1, nos 80–92 ; 4, no 521 ; Journal of SPG, 25–37.— Winslow papers (Raymond).— F. B. Dexter, Biographical sketches of the graduates of Yale College, with annals of the college history (6 vol., New York et New Haven, Conn., 1885–1912).— « Roll of officers of the British American or loyalist corps », N.B. Hist. Soc., Coll., 2 (1899–1905), no 5 : 249.— Leonard Allison, The RevOliver Arnold, first rector of Sussex, N.B., with some account of his life, his parish, and his successors, and the old Indian College (Saint-Jean, N.-B., 1892).— G. H. Lee, An historical sketch of the first fifty years of the Church of England in the province of New Brunswick (1783–1833) (Saint-Jean, 1880).— Pascoe, S.P.G.— Judith Fingard, « English humanitarianism and the colonial mind : Walter Bromley in Nova Scotia, 1813–25 », CHR, 54 (1973) : 123–151 ; « The New England Company and the New Brunswick Indians, 1786–1826 : a comment on the colonial perversion of British benevolence », Acadiensis (Fredericton), 1 (1971–1972), no 2 : 29–42.

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Judith Fingard, « ARNOLD, OLIVER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/arnold_oliver_6F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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