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ALLOWAY, WILLIAM FORBES, homme d’affaires, homme politique, banquier et philanthrope, né le 20 août 1852 à The Derries (république d’Irlande), fils d’Arthur William Alloway, vétérinaire, et de Mary Frances Johnson ; le 3 septembre 1878, il épousa à Buckingham, Québec, Elizabeth MacLaren (décédée en 1926), fille de James Maclaren*, et ils eurent un fils qui mourut en bas âge ; décédé le 2 février 1930 à Winnipeg.
En 1855, à l’âge de trois ans, William Forbes Alloway immigra à Hamilton, dans le Haut-Canada, avec sa famille. Son père ouvrit à cet endroit une clinique vétérinaire, une maréchalerie et une école d’équitation. Moins de deux ans plus tard, il réinstalla sa famille et son entreprise à Montréal. William Forbes fréquenterait la High School of Montreal.
Quatre jours après ses 18 ans, Alloway arriva à Winnipeg à titre de simple soldat du corps expéditionnaire qui, sous les ordres du colonel Garnet Joseph Wolseley*, allait réprimer le soulèvement métis dirigé par Louis Riel*. Par la suite, il fit partie des 19 hommes choisis pour former le noyau d’une gendarmerie à cheval au Manitoba. Libéré de la milice en avril 1871, il s’établit à Winnipeg, où il exerça la profession de vétérinaire, comme son père, tout en étant marchand de tabac et encanteur de chevaux. Engagé en 1874 comme contremaître par James McKay*, entrepreneur de transport et homme politique réputé, il devint son associé l’année suivante.
En 1876, Alloway se mit à son compte et, durant quatre ans, le transport et le commerce furent ses principales activités. Il avait aussi un à-côté, la spéculation sur les terres et les certificats de concession. La plus grande partie de son travail lui venait de Thomas Nixon, fournisseur du département de l’Intérieur à Winnipeg, avec qui il noua une relation assez intime parce qu’il était propriétaire de son logement. Par la suite, une commission royale d’enquête blâmerait sévèrement Nixon pour son manque de diligence en affaires. Au nom du gouvernement fédéral, Alloway achetait des chevaux pour les équipes d’arpenteurs de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique. Ses principaux fournisseurs étaient des Métis. En payant le prix courant pour un bon cheval de trait, soit 50 $, et en revendant la bête de 90 $ à 157 $ au gouvernement, il « récoltait un bénéfice considérable ». Ses ennemis le traitaient de « magouilleur ».
Alloway fournissait également aux arpenteurs des véhicules d’usage courant chez les autochtones des Prairies – des charrettes dont les essieux étaient entourés d’une boîte de fer et les moyeux, munis de bandes. En outre, il se faisait un petit pécule en revendant avec Nixon des chariots et des harnais du gouvernement qui avaient été abandonnés. Une fois, il se servit de Nixon pour rassembler des fonds sous leur responsabilité commune. Ses transactions douteuses avec cet homme lui permettaient d’obtenir du gouvernement des contrats lucratifs de transport ; certains n’étaient jamais annoncés. Il en confiait toujours l’exécution à des sous-traitants. Leur travail consistait par exemple à transporter des fournitures et à livrer le courrier aux équipes de construction du chemin de fer canadien du Pacifique par la route Dawson et le lac des Bois ou à approvisionner les divers avant-postes de la Police à cheval du Nord-Ouest. Au fil des années, les transactions d’Alloway avec le gouvernement atteignirent au moins 40 000 $.
Homme d’affaires ambitieux, Alloway fit de la politique sur la scène locale. Il appartint au conseil municipal pendant quatre mandats en 1876, en 1877, en 1879 et en 1880. Après la relance du Bureau de commerce de Winnipeg, il fit partie des deux premiers conseils de cet organisme, qui se mit à fonctionner pour de bon en 1879. Pour Alloway, il ne faisait aucun doute que l’Ouest « se remplir[ait] de monde » et que Winnipeg gagnerait en « importance, [en] taille, [en] richesse et [en] prestige ». Des photographies de lui révèlent un regard franc et un air résolu. Au moment où il essaierait, avec d’autres, de stimuler l’économie de la ville, ces atouts l’aideraient à gagner le respect et l’admiration du milieu des affaires.
Le 28 novembre 1879, toujours à Winnipeg, Alloway s’associa à Henry Thompson Champion, comptable à la Banque des marchands du Canada et venu lui aussi dans l’Ouest avec l’expédition de Wolseley. En mars 1880, les deux hommes donnèrent un caractère officiel à leur association, baptisée Alloway and Champion, « banquiers, courtiers, marchands commissionnaires, entrepreneurs de transport, négociants et agents immobiliers ». L’entreprise disposait d’un capital de 7 000 $ dont 5 000 $ venaient d’Alloway.
Comme l’Alloway and Champion vit le jour dans la période d’instabilité qui accompagna la mise en chantier du chemin de fer canadien du Pacifique, elle évita la ruée immobilière de 1881–1882. En tant que banque privée, elle était libre de négocier des terres et de prêter de l’argent sur ses propres garanties, mais les associés recherchaient seulement des « affaires légitimes » et non des transactions liées à la spéculation foncière. Grâce au flair d’Alloway, la société acquit un vaste inventaire de « terres agricoles de choix » dans chaque canton de la province ainsi que dans les Territoires du Nord-Ouest. Elle les vendait « à des prix raisonnables et à des conditions avantageuses ». En outre, elle irait jusqu’à prêter 25 000 $ sur des premières hypothèques.
Dès 1882, l’Alloway and Champion avait un capital d’environ 175 000 $. À la même époque, elle devint une agence foncière de la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique. Par la suite, elle s’occupa aussi de paiements pour la préemption de terres fédérales et de transactions pour la Canada North-West Land Company [V. William Bain Scarth*]. Cependant, la plupart de ses transactions foncières se faisaient indirectement par achat et revente de certificats de concession de terres et de monnaie provisoire, de titres de terres données en primes à des militaires et de certificats de vente pour arrérages de taxes. Le frère de William Forbes Alloway, Charles Valentine, qui deviendrait simple associé de la compagnie en 1885, facilitait beaucoup l’acquisition de certificats.
En 1881, l’Alloway and Champion avait ouvert une succursale à Portage-la-Prairie. La même année, Alloway était entré au premier conseil d’administration de l’Ogilvie Milling Company, la filiale de l’A. W. Ogilvie and Company dans l’Ouest [V. William Watson Ogilvie*]. En 1882, il participa à la création de la Manitoba Cartage and Warehousing Company et, avec Champion entre autres, il essaya de fonder une Bourse. La crise soudaine de ce printemps-là empêcha la Bourse d’ouvrir immédiatement, mais l’entreprise se mit bientôt à acheter et à vendre des actions aux Bourses de Toronto, de Montréal, de New York et de Chicago. De plus, elle négociait des produits sur les marchés de New York et de Chicago.
Au début des années 1890, l’Alloway and Champion agrandit son service des changes. Le Manitoba comptait en effet de plus en plus d’immigrants, originaires surtout d’Europe de l’Est, qui voulaient convertir en dollars canadiens leur or, leur argent et leur monnaie nationale ou transférer des fonds à l’étranger. Dès 1904, les opérations de change de l’Alloway and Champion atteignaient une telle ampleur qu’elle décida d’ouvrir une succursale à l’extrémité nord de Winnipeg. Inaugurée l’année suivante, celle-ci comptait cinq interprètes (leur nombre doublerait par la suite). Comme l’Alloway and Champion servait généralement d’agence de voyage par bateau à vapeur et par train, elle aida à faire venir au pays bien des membres des familles de ceux qui étaient déjà installés dans la ville. La succursale entretenait des relations chaleureuses avec ces Néo-Canadiens, et Alloway en était extrêmement fier. Un des premiers employés, un Juif roumain qui voulait évoquer le lien étroit de la succursale avec les membres de sa communauté, la surnommait avec affection la « Banque juive ».
Pendant la période de prospérité qui marqua le début du siècle, l’entreprise participa à la promotion de capitaux industriels locaux parce que Champion était membre de la Winnipeg Stock Exchange, inaugurée en février 1909. Dès 1912, l’Alloway and Champion avait un capital supérieur à un million de dollars, ce qui était remarquable. En septembre, elle se constitua juridiquement sous le nom d’Alloway and Champion Limited ; son capital-actions autorisé était de 3 millions de dollars et sa réserve, de 125 000 $. Le capital versé, 1 025 000 $, était détenu principalement par les associés originaux. Parmi toutes les banques privées du Canada, l’Alloway and Champion était alors la plus grosse et la plus solide. En 1919, trois ans après la mort de Champion, Alloway la vendit à la Banque canadienne de commerce, mais il en resta président jusqu’en 1923. L’entreprise conserva le nom d’Alloway and Champion jusqu’au décès d’Alloway en 1930.
Fondateur d’une banque qui joua un rôle majeur dans le peuplement et le développement économique de Winnipeg et du Manitoba, William Forbes Alloway savait que la croissance effrénée engendre pauvreté et inégalité. Millionnaire à compter de 1910, il soutint généreusement un grand nombre d’œuvres de bienfaisance en versant 5 000 $ par an au Federated Budget Board. Il devint membre bienfaiteur à vie de l’Hôpital Général de Winnipeg en 1884 et, de 1912 à sa mort, il appartint au conseil d’administration de cet établissement. Il fut aussi membre du conseil consultatif de la Margaret Scott Nursing Mission durant 25 ans. Son plus grand titre de gloire reste néanmoins la constitution de la première fiducie communautaire du Canada en 1921, la Winnipeg Foundation. Il la dota d’une somme de 100 000 $ au début. Sa femme, Elizabeth MacLaren, s’intéressait vivement à cette fondation elle aussi ; à eux deux, ils lui versèrent 2 654 764 $. La Winnipeg Foundation a reçu des legs d’un grand nombre de Manitobains. La liste impressionnante de ses contributions au bien-être et à l’avancement de la connaissance forme le testament social d’Alloway.
ANQ-O, ZQ127/25, 3 sept. 1878.-- BAC, RG 9, II, A5, 3 : 159 ; B4, 16 : 1.-- Manitoba, Dept. of Finance, Consumer and Corporate Affairs, Companies office (Winnipeg), Charter book A, 1880–1890 : 49–52, 144–145, 151–153 ; Letters patent, juin–nov. 1912 : 109 ; Partnership agreements, file no 83, 17 avril 1880 ; file no 121, 3 avril 1881.-- St John’s Anglican Cathedral (Winnipeg), Reg. of burials.-- Commercial (Winnipeg), 22 juill. 1889.-- Manitoba Free Press, 1873–1930, particulièrement 3 févr. 1930.-- Winnipeg Tribune, 1er nov. 1912.-- Canada, Chambre des communes, Journaux, 1878, app. 1 ; Commission royale d’enquête sur la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, Rapport (3 vol., Ottawa, 1882).-- Canadian album (Cochrane et Hopkins), 3.-- N. S. Garland, Garland’s banks, bankers and banking in Canada [...] (Ottawa, 1890).-- Peter Lowe, « All western dollars », Manitoba, Hist. and Scientific Soc., Papers (Winnipeg), 3e sér., no 2 (1945–1946) : 10–25.-- Helena Macvicar, Margaret Scott : a tribute ; the Margaret Scott Nursing Mission ([Winnipeg, 1947?]).
Peter Hanlon, « ALLOWAY, WILLIAM FORBES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/alloway_william_forbes_15F.html.
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Auteur de l'article: | Peter Hanlon |
Titre de l'article: | ALLOWAY, WILLIAM FORBES |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |