ALLANSON, JOHN, graveur sur bois, né vers 1813 en Angleterre ; sa femme, prénommée Elizabeth, et un enfant moururent avant lui ; décédé le 11 février 1853 à Toronto.
On ignore à quel endroit et de qui John Allanson apprit la gravure sur bois. Plusieurs ouvrages de référence reprennent les propos d’un homme qui fut son associé à Leipzig (République démocratique allemande), selon lesquels il avait été l’élève de Thomas Bewick, le célèbre graveur de Newcastle upon Tyne, en Angleterre, mais Allanson n’avait que 15 ans environ lorsque Bewick mourut en 1828 après avoir été malade et en demi-retraite durant plusieurs années. Allanson terminait peut-être son apprentissage au moment où un hebdomadaire illustré, le Penny Magazine, fut lancé à Londres en 1832. La popularité que connut immédiatement ce périodique suscita une foule d’imitations en Angleterre et à l’étranger, ainsi qu’une demande de graveurs formés par Bewick ou par un de ses élèves. Fait sur le modèle de l’hebdomadaire londonien, le Musée des familles, lancé à Paris en 1833, publia durant sa première année de parution 20 gravures signées par Allanson. Elles permettent de constater que, s’il était encore jeune, Allanson maîtrisait déjà divers styles et possédait le talent requis pour reproduire fidèlement la spontanéité des croquis de Paul Gavarni et de Henry Monnier, les vignettes minutieusement dessinées à la manière miniaturiste de Bewick et les subtiles gradations de tons observées dans les tableaux exposés au Salon. Toutefois, après deux ou trois ans environ, face à un sentiment nationaliste croissant qui favorisait de plus en plus la nouvelle génération des graveurs et illustrateurs français, Allanson décida de partir pour les États-Unis.
Lorsqu’il fut installé à New York, Allanson n’eut pas trop de mal, au début, à trouver des commandes. En mai 1836, il obtint une critique favorable dans le New York Mirror pour un cadre orné de vignettes présenté à l’exposition printanière de la National Academy of Design de la ville. Trois vues topographiques, par Allanson, avaient déjà paru dans l’American Magazine of Useful and Entertaining Knowledge publié à Boston, suivies de dix illustrations dans le style narratif français, qui accompagnaient un conte publié en feuilleton dans le New York Mirror à la fin de 1837. Son séjour à New York ne dura cependant pas plus de quatre années. Il retourna en Angleterre, probablement parce qu’il était incapable d’obtenir du travail régulièrement à New York, où l’art de la gravure sur bois n’était pas encore très perfectionné.
On retrouve ensuite le nom d’Allanson à Leipzig en 1843, lorsqu’un magazine du nom d’Illustrirte Zeitung, lancé cette année-là, se mit à publier régulièrement ses œuvres : des portraits, des reproductions de tableaux d’anciens maîtres, des vues architecturales et des scènes d’actualité. Allanson ainsi que d’autres graveurs s’étaient laissé convaincre de quitter Londres par un éditeur de Leipzig, Georg Wigand, et Allanson devint par la suite le principal graveur des illustrations romantiques de l’artiste Adrian Ludwig Richter qui parurent dans les collections que Wigand consacrait à la mythologie et aux contes folkloriques d’Allemagne. L’histoire allait toutefois se répéter pour Allanson : la fierté nationale qui prévalait au sein du groupe des graveurs compétents du pays, ainsi que le malaise causé par l’apparente obsession des graveurs anglais pour la technique au détriment de la sensibilité, mirent un terme en 1848 à sa carrière en Allemagne.
On ne peut que s’interroger sur les raisons qui incitèrent Allanson, alors âgé de 35 ans environ, à considérer le Haut-Canada comme un lieu de résidence convenant à un homme de son talent et de son expérience. En tant que graveur sur bois, il avait appris à reproduire la forme et l’esprit d’un dessin d’artiste, et lorsqu’il avait à sa disposition l’équipement, les matériaux et l’aide technique nécessaires, comme en Allemagne, la gravure sur bois devenait véritablement entre ses mains « ce bel art », selon l’expression utilisée dans un éditorial de l’époque. Dans le Haut-Canada, il n’allait certes pas trouver des conditions idéales. Il se peut qu’Allanson ait choisi cette province pour éviter l’anonymat relatif et l’état de dépendance qui auraient été son lot dans une grande firme de Londres. Depuis quelques années, les éditeurs du Haut-Canada avaient parfois essayé de calmer l’appétit de plus en plus fort des lecteurs pour les illustrations en insérant de temps en temps des gravures, mais celles-ci étaient ordinairement imitées de publications étrangères. Lorsque Allanson arriva à Toronto en 1848, les publications du Haut-Canada ne comptaient qu’un très petit nombre de lecteurs et il n’y avait qu’un seul graveur sur bois, Frederick C. Lowe, qui ne travaillait pas à plein temps. Toutefois, pour un immigrant britannique tel qu’Allanson, prêt à s’installer à demeure et, si nécessaire, à accomplir diverses tâches dans les domaines de l’édition et de l’imprimerie, Toronto, ville où il se faisait déjà beaucoup de travaux d’édition, offrait la sécurité, à lui et à sa famille.
Les renseignements concernant les quatre ou cinq années qu’Allanson passa à Toronto avant sa mort sont limités, mais ils permettent de croire qu’il se servit de son expérience en édition pour se bâtir un avenir sûr. En mars 1849, il fit paraître dans le British Colonist, publié à Toronto, une annonce dans laquelle il mettait en vente un ensemble de gravures sur acier de William Hogarth et une autre série représentant Paris et les environs, et donnait son adresse d’affaires, rue King. À la fin du printemps, il avait installé sa propre presse lithographique. En novembre, il fut élu membre du Toronto Mechanics’ Institute, qui disposait d’une salle de lecture ; ce n’est peut-être pas un hasard si, à cette époque, il se mit aussi à travailler comme agent chargé de recruter des abonnés pour des périodiques.
Il ne fait aucun doute que, dès le début, Allanson établit des relations professionnelles avec des personnes en vue dans le secteur de l’édition à Toronto. Son nom n’est pas mentionné sur la carte topographique de la ville qui fut préparée par Sandford Fleming* et publiée par Hugh Scobie, mais Fleming nota en 1849 qu’il dessinait la carte sur une pierre lithographique dans les locaux d’Allanson. La carte comprenait une bordure constituée par une série d’édifices publics reproduits en gravure par Allanson d’après des dessins de l’architecte Thomas Young, et elle fut achevée à temps pour l’Exposition universelle de Londres en 1851. Un critique torontois, jugeant ce travail bien exécuté, fit observer : « Cette nouvelle carte de la ville est canadienne à tous points de vue. » Dans cette province peuplée d’immigrants de fraîche date, Allanson était finalement accepté, au bout de trois ans, à l’égal des autres citoyens.
Il était d’usage à cette époque, dans le Haut-Canada, que les artistes amateurs et professionnels montrent leurs œuvres à la population et se disputent des prix au cours d’une exposition provinciale tenue chaque année. Le premier prix de gravure sur bois dans la catégorie des beaux-arts fut obtenu par Allanson en trois occasions de 1849 à 1852. En 1850, Allanson prenait à bail des locaux à des fins privées et commerciales, rue Yonge, à côté de l’église Holy Trinity, et il annonçait dans le Canadian almanac de 1851, publié par Scobie, qu’il pouvait fournir un large éventail de services à cette adresse en qualité de graveur sur bois : « Sujets historiques, édifices publics, hôtels, sceaux officiels et municipaux, armoiries. » Il obtint évidemment des contrats, et on commença de voir assez souvent des illustrations avec le nom d’Allanson inscrit sur le bois. Dans le même almanach, les dessins de Young qui représentent un atelier de peinture et de décoration, ainsi qu’un bâtiment abritant une écurie de chevaux de louage et une salle de quilles, sont reproduits avec précision sous forme de deux annonces gravées par Allanson sur deux pages complètes. Le Canadian Agriculturist de Toronto l’employa en 1852 pour exécuter de petites gravures imitées des journaux américains et une vue des terrains de l’exposition provinciale. La mention peu fréquente « Allanson del & sc » (delineavit et sculpsit) sur une gravure représentant le Trinity College de Toronto, construit depuis peu par l’architecte Kivas Tully*, témoigne de ce qu’Allanson était l’auteur à la fois du dessin original et de la planche de bois.
Allanson se remit à travailler pour des périodiques lorsque Thomas Maclear* fit une large place aux illustrations dans l’Anglo-American Magazine qu’il lança à Toronto en juillet 1852. Une vue d’une ville de la province, exécutée chaque mois et imprimée sur une page distincte, une image de mode et une autre gravure, habituellement d’après un sujet littéraire, tels étaient les travaux confiés à Allanson. Les épreuves de ces gravures, notamment des vues de Kingston, de Hamilton et de Brockville, furent « très admirées » à l’exposition provinciale, cette année-là, et reproduites séparément, après la mort de l’auteur, dans certaines des dernières impressions du Canada : past, present and future [...] de William Henry Smith*. Les dernières contributions d’Allanson à l’Anglo-American Magazine parurent dans le numéro d’octobre 1852 ; dès novembre, il fut remplacé par Frederick C. Lowe. Allanson était peut-être déjà aux prises avec les problèmes de santé qui allaient entraîner sa mort en février de l’année suivante.
Obligé de remplacer le bois de buis européen, plus avantageux, par des bois locaux moins durs, et probablement forcé de s’accommoder de presses d’imprimerie et de papier inappropriés, ainsi que de pressiers qui n’avaient pas l’habitude d’imprimer à partir de planches, John Allanson ne pouvait certes pas considérer que les impressions tirées de ses planches canadiennes rendaient justice à sa formation, à son talent et à sa réputation. Pour gagner sa vie, il lui fallut sans doute effectuer régulièrement du travail commercial tel que des sceaux, de petites gravures publicitaires et des en-têtes de lettres, et, dans la plus grande partie de ce travail, il ne se distinguait pas des graveurs de son temps. Cependant, sa carrière faite de déplacements fut le propre d’un petit nombre seulement de graveurs anglais qui apportèrent les secrets de la technique de Thomas Bewick à des publics réceptifs dans des pays étrangers.
AO, MU 1050, diary, 26 juin 1849 (transcription).— MTL, Toronto, Mechanics Institute papers, G4 (General accounts, 1849–1858) : 29.— Toronto Necropolis and Crematorium, Reg. of burials (Elizabeth Allanson, morte le 23 déc. 1851 ; (enfant) Allanson, mort le 12 juill. 1852 ; John Allanson, mort le 11 févr. 1853).— Canadian Agriculturist (Toronto), 1 (1849) : 281 ; 2 (1850) : 235 ; 4 (1852) : 292, 311, 365.— British Colonist (Toronto), 27 mars 1849, 29 août 1851, 15 févr. 1853.— Globe, « Pictorial Suppl. », déc. 1856 : 3.— Canadian almanac, 1851 : 78–79, 83.— J. F. Hoff, Adrian Ludwig Richter, maler und radierer [...] (2e éd., Freiburg, République fédérale d’Allemagne, 1922), 405.— M. F. Williamson, « Description fails [...] » ; periodical illustration in 19th century Ontario », The art and pictorial press in Canada ; two centuries of art magazines, Karen McKenzie et M. F. Williamson, édit. (Toronto, 1979), 11–19.— Patricia Stone, « The publishing history of W. H. Smith’s Canada : past, present and future :a preliminary investigation », Soc. bibliogr. du Canada, Cahiers (Toronto), 19 (1980) : 38–68.
Mary F. Williamson, « ALLANSON, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/allanson_john_8F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
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