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ARCHAMBEAULT (Archambault), LOUIS, notaire et homme politique, né à Longue-Pointe (maintenant partie de Montréal), le 7 novembre 1814, fils de Jacques Archambault, cultivateur, et de Catherine Raimondvert ; le 9 août 1839, à Saint-Roch-de-l’Achigan, il épousa Éloïse (Élise) Roy, puis, le 17 juillet 1848, à Terrebonne, Marguerite-Élisabeth Dugal, et de ce mariage naquirent, entre autres, Horace, homme politique et juge, et Joseph-Alfred, premier évêque de Joliette ; décédé à L’Assomption, Québec, le 3 mars 1890.
Louis Archambeault ne reçoit qu’une instruction élémentaire. Admis au notariat en 1836, il exerce d’abord sa profession à Saint-Roch-de-l’Achigan, dont il deviendra maire. Le 18 mars 1843, il est nommé « régistrateur » de la circonscription de Leinster (scindée, en 1853, en L’Assomption et Montcalm). Préfet du comté de Leinster depuis 1848, il est réélu à l’unanimité en septembre 1854, pour un an, dans le comté de L’Assomption et, de nouveau, en 1877. En 1855, il quitte Saint-Roch-de-l’Achigan pour le village de L’Assomption, dont il sera maire de 1877 à 1882.
La question de l’abolition du régime seigneurial passionne Archambeault et il milite dans la « convention anti-seigneuriale du district de Montréal ». En 1853, cette dernière adopte un projet d’abolition, mais il s’y oppose car le plan comporte le rachat des droits seigneuriaux par l’État. Archambeault affirme qu’il « ne considérerait ni juste ni équitable que les fonds publics fussent employés à racheter le censitaire au détriment du prolétaire et de l’habitant des Townships, qui ne sont pas intéressés dans la question et qui versent aussi leur contingent dans la caisse publique ». Il propose une solution de rechange que le Canadien (Québec) juge préférable au projet de la convention « comme plan de commutation immédiate et générale ». Par sa participation au débat, Archambeault s’est bâti une réputation de compétence, qui lui vaut d’être nommé, le 3 mars 1855, l’un des dix commissaires seigneuriaux chargés de la confection du cadastre.
En 1855, le député « rouge » Joseph Papin* l’accuse de s’être mal acquitté de sa tâche d’« officier rapporteur » aux élections de 1851 et de 1854. Une enquête établit, en effet, qu’Archambeault a gonflé ses comptes et touché indûment une somme d’environ £150. Même si c’était une pratique assez généralisée à l’époque, il est destitué de ses fonctions de régistrateur et de commissaire seigneurial en janvier 1856 ; il démissionne peu de temps après de son poste de lieutenant-colonel de milice. Aux élections de 1858, pour assouvir sa vengeance, Archambeault se présente contre Papin, handicapé par sa prise de position sur les écoles confessionnelles. À la surprise générale, il l’emporte, de justesse, sur le tribun. En 1861, un excès de confiance et une organisation déficiente entraînent la défaite d’Archambeault aux mains d’Alexandre Archambault, frère de Pierre-Urgel*. Parmi les thèmes de l’élection figurent l’enseignement religieux dans les écoles et l’intégrité d’Archambeault : les électeurs se seraient-ils ravisés ? Comme fiche de consolation, George-Étienne Cartier* le réintègre, le 1er février 1862, dans son grade de lieutenant-colonel de milice, mais, avec l’arrivée des libéraux au pouvoir, Archambeault se voit de nouveau destitué de son poste le 6 septembre 1862. Les luttes électorales dans la circonscription de L’Assomption prennent désormais l’allure d’une rivalité de clans, d’une vendetta. Ainsi, aux élections de 1863, selon la Minerve, Louis Archambeault n’a pas à faire face seulement au député sortant : « Tous les Archambault, frères, neveux, cousins du grand Alexandre [...] sont en campagne. » L’ingérence cléricale aidant, selon le Pays de Montréal, il reconquiert pourtant son siège.
En 1865, Louis Archambeault ne manifeste aucune espèce d’enthousiasme pour les Résolutions de Québec. Selon lui, « c’est un système qui se rapproche plus de l’union législative que de l’union fédérative ». Mais Cartier a raison des réticences de son ami. Dans le gouvernement de Pierre-Joseph-Olivier Chauveau, Archambeault reçoit, le 15 juillet 1867, le portefeuille de l’Agriculture et des Travaux publics. À partir du 2 novembre 1867, il représente la division de Repentigny au Conseil législatif. Si la presse conservatrice applaudit, le Pays se scandalise du choix d’un « voleur judiciairement convaincu », d’un « concussionnaire condamné par la plus haute autorité du pays ».
À tout prendre, Archambeault s’est révélé excellent ministre. Son œuvre, considérable, embrasse les multiples compétences de son département, l’un des plus importants du gouvernement québécois. Secondé par son proche collaborateur, le commissaire adjoint Siméon Le Sage*, il a réformé l’organisation agricole : la Chambre d’agriculture a été abolie en faveur d’un Conseil d’agriculture, plus étroitement subordonné à l’exécutif. Il a protégé les écoles moyennes d’agriculture de Sainte-Anne-de-la-Pocatière (La Pocatière) [V. François Pilote] et de L’Assomption (il avait contribué à fonder cette dernière [V. Pierre-Urgel Archambault]) contre les tenants de l’école unique.
L’émigration aux États-Unis sévissait et troublait profondément la conscience nationale. Les hommes politiques se sont rabattus sur la seule solution à leur portée : la colonisation. En ce domaine plus encore qu’en agriculture, l’œuvre d’Archambeault doit retenir l’attention. Les lois qu’il a inspirées resteront en vigueur jusqu’à la fin du siècle. Les crédits consacrés à la colonisation ont atteint de 1869 à 1873 des sommets qui resteront inégalés jusqu’en 1900, sauf sous les ministères de John Jones Ross* et d’Honoré Mercier*. Pour maintenir l’équilibre démographique au sein de la fédération, il a tenté d’attirer une immigration francophone, surtout agricole, « morale et amie de l’ordre », et pourvue d’un petit pécule. Jamais le Québec n’a pris autant d’initiatives dans ce domaine qu’au cours des premières années de la décennie 1870. Les crédits votés alors étaient le double de ce qu’ils allaient être en 1880–1881, le quintuple de ce qu’ils seraient en 1898–1899.
Ce conseiller législatif et ministre ne borne pas là son action. Aux élections fédérales de 1867, il l’emporte par 233 voix sur Pierre-Urgel Archambault. Une loi fédérale ayant aboli le double mandat, Archambeault ne sera pas en lice aux élections de 1874 : il démissionne le 2 janvier de la même année.
En 1874, Archambeault est impliqué dans le scandale des Tanneries qui amène la chute du cabinet de Gédéon Ouimet* et le réduit au rôle de conseiller législatif ; il se remettra à la pratique du notariat. Épisode de la fièvre de la spéculation foncière qui sévissait dans la région de Montréal dans les années 1870, le scandale des Tanneries fut causé par l’échange que fit le gouvernement d’un de ses terrains contre un autre de moindre valeur mais dont le prix avait été artificiellement gonflé. Les spéculateurs auraient partagé une partie du profit escompté avec leurs compères politiciens. Archambeault est-il coupable ? Il n’a cessé de proclamer son innocence, mais l’observateur le plus sympathique ne peut se défendre d’un certain malaise. En tant que commissaire des Travaux publics, il est le principal responsable de l’échange. Il n’est pas parvenu à expliquer de façon convaincante le fameux dépôt de $50 000 à son nom. Son intégrité personnelle n’est toutefois pas en cause : on soupçonne que la transaction vise à assurer l’avenir financier de la Minerve et à renflouer la caisse du parti. Quant à la démission de Ouimet, faisant suite à celle des trois ministres anglophones de son cabinet, il la désapprouve : « J’aurais essayé de remplir les vides [laissés par les ministres démissionnaires] [...] En supposant qu’aucun Anglais n’eût voulu entrer dans le gouvernement, j’aurais appelé des Canadiens à leur place […] Cette conduite énergique aurait fait réfléchir Messieurs les Anglais et aurait fini par nous les rallier. » Comme Ouimet, il décèle au fond de cette affaire « d’odieuses machinations, des traitres, des misérables ». Un nom surtout émerge, celui de l’ancien procureur général George Irvine*, le premier à démissionner. Archambeault, malgré son expérience, aurait-il été autant victime que complice ?
Quoi qu’il en soit, Archambeault ne remet pas en question son allégeance politique. Mais les circonstances et des divergences de vues entraîneront tout de même une évolution. Il s’oppose tout d’abord à la modification du tracé du chemin de fer Québec, Montréal, Ottawa et Occidental, proposée par le cabinet de Charles-Eugène Boucher* de Boucherville, c’est-à-dire l’abandon de la ligne du Bout-de-l’Île, qui passe par L’Assomption, pour une autre passant par Terrebonne. Après le coup d’État de 1878 [V. Luc Letellier de Saint-Just], le premier ministre Henri-Gustave Joly* lui offre un portefeuille, mais il décline l’invitation et demeure au Conseil législatif, votant « pour les propositions ministérielles qui [lui] paraissaient bonnes et devoir être adoptées ». D’abord favorable au ministère de Joseph-Adolphe Chapleau*, il l’attaque avec virulence au sujet de la vente du Québec, Montréal, Ottawa et Occidental à Louis-Adélard Senécal et au syndicat du Pacifique. L’affaire Louis Riel est à l’origine de la dernière étape de cette évolution : le voilà devenu conservateur national, au coude à coude avec ses adversaires de jadis, libéraux et ultramontains. Le 6 juin 1888, il abandonne son siège au Conseil législatif en faveur de son fils Horace, que la presse classe aussi comme conservateur national. Horace parachèvera l’évolution de son père en devenant ministre libéral,- mais du père qui vient de quitter la vie publique l’Etendard écrit qu’il a « toujours été conservateur convaincu ».
Archambeault ne s’est pas contenté de laisser sa marque dans l’histoire politique : celle du notariat retient aussi son nom. Membre de la Chambre des notaires du district de Montréal depuis 1848, il siège au sein de son bureau à partir de 1859 avant d’accéder à la présidence qu’il occupera de 1865 à 1870. Il remplira la même fonction dans la Chambre unique (1870–1876), désignée sous le nom de chambre des notaires. Au notariat comme en agriculture, il fait figure de réformateur. On lui doit la loi organique de 1870 qui, grâce surtout à la réforme fondamentale de la chambre unique, contribuera à tirer le notariat de la déchéance où il s’était enlisé [V. Louis-Édouard Glackmeyer].
Somme toute, une carrière féconde mais mouvementée, assombrie par les scandales de 1856 et 1874. Ferme, énergique, combatif, Archambeault fut un des hommes forts des cabinets Chauveau et Ouimet. Au dire de son biographe anonyme, « ses connaissances en droit constitutionel et ses talents d’administrateur lui marquaient une place dans le cabinet dès avant la confédération. Sa difficulté à se servir de la langue anglaise l’a toujours porté à refuser les offres qui lui furent faites à différentes reprises. » L’eût-il maîtrisée, il aurait pu faire valoir des droits à la succession de Cartier contre Hector-Louis Langevin*, brillant sous-ordre mais chef médiocre.
Il n’existe pas de fonds Louis Archambeault et le chercheur doit se rabattre sur les pièces éparses dans les divers dépôts d’archives. Aux ANQ-Q, on trouve des lettres officielles de Louis Archambeault dans le fonds des travaux publics (PQ, TP) pour les années 1867–1874. Parmi les lettres reçues se trouvent quelques lettres d’Archambeault aux fonctionnaires de son ministère pendant ses nombreuses absences. Il lui arrive, après avoir expédié les affaires courantes, d’ajouter quelques mots plus personnels sur la politique du jour. Le fonds Siméon Le Sage (AP-G–149) contient une lettre d’Archambeault à Le Sage et plusieurs de ce dernier à Archambeault. Aux APC, on peut consulter surtout le fonds Gédéon Ouimet (MG 27, I, F8, 1–2) pour l’affaire des Tanneries. On trouve aussi une ou deux pièces dans les fonds John Alexander Macdonald (MG 26, A), George-Étienne Cartier (MG 27, I, D4) et Francis-Joseph Audet (MG 30, D1). Les papiers de Joseph-Israël Tarte* (MG 27, II, D16) renferment une longue et intéressante lettre, sur le projet de confédération, de Louis Archambeault à Joseph-Guillaume Barthe*. Les ASQ possèdent une lettre de Pierre-Joseph-Olivier Chauveau à Hospice-Anthelme-Jean-Baptiste Verreau*, où il est question d’Archambeault (Fonds Viger-Verreau, carton 96 : no 105). La collection Baby (P 58, U) des AUM renferme deux lettres d’Archambeault. Enfin, quant à sa carrière de milicien, V. APC, RG 9, I, C4 ; C5 ; C6. [p. et l. t.]
AC, Joliette, État civil, Catholiques, Saint-Roch-de-l’Achigan, 9 août 1839 ; Terrebonne (Saint-Jérôme), État civil, Catholiques, Saint-Louis (Terrebonne), 17 juill. 1848.— ANQ-M, État civil, Catholiques, Saint-François-d’Assise (Montréal), 7 nov. 1814.— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1854–1855, VIII : app.N ; 1857, VII. app.43 ; VIII : app.51 ; Parl., Doc. de la session, 1862, IV : no 24 ; févr.–mai 1863, V : no 29.— Documents relatifs à l’échange des propriétés des Tanneries, près de Montréal (s.l.n.d.).— Québec, Commission royale, Enquête concernant le chemin de fer de Québec, Montréal, Ottawa et Occidental (4 vol., Québec, 1887), III : 78–90.— Achintre, Manuel électoral.— Biographie de l’hon. Louis Archambeault, ministre de l’agriculture et commissaire des T. P. pour Québec, conseiller législatif et membre des Communes (s.l., 1873).— Anastase Forget, Histoire du collège de L’Assomption ; 1833 – un siècle – 1933 (Montréal, [1933]), 253ss.— M. Hamelin, Premières années du parlementarisme québécois.— Christian Roy, Histoire de L’Assomption (L’Assomption, Québec, 1967), 321 s., 441 s., 462s., 498.— J.-E. Roy, Hist. du notariat, II : 548 ; III : 240, 247, 292s., 321, 330–483 ; IV : 1–32, 71–75, 100, 121, 178–194, 269–271, 357–359, 426–440.— J.-J. Lefebvre, « Les Archambault au Conseil législatif ; quelques précisions sur sir Horace, l’hon. Louis et l’hon. Pierre-Urgel Archambault », BRH, 59 (1953) : 23–28.
Pierre et Lise Trépanier, « ARCHAMBEAULT (Archambault), LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/archambeault_louis_11F.html.
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Auteur de l'article: | Pierre et Lise Trépanier |
Titre de l'article: | ARCHAMBEAULT (Archambault), LOUIS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |